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# Flashback 3
Je ne sais pas si ma décision est la bonne. Quand Éric a repris ses esprits, l’état de la piaule était suffisamment explicite. Habituellement, j’efface toutes les traces. Je suis parfaitement conscient que c’est pour moi que je le fais. Pour éviter de me confronter à la réalité sans aucun doute.
L’odeur était à la limite du soutenable, il l’a prise de plein fouet. Ses haut-le-cœur n'étaient pas simulés. Ses mots, ses excuses étaient sincères, je crois. J’aurai peut-être dû faire ainsi bien avant...
Pendant quelques jours, cela a fonctionné. Il ne travaillait pas plus pour autant, mais au moins, lorsque je rentrais, épuisé, je n’avais pas à gérer le résultat de ses addictions. Je ne suis pas si naïf. Je savais que cela ne durerait pas mais mettre au point ce que j’avais en tête, nécessitait du temps.
[...]
— Je te préviens, Simon, dis-je menaçant, s’il y a une seule entourloupe, qu'importe le temps que cela me prendra, je te retrouverai.
— Ce n'est pas nécessaire de me menacer, Brice. Je travaille dans cette boîte tous les ans depuis mes seize ans. Je leur ai précisé que vous étiez deux, qu’un au moins parlait anglais. C’est plutôt bien payé et le logement est fourni par l'hôtel.
J'avais des difficultés à réaliser que cette étape était franchie.
Un soir, je l’avais entendu se plaindre auprès d'un autre mec. Une histoire de boulot en Angleterre. Régulier. Que cette année, à son grand désarroi, pour des raisons personnelles, il ne pouvait pas honorer. Afin de ne pas perdre toute crédibilité avec le patron, il avait promis de lui trouver une équipe. Évidemment cela avait fait tilt. Le mec venait régulièrement au bar, plutôt gentil, pas du style arnaqueur.
Bizarrement, je me suis mis à le croiser très souvent au point que nos discussions sont devenues régulières. Je n'étais pas très à l’aise à dissimuler le côté toxico d’Éric mais j’espérais sincèrement qu'un changement d’environnement suffirait à mettre un terme définitif à son addiction. Alors j’avais usé de tous mes atouts physiques et intellectuels. C'était la première fois que je manipulais une personne pour obtenir quelque chose et j'étais très loin d'être fier de cette situation. Simon était très vite tombé sous mon charme. Je me répétais en boucle que ces deux places sonneraient la fin de la dépendance d'Éric. J'étais prêt à laisser Simon profiter de mon corps au besoin. Tant que cela pouvait aider Éric à sortir de tout cela Mais, Simon n'exigea rien en retour.
En rentrant vers notre logement, je me répète les arguments que je vais donner à Eric. Le départ est dans huit jours.
La bouteille vole au-dessus de ma tête juste avant de s’ exploser contre le mur.
— Pourquoi tu fais cela, Brice ? Je ne veux pas partir d’ici, moi, hurle Éric. Regarde-moi, je suis clean.
— Ne me prends pas pour un con, tu veux ? Je n’en peux plus, moi de ne jamais savoir dans quel état je vais te trouver lorsque je rentre. J’abandonne. Tu sais, Éric, voilà ce qui va se passer. Tu peux rester, mais moi, je pars en Angleterre. Je te conseille de trouver vite fait quelqu'un qui acceptera de te nourrir, de te loger sans que tu daignes participer à quoi que ce soit. Je prédis que tu vas vite regretter ton refus.
— Tu oublies que je participe à ton épanouissement sexuel, bébé, lâche-t-il sûr de lui.
Je ne réagis pas à sa remarque, c’est une de ses habitudes, un de ses moyens de pression. La pièce où nous vivons ne possède qu'un petit miroir qui ne lui permet pas de découvrir les effets délétères de la drogue et de l’alcool sur son corps. Cela fait déjà un moment qu’il n’y a plus de sexe entre nous. Cela n’a pas toujours été aussi clair dans mon esprit. Je n’arrivais plus à me situer entre l’image du compagnon et celle du client. Petit à petit, du sexe qu'il me proposait pour obtenir ce que lui désirait -son schéma habituel dans sa façon de vivre- j’ai glissé l’option de câlins où il se laisse porter. Dans le secteur, tout le monde sait qu'il est peu fiable. Dès le lever du jour, son seul objectif est de trouver sa dose. J’ai tout tenté pour l’aider. J'espère que mes mots vont l'angoisser afin de le forcer à réagir. Alors que je récupère quelques vêtements que j'enfourne dans un sac, je sais qu'il étudie chacun de mes mouvements.
— Qu'est-ce que tu fais ? s'inquiète-t-il.
— Je m'installe chez José pour quelques jours. Je viendrais récupérer le reste de mes affaires demain.
— Attends ! S'il te plaît. Viens t'asseoir à côté de moi, nous devons discuter.
— Non, Éric. Tu as toutes les informations nécessaires. Mercredi de la semaine prochaine, je prends cet avion. Avec ou sans toi.
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