-Chapitre 11/Confidences-
Ma vision se brouilla de nouveau. Les larmes perlaient sur le côté de mes yeux, sans toutefois ruisseler sur mes joues. Je dévisageai Time, assise en tailleur devant moi, sur la pelouse des jardins d'Eel. Elle me rendit son regard, mais plus rassurant encore.
- C'est normal de se libérer, déclara-t-elle d'un air détaché.
- J'en ai gros sur le cœur, ces derniers temps. Mes pouvoirs me terrifient de plus en plus.
Je levai les yeux pour apercevoir les branches rouges et roses enchevêtrées de l'Arbre Centenaire. Le grand chêne émanait d'une odeur florale envoûtante. Cela me rassurait tellement, en plus de la présence de mon amie.
- J'imagine bien la scène, me dit la jeune fille, pensive. Au moins, tu as reçu un câlin de la part de Nevra.
Je pouffai de rire à l'entente de ce prénom. À voir la tête de Time, le jeune brun ne la laissait pas indifférente !
- T'es jalouse ? la taquinai-je, en séchant mes larmes.
- Non... Pas du tout ! s'empressa-t-elle de me répondre de sa voix fluette et ferme à la fois.
J'émis à nouveau un petit rire. Difficile de la croire.
- On ne parlait pas de moi, à la base, répliqua Time pour changer de sujet.
- Hé bien, parle moi de toi. Tu sais déjà ce que je ressens ces derniers temps, alors à toi de te confier, maintenant.
Elle pencha légèrement sa tête sur le côté, mélancolique. Elle baissa le regard pour regarder l'herbe grasse et verte qui se trouvait à ses pieds.
- J'ai un passé compliqué, annonça-t-elle d'une petite voix.
Elle releva sa tête vers moi. Ses cheveux roses et bouclés cachaient désormais une partie de son visage, pour cacher une larme.
- Qu'est-ce que vous faites, les filles ? tonna soudainement une voix.
Time et moi tournèrent instinctivement nos têtes vers le garçon qui marchait en notre direction.
- Pour un Guetteur d'Eel, tu es bien silencieux ! On aurait dit un Ombre, remarquai-je en invitant le-dit Guetteur d'Eel à s'assoir avec nous.
- Et toi, pour une simple faélienne qui ne s'est jamais entraînée, tu es bien puissante ! fit Lirick en s'asseyant à son tour.
- Je crois que je suis spéciale, sans doute.
- Il ne vaut mieux pas que tu commences à prendre la grosse tête, l'Élue, se moqua-t-il gentiment.
Je tournai mon visage vers Time et lui fit promettre dans mon regard que notre discussion reprendrait plus tard. Puis mes yeux croisèrent ceux de Lirick. Il s'apprêtait à poser une question, mais je le coupai.
- Dites-moi, où étiez-vous pendant l'incident ?
- Tu sais, ce n'était que ce matin. Donc j'étais en train de surveiller la muraille. Mais les vibrations ne nous ont pas atteintes. Je ne savais pas ce qu'il se passait, à ce moment là, me répondit le jeune homme d'un air désolé.
- Et moi j'étais dans le laboratoire. Juste après que tu sois partie, Amélie. Je t'ai aperçue mais vu ton air pressé, je ne t'ai pas retenue, parla Time en remettant ses cheveux à leur place. Et merci pour l'odeur de ton passage, ajouta-t-elle d'un ton moqueur et dégoûté.
- Ce n'est pas de ma faute si ton Chef de Garde s'amuse à faire de moi son cobaye ! rétorquai-je, gênée et outrée en même temps.
- Sadique mais intelligent. Sa potion a sauvé les vies de tous les Obsidiens durant l'entraînement. Et la tienne par la même occasion, souligna Lirick.
- T'en a entendu parler de sa nouvelle invention ? La potion de Contrôle comme il l'a appelée, questionnai-je.
- Tu sais, ta perte de contrôle a fait le tour du QG, Amélie. Tout se répend comme une traînée de poudre, ici, me prévint Time en esquissant un sourire. Ezarel a profité de ces rumeurs pour rendre publique sa "noble et magnifique invention" comme il disait. Depuis, il s'attire toute la gloire des gardiens et la gente féminine de l'Absynthe ferait tout pour ne serait-ce croiser son regard.
Je gloussai de rire en entendant ces dernières paroles. Ezarel ne changerait donc jamais. Il croit vraiment que tout chez lui et que tout ses travaux sont magnifiques.
- Sinon, vous allez bien ? interrogea Lirick en s'allongeant, sur le dos, sur l'herbe d'un air rêveur.
- Je n'ai pas été blessée. Mes pouvoirs ne me blessent pas physiquement, mais plutôt moralement. Parce que cela me frustre et me terrifie. Mais bon, Nevra m'a forcée à aller faire un tour chez Eweleïn, et son rapport est positif. Donc, je vais bien, annonçai-je en m'allongeant aussi sur l'herbe, à côté de Lirick.
- Moi aussi je vais bien. J'ai moi aussi été plaquée sur le sol et les fioles me sont tombées sur la tête, mais ça va, dit Time en dépliant ses jambes, mais le buste toujours droit.
- Tant mieux, répondit Lirick. Si tout le monde va bien, alors moi aussi je vais bien. L'incident ne m'a pas atteint alors tout va bien de mon côté.
Un silence appréciable s'installa alors. Nous ne savions pas quoi ajouter, moi la première. Que dire de plus ? Je ne voulais pas parler pour parler. Alors, je fermai doucement mes paupières, appréciant l'instant de repos qui s'offrait à moi.
- Comment c'est, le monde des humains ? posa distraitement Lirick en plaçant ses mains derrière sa tête, pour mieux contempler le ciel.
Prise de court, je racontai alors comment moi je voyais la Terre.
- Il y a des bons et des mauvais côtés. Les humains eux-mêmes représentent le bien et le mal de notre monde. Ce sont eux qui inventent, qui créent, qui bâtissent, qui cherchent, qui combattent, qui protègent, qui blessent, qui aiment, qui détestent, qui construisent, qui démolissent... Tout ça sans magie, à la force de leurs bras et de leur cœur. Il n'y a pas d'Oracle, il n'y a rien qui dicte nos voies, là bas. Alors chacun vit sa vie, de son côté. Il n'y a pas de Garde, alors tout le monde se protège ou blesse. Mais la plus belle qualité des humains est certainement la créativité. Nous sommes créatifs. Nous inventons un monde meilleur ou pire. Nous n'avons pas de limite. Envoyer des hommes sur la lune n'est pas un problème. Maîtriser toutes les créatures n'est pas un problème. Détruire la Terre à quelques endroits et construire à d'autres n'est pas un problème. Nous savons tout et nous savons tout faire. Intelligents et unis quelques fois, bêtes et dissous à d'autres. Nous pouvons tout deviner, même les planètes que nous n'avons jamais vu. Pourtant, nous ne sommes pas voyants. Nous savons juste imaginer et construire des choses pour nous aider. La magie serait impuissante contre nos forces. La race Terrienne est une même unité. Mais plus développée que la race Eldarienne. Nous ne sommes pas tous amis, mais nous travaillons tous ensemble. Il y a aussi des guerres, chez nous. Des morts inutiles et des combats sanglants. Mais c'est pour nous divertir. Pour nous rendre plus fort. Un combat contre nous mêmes, pour prouver à tous ce que l'on vaut. Pour prouver à nos chefs nos valeurs. Mais, sur Terre, hormis toutes ces horreurs, il y a de l'amour. Des romances toutes bien trouvées. Des personnes en écrivent des histoires. Elles s'en inspirent tellement cela est beau. Notre monde est assez vaste, aussi. Nous avons six continents, chacun faisant la taille de votre monde ! Il est géant par rapport au vautre, notre monde. Nous connaissons aussi le jour et la nuit. Mais notre soleil est plus jaune. Notre lune est plus scintillante. Nos étoiles sont plus grosses et forment des constellations. Elles sont toutes uniques et visibles aux yeux de tous. Je me demande tout de même quelque chose. Si je meurs ici, rejoindrai-je ma famille aux cieux terriens ? Retrouverai-je seulement ma mère un jour ?
Je m'arrêtai subitement de parler. Je pourrai parler de mon monde des heures et des heures entières, mais le fait de me rappeler de tout ça me replongeait dans une grande tristesse. Je revoyais le visage de ma mère. Son air bienveillant à chaque moment et son sourire espiègle quand elle me parlait des garçons de ma classe au Lycée. Elle m'inventait une vie amoureuse avec ces gars là. Mais elle savait, au fond, que je n'avais jamais aimé. L'amitié dans mon monde m'avait brisée, alors, je m'étais refermée pour ne plus souffrir. De ce fait, mes sentiments amoureux se faisaient inexistants.
- J'aimerais y aller un jour pour voir tout ça, déclara Lirick dans un soupire.
- Tu serais tellement déboussolé, là bas... De plus, tu es un Feary. Si tu parles de la magie aux humains, soit tu finis dans un asile pour fous, soit tu es ligoté et tu deviens un cobaye pour la science Humaine.
- Charmant, se moqua doucement Time.
- Tu faisais quoi là bas ? Raconte nous ta vie sur Terre, demanda Lirick, émerveillé par mon récit.
- J'habitai à côté d'une forêt avec ma mère. C'était ma seule famille. Mon père a quitté ma mère à ma naissance, je n'ai jamais cherché à savoir qui c'était. De toute façon, je crois qu'il est mort d'un accident de moto. Niveau études, je travaillais pour un bac L. Pour la littérature, quoi. Je ne suis pas vraiment douée en mathématiques, en alchimie, tout ça, tout ça. Et niveau sentimental, je n'aimai que ma mère. J'ai eu une meilleure amie, plus jeune. Elle s'appelait Shylla. Quel nom étrange elle avait ! Mais de toute façon, je m'en fiche, à présent. Elle m'a trahie et c'est tout.
Mes deux acolytes me dévisageaient. Mais je n'étais pas gênée. Je savais ce qu'ils allaient me dire ou me demander.
- C'est affreux, prononça Time.
- Comment t'a-t-elle trahie ? m'interrogea Lirick, d'une voix hésitante.
Time fit les gros yeux. Moi, je m'étais attendue à ce qu'il me pose cette question. Lirick était vraiment curieux et je l'avais remarqué, à force.
- Nous étions meilleures amies. Nous nous disions tout. Et un jour, alors que je me rendais chez elle comme tous les matins de samedi, je n'ai trouvé personne à leur domicile. Sur la table de la cuisine, il y avait des papiers. C'était des permis de construire. La panique m'avait gagnée, alors je décidai de monter à l'étage pour rejoindre sa chambre. Et quand j'y suis arrivée, je n'ai trouvé personne. Je me suis approchée de son bureau, et j'ai vu qu'il y avait un mot signé par mon amie. Je l'ai lu. Et c'est là que j'ai comprit. Elle m'avait juste marqué "Désolée" mais j'avais tout de même comprit. Du jour au lendemain, elle était partie. Elle ne m'avait pas prévenue. Elle ne m'avait pas dit au revoir. Nous n'avons pas pu rigoler et discuter une dernière fois. Elle s'était envolée. Et je n'avais qu'elle comme amie, elle le savait. Mais elle m'avait quand même délaissée.
Je soupirai, sentant que les larmes me montaient aux yeux. Ce souvenir m'était tellement douloureux.
- Oh, Amélie... souffla Lirick. Désolé, je n'aurais pas dû...
Il se pencha vers moi et m'entoura de ses bras. Ce soudain contact me faisait du bien.
Time se joignit au câlin. Il en devint collectif. Consolée, je resserai mon étreinte sur mes deux amis. Car oui, c'étaient mes amis. J'en étais même sûre.
- Et vous ? soufflai-je. J'ai moi aussi un passé douloureux, étant donné que je ne verrais peut être plus ma mère... Je peux vous comprendre, faites moi confiance. Racontez moi vos vies d'avant.
Lirick se détacha soudainement de moi pour s'assoir en tailleur et me tourner le dos. Il voulait me cacher ses yeux devenus humides, mais je les avais vus avant qu'il ne se retourne subitement. Time, quant à elle, s'allongea près de moi, les yeux perdus dans le vague.
- Je peux vous comprendre, répétai-je. Je vous ai fait confiance, en vous parlant de moi. Faites moi confiance...
- C'était il y a trois ans, débuta alors Lirick d'une voix grave mal assurée. J'habitai chez mes parents avec mon petit frère de dix années Eldariennes. Nous vivions heureux, jusqu'à ce que des Ténébreux pénètrent notre maison une nuit. Mon frère les avait entendu. Il est allé prévenir nos parents, avec moi sur ses talons. Mais lorsque nous sommes arrivés, ils avaient tous les deux été assassinés. Des couteaux pénétraient à tous les deux leur corps. Ils avaient le regard vitreux. Puis, dans un dernier souffle, j'ai vu ma mère ouvrir la bouche à mon intention. "Protège ton frère.", avait-elle prononcé. Et elle est morte, comme mon père. Ces hideux Ténébreux ont foutu en l'air une famille, car elle était du côté de Eel. Tout ça pour ça.
Lirick porta une main à ses yeux, arrêtant un instant son récit. Puis il continua, d'une voix fluette.
- Cette nuit-là, les Ténébreux ont essayé de nous tuer, nous aussi, mon frère et moi. Mais j'ai réussi à les repousser quelques temps pour nous enfuir. Cela m'a valut une cicatrice au bras, mais on s'en est sortit. Depuis, j'ai confié mon frère à notre tante. Et moi, je me suis entraînée pour entrer dans la Garde d'Eel. Je voulais prouver à mon petit frère que même orphelins, nous pouvions être forts et nous pouvions nous venger en aidant la Garde. Et je suis entré dans la Garde d'Eel, j'ai réussi. Certes, je n'ai pas dégoté le meilleur poste, mais je suis utile. Je protège les habitants d'Eel, et cela me va. Du coup, quatre fois par mois, je vais chez ma tante et j'entraîne mon frère. Comme ça, il deviendra plus fort que moi. Et il entrera dans une Garde, lui. C'est tout ce que je lui souhaite.
Le jeune homme soupira. Je me relevai alors et allai poser une main sur son épaule gauche. Puis je barrai le chemin que les larmes se frayaient sur son visage de mon autre main. Je vis un sourire se dessiner au creux de ses lèvres. Lirick ne parlait pas, il pleurait en silence. Je ressentais la douleur de son vécu. Au moins, lui, il avait son frère et sa tante. Moi, j'étais fille unique et ma mère vit dans une autre dimension.
Time s'approcha de nous et s'assit à mon côté.
- Moi aussi c'était il y a trois ans, commença à son tour la jeune fille. J'habitai aussi chez mes parents, avec mes quatre frères et sœurs. J'en suis l'aînée. Un jour, j'ai entendu parler de la Garde d'Eel. Étant petite et insouciante, je rêvai d'y entrer un jour. Et dix années Eldariennes plus tard, à mes quinze ans donc, j'ai fait part de mon rêve à ma famille. Ils étaient tous horrifiés, pour je ne sais quelle raison. Mon père m'a traîné de force jusqu'au Chef du village. Et je lui ai avoué à son tour mon rêve. Sa réaction fut immédiate ; il m'a bannie. Mes parents n'étaient même pas tristes. Seuls mes jeunes frères et sœurs, qui ne comprenaient pas, ont pleuré. Mais cela n'a rien changé. J'ai du errer dans une forêt pendant des mois. Puis j'ai réussi à rejoindre la Forêt Florale, à bout de force. J'ai entendu des grognements et j'ai vu une meute de Blackdogs se diriger vers moi. J'ai hurlé de toutes mes forces, espérant que quelqu'un vienne me chercher pour me secourir, me délivrer de mon cauchemar.
Une larme coula le long de sa joue. J'en déduis que ces mois d'errance lui ont endurci son caractère mais en même temps l'ont fait énormément souffrir.
- Et c'est là qu'il est intervenu. Grâce à son ouïe fine, il a accouru et m'a sauvée. Il a combattu avec rage les Blackdogs pour moi et m'a ramené à Eel. Je parle bien sûr de Nevra. Mais quand je me suis installée à Eel, je croyais que mon cauchemar était terminé. Mais non, il a fallut que toutes les filles de la Garde de l'Ombre me dévisagent comme si j'étais une bête de foire. Juste parce que leur Chef m'avait secourue. Au début, je m'en fichais. Mais après, tout le monde a commencé à mal me regarder. Parce que j'étais une réfugiée d'une cité aux abords de Aal.
Une deuxième larme perla le long de sa pommette. Elle baissa la tête, en reniflant.
- Je me suis renfermée sur moi même. Personne ne pouvait m'approcher sans que je ne grogne. Alors, Miiko a décidé de me placer dans une Garde pour que je m'ouvre aux autres avec le travail. C'est comme ça que mon rêve s'est réalisé. Que je suis entrée dans la Garde d'Eel, comme membre de l'Absynthe.
Elle releva soudainement la tête pour me dévisager.
- Les gens ne me faisaient pas confiance, même au sein de ma Garde, juste parce que Aal était notre ville voisine. Ils croyaient que j'étais maudite, alors que non. Et puis un jour, j'ai eu écho qu'une Faelienne était arrivée dans la Garde. Qu'elle était spéciale. Et qu'elle était peut être maudite. Et c'est là que je t'ai rencontrée. Je t'ai vu, à la bibliothèque, derrière Miiko. Et lorsque tu es partie, suivie par Miiko, je n'ai eu d'autres choix que de vous suivre. Je voulai savoir si c'était bien toi, l'humaine. Et tes performances me l'ont confirmé. Et depuis cet incident, je ne t'ai plus lâchée. Et tu es la seule personne à qui je fais assez confiance pour dévoiler mes secrets. Car tu es comme moi, après tout. Jugée au premier regard par les autres.
Elle me dévoilait là qu'elle n'avait que moi, comme amie, au final. Alors, je n'eu d'autres choix que de la prendre dans mes bras.
- Je me fiche désormais des regards des autres. Je suis devenue plus forte. Même si tu es jugée, tu ne bats pas en retraite, toi. Devant Miiko, par exemple. Tu lui tiens tête. Et tu as confiance en toi. Tu ne sais peut être pas ce que tu fais tout le temps, mais tu te débrouilles pour gérer toutes les situations. Et ça, crois moi, c'est formidable, m'assura-t-elle en séchant ses larmes.
- Merci, répondis-je, presque toute émue.
Je lâchai Time pour me mettre debout doucement.
- Je suis contente que vous vous soyez dévoilés à moi, vraiment. Mais je dois aller m'entraîner, maintenant. Je suis désolée, on discutera plus tard ?
Ils acquiescèrent tous deux de la tête, avant de me faire un signe de la main, lorsque je tournai les talons pour m'en aller, le regard rivé sur le sol. On me faisait enfin confiance ! Et on m'avait avoué des choses personnelles que personne ne connaissait. Des choses douloureuses parce que je peux les comprendre.
Machinalement, je marchai vers l'intérieur du QG, pensive. Je devais me rendre dans la forêt mais mes pas me guidaient autre part. J'avançai sans m'arrêter, d'une marche assez rapide. J'arrivais bientôt dans le hall d'entrée du château. À l'intérieur, je me dirigeai vers un couloir à droite, pour déboucher dans la salle d'alchimie. Qu'est ce que je faisais là ?
À ma grande surprise, mes yeux balayant la salle vide se posaient sur une étoffe noire placée sur un tabouret.
"L'écharpe de Nevra !" pensai-je aussitôt.
Je la pris et partie avec du laboratoire. Je devais la redonner à Nevra et par la même occasion le remercier de m'avoir donné la potion de Contrôle.
Je m'en fus alors dans les nombreux couloirs du quartier général. Où pouvait se trouver Nevra quand on avait besoin de lui ?
Je me dirigeai alors vers l'infirmerie. Je profitai du fait de me balader dans le château pour aller m'enquérir de l'état des blessés et de Valkyon. Le pauvre, je l'avais tout de même envoyé valser dans les airs avant de le clouer au sol par une gravité déconcertante.
Descendant des escaliers sombres et montant d'autres, je me retrouvai enfin à l'infirmerie. J'entrai à l'intérieur au pas de course. Je vis Eweleïn penchée sur l'un de ses patients prit d'une violente quinte de toux. Je balayai la salle du regard espérant trouver Valkyon. Je remarquai que tous les blessés n'avaient pas de coupures, mais juste un bandage apposé sur leur front. Ils devaient avoir eux aussi une migraine. Mais contrairement à eux, je n'avais aucune séquelle du combat.
- Amélie ! s'écria l'infirmière m'ayant aperçue.
Je m'approchai donc d'elle, la mine attristée.
- Ils vont bien ? interrogeai-je en posant mon regard sur les lits occupés.
- Bien sûr ! Ils ont juste très mal à la tête, et parfois, quelques Obsidiens ont attrapé un rhume, à cause de la terre meuble et froide qui leur servait de lit, ce matin.
Je fis la grimace. Tout ça à cause de moi...
- Ne t'inquiète pas, c'était un accident. C'était involontaire, n'est ce pas ? posa-t-elle, les sourcils légèrement froncés.
- Oui..., répondis-je d'une voix fluette.
Je n'avais pas voulu les blesser, mais c'était moi qui avait fait appel à mes pouvoirs. Moi et personne d'autre.
- Très bien. Tu veux voir Valkyon peut être ? posa Eweleïn.
- Où est il ? répondis-je à l'infirmière.
Elle me désigna du bout des doigts un grand rideau au fond de la pièce, à côté du grand bureau.
- Tu le trouveras derrière. Valkyon a besoin d'intimité.
- Pourquoi..? Il est..., hésitai-je d'une petite voix.
- Mais non ! Il a gardé ses vêtements voyons ! Mais il ne faut juste pas le déranger trop souvent. Donc ce drap dissuade beaucoup de gardiens, rit malicieusement Eweleïn.
J'acquiesçai alors de la tête, ne sachant quoi répondre, les joues légèrement rougies de honte d'avoir pensé à cela. Je m'approchai donc du fond de la pièce, en contournant les petites tables sur lesquelles étaient entreposées de diverses fioles, potions, bandages et produits.
Arrivée à la hauteur de la large bande de tissus, je l'ouvrais sur l'un des côtés sans hésiter. Je trouvai Valkyon assit sur son lit, l'air songeur, avec son armure légèrement abîmée. Il tourna sa tête vers moi, d'où je pouvais apercevoir une petite égratignure sur sa joue droite.
Il me contemplait, ses yeux rivés sur les miens. Il ne bougeait pas, n'affichait aucune émotion particulière. Il n'était pas énervé, ni déçu, ni content, ni soulagé, ni décontenancé. C'était juste... Valkyon après tout.
- Ça va ? demandai-je automatiquement.
- Oui, oui, répondit-il de sa voix rauque et calme.
Je ne savais pas quoi ajouter. À part des excuses, peut être ?
- Je suis tellement désolée... C'est partit tout seul, m'excusai-je, en baissant le regard, un peu intimidée.
- Je n'ai rien, m'assura Valkyon. C'est oublié.
Je ne répondis rien. Je relevai seulement les yeux pour mieux le regarder. Son regard doré me transperçait. J'y ressentais un mélange d'émotions tel que du soulagement, du réconfort et... de l'envie ? Oui, comme si ses yeux me suppliaient quelque chose que je ne comprenais pas. Valkyon se redressa alors, sa figure arrivée à la hauteur de la mienne. Quelques centimètres à peine nous séparaient désormais. Il était si proche... Il penchait la tête pour gagner ces quelques centimètres quand, tout à coup, le rideau s'envola à la volée.
Je fis aussitôt volte-face pour découvrir Nevra.
- Je suis arrivé à temps, à ce que je vois, souligna le brun en fusillant Valkyon du regard.
Que voulait-il dire par là ? Que s'il n'était pas arrivé... Il se serait passé des choses ? Impossible !
- Enfin bref, je voulais savoir si tu allais bien, reprit Nevra en redressant son buste pour paraître plus grand.
Il posa finalement son regard sur moi.
- Mais à part ça, je ne suis pas venu pour rien, on dirait, susurra-t-il de sa voix enjôleuse.
- Justement Nevra... Je te cherchais, dis-je en ignorant ses sous-entendus.
Son regard fut traversé par une lueur d'excitation. Je préférai ignorer cela aussi et reprendre ma phrase, alors que Nevra s'approchait de moi.
- Euuh... Oui, je voulais te rendre ton... écharpe, continuai-je, bafouillante, en lui tendant le tissu.
- Merci ma belle, répondit le beau brun en me faisant un baisemain.
- Allez faire vos roucoulades ailleurs ! gronda une voix.
Nous nous retournèrent instinctivement vers Valkyon, qui avait les sourcils froncés.
- Sortez ! gronda-t-il à nouveau.
Je baissai le regard, peinée, avant de repasser par l'embouchure du rideau de couleur bordeau. Sans un regard en arrière, je me dirigeai vers la sortie de l'infirmerie. J'entendis néanmoins les deux Chefs de Gardes se parler. J'entendis aussi Nevra ricaner malicieusement. Je n'y prêtait tout de même guère attention et quitta la grande pièce.
Je me directionnai maintenant vers les grandes portes d'Eel, afin de sortir du QG. Je traversai les longs couloirs et arrivai enfin au hall d'entrée. Sur mon chemin, je saluai Keroshane avant de déboucher sur les jardins, à l'extérieur du château blanc.
À toute vitesse, je dépassai des arbres en fleurs et des plantes multicolores. Je sautai par dessus un banc avant d'arriver enfin au grand portail.
Finalement, je pu sortir sans encombre, prétextant être en mission pour Miiko. Une fois sortie, je me dirigeai directement vers la Forêt Florale. J'y pénétrai, essayant tant bien que mal de me souvenir de l'emplacement de la clairière. En repérant le petit arbre bleu sans écorce, je fus soulagée. J'étais donc dans la bonne direction.
J'avançai toujours lorsque je débouchai enfin dans la clairière à l'herbe blanche. Elle était toujours bordée des arbres rosés et bleutés et séparée de la petite rivière turquoise au sable rose. Toujours un paysage magnifique.
- Tu es enfin là, me souffla une voix.
Parmi les taillis, je vis Sally descendre d'un arbre. On se rejoignit alors au centre de la clairière, chacune d'un des côtés de la rivière.
- C'est la frontière. Je me trouve sur le territoire d'Aal, ici. Et toi, tu te trouves sur le territoire de Eel.
J'hochai la tête pour lui dire 'D'accord'.
- Bon, suis moi, nous allons aller autre part pour t'entraîner.
Je franchis la frontière marquée par la rivière et suivis donc Sally à travers la petite clairière. Sally se dirigea vers la gauche. J'empruntai le même chemin. Au bout de quelques minutes à zigzaguer entre les arbustes, nous débouchâmes enfin dans une sorte de clairière où les arbres désormais noirs et foncés étaient souvent arrachés du sol. La terre était çà et là éventrée et les troncs paraissaient empilés à d'autres. Quel sinistre paysage ! Mais il offrait tout de même un bon terrain d'entraînement et un grand parcours du combattant.
Sally et moi nous plaçâmes au centre de cette clairière. La jeune fille me scruta de ses yeux noirs. Ses cheveux étaient attachés hautement sur sa tête et cela lui donnait un style de combattante.
- Bon, pour commencer, ne libère jamais pleinement tes pouvoirs. Les secours d'Eel ne viendront jamais sur territoire ennemi.
J'acquiesçai de la tête. Je savais très bien où Sally voulait en venir, en disant cela. Elle avait peut être eu vent de ce qu'il s'était passé le matin même, à Eel.
- Essaye de canaliser ton énergie. Concentre-la sur ta main droite. Tu dois la réguler afin de ne pas éventrer tout ce que tu vois.
Je fermai aussitôt les yeux. Je pensai fortement à ma main droite, et j'imaginai des vagues de Manaa s'y rendre.
- Contrôle ta peur, car cela peut tout faire dégénérer.
Je me rythmai sur les paroles de la jeune Feary. Elle parlait distinctement et calmement, cela me rassurait.
- Ouvre les yeux, tu dois pouvoir utiliser ta magie sans les fermer.
Je les ouvris donc, n'oubliant pas pour autant d'imaginer des vagues de Manaa se déferler sur ma main droite qui me picotait légèrement.
- Très bien, maintenant, fait appel à ta magie. Essaye de démolir ce tronc, à ta gauche.
Je me tournai donc dans la direction indiquée et fis, comme Sally me le demandai, appel à ma magie. Je fis le vide dans mon esprit et fis ressortir des sentiments colériques. Pour conséquence, je sentai mon Énergie me traverser pour de bon le corps, se directionnant comme voulu vers ma main droite. Je tendis aussitôt ma main vers le tronc de l'arbre mort. Autour de mon point serré émanait une forte lueur rouge. Elle enveloppait aussi mon bras droit.
Une pression commençait à s'exercer sur mon point, et je ne perdais pas de temps, j'ouvris mes doigts. Ce n'était pas une boule de flammes qui sortie de ma main, non. C'était un rayon laser rouge qui traça en une seconde pour s'abattre sur l'arbre et l'exploser. J'eu un mouvement de recule, tout comme Sally.
- Wooah..., murmura-t-elle, les yeux écarquillés. Ton Manaa est puissant !
Je me tournai vers elle, la mine inquiète. Cela m'avait terrifiée, moi. Mais elle, elle semblait plus admirative.
- Tu sais que tu es l'une des rares personnes sur Eldarya à utiliser leur Manaa pour attaquer ? D'habitude, il sert de défense. Mais après ce que je viens de voir, je peux te garantir que tu attaques plutôt bien !
Je baissa mon regard vers ma main droite. La lumière redoublait d'intensité. Ma main tremblait et me picotait fortement à présent. Si cela continuait, j'allais perdre le contrôle, une fois de plus.
Sally sembla comprendre puisqu'elle reprit la conversation.
- Bon, maintenant, essaye d'attaquer ce tronc là, avec autant d'énergie dans ta main, mais en utilisant moins de force.
Je me tournai donc vers la droite, le bras tendu en avant.
- J'ai peur de ne pas pouvoir me contrôler, si je fais ça, avouai-je en toute sincérité.
- C'est pour ça que tu t'entraînes.
J'hochai de la tête en ouvrant mes doigts sur le nouveau tronc. Je crispai alors mes doigts comme si je tenais quelque chose au creux de ma main. Je sentis mon Énergie se compresser. Mais un rayon partit tout de même. Il désintégra les branches tordues de l'arbre avant de l'enflammer. Un second jet s'extirpa de ma main pour exploser le tronc du végétal mort.
- Retse concentrée ! me dit Sally, soucieuse.
J'essayai tant bien que mal de refermer mes doigts, mais je n'y arrivai pas, cela me faisait un mal de chien. Une inquiétude soudaine m'envahit, mes membres étaient paralysés, j'attendais que ça se passe. Les boules de Manaa rouge ne cessaient de jaillir de ma main pour écorcher l'arbre noir. Je paniquai à l'idée de ne plus pouvoir arrêter ce massacre.
"Et si il y avait une personne à la place de l'arbre ? À l'heure qu'il est, elle serait morte !" pensai-je, au bord de la folie.
- Contrôle ta peur ! Ne la laisse pas t'envahir, me hurla Sally que je j'entendais de moins en moins.
J'étais maintenant rythmée sur les secousses que provoquaient les vagues de Manaa se déferlants sur le tronc mort. Ce mouvement régulier absorbait toute ma concentration. Tout semblait s'amplifier. Mes doigts s'ouvrirent en grand et des boules de flammes rouges se matérialisèrent avant de mettre le feu au gros tronc et d'exploser les branches craquantes, en projectant au loin des morceaux de bois enflammés. Si je continuai, j'aillais très certainement mettre le feu à la forêt.
Soudain, l'arbre - du moins, ce qu'il en restait - s'écroula au sol, en cendres. Mon pouvoir continuait tout de même à envoyer des boules de flammes sur le sol. Ces dernières enflammaient et brûlaient tout se qui était à leur portée. Je regardai ce carnage, horrifiée.
Prise d'un regain d'énergie, je voulu tout arrêter. J'inspirai alors une grosse goulée d'air en fermant les yeux pour me calmer. Lentement, je commençai à fermer les doigts. J'entendais le feu qui crépitait s'atténuer en terme bruit. La chaleur de mon corps baissait considérablement.
Puis, enfin, je réussi à fermer complètement mes doigts. Lorsque les boules cessèrent de se matérialiser, je m'effondrai au sol, prise de convulsion. Je me sentais atrocement faible, tout à coup. Comme vidée de toute énergie. J'avais toujours l'impression d'être en feu et de me faire brûler vive. Je sentis mes yeux s'humidifier, ce qui me fit du bien.
- Doucement, c'est terminé..., me calma Sally en s'accroupiant à mon niveau.
Elle épousseta mes vêtements emplis de cendres.
- Tu as réussi ! Mais tu ne semblais pas m'écouter.
Je soupirai. Elle avait raison. Je m'étais perdue seule dans ma terreur. Oubliant le monde à côté de moi. Sally m'aida à me relever. Elle ouvrit la bouche pour parler, mais elle se ravisa, dressant ses oreilles sur sa tête, en direction de la lisière gauche de la forêt. Ses yeux s'écarquillèrent et elle fit volte-face. Je l'interrogeai du regard mais elle semblait paniquée.
- Des Ténébreux ! Ils arrivent ! me hurla-t-elle en chuchotant. À l'abri !
La jeune fille me prit le poignet et plongea avec moi derrière un tronc enchevêtré au sol avec des racines. Elle mit un doigt sur sa bouche, pour me dire de me taire. Je préferai donc l'écouter et garder le silence en attendant ses signaux. Puis, j'entendis moi aussi des bruits de pas approcher. Bientôt, je pus distinctement suivre une conversation.
- Bon sang Eresh ! Tu es sûr de ce que tu avances ? Il n'y a rien, ici, gronda une voix masculine.
Aussitôt, le dénommé Eresh répliqua d'une voix mal assurée :
- Oui ! Je ne suis pas... aveugle, moi. Je suis sûr d'avoir vu des lumières rouges... ici.
À travers les racines, je tendis le cou pour apercevoir deux hommes. Un brun, haut de taille, dont le bout de ses mèches étaient blondes, et un autre brun, mais de taille plus petite. Le premier faisait au moins une tête de plus que le second.
La queue brune aux mèches blondes du premier homme s'agitait en tout sens. Il était de la même espèce que Sally. En fait, les deux hommes étaient de la même espèce que Sally. J'apercevai une queue brune raide sortant du fessier de plus petit homme, le dénommé Eresh. Ce dernier avait du vernis noirs sur les ongles, tendis que son acolyte avait du vernis blanc. Eresh portait des affaires sombres et sales. Sa peau même était grisée çà et là par de la poussière. Le brun-blond était, lui, vêtu d'une ravissante cape noire décorée par des arabesques blanches. Dressé tel un pique, cet homme semblait être le supérieur d'Eresh.
- Y a intérêt ! Ces filles sont introuvables, donc ne me donne pas de faux espoirs, répliqua le supérieur en grondant.
- Je ne comprends pas pourquoi le Maître les veut auprès de lui. Il a déjà beaucoup de filles à ses pieds, et il en veut encore ? soupirait Eresh de sa voix fluette.
Son acolyte lui assénit une tape derrière la tête.
- Triple idiot ! Ce n'est pas pour ça ! La première est une voyante et l'autre est l'Élue du Cristal Démon !
- Je..., voulu répondre Eresh.
Mais il se stoppa net, tout comme son supérieur. Ils étaient à seulement dix mètres de notre cachette.
- Tu sens ça toi aussi ? chuchota le brun aux mèches blondes.
- Oui, Ludwig, répondit sur le même ton Eresh.
Ils levèrent leur tête au ciel, comme pour humer l'air.
- Oh non, se crispa Sally à côté de moi. Ce sont des Ténébreux Blackdogs, ils vont nous repérer ! Et ils peuvent nous entendre, donc on va s'éloigner le plus discrètement po..., commença Sally avant de se faire couper par la forte voix du dénommé Ludwig.
- Elles sont là, ce sont elles ! Tellement pas discrètes ! Elles me déçoivent. Je croyais qu'elles seraient plus compétentes, au moins pour ça, vu les rumeurs qui courent à Aal. En fait, elle ne sont pas vraiment fortes pour s'enfuir, ricana-t-il en courant vers nous.
Sally et moi nous figeâmes. Nous nous redressâmes cependant mais n'osâmes pas nous enfuir. Néanmoins, les deux hommes s'avançaient vers nous.
- Rien ne sert de courir, vous êtes cuites à point, ricana de nouveau Ludwig en s'approchant furtivement, suivit par son acolyte.
- Que voulez-vous ? grogna Sally d'une voix assez ferme et crédible.
- Vous ! Nous voulons vous ramener à Malensars, bien sur ! Quelle question, franchement ! lança toujours le même homme, sarcastique.
- On ne se laissera pas faire ! menaçai-je à mon tour.
https://youtu.be/wj9jkVQS-No
- Tu veux vraiment nous affronter ? Et puis, même si tu prenais le choix de la fuite, nous vous rattraperons facilement. Nous sommes des Ténébreux Blackdogs, après tout, répliqua Ludwig en avançant toujours.
Il n'était plus qu'à un bon mètre de nous. Derrière lui, Eresh semblait prêt à en découdre. Les deux se penchèrent légèrement en avance. Pour avoir fait le mati même du combat au corps à corps, je savais que cette posture était la position d'attaque.
- N'approchez pas, les préviens-je.
Sans prendre gare de mon avertissement, Ludwig bondit sur moi. Il me cloua au sol de tout son poids avant de claquer des doigts de sa main droite. Aussitôt, je vis Eresh bondir lui aussi, mais sur Sally. Cette dernière l'esquiva en beauté, prévoyant son coup. Un combat au corps à corps s'engagea alors entre eux lorsque la jeune fille envoya son point dans la figure du jeune homme.
- Abandonnez, livrez-vous à nous et nous n'abîmerons pas vos petites bouilles, me susurra Ludwig, penché sur moi.
Ses mèches blondes se posaient sur mon visage tellement il était proche. Les bras pris par les siens et les jambes emprisonnées par tout son poids, je ne pouvai lutter. Pourtant, je n'admettrai pas la défaite. Il m'avait prise par surprise, comme Valkyon le matin même. Je ne pouvais me faire avoir une deuxième fois ! Et cette fois ci, il n'y avait pas de règles. On pouvait utiliser la magie.
- Jamais, grondai-je pour réponse.
- Dommage, je t'aurais prévenu.
L'homme se redressa et leva sa main droite. Par reflex, je libérai donc mon bras droit sous son emprise quelques secondes plus tôt pour le mette devant ma figure. Mais déjà le fameux Ludwig m'envoyait son point dans la figure. Je gémis en essayant de me débattre. Mais il ne lâchait pas et relevait déjà sa main.
- Moi aussi, je vous aurais prévenu, grondai-je en posant ma main gauche sur le torse de l'homme.
Il sourit, amusé. Pourtant, dans quelques instants, il allait tout faire sauf rire.
Je concentrai mon Énergie dans la paume de ma main. Je faisais de nouveau appel à mes pouvoirs en faisant le vide dans mon esprit. Mes doigts ouverts commencèrent à me chauffer. À travers mes yeux plissés, je vis l'homme grimacer. Il essaya de se relever, libérant mon bras droit. Alors, j'apposai aussi ce dernier sur son torse, canalisant mon Énergie dans mes deux mains.
Une lumière rouge se forma autour de mes doigts fumants. Ludwig hurla de douleur. Pour ma part, je souris à mon tour.
Mes mains fumantes le brûlaient à travers ses vêtements qui noircissaient plus qu'ils ne l'étaient déjà. Une odeur de brûlé me parvint alors.
Ludwig se débattit sauvagement et réussit à se relever, ses mains posées sur le haut de son buste, sur sa poitrine qui était en train de brûler. Il me fusilla du regard avant de me donner un violent coup de pied dans les côtes. Toujours allongée au sol, je ne pus esquiver son coup. Il ricana en m'entendant gémir.
Je tournai la tête vers Sally qui envoyait au tapis Eresh. Mais ce dernier se relevait pour bondir à nouveau sur la jeune fille, la plaquant au sol elle aussi. Elle grogna entre ses dents avant de tirer sur les cheveux du petit brun pour le forcer à se relever. Mais au lieu de se redresser, il enfonça ses ongles noirs pointus dans la chair de la Feary.
Je l'entendais hurler et cela me mit en rage plus que je ne l'étais déjà. Je ne sentais plus les coups que me donnaient Ludwig de son pied. Il était lâche de faire cela. Et j'allais moi aussi être lâche.
Je pris un bout de bois pointu disposé à ma portée que je lançai droit dans les yeux de mon agresseur. Ludwig le heurta de plein fouet en hurlant de rage. Déséquilibré un instant, l'homme ne me vit pas me redresser. Je le poussai sur le côté avec une boule de flammes rouges que je matérialisai bien vite. Aussitôt je me ruai sur Eresh. Je l'attrapai par le col avant de lui prendre la figure entre mes doigts ouverts. Ma paume fumante lui arracha un cri sinistre de douleur. Il se débattait, tandis que moi, je lui brûlai la peau de son visage. Il l'avait mérité.
Sally se redressa et posa deux doigts sur mon bras.
- Contrôle-toi, me souffla-t-elle.
À contrecœur, je lâchai le jeune garçon qui retomba mollement au sol, la figure prise entre ses mains. Il hurlait de douleur et des larmes lui perlèrent le long de ses joues défigurées.
Soudainement, je me sentis étranglée. Je ne pus me retourner que je fus projectée à nouveau au sol.
- Qu'as-tu fait à Eresh ? gronda Ludwig en me sautant sur mon dos meurtri.
Il prit mon cou entre ses mains et commença à m'étrangler. Je vis du coin de l'œil Sally essayant de le dégager, en vain. D'un coup de pied puissant, il déséquilibra la jeune fille qui tomba dans un petit brasier. Je l'entendis hurler de douleur lorsqu'elle heurta le sol en feu.
Mes points se serrèrent. J'étouffai mais je ne voulai pour rien au monde lâcher l'affaire. Alors, Ludwig se vit propulsé lui aussi dans des décombres par un mur de Manaa bleu. Une vague d'Énergie me transperça alors. J'étais à deux doigts de perdre le contrôle sur mes pouvoirs. Mais je me relevai tout de même. Le mur se dressa de nouveau devant moi. Je matérialisai alors une boule de flammes rouge sur ma main droite. J'ouvris mes doigts vers l'homme qui avait envoyé Sally dans le braisier. La boule de Manaa rouge rencontra alors en chemin le mur de Manaa bleu. Les flammes se chargèrent en Énergie Bleue pour devenir l'Énergie Violette. Cette dernière explosa dans un grand fracas sur Ludwig.
Ce dernier roula au sol. Il grognait de douleur tandis que je me précipitai vers Sally. Elle s'était relevée du sol, les mains et la joue droite ensanglantées.
- Je vais bien, m'assura-t-elle en essuyant sa joue.
Je scrutai ses vêtements carbonisés. Quelques déchirures laissaient paraître des coupures à même la peau. Elle n'allait pas bien. Mais elle me faisait croire l'inverse. Pourquoi ?
J'entendis un bruit derrière moi. Je fis volte-face, découvrant Eresh qui avait rejoint son supérieur. Je rageai intérieurement qu'ils ne soient pas tous les deux morts. Je secouai ma tête frénétiquement de gauche à droite.
"Pourquoi pensais-je cela ? Je ne souhaite pas leur mort !" pensai-je, horrifiée.
C'est alors que je compris que mes pouvoirs voulaient s'intensifier pour tuer les Ténébreux. Je perdais le contrôle en ayant ces pensées sinistres.
Je me ressaisissais alors en me calant à côté de Sally. Cette dernière écarquilla alors les yeux. Je me tournai mon regard vers celui pointé par le sien pour découvrir les deux hommes debout, nous défiant du regard.
Soudainement, leurs yeux deviennent jaunes puis redevinrent noirs. Leur dos se arqua alors, agrandissant leur colonne vertébrale sous leur peau. Ils hurlèrent de douleur mais ne se débattaient pas. Leurs ongles s'allongeaient pour devenir des griffes, tout comme leurs crocs devenaient aiguisés dans leur bouche. Leurs queues touffues doublèrent de volume. Les oreilles brunes sur leur tête grandirent elles aussi. De la fumée émanait maintenant de leur peau à nue. Bientôt, les deux hommes se retrouvèrent à quatre pattes au sol. Ils grondaient et crachaient. Leur peau dénudée désormais de vêtements arrachés était recouverte de poils sombres. Sauf Ludwig. Les bouts des touffes de ses poils étaient blonds.
Je comprenais alors que j'assistai à la métamorphose des Ténébreux en Blackdogs. Ils ressemblaient désormais à ces loups plutôt qu'à des hommes. Ils ressemblaient en tous points aux créatures sombres, sauf à un seul : il n'avaient pas de troisième œil sur leur front. Cela était la seule chose pour les différencier des vrais Blackdogs.
Je me tournai alors vers Sally, qui semblait crispée.
- Je ne peux pas... me métamorphoser, moi..., m'avoua-t-elle.
Je l'interrogeai du regard.
- Quand je suis métamorphosée, je perds le contrôle de moi même. Mon instinct animal domine mon instinct de Feary. Sans le vouloir, je pourrai te blesser..., me dit-elle d'une petite voix emplie de regret.
Je ne pus lui répondre. Les deux loups grognaient et avançaient en crachant. Je remarquai qu'Eresh n'avait pas de poils à l'endroit où je l'avais brûlé. Il porterait donc une cicatrice de notre combat à vie.
Sans attendre plus, Ludwig passa à l'attaque. Il me sauta dessus et me mordit violemment à l'épaule gauche.
- Dommage, Malensars voulait que je te ramène vivante, gronda le Ténébreux Blackdog de sa nouvelle voix rauque, entre deux coups de crocs.
Je tentai de me débattre, en vain. Ludwig tenait bon. Son poids lui donnait un très bon équilibre. À côté de moi, je vis Sally rouler dans la poussière. Eresh s'avança vers elle, un sourire meurtrier dessiné sur ses babines. Sa truffe se fronça lorsqu'il voulu cracher un grondement sourd.
Je priai Sally pour qu'elle se métamorphose tout de même. Elle pouvait se faire tuer à tout moment, et cela était une bonne raison pour fair appel à son pouvoir de métamorphe.
Une douleur me sortit de mes inquiétudes pour la jeune fille fille. Ludwig venait de me planter ses griffes dans mes côtes. Cela me rappelait une scène de déjà-vu, lorsqu'Ëphrézias devait m'entraîner, dans la salle des roches, sous l'emprise du Cristal Démon. À ce moment là, j'avais perdu espoir. Mais maintenant, or de question d'abandonner. Sally aussi était en danger. Lorsqu'une vague d'Énergie me traversa le corps, je n'hésitai plus une seconde. J'imaginai un mur de Manaa bleu éjecter le loup. Et ce songe se réalisa bien vite. Le poids qui pesait sur moi disparut alors.
Je pus me relever, mais difficilement. Ludwig roula entre les racines d'un arbre mort avant de se redresser aussi, en grondant. Il s'approchait de moi encore une fois et je le retins en lui envoyant des boules de Manaa rouge dans la figure.
Je me retournai vers Sally pour la voir se redresser tant bien que mal. Eresh allait lui sauter à nouveau dessus lorsque j'ouvris mes doigts sur lui. Il fut projecté et roula dix mètres plus loin.
- Il faut... que tu te... transformes, lui criai-je en essayant de reprendre mon souffle.
Sally me lança un regard paniqué.
Je me sentis alors à nouveau plaquée au sol. Ludwig me grogna à la figure en me lacérant les membres de ses griffes. Je commençai à faiblir, à force de tomber au sol et de me blesser. Au contraire, Ludwig semblait puiser dans une nouvelle énergie. Il était de plus en plus fluide et sa rage me faisait trembler. Clouée au sol, je lançai un regard désespéré en direction de la jeune fille. Elle hocha alors de la tête.
Ses yeux devinrent alors jaunes puis redevinrent noirs. Elle se métamorphosait alors, tout comme les deux hommes avant elle.
https://youtu.be/ASj81daun5Q
Elle tomba quatre pattes à terre, le poil hérissé sur son échine. Elle grondait de rage. Le bout de ses oreilles hérissées aussi était en poils dorés, ce qui était magnifique.
Eresh la contourna et Ludwig me lâcha pour faire face à la louve. Les deux hommes bondirent en même temps sur Sally, qui ne se laissait pas intimider. Elle roula sur le côté pour blesser au flanc Ludwig. Elle sauta par dessus le brun-blond pour atterrir sur le dos d'Eresh. Il s'écroula au sol. Sally en profita pour le mordre au cou, temps qu'il était en position de faiblesse.
Eresh cracha et Ludwig vola à son secours en percutant de plein fouet la louve qui tomba entre les racines pointues des arbres morts. Elle se redressa aussitôt pour hurler avant de bondir à nouveau. Elle posa ses pattes avant sur la truffe de Ludwig, ce qui le fit tomber en arrière. Mais pour ne pas se laisser avoir, ce dernier tendit son cou et attrapa dans sa gueule l'une des pattes de la louve. Il enfonça ses crocs dans la chair de Sally qui gronda. Elle se débattait mais Ludwig tenait bon. De plus, Eresh revenait à la charge en lacérant le flanc exposé de la louve. Elle roula finalement sur le côté, la patte tordue.
Les deux Ténébreux ne perdirent pas de temps et se ruèrent sur Sally dans un grondement sourd. La louve gémit lorsque les bêtes lui mordirent ses memebres et son cou. Sally était en train de se faire massacrer. À deux contre elle, elle n'avait aucune chance. Il fallait que je la sauve, même si, pour cela, je devais libérer pleinement mes pouvoirs.
Je me mit sur pieds aussitôt. Mes mains déjà fumantes me picotaient. Et je laissai des vagues de Manaa emplir mon corps. Je n'essayai plus de résister lorsque l'Énergie transperça mon être pour se libérer pleinement. Une force nouvelle s'emparait de moi, et je n'osai plus réagir. Alors, sans grande conscience, je levai mon bras vers les deux hommes dos à moi. Au moment même où j'ouvrirai mes doigts dans leur direction, un flash rouge illumina la clairière. Un rayon de Manaa rouge s'abattit directement sur les deux gars dans un grand fracas. Dans l'air, j'apercevai des vagues de Manaa bleu danser. Je puisai de là ma force à continuer ce combat.
Eresh fut éjecté au loin de Sally avec le choc. Ludwig, lui, avait roulé sur le côté contre son gré. Des boules de feu partaient toujours de ma main pour heurter le corps des Ténébreux. Je vis Sally se redresser, le souffle cours. Elle m'adressa un regard meurtrier avant de se ruer sur moi. Mais un mur de Manaa bleu la rejeta en arrière. Un rayon rouge la poursuivit, se changeant en Énergie Violette au passage, avant d'exploser sur la louve.
Cette dernière, très affaiblie, retrouva ses esprits en reprenant petit à petit sa forme humaine. Son museau disparaissait et sa colonne vertébrale redevenait de plus en plus droite sous sa peau en craquant quelques fois des cartilages. Sally se recroquevilla sur elle même. Elle tremblait de peur et cachait son visage entre ses mains.
Je me tournai finalement vers les deux hommes qui retrouvaient eux aussi connaissance. Allongés sur une même racine, les Ténébreux grondaient et crachaient. Ludwig se redressa et fit le gros dos avant de retrousser ses babines au plus extrême. Ses griffes aiguisées tranchaient le sol sous ses pattes. Il me bondit à nouveau dessus, les crocs découverts. Il ne réussit pas à m'atteindre. Mes pouvoirs réagirent plus vite. Déjà une boule violette lui rentrait dans la gueule. Puis une autre, plus explosive encore, s'abattit sur le loup d'un tel fracas que j'entendis tous ses os craquer. Un hurlement plaintif s'entendait alors. Mais mon Énergie n'en eu guère pitié. Un rayon se braquait déjà en direction de Ludwig. Cette attaque l'envoya rouler dix mètres plus loin, dans un grand bruit.
- NON ! hurla Eresh en voyant que son supérieur ne se relevait pas.
Il se retourna alors vers moi, le regard meurtrier.
- Tu vas le payer, grogna de plus bel le loup en se redressant.
Soudainement, je vis ma main droite émaner d'une lumière rouge plus intense. Et de ma main gauche, une nouvelle lumière bleue l'entourait. Je joignis mes mains sans plus attendre. Une boule violette se formait des deux Énergies qui se touchaient presque. Puis, de cette énorme matière violette, un rayon traça vers le Ténébreux Blackdog qui me faisait face. Le tronc derrière lui en fut tout ébranlé et en laissa tomber ses branches mortes sur Eresh.
Ce dernier gisait à terre, inerte. Son pelage noir semblait cramé. Ses yeux noirs étaient fermés. Sa poitrine ne se soulevait plus régulièrement. Sa respiration hachée était très faible. Du sang lui coulait de partout, et plus encore dans la gueule.
Une folie s'empara alors de moi. Il allait mourir ! L'inquiétude commença à me ronger de l'intérieur. Des boules de flammes furent lancées au sol bien malgré moi. Un brasier naquit alors à mes pieds. Au ciel, je vis les vagues de mon Manaa bleu former des flammes. Elles mêmes semblaient combattre un ennemi invisible dans l'air. Ou tout simplement, le vent.
Puis, une phrase m'apparut tout à coup tel une évidence dans mon esprit. 'Contrôle ta peur, car tout peut dégénérer.'. Sally. Oui, son conseil me revint en tête. J'essayai alors de faire le vide dans mon esprit. Je relâchai la pression excercée sur mes mains. Mais un terrible hurlement me sortit de ma transe.
- ERESH ! hurla une voix suppliante.
J'ouvris mes yeux mi-clos pour voir, à travers les flammes du braisier au sol, Ludwig. Il se penchait sur le corps inerte de son ami. Il avait reprit sa forme humaine, tout comme le petit brun.
La voix de Ludwig s'intensifiait de plaintes et de pleurs. Je ne savais comment réagir. L'avais-je tué ? Soudainement, je tombai à genoux à terre. Mon regard fixe était rivé sur le sol. Mon corps émanait d'une lumière rougeoyante. Mes mains tremblantes touchèrent les décombres des arbres morts. Mes paumes chauffèrent dès lors les morceaux de bois. Mes pouvoirs voulaient sortir de nouveau, contre mon gré, cette fois. Car je ne voulais pas me risquer à me redresser. Et si, par malheur, mes pouvoirs s'attaquaient à Ludwig ?
Je me surpris à recevoir des gouttes chaudes sur mes mains. Des larmes. Je pleurai tout bonnement. Je sentis alors une chose se poser sur mon épaule gauche. Sally s'accroupia à mes côtés, le regard perdu dans le vague.
- Ce n'est pas ta faute. Moi aussi, j'ai perdu le contrôle, durant le combat. La preuve, je t'ai attaquée, contre mon gré.
Je levai la tête vers elle, peu rassurée.
- Si je ne suis pas assommée ou morte à l'heure qu'il est, dis-toi que c'est grâce à toi.
Je reniflai, peu convaincue. Je m'étais encore faite avoir par mes pouvoirs. Le pire c'était que je m'étais laissée faire toute seule. Je ne sais pas trop pourquoi, ma conscience voulait libérer mes Énergies. Alors qu'au plus profond de moi, je ne voulais guère.
Sally se leva et prit un gros morceau de bois entre ses mains. Je la vit l'abattre sur la tête de Ludwig, qui tomba lui aussi au sol. J'écarquillai les yeux, incompréhensive.
- Ils sont assommés, comme ça. Ils ne nous verrons pas partir, me dit-elle en m'invitant la à rejoindre.
Ce que je fis donc. Je m'approchai d'elle en évitant de marcher sur le braisier.
Je vis avec horreur le visage du plus petit homme. Eresh avait bel et bien été défiguré par mes paumes fumantes. Je regardai ses traits brûlés. Ses sourcils continuellement froncés et ses yeux humides exprimaient sa douleur. Ses vêtements étaient encore plus cramés que ceux de la jeune fille à mes côtés. Le spectacle qui m'était offert me fit presque tourner de l'œil. Eresh était vraiment en piteux état.
Cette vision me calma alors. Je sentis mes pouvoirs se renfouir dans mon corps qui ne supportait plus toutes ces dépenses physiques. J'étais très fatiguée et je ne venais que de le remarquer.
- Ligotons-les, proposa Sally avant de prendre des lianes traînantes au sol pour attacher les deux Ténébreux au tronc derrière eux.
- On ne leur donne pas de soins ? demandai-je, la mine sombre.
- Quelle idée ! Autant qu'ils meurent ! Ils nous ont attaqué, tout de même, Amélie ! fit Sally en plissant les yeux.
Je remarquai alors que sa jambe droite était gravement blessée. Et elle, elle ne pourra pas avoir de soins, étant donné qu'elle erre dans la forêt.
Elle se releva alors après avoir attaché les deux hommes. Elle passa devant moi et m'indiqua de la suivre, pour sortir de la clairière sombre. Des volutes de fumée se dressaient sur notre chemin. Des feux crépitaient çà et là.
Sally s'introduisit alors dans la forêt et me ramena à la clairière séparée par la rivière bien vite. Je franchissais la frontière sans gêne et soupira. Sally soupira aussi en s'asseyant au bord de l'eau. Elle en mit sur son visage pour se rafraîchir et sur sa jambe boitante.
Elle leva alors son visage vers moi, les yeux emplis de fierté et d'animosité.
- Hé bien ça pour un entraînement, c'en était un !
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