L'attente sur le quai me parait interminable. Entre les passants pressés, les pigeons qui roucoulent et le vrombissement des voitures, le tic-tac incessant de l'horloge parvient à mes oreilles. Jamais, ce son ne m'avait semblé aussi mélodieux que cet après-midi pluvieuse. Chaque pas le long des rails me rapproche de lui alors que chaque minute se révèle plus longue que la précédente.

Ah ! Les haut-parleurs grésillent ; une annonce va être passée. « Le train IC à destination d'Anvers Central arrivera dans quelques instants voie une. Ce train s'arrête à Bruxelles-Midi, Bruxelles-Centrale,... ».

Je n'écoute plus. Mon cerveau a déconnecté ; après trois longs mois d'attente, je vais enfin le revoir. La boule d'angoisse présente dans mon estomac depuis quelques jours monte le long de ma gorge. Les phares apparaissent au loin. Plus que quelques secondes. Le train s'arrête. Les portes s'ouvrent. Une dernière inspiration et il est temps de monter dans le wagon. Alors que j'attendais cet instant depuis si longtemps, j'ai l'impression de vouloir le retarder au maximum.

Il est là juste devant moi. Lui ne peut pas encore me voir. Je le contemple un sourire aux lèvres ; il m'avait manqué. Le train s'ébranle et redémarre. Je l'aperçois occupé à me chercher du regard. Mes yeux rencontrent les siens. Il se lève et nous nous retrouvons face à face. Après autant de temps, le visuel ne suffit pas ; j'ai besoin de le sentir près de moi, d'avoir ses bras autour de moi, son souffle sur mon visage.

Plus que quelques centimètres. Le contact de sa peau contre la mienne m'électrise. Je me sens foudroyée sur place comme à notre première rencontre. Ses mains dans mon dos me donnent terriblement chaud. Il m'attire sur un siège. Je pose ma tête sur son épaule. Aucun de nous deux n'a encore prononcé un seul mot comme si nous avions peur de briser l'instant vécu, comme si un seul mot allait briser la bulle autour de nous.