- XIII - Ruminieren
Ce sont les rayons obliques du soleil qui furent les responsables du réveil d'Elenore. Leur douce et rassurante chaleur entoura les traits détendus de la jeune femme qui somnolait.
Ouvrant ses yeux à la couleur de l'or foncé, elle inspira profondément. Elle avait si bien dormi que cela en était suspect. Une seconde, le temps de la réflexion et elle sut expliquer la raison de son bien être.
Elle était rentrée chez son père d'adoption, la veille au soir et après un bon repas avec Swen et Ludwig et Elina. Après un bain chaud, elle s'était endormie dans un lit confortable. Il était donc tout naturel qu'elle se sente en presque parfaite forme.
Se redressant en position assise, elle regarda tout autour d'elle la chambre qu'elle connaissait mais qu'elle n'avait pas pris le temps d'observer la veille. Le grand lit à la tête de fer forgé, l'armoire de bois sculpté, les deux riches et épais tapis qui recouvrait un plancher impeccablement astiqué, la coiffeuse avec la glace ovale, la brosse et le peigne de nacre, les quelques flacons de parfum.. La table au plateau de marbre blanc, le miroir de plain pied, la chaise ouvragée et le fauteuil là bas dans le coin, près d'une des deux fenêtres qui donnaient sur le jardin.
À cette fenêtre, d'ailleurs, on pouvait apercevoir l'immense saule pleureur qui dominait tous les autres végétaux du jardin.
Elenore repoussa la couverture en souriant. Il faisait beau et Pixis ne lui refuserait pas le droit de se promener !
Ses pieds effleurèrent le tapis rouge et elle se leva, les pans de sa longue chemise de nuit blanche lui arrivant un peu en dessous des chevilles.
La veille, elle avait déposé sur le dossier de la chaise la robe verte qu'elle avait porté mais cette dernière avait été remplacée par une autre robe.
Curieuse et amusée à la fois, -apparemment Pixis n'avait pas résisté à la tentation de lui offrir une nouvelle robe-, Elenore se rapprocha de l'amas de tissus et le souleva, pour en regarder l'aspect. Cette robe ressemblait à la combinaison entre un chemisier et une longue jupe ample.
Le haut, blanc, se fermait sur le cou et de part et d'autre de la rangée de boutons, sept rangées de volants formait le devant du chemisier. Les manches devait arriver un peu en dessous du coude et se terminaient par un volant plus simple. La taille de la robe était composée d'un tissu soyeux, rouge foncé, sur lequel, en décoration, étaient disposés symétriquement huit boutons de cuir brun. Des lanières astucieusement cachées dans le dos permettaient d'ajuster la robe. La jupe, quant à elle, était formée de deux volants. Un long, rouge foncé qui devait frôler les pieds d'Elenore et un plus court, par dessus, de la même couleur rouge, décoré d'un motif quadrillé gris et noir. Un peu avant l'ourlet de ce pan, se trouvait une ligne de tissu froncé qui en faisait le tour.
Décidément, Dot Pixis avait bon goût. Il s'agissait d'une tenue plutôt simple, compte tenu de la population de district mais assez chic pour qu'elle puisse sortir sans craindre d'être jugé du regard.
Elenore enleva prestement sa chemise de nuit et enfila la robe. L'idée des manches plus courtes était parfaite pour son attelle qu'elle réajusta correctement. En fermant les boutons du haut, elle espéra que Pixis n'était pas encore parti ce matin.
Resserrant les lacets de la taille, elle vit immédiatement la différence. La robe semblait à présent parfaitement ajustée et elle sourit.
Se dirigeant vers le miroir, elle ne put s'empêcher d'écarquiller les yeux. Le reflet qu'elle contemplait lui renvoyait l'image d'une femme accomplie. La robe était parfaite. Le teint d'Elenore était frais et reposé, ses longs cheveux châtains reposaient en mèches souples et propres sur ses épaules.
Il fallait dire qu'au Bataillon, personne n'avait vraiment le temps de s'arrêter devant les rares miroirs. Depuis combien de temps n'avait-elle pas vu à quoi elle ressemblait ?
Elenore qui, la veille, n'avait pas compris la réaction de ses camarades du Bataillon, la comprenait à présent. Elle avait vraiment grandi, s'était affinée. Des traits délicats formaient un visage au pommettes légèrement marquées, aux fossettes visibles, au nez droit et aux lèvres fines. Ses sourcils, soulignaient un regard volontaire. Quelques discrètes taches de rousseur se battaient en duel sur son nez et ses joues. Le haut de sa robe, bien que fermé correctement, laissait deviner une poitrine plus grosse qu'elle ne l'aurait pensée et une taille fine.
Après tout, c'était normal, Elenore bandait dans une long tissu sa poitrine lorsqu'elle était au Bataillon. Il fallait dire que s'était quand même plus confortable pour courir.
Alors, Elenore se surpris à se trouver jolie. Le reflet lui plut et, un peu naïvement peut-être, elle se dit que cela devait être grâce à la robe.
Saisissant sur la coiffeuse la brosse, elle démêla rapidement ses cheveux avant de les attacher en un chignon bas.
Elle était prête, et après une pulvérisation de parfum, elle ouvrit la porte de sa chambre pour se retrouver dans le couloir.
Les murs de pierre étaient décorés de tableaux et le son de ses pas était étouffé par un épais tapis fort long.
Descendant le long de l'escalier, elle entendit monter de la salle à manger une voix qu'elle reconnut et qui lui souleva le cœur de joie.
Elle pressa le pas et arriva bien vite dans la pièce où Pixis terminait son repas.
— Elenore ! Dit-il en l'apercevant.
La jeune femme sourit avant de presque courir jusqu'au Commandant pour l'enlacer.
Pixis souriait aussi, heureux de la voir de nouveau auprès de lui.
— Papixis, je suis tellement heureuse d'être ici !
Pixis lui embrassa les deux joues, bien vite imité par Elenore qui s'assit sur la chaise à sa droite.
— On dirait que tu as eu du mal à te réveiller ce matin, n'est-ce pas ?
Elenore entrouvrit les lèvres. À vrai dire, elle n'avait pas la moindre idée de l'heure qu'il était.
— Il est un peu plus de midi et demie. Ajouta Pixis en voyant l'air perdu de sa fille adoptive.
Cette dernière afficha un air horrifié.
— J'ai dormi si longtemps ?!
Un petit rire échappa à Pixis tandis qu'elle poursuivait :
— Pourquoi personne ne m'a réveillé ?
— Parce que j'ai demandé à ce que personne ne te dérange. Tu avais besoin de repos. Répondit Pixis avec un sourire en coin.
Ludwig entra dans la pièce et eut un petit sourire avant de demander :
— Ah.. l'ours a enfin décidé de sortir de son hibernation !
Elenore eut un air interloqué.
— Un.. ours ?
Le vieux domestique ricana en adressant un clin d'œil malicieux à Elenore qui se contenta de râler tout bas qu'elle n'était pas un ours.
— Souhaitez-vous manger quelque chose, Elenore ? Demanda t-il avec déférence, reprenant un semblant de sérieux.
Elenore songea à décliner l'offre mais soudain son estomac se rappela à elle et gronda. En souriant, elle jeta un œil à l'assiette de l'autre attablé et y vit les reste d'un plat de légume et des arrêtes de poissons.
— Je prendrai la même chose que Papixis, s'il te plaît Ludwig.
Saluant rapidement, il tourna les talons et s'en alla en cuisine.
— As-tu bien dormi ? Interrogea son père adoptif.
— À merveille, je me sens en pleine forme. Et toi ?
— Tu sais, Elenore, à mon âge, on ne dors plus aussi bien qu'avant ! Mais j'ai bien dormi, pour une fois.
Elenore appuya ses bras sur la table et demanda :
— Quelle nouvelles de la Garnison ?
Le commandant esquissa un sourire.
— Elles sont excellentes, ma foi. La lieutenante Antje Feistel, tu te souviens d'elle ?
Là, Elenore acquiesça, oui, elle se rappelait d'une belle femme aux cheveux gris coupés au carré. Une longue cicatrice parcourait le côté droit de son visage, s'étendant de son front à son menton. Mais elle avait un charisme certain.
— Et bien, elle a commencé avec la division Nord de la garnison l'inspection minutieuse du mur du district de Bezirk.
Elenore fronça les sourcils.
— Pourquoi une inspection ?
Pixis porta à ses lèvres le verre de vin devant lui, qui n'était pas encore vidé.
— Et bien.. Des habitants ont juré avoir entendu des bruits venant du mur.
— Des bruits ? Quel genre de bruits exactement ?
— Les habitants ont décrit ça comme des grognements.. Les mêmes que ceux des titans.
— Mais cela nous pouvait-il pas venir de titans à l'extérieur ? Après tout, il s'agit du mur Maria !
— C'est ce que nous avons d'abord pensé mais les bruits avaient lieu à des moments où les soldats de la garnison en poste n'avaient signalé la présence d'aucun titan..
— Hmm.. Des titans invisibles ? Ajouta t-elle en désespoir de cause.
Pixis laissa paraître un air horrifié.
— Tu plaisantes ?!
— Oui. J'espère bien que des titans invisibles n'existent pas.. Quelle galère franchement..
Pixis sembla reprendre son souffle.
— Et donc.. Vous inspectez le mur ? Reprit Elenore.
— Oui, c'est cela, cela prend du temps puisque pour apaiser la situation, nous avons promis une inspection poussée.
— J'imagine que cela doit ravir le Culte du Mur.. Ajouta sarcastiquement la jeune femme.
Pixis termina d'un geste son verre de vin.
— Tu n'imagines même pas à quel point.. Ils sont franchement pénibles.. Le mur ne va pas s'écrouler si on le touche !
Elenore eut un petit rire et sur ces faits, Ludwig revint avec une assiette pour Elenore, remplie comme promis d'un mélange de légume et d'un morceau de poisson.
— Merci beaucoup Ludwig, le remercia t-elle en le voyant poser son assiette devant elle.
— Bon appétit, Mademoiselle Elenore !
— Cela a l'air délicieux, merci.
Ludwig s'éclipsa et Pixis parla encore un peu du cas du district de Bezirk alors qu'Elenore commençait à manger avec plus d'appétit qu'elle ne l'aurait cru.
Elle avait eu raison. c'était délicieux.
Quand elle termina son assiettée, Pixis l'interrogea soudain sur sa vie au Bataillon.
— Keith m'a dit que le Major Erwin avait insisté pour votre transfert au Bataillon ?
Elenore sourit distraitement en songeant à la raison de ce transfert.
— C'est vrai.. Nous avions quelques interventions avec le Bataillon et quand nous avons tr.. Enfin quand Erwin a décidé d'engager trois jeunes qui n'étaient pas passés par la brigade d'entraînement, il a suggéré à Keith Shadiz que nous étions prêts à rejoindre le Bataillon et que notre présence faciliterait l'intégration des trois nouveaux.
— Ils sont trois donc ? demanda Pixis avec curiosité.
Elenore laissa glisser son regard jusqu'à la fenêtre et murmura :
— Ils étaient. Ils étaient trois. Furlan Church, Isabel Magnolia et Livaï. Furlan et Isabel n'ont pas survécu à leur première expédition.
Pixis n'ajouta plus rien pendant plusieurs longues secondes, attendant qu'Elenore poursuive, si elle le souhaitait.
— Ils s'entendaient très bien, et j'avais commencé à me rapprocher de Furlan et Isabel. Livaï aussi, mais différemment. Il n'est pas très sociable, tu vois ? Mais il n'arrive pas à passer au dessus de leur mort. Je crois qu'ils étaient comme une famille pour lui.
Elenore secoua doucement la tête en ajoutant :
— Je ne peux pas complètement le comprendre. J'étais trop jeune quand j'ai perdu ma.. mes parents. Mais j'imagine qu'il a besoin de temps.
Buvant un peu de son eau, elle ne sut quoi ajouter et un silence inconfortable s'installa.
Fort heureusement, Elina arriva à ce moment, un lettre entre les mains.
— Une lettre vient d'arriver pour Mademoiselle Elenore.
Elenore releva le visage vers la domestique, lui adressa un sourire avant de saisir la lettre et d'en déchirer le sceau qu'elle avait bien évidemment reconnu. Un aigle enserrant un rameau d'olivier dans ses serres. C'était le sceau des Lauer.
— De qui est-ce ? s'enquit Pixis.
Elenore répondit distraitement :
— Elle vient de Swen.
Elle ne vit pas le sourire en coin qu'afficha momentanément son père de cœur.
Elle admirait l'écriture soignée et appliquée, le papier d'excellente qualité, l'encre sombre. Se plongeant dans sa lecture, elle ne prêta plus attention à Pixis qui la regardait, amusé.
Ma chère Elenore,
Pardon, je n'ai pu m'empêcher de dire aux autres que tu étais de retour pour quelques temps au district de Yarckel. Tu imagines bien qu'ils sont ravis et qu'ils ont hâte de te revoir !
J'ai réussi à réunir tout le monde pour cet après-midi. Nous nous rejoindrions à la librairie du Zenith à 15h puis prendre un café juste après. Je connais une excellente adresse, le propriétaire nous fera un prix !
J'espère que je ne te prend pas trop au dépourvu, et que tu n'avais rien de prévu, mais par pitié, j'espère que tu pourras venir ! Nous t'attendrons avec impatience !
En attendant, accepte mes chaleureuses salutations.
Swen Lauer
Elenore releva des yeux brillants d'excitation vers Pixis, remarquant soudain avec quel air il la regardait.
— Quoi ?!
— Rien.. Mais tu m'as l'air très proche de ce jeune homme.
— Arrête de dire n'importe quoi.. C'est un ami.
Pixis leva les yeux au ciel, marmonnant quelque chose à propos de vieux singe, d'apprendre et de grimace.
— Il a réuni les autres à la librairie du Zenith. Je dois y être à 15h. Puis-je y aller ?
Pixis posa son menton sur sa main, souriant.
— Oui, bien sûr. Est-ce que tu veux prendre la voiture ?
— Non non, Je préfèrerais y aller à pied.
— Tu es certaine ?
— Oui, j'ai besoin de faire de l'exercice, sinon je vais rouiller.
Pixis acquiesça, regardant l'heure.
— Il est 14h. En partant dans une petite demi-heure, tu devrais y être à temps.
Elenore sourit, remerciant Pixis.
Se levant, elle récupéra son assiette ainsi que celle de Pixis et amena les deux couverts en cuisine où Miriam lui dit haut et fort qu'elle n'avait pas à débarrasser la table.
Elenore s'enfuit dans sa chambre, le temps de choisir un châle dans son armoire. En l'ouvrant, elle y trouva une multitude de nouveaux habits. Elle soupira, à la fois amusée et lasse. Pixis pensait-il qu'elle ne pensait qu'à être coquette ?
Saisissant un châle beige, elle descendit les escaliers et en profita pour remercier Pixis de ses nouvelles tenues.
Sur ces paroles, elle sortit dans la rue et respira un grand coup. Les rues larges, propres et lumineuses lui avaient un peu manqué. Elle se décida à marcher doucement, profitant de la vue des quelques passants affairés.
Arrivant au lieu de rendez-vous, elle regarda la porte de la librairie, en haut de quelques marches qui donnaient sur un perron.
La librairie du Zenith. Un endroit où elle avait passé d'excellents moments, avec ses quelques amis du district.
Entrant, elle fit tinter la clochette au-dessus de la porte.
Une vieille dame s'approcha et ses traits ridés s'étirèrent en un sourire.
— Mais ne serait-ce pas Elenore ? Comme tu as grandi !
Elenore salua avec plaisir la vieille libraire qui la connaissait bien.
— Les autres sont-ils déjà là ?
— Oui, vous êtes la dernière il me semble.
La jeune femme sourit et se dirigea vers la salle au fond de la librairie qui menait à une grande terrasse, donnant sur le canal.
Aussitôt, parvinrent à ses oreilles des voix qu'elle connaissaient. Entrant sur la terrasse, elle ferma un instant les yeux, aveuglée par la lumière du soleil après la tranquille semi obscurité de l'intérieur de la librairie.
Un grand noiraud aux yeux bleus et au fin collier de barbe sourit en la voyant.
— Mazette ! Elenore ? C'est bien toi ? Ce que t'as changé !
Il avait toujours été d'une élégance peu commune et la barbe lui ajoutait un petit style pas déplaisant. Sa veste de soie rouge était décorée de motifs brodés sûrement au fil d'or. Sa famille était très amie avec celle des Lauer, qui était sans conteste les plus riches de Yarckel. Les Lauer avaient beaucoup d'influence et inspirait de la crainte à beaucoup de bourgeois.
Alexander Herwig sourit de plus belle en venant enlacer Elenore.
— Alexander ! Toi aussi, tu as beaucoup grandi. Et tu portes la barbe ! Cela te va bien !
Une autre voix, plus fluette se fit entendre :
— Et moi, j'ai le droit de saluer Elenore ? Alexander ! Pousse toi !
Rita Letzel était une jeune femme blonde aux yeux vert. D'une grande beauté, tout le monde savait qu'elle aimait Alexander, sauf lui.. Il paraissait évident que leurs parents respectifs ne sauraient tarder à les pousser à se fiancer.
Elenore se détourna d'Alexander pour prendre dans ses bras Rita.
— Cela fait plaisir de vous revoir !
Rita était grande. Environ 1m70, peut-être, en tout cas, bien plus grand que les pauvres 1m63 d'Elenore.
Swen était présent, lui aussi.
Ils s'assirent sur les chaises présentes sur la terrasse et parlèrent sans cesser pendant plus de trois heures.
Ils parlaient de tout. De leurs activités, de leur projets, de leur vie. Ils écoutèrent avec un intérêt non dissimulé le récit de la formation d'Elenore et rirent en apprenant qu'elle était souvent punie, et forcée à faire des tours de terrains.
Elle leur raconta sa première expédition et à quelle point l'extérieur était beau, mais à quel point les titans étaient terrifiants.
Beaucoup de questions fusaient, de digressions aussi, de rires et de joie. Il était déjà 18h30 quand la libraire vint les avertir de la fermeture imminente de la librairie.
Les quatre amis sortirent de la librairie pour se diriger vers le café dont Swen connaissait bien l'adresse.
Ils s'assirent à nouveau, autour d'une table, et commandèrent des boissons. Il commençait à faire frais aussi Elenore commanda un thé.
— Un thé noir ? Sérieusement ? Commenta Alexander.
— Que veux-tu.. Elenore a des goûts de grand mère..
— Il est noir en plus ? s'exclama Swen. Mais comment tu fais ? Je déteste le thé !
Elenore sourit en portant à ses lèvres la tasse chaude.
— Tss.. Vous n'appréciez pas les bonne choses..
Ils blaguèrent encore longtemps, si longtemps que le soleil s'était couché depuis belle lurette quand Alexander regarda Rita avant que cette dernière ne prenne la parole.
— À vrai dire, nous avons quelque chose à vous annoncer. Alexander et moi sommes fiancés depuis deux mois. Nous nous marierons l'année prochaine, si tout se passe bien.
Elenore vit avec stupeur la main du noiraud se poser sur celle de la blonde avant de sourire.
— Sérieusement ??!! s'écria Swen. Comment vous avez pu me cacher ça ?? Je n'étais même pas au courant !!!
Les trois autres explosèrent de rire.
Les discussions allant bon train, vint le moment où Rita se leva pour dire qu'elle devait rentrer.
Alexander proposa de la ramener et elle accepta avec joie.
Quand ils eurent quitté l'auberge, Elenore sourit.
— En vérité, je m'en doutais.
— Vraiment ? interrogea Swen.
— Oui. Rita aime Alexander depuis longtemps et il me semblait avoir remarqué que lui ressentait quelques sentiments pour elle. Je suis très heureuse pour eux, ils forment un très beaux couples.
Qu'avaient décidemment tous ses amis à se mettre en couple ? Était-ce une norme ? Peut-être n'était-elle pas normale ?
Après une prompte réflexion, elle se dit qu'entrer au Bataillon n'encourageait certes pas à se lancer dans une relation.
—Et toi ?
La question de Swen sortit Elenore de ses pensées.
— Pardon.. De quoi parlais-tu ?
— Ah.. Tu ne m'écoutais pas.. Je te demandais si tu côtoyais quelqu'un.
Elenore ne sut pourquoi mais elle se sentit rougir doucement.
— Euh.. Non. Mais je ne cherche pas trop à me lancer dans une relation maintenant.
— Ah je vois..
Un silence gênant s'installa et Elenore se demanda si elle était la cause. Pourquoi tout à coup l'ambiance était bizarre ?
— Bon.. Si on y allait, nous aussi ? proposa t-elle pour briser ce silence infernal.
Swen acquiesça et ils sortirent dans la nuit déjà noire.
— Mince.. Il fait sombre. Marmonna t-elle.
— Tu es venue à pied ?
— Oui.
— Je te raccompagne.
— Mais..
— Il est hors de question que je te laisse rentrer toute seule alors qu'il fait nuit, quand bien même nous sommes dans le district le plus sécurisé des murs.
Elenore accepta, n'ayant pas le choix.
Leur marche commença, dans les rues peu éclairées. Le froid se faisait plus mordant et Elenore frissonna finalement.
— Tu as froid ? Interrogea Swen.
Elenore nia, ne voulant pas l'embarrasser mais il ôta son manteau bleu sombre pour le déposer sur les épaules de la jeune femme.
— Tu es convalescente, je te rappelle. N'ajoute pas un rhume à ta liste.
Elenore ne sut quoi dire et resta coite, remerciant d'un signe de tête le jeune homme.
Ils parlaient peu, profitant du silence de la nuit. Quelques grillons crissaient et les étoiles brillaient, lumineuses, dans un ciel d'encre.
La fin du trajet ne tarda pas à arriver et la contour de la maison de Pixis se dessina à quelques mètres d'eux.
Elenore, une fois sur le pas de la porte, rendit sa veste à Swen en le remerciant encore.
— Veux tu que quelqu'un te raccompagne en voiture ?
Il déclina.
— Non merci, c'est gentil, je n'habite pas très loin.
Elenore salua son ami et entra dans la maison.
Swen resta immobile quelques secondes, sentant émaner du manteau entre ses mains la douce odeur de la jeune femme.
Ne résistant pas à l'envie, il huma cette fragrance qui sentait à la fois la fleur et la forêt.
Souriant, il descendit les marches et s'en alla vers chez lui.
La châtain, quant à elle, épuisée, se passa de dîner, se baigna et fila au lit.
Demain serait un autre jour, et elle avait déjà hâte d'y être.
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