Chapitre 5 : Aide-moi

Mes doigts triturèrent le morceau de papier, dans l'hésitation qui me dominait avec délectation.

Est-ce que j'ai vraiment le droit d'entrer dans sa vie ? 

Après tout, on ne se connaissait pas. 

En plus, il ne voudra peut-être pas m'aider.

Dans le feu de l'action, je me retrouvai avec le minimum vital. J'errai sans but dans les rues, des bas-fonds. Rester, ainsi fessait de moi une proie facile.

Ma raison se battait avec mon envie de le rejoindre, je résonnai cette dernière qui me disait de me débrouiller, seul...

Après tout, ou je peux aller d'autre ? Nulle part est ma triste réalité...

Ma marche de pérégrination s'arrêta juste devant le bar-discothèque « Red Room » ou les videurs me regardèrent de la tête aux pieds. Le pas-de-porte passait, je soufflai de soulagement. Ils m'avaient laissé entrer sans problème, malgré mon état déplorable.

Une salle exiguë et peu éclairée se dévoila à moi, une foule phénoménale se déhanchait sur le rythme du flot. 

Mon ouïe chercha à différencier les cris, des paroles. Ces dernières m'interpellèrent par leurs profondeurs et leurs engagements. 

La voix était rocailleuse et alerte, elle m'émouvait, me transportait.

La mélodie me séduisit et je bougeai mon corps dans des mouvements lents des bras et du basin. La cohue ne m'autorisait qu'à peu d'espace. Mais qu'importe, je le prenais avec joie, me laissant bercer par élocution du rappeur, même emporter dans son monde à lui. 

Mais dû au public venu l'écoutaient, je ne pouvais l'apercevoir.

La musique se voulait plus insistante et brutale, le rassemblement était exalté et les premières bousculades arrivèrent. Elles m'aiguillèrent en me projetant de plus en plus près de la scène. L'agitation m'éjecta jusqu'à l'estrade, mon dos face à cette dernière. 

Dans une action lente, je me tournai pour enfin observer le chanteur. Là, mes yeux s'écarquillèrent en le voyant, lui devant moi, Suga.

Il était accroupi et me fixait, étonner. Plus que le son des basses se faisait entendre, son mutisme perdura un instant.  Alors que nos regards s'accrochèrent, l'impression que nous étions seul au monde m'emporta. Cinq ou dix secondes s'étaient écoulées, je ne pouvais le dire. 

Puis Suga se redressa et reprit le morceau. Ses iris ne me quittèrent pas de leurs champs de vision.

Le voir dans son univers, m'emplissait de joie. Je me réprimandai.

On dirait une jeune fille en fleur devant son amoureux.

Son amoureux ? Mais on ne se connaît pas !

À quoi tu penses ?

Déjà la femme, alors que je suis un homme, puis le chéri en prime.

Je deviens fou ?

Le silence me surprit, me faisant sortir de mes réflexions. 

Je le recherchai du regard, fronçant des sourcils, alors que je ne le distinguai nulle part. Suga était descendu de scène, les fans l'entourèrent, créant une barrière entre lui et moi. Il leur parlait et riait avec eux.

Mon Dieu que son sourire est beau, il illumine son doux visage.

Mes yeux ne se détachèrent plus de cette vision, paradisiaque. Dans une démarche agile, il se déplaça pour me rejoindre. Je baissai la tête, gêner de le fixer ainsi. 

Ses converses s'arrêtèrent juste devant mes pieds. Je relevai progressivement le menton, me retrouvant face à son regard, les mots me manquèrent.

— Salut, Ji-min, me lança-t-il avec un visage intrigué par ma présence.

Mes salutations restèrent bloquées dans ma gorge nouée par mon angoisse d'être rejeté. Je l'observai bêtement, alors que lui m'analysa, avant de me questionner avec un sourire en coin.

— Tu es venu pour m'entendre ou il y a autre chose ?

— D'abord autre chose et après je me suis abandonné à ta musique, murmurai-je en baissant les yeux.

— Tu as des problèmes ?

Son côté direct me surprenait, me laissant presque dans l'obligation d'être flou dans ma réponse, et même fuyant.

— On peut dire ça, mais je ne vais pas de déranger.

cette phrase s'échappa d'entre mes lèvres, avant que je ne me décidai à partir dans un mouvement rapide. Ses doigts me saisirent le poignet, me forçant à m'arrêter.

— Je ne t'ai pas demandé de ne pas me déranger. Et je t'ai dit de venir ici, si tu avais des problèmes, non ? affirma Suga en cherchant à capter mon regard.

Dans un geste malencontreux, je lui balayai sa main par réflexe pour qu'il abandonne sa prise. Suga fronça des sourcils de stupeur et les traits de son visage se durcirent.

Mais pourquoi, j'ai fait ça ? La peur ? Ou l'angoisse de m'attacher à quelqu'un ?

Je bafouillai quelques mots à la hâte avant de m'enfuir.

— C'est bon, tout va bien.

Une fois, dehors, ma respiration était rapide, suffocante. Mes émotions se mélangèrent dans mon esprit.

Mais qu'est-ce qui m'a pris ? Pour une fois, que quelqu'un voulait m'aider, je me défends.

Je suis vraiment, nul  !

Je ne peux pas y retourner, j'ai bien trop honte.

Je m'appuyai contre un mur, la tête baissée. Des bruits de pas qui se diriger vers moi me parvinrent aux oreilles. Une main timide se posa sur mon épaule, accompagner d'une voix inquiète.

— Désolé, je n'aurai pas dû. Moi aussi, je n'aime pas qu'on me touche.

Suga retira sa poigne de mon omoplate, d'un air penaud. 

Nos regards s'accrochèrent, je lisais en lui son malaise. Je me sentais encore plus minable, qu'il pense que tout venait de lui. 

Ma voix était peu audible dû aux remords, mais en vue de la gentillesse dont il fessait preuve, je me devais de m'excuser.

— C'est moi qui suis désolé...

— Alors, je peux t'aider ? questionna-t-il avec prudence.

— C'est une longue histoire.

Une longue histoire est un euphémisme, en vue de ma situation. Mais je ne veux pas l'obliger, lui laissant pleinement le choix.

— Ça tombe bien, j'ai toute la nuit. Viens, on va boire un verre là-bas, me montra Suga du doigt.

Mon visage marqua mon étonnement, je ne m'attendais vraiment pas à ce qu'il me propose d'entendre mon récit. Je tergiversai, pesant le pour et le contre. 

Suga se dirigea vers la café-restaurant, lorsque je mettais enfin décider. Il se tourna en constatant que je n'étais pas à ses côtés, un sourire s'esquissa sur son faciès, comme une invitation à le rejoindre.

Après tout, je n'ai pas d'autre solution. Puis c'est un gentil garçon.

Je m'élançai à sa rencontre. 

Nous arrivâmes devant l'établissement. Suga poussa la porte, nous rentrâmes. Tous les clients et les barmens se retournèrent pour lui dire « Bonsoir ».

Il est vraiment connu ?

J'abaissai ma casquette, bien trop timide pour tous ses regards sur nous. 

Suga me guida vers une table au fond, en prenant bien soin que je le suive. Il prit place sur la banquette, me laissant ainsi la chaise en face de lui. 

Le serveur vint noter notre commande en me dévisageant.

— Hello, Suga, comment d'habitude ?

— Oui... Et toi, tu veux aussi un café ? me questionna Suga, taquin.

— Oui, un arabica bien fort. S'il vous plaît, demandai-je, en réponse du défi lancer par mon ami.

Le sommelier partit préparer nos boissons et revint avec les breuvages chauds. 

Je fixai Suga, en portant le liquide fumant à ma bouche. Je bridai une grimace, qui malheureusement s'aperçut.

C'est tellement amer pour moi.

Voilà, à vouloir impressionner, je me retrouve pris à mon propre jeu.

Suga ria d'abord doucement, puis à plein poumon. Je me vexai sur-le-champ, mais il posa amicalement une main sur mon épaule. Son enjouement était communicatif et je commençai à rire. 

Après quelques secondes, nous nous arrêtâmes et la curiosité regagna mon compère.

— Alors tu vas me raconter ou il faut que je devine ? ironisa-t-il avec un air espiègle.

Je me lançai dans l'élocution de chaque détail, plus mon monologue avançait et plus le regard de Suga se noircit. Son corps était devenu raide à la fin de mon histoire. Il se figea un instant, absorbait par ses pensées.

Quelle impression, je dois lui faire après ça ?

Je suis un vrai, un nid à problèmes pour lui.

Il s'empara de son téléphone portable dans sa poche et se leva.

— Attends-moi ici, je reviens ! demanda Suga en prenant la direction de la sortie.

Je poireautai des minutes interminables, avant de voir sa silhouette s'approcher. Suga s'assit, but une gorgée de café et m'annonça.

— Mon ami, Young-Jae, nous prête son studio pour quelque temps. Là, où je t'avais amené à notre première rencontre.

— Mais je ne veux pas t'embêter ou déranger ton copain, répondis-je embarrasser de bouleverser sa vie.

— Arrête ça, c'est déjà décider. Donc on n'y va maintenant !

Son ton était ferme et ne laissait aucune rétractation possible. 

Il se releva et marcha jusqu'au comptoir. Je l'observai discuter avec le barman, puis Suga revint en me tendant la main. Je m'en saisis pour me mettre debout, il la relâcha aussitôt, alors que je me retrouvai sur mes pieds.

C'est vrai, il n'aime pas qu'on le touche. 

Mais si c'était lui qui rentre en contact avec les autres ?

Sa démarche féline fut tellement rapide, que lorsque je sortis de mes pensées, il se retrouvait dehors du bar-restaurant. Je me hâtai pour le rejoindre et me plaçai à ses côtés pour le suivre jusqu'au studio.

Après une marche interminable, nous atteignîmes enfin notre but. Suga passa devant, ouvrit la porte de l'appartement et la ferma une fois que je franchis cette dernière. 

Un goût de déjà vu m'interpella, puis ses yeux se posèrent sur moi avec douceur.

Une nouvelle vie s'offrait à moi. 

Mais avais-je pris la bonne décision ?

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