Chapitre 5 : Traffic humain et des (non)reconcilliations

Je tripotais rageusement le bout de ma chemise.

Le regard noir rivé sur ce tissus pâle, les doigts frivoles ne cessant de s'agiter et de virevolter autour de leur malheureuse proie, les joues gonflées, recroquevillée sur le sol froid, le dos adossé contre le mur dur et hostile, je ne cessais de regarder, encore et encore ce malheureux bout de chemise. Comme pour lui faire porter le chapeau, comme pour mieux faire de lui un coupable et mieux le désigner du bout d'un doigt moqueur, je le fixais, le tirais, le mordillais, l'enroulais, le chiffonnais.

J'avais envie de hurler.

Le silence autour de moi était lourd, pesant, avait pris une forme physique et palpable et me serrait contre lui, sous lui, me suffoquait, m'étranglait, me frappait et m'effrayait, il ne cessait de s'agiter, de m'attraper par les chevilles afin de me tirer vers son mutisme exubérant, m'emporter vers un monde fou et illusoire et me couvrir sous un drap beaucoup trop lourd à supporter, un drap qui ne laisserait aucune once d'air passer.

Je voulais tellement, tellement, tellement rompre ce silence.

Me lever, me mettre à hurler ou à frapper, me mettre à penser tout haut, oser faire et oser dire, oser défier et m'emparer d'un courage magique afin de mieux laisser cette peur, cette peur si collante et attachante, quelque part derrière moi. Je voulais me lever et rompre ces chaines qui m'enrayaient le cou, le ventre, les pieds et les mains, pouvoir me battre et sortir d'ici, de cette maison où un homme, l'homme au sourire de loup habite.

Je ne pouvais rien faire.

C'était surtout ça, cette impuissance qui me tuait à petit feu. Ne rien pouvoir faire, ne pas pouvoir parler ou même penser, la peur et le silence me clouant sur place et m'empêchant de bouger. Je levais un coup d'œil, un coup d'œil curieux vers la tête bleue de Levy, sa tête penchée en avant, ses sourcils froncés sous l'effet d'une intense réflexion, son regard doux et meurtri, rempli d'une culpabilité sans bornes, était rivé sur ses mains, sur ses ongles qui avaient toujours cette apparence parfaite.

Elle leva la tête subitement et intercepta mon regard.

Un mince sourire s'infiltra sur ses lèvres pâles, son visage sembla s'illuminer pendant quelques secondes, voler et s'approprier cette merveilleuse teinte que porte le sadique espoir.

Je détournais ma tête, rapidement, faisant virevolter quelques mèches de mes cheveux dorés, entraînés par ce brusque mouvement de tête que la surprise me força d'effectuer.

-Lucy..., je l'entendis murmurer, avec une hésitation infinie et une peine qui me creva le cœur.

Elle semblait au bord du désespoir, sa voix était noyée par le chagrin et elle avait l'air perdue, perdue par tout, perdue dans ce monde cruel, elle avait l'air de me demander mon pardon, d'espérer le pardon sans pour autant oser l'avouer tout haut ou tout bas, ayant trop peur de paraître hypocrite, comme si on pouvait réellement croire cela d'une personne telle que Levy McGarden !

Je me tournais de nouveau vers elle, timide, gênée, embarrassée, oubliant soudainement quoi faire avec mes deux pauvres petites mains pales et agitées. J'avais soudainement peur, peur de paraître gauche, peur de ce vide qui s'installait en moi et de mes mots qui commençaient à me manquer, tous ces beaux mots futiles que je pourrais lui adresser pour lui exprimer mon ressenti, ce que je pensais d'elle, de cette situation, me mettre à lui en vouloir ouvertement, lui passer un savon pour s'être montrée si peu réfléchie, si peu rationnelle !

Même si au fond, je n'étais pas en colère.

Plutôt déçue, j'étais déçue de son comportement infantile et insouciant même si jamais je ne pourrais lui en vouloir.

En fin de compte, j'étais surtout soulagée de la savoir en vie, de savoir qu'elle allait bien, de savoir qu'elle ne risquait rien et que nous pourrions rapidement partir, que nous pourrions laisser cette histoire derrière nous, loin, loin derrière nous.

-Je... je suis désolée, pleurnicha-t-elle telle la parfaite gamine qu'elle était en s'approchant vers moi à petites enjambées tremblantes et hésitante.

Elle tendit ses bras pâles et maigres en ma direction, souhaitant une réconciliation, me demandant pardon silencieusement, parce qu'aucun mot, aucune phrase et aucun paragraphe au monde ne pourra jamais exprimer mieux le tourbillon de sentiments qui s'enchaînaient et s'enchevêtraient dans son cœur que ce silence rempli et lourds de sous-entendus, de mots secrets, de regards échangés.

Elle avait compris, elle avait compris sa bêtise, avait su sortir et retenir une leçon de cette histoire sortant de l'ordinaire.

Les larmes continuaient de sillonner ses joues.

-Pou...pourquoi est-ce que tu es venue me chercher ?, me demanda-t-elle entre deux hoquets. Je ne voulais pas te mêler à cette histoire, je ne voulais pas que tu sois blessée à cause de mes actes stupides et irréfléchis, à cause de mes mauvaises fréquentations, de mes mauvaises habitudes ! Je ne voulais pas vivre avec le regret et la culpabilité le restant de mes jours, Lucy ! Alors pourquoi, pourquoi es-tue venue me chercher ? À quoi bon venir me chercher ? Pourquoi se soucier d'une amie telle que moi, une amie qui te crie dessus et part après t'avoir subitement annoncé son mariage avec un parfait dealer de drogue ! Dealer avec qui elle a joué au poker, avec qui elle a parié sa propre vie et ayant perdue, avec qui elle s'était retrouvée collée à lui ! Et maintenant, toi aussi, tu peux gagner le même sort que moi... je ne me le pardonnerais jamais... je... je...je...

-C'est bon, Levy, je te pardonne, chuchotais-je, la gorge nouée par la tristesse et la douleur que ces paroles provoquèrent, ces paroles qui se révélèrent mensongères et hypocrites.

J'étais tiraillée.

Tiraillée entre toute l'amitié que j'avais pour Levy, toute la compassion, tout le soulagement, tous ces bons moments, ces souvenirs qui se mettaient à ressurgir dans ma tête, ces rires, ces mots, ces couleurs et cette chaleur, cette joie infantile que je ressentais lorsque je me retrouvais près d'elle.

J'étais tiraillée entre cette joie insouciante et ce sentiment de panique qui commençait à monter lentement en moi, tel un serpent venimeux et dangereux, au fur et à mesure que le temps passait, que la tension montait dans cette petite chambre où on nous a obligés de nous cacher, pour ne pas distraire les joueurs, étant bien à l'abri derrière une porte lourde et un homme baraquée posté devant elle. Comme si nous pouvions songer à nous enfuir; notre état de frayeur et de lâcheté nous l'interdisait ben, pourtant ! Malgré tout ce que je me disais, malgré toutes les images qui ressortaient devant mes yeux et malgré mon cœur qui voulait lui pardonner, être heureux et soulagé et pur, je ne pouvais m'empêcher de songer à cet avenir qui pourrait m'être volé à cause d'elle. Ses mots n'aidant pas, me voilà, plongée dans des intenses réflexions, muette et perdue, déséquilibrée, me voilà qui commençait à prendre de plus en plus peur. Cette peur entraînant derrière elle la colère, entraînant derrière elle l'agacement, l'amertume, tout ce que je ne voulais pas ressentir.

-Je ne veux pas que tu me pardonnes, Lucy, suffoqua Levy en secouant la tête. Je ne veux pas que tu me dises que tout ira bien, qu'on sortira d'ici heureuses et que notre amitié en sera encore plus renforcée, je ne veux pas que tu continues de m'aider, que tu sois toujours là pour moi, de me réconforter et de me sauver lorsque je mets mes fesses en danger. Je ne veux plus continuer de vivre comme ça, de t'entraîner encore et toujours dans mes sordides histoires, passer mon temps à culpabiliser... Je crois .... Je crois que j'ai besoin de m'éloigner un peu de toi... enfin, je ne sais pas... je ne sais plus rien... je t'en supplie, laisse-moi partir, murmura-t-elle rapidement en baissant la tête, en serrant ses deux minuscules poings et en fermant les yeux, tremblantes, tellement fragile, tellement petite.

Elle souffla et se dirigea vers la porte, d'un pas toujours aussi chancelant et menaçant de s'écrouler, elle souffla et ouvrit la porte, leva la tête vers le grand homme baraqué, l'homme au regard cruel et au sourire pervers qui haussa un sourcil face à son visage déterminé.

-J'ai besoin d'aller aux toilettes, lui adressa-t-elle des paroles fermes.

Levy disparut rapidement, s'évanouissant derrière la porte, derrière la grande silhouette de l'inconnu, se dirigeant vers une salle quelconque en préférant de se cacher, de se cacher derrière d'autres portes, derrières des murs, en préférant lever des barrières entre nous parce qu'elle ne pouvait supporter la culpabilité.

Un râle franchit mes lèvres, s'écrasa contre la tension et le silence, contre toutes mes questions, mes pensées qui e sont brusquement effacées, préférant laisser un champ libre et dévasté. Vide, le regard vide, l'esprit vide, le cœur vide, la tête vide, je me dirigeais d'un pas machinal vers l'unique minuscule lit qui trônait au milieu de la salle et m'y affalais, épuisée.

Ne sachant quoi penser.

Quoi devoir penser.

Ce qui était juste ou pas.

Tout ceci était tellement fatiguant.

Puis une voix me fit sursauter :

-Ça alors ! Quel spectacle touchant !

Moqueur et indifférant, quelque part amusé, Natsu Dragneel haussa un sourcil devant ma figure pâle et décomposée.

Assis de l'autre côté du lit, sur son bord, il me regardait, me jugeait et m'observait, un énorme sourire indéchiffrable collé sur ses lèvres. Il souriait et continuait de se moquer, de jouer, de s'amuser, continuait de me fixer avec ses prunelles insondables et étourdissantes, semblait prendre un malin plaisir à étudier cette situation.

J'avais complétement oublié sa présence.

J'avais complétement oublié le fait que, ne me jugeant pas dotée d'une très grande valeur, le diable avait insisté que la partie soit misée sur Natsu et moi. Sur nous deux. Alors que lui misait sur sa précieuse Levy.

J'avais encore le cœur au bord des lèvres en repensant à la discussion entretenue entre Gajil et Nick, leur débat. J'avais encore le cœur au bord des lèvres lorsque je songeais à quel point ceci était insensé, à quel point ce jeu était malsain, cette situation malsaine. Le trafic humain. C'était du trafic humain, purement et simplement, aussi simple et enrageant que ce mot pouvait paraître.

Et dire que certains pensent que ce commerce barbare et inhumain a cessé d'exister depuis longtemps !

Et dire que je faisais partie de ces personnes naïves et insouciantes, il y a peu de temps de cela !

-Vos amies sont pour le moins intéressantes, ma chère dame, me taquina-t-il en se détournant lentement.

-Ce n'est pas de tes affaires, Dragneel, soufflais-je ne me redressant, rouge et embarrassée d'avoir été prise dans un moment de faiblesse, m'empressant lisser ma chemise et de recoiffer mes cheveux, lui tournant le dos, fixant mes pieds qui pendaient sur le bord de ce lit.

-Comme vous pouvez être cruelle ; et dire que je me suis porté volontaire pour partager votre destin !

-Je ne t'ai jamais rien demandé !

-Oh, alors dites-moi, qui étais-ce, cette jeune femme qui est venue me demander mon aide afin de trouver son amie ? Votre sœur jumelle, peut-être ? Une sœur jumelle bien plus douce et gentille que vous ? Donnez-moi donc son numéro, parce que j'avoue avoir très envie de connaître cette créature !

Je serais les dents, refusant de lui faire face, refusant de jouer à son jeu, le cœur au bord des lèvres, serré et meurtri, mal traité et rempli d'une colère, une colère subite, une colère née à cause de Levy et de son départ précipité, de cette amitié qui était sur le point de s'effondrer, de ce Natsu qui ne cessait de plaisanter, même dans les moments les plus cruciaux, les plus inquiétants, les plus tendus ! Pourquoi était-il toujours aussi détendu, toujours aussi neutre, toujours aussi charmeur, toujours un aussi grand gamin alors que le monde semblait s'écrouler et tomber, se fragmenter de plus en plus ?

Le lit grinça.

-Vous êtes tellement tendue, ma chère dame... laissez-moi donc vous faire un massage, chuchota-t-il, à présent derrière moi, en tendant sa grande main et en touchant lentement mon bras.

Mes oreilles surchauffèrent et mon cœur explosa.

Je me levais d'un bond, furibonde et incrédule, paniquée, essoufflée, brûlante. Je me levais d'un bon et m'apprêtais à partir, à m'éloigner, à aller n'importe où, dans le salon ou dans la salle de bains, peu m'importait tant le besoin de m'éloigner était présent, m'éloigner de cet être que je considérais comme détestable, cet être vil et malicieux qui ne cessait de jouer avec mes sentiments sans le moindre remords, cet homme que je commençais sérieusement à haïr. Je pris une grande inspiration, tentais de calmer mon cœur qui se noyait avec désespoir et ma vision qui commençait à se flouter, ces joues qui s'embrasaient, je m'apprêtais à prendre mes jambes à mon coup quand je sentis sa poigne se fermer autour de mon bras.

Il me tira en arrière sans aucun ménagement et je tombais, je tombais et je tombais encore, tombant brutalement et sans aucune grâce, dans un son lourd en laissant échapper un long et inépuisable râle, fermant les yeux, effrayée, surprise, énervée, embarrassée, ne sachant comment agir tant le choc me coulait le bec.

-Lâche-moi !, soufflais-je en fronçant les sourcils et en tentant de me relever.

Son bras autour de mes épaules m'en empêchait.

Et lui, fier de m'avoir fait tomber et de mon état de vulnérabilité, apparut devant moi, son visage devant mes yeux ne cessa de se pencher et son souffle me chatouillant les oreilles, il me dit, le ton éternellement amusé :

-Sérieusement Lucy, nous sommes deux grandes personnes enfermés dans une petite chambre, assis sur un lit, seuls...avec nos hormones en pleine ébullition... pourquoi ne pas s'amuser un peu ?

-Lâche-moi, Dragneel, lui crachais-je en le fusillant du regard, le ton ferme, le ton menaçant. Je ne suis pas ce genre de fille. Je ne suis pas ce genre de filles que tu as l'habitude de fréquenter, pas le genre de fille à bêtement faire tout ce que tu lui dis. Je n'ai pas la moindre intention de faire quoi que ce soit avec toi, ni maintenant, ni jamais. Plutôt mourir ! Et si seulement tu devinais le dégout que tu m'ins-

-Chut !

Il posa sa main sur ma bouche et leva les yeux, soudainement concentré, toute forme d'amusement étant partie tandis qu'il fronça ses sourcils et qu'il regarda la porte intensément.

Puis, nonchalamment, il se leva, me libéra de l'étau de ses bras et me lança un autre de ses fameux sourires que je détestais.

-Je crois que la partie est terminée, m'annonça-t-il en ouvrant grand la porte.



Mots d'auteure : 

Alors alors, ce chapitre... dans lequel il ne se passe pas grand chose ! Et qui, comme à mon ennuyeuse habitude, vous laisse sur votre faim ! Qu'en pensez-vous ? 

Que pensez-vous de Levy et de ses propos ? De sa fuite ? Que pensez-vous de Lucy ? Et de Natsu qui, dans ce chapitre, est un peu plus... hum... enjôleur ? Enfin, Lucy ne compte pas se laisser faire si facilement, surtout en sachant qu'Il ne fait que jouer (jusqu'à présent ). 

Personnellement j'aime bien la nouvelle voie que cette histoire prend, et j'ai des tonnes et des tonnes d'Idées pour la suite ! Des idées qui me rendent toute excitée et nerveuse à la fois ! J'ai tellement de moments en tête que je VEUX faire, absolument ! 

En tout cas, dites-moi ce que vous en avez pensé ! Ce que vous pensez de la progression de cette nouvelle version de l'histoire, si vous préférez cette version ou l'ancienne ... enfin, je veux juste connaître vos ressentis, quoi  ! 

Voilà voilà, ça fait trois semaines que je n'avais pas écrit et ça m'a fait du bien de poster ce chapitre.

En espérant que vous avez apprécié votre lecture,

Bises ! 

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