- VII - Überleben

Le soleil brillait fortement au dessus de l'étendue de verdure. Ses rayons chauds transperçaient le feuillage des arbres, nimbant de lumière l'herbe verte à leur pieds. 

Dix-sept heures étaient passées depuis le retour du Bataillon dans l'enceinte des murs. Dans le quartier général du Bataillon, l'ambiance était pesante. 

Les soldats s'occupaient comme ils pouvaient pour encaisser la mort de leurs camarades. Au réfectoire, aux quelques soldats qui vinrent manger, Erwin dit ceci :

— Vous avez quartier libre pour la journée de demain. Nous tiendrons après le coucher du soleil une cérémonie pour nos camarades tombés au combat. Transmettez l'information aux absents. 

Le silence avait accueilli les paroles du major. Personne de ceux qui étaient présents dans la salle n'exprima quelque chose d'autre que la lassitude et la tristesse. 

Dans le coin le plus sombre de la pièce, éloigné de la lueur pâle des bougies, il fixait du regard l'endroit que venait de quitter le chef du Bataillon. 

Pourquoi est-ce qu'il trouvait encore l'envie de rester dans le Bataillon malgré tout ?  Qu'est-ce que le Major Erwin pouvait voir qu'il était incapable de voir ? 

Il reposa dans son assiette sa cuillère encore pleine de soupe. Il avait à peine touché à son repas. En même temps, comment pouvait-il espérer manger quelque chose après cet après-midi ? 

En rentrant au quartier général, mécaniquement, il était allé se doucher, se changer, et, perdu dans ses pensées, ses pas l'avaient guidé jusqu'au réfectoire. À peine une trentaine de personnes étaient là, dans la pièce, en train d'avaler ce qu'ils pouvaient.

Quand il avait porté à ses lèvres la cuillère, la soupe lui avait brulé la langue et la gorge. Ses yeux s'étaient emplis de larmes et il avait repris conscience de la réalité. 

Comme si la sensation de chaleur avait ravivé en lui ses tourments encore bien trop récents. 

Silencieusement, une larme roula sur sa joue. Une main se posa sur la sienne et il sursauta. IL avait beau vouloir rester seul, ce geste était tant empli de douceur qu'il en eut le cœur ému. 

Levant les yeux vers les nouveaux venus, il aperçut les mèches brunes folles et désordonnées d'Hansi, ainsi que la chevelure noire d'Egon.

— Hansi, Egon. Murmura t-il. 

Elle eut un pâle sourire très faible. Son teint était blafard et ses yeux rouges. Elle avait pleuré, abondamment. Et lui.. Il était dans le même état. 

Malgré tout, elle était là, et sa main posée sur la sienne le toucha plus qu'il ne l'aurait cru. 

— Livaï. Nous ne pouvions pas te laisser seul. 

Le noiraud esquissa un rictus à la fois désolé et reconnaissant. Egon s'assit en face de Livaï et Hansi s'assit à côté de lui, son bol fumant dans la main. Laissant la main de Livaï tranquille, elle saisit des deux mains son bol avant de le porter à ses lèvres. Comme pour Livaï, la chaleur raviva curieusement la douleur et quelques larmes salées se mélangèrent au liquide chaud. 

Ils étaient là, tous les trois silencieux. L'appétit coupé, bien évidemment, mais le regard vide et le cœur lourd.

Les jours à venir seraient durs. Difficiles à supporter sans leurs camarades.

Il ne fallait pas pour autant que la vie s'arrêta. Chacun se força à finir sa soupe sans échanger le moindre mot tandis que dans leurs mémoires, les souvenirs des disparus s'entremêlaient. 

Au final, ici comme en bas, c'est la même chose..

Non, frérot ! Regarde ! Ce ciel là.. Il n'a pas de fin ! 

Le ciel s'était petit à petit dégagé et la lune était apparue, brillante, accompagnée de son cortège d'étoiles scintillantes. 

Les trois observaient le ciel, les pieds dans le vide, assis sur les créneaux de la forteresse qui abritait le quartier général. 

Livaï avait tourné son regard vers eux, murmurant en son fort intérieur :

"Furlan.. Isabel.. Merci."

Hansi, elle se souvenait de chacune de leur discussion interminables, et Egon se remémorait les bêtises qu'ils avaient faites ensemble.  

Je suis certaine que c'est une connerie ce qu'on s'apprête à faire..

Arrête Elenore ! Parfois t'es rabat-joie ! C'est bon, ce ne sont que les douches des recrues, pas celles des supérieurs !

Egon s'était tourné vers elles, le sourire aux lèvres. 

Alors on se dégonfle ?!

Hansi, le regard brillant, avait tapé gentiment le bras du jeune homme. 

Hors de question ! Maintenant qu'on est là, on continue !

La brune était plus enthousiaste que jamais et Elenore soupira, laissant malgré elle un sourire fleurir sur ses lèvres. 

Bon.. Vous avez le matériel ? Demanda t-elle.

Egon tapota la poche de la large veste. 

Ouais, j'ai tout. On y va !

Le trio infernal, ce jour là, avait mis de la peinture dans les pommeaux des douches pour faire une blague à leurs camarades. Quand, le soir, tous se douchèrent, des cris indignés avaient résonné dans les baraquements.

Et ils avaient été de corvées pendant trois mois en plus d'écoper d'un nombre absolument affolant de tours de terrains supplémentaires. 

Un sourire sur les lèvres, Egon soupira doucement. Quand Hansi l'interrogea du regard, il murmura :

— Douches. 

La brune eut le même sourire. Comment oublier cette blague qui avait provoqué nombre de fous rires entre eux ? 

 Mais pour l'heure, tous trois restaient silencieux, ayant bien du mal à imaginer que Furlan, Isabel et Elenore ne seraient plus là avec eux. 

***

La journée du lendemain passa lentement, chacun des soldats survivants surmontait l'épreuve comme il pouvait. Hansi et Egon avait fini par aller donner un coup de main à l'infirmerie où étaient soignés les blessés de l'expédition. 

Les repas se firent dans la même ambiance lourde et silencieuse que la veille au soir et quand vint le soir, les membres du Bataillon, en uniforme, se rendirent sur la place à l'arrière du château. Au centre de la place de dalles blanches, un grand bûcher avait été dressé. S'élevant bien au dessus de leurs têtes, les branches et bûches qui le formaient donnaient l'impression de vouloir tutoyer la voûte céleste. 

Hansi et Egon rejoignirent Livaï qui leur adressa un regard reconnaissant. Les visages étaient sombres et renfermés pour certains et pour d'autres, encore humides de larmes. 

Le major Erwin, accompagné d'Ida Herberger et de Fynn Kott, son second, s'avança parmi eux. Devant le bûcher, il lui tourna le dos pour regarder les soldats rassemblés. 

— Nous sommes rassemblés pour saluer la mémoire de nos camarades tombés au combat hier. J'aimerai pouvoir vous dire que leurs morts ont été utiles à la réussite de la mission mais cette dernière a été un véritable fiasco. Nous sommes terriblement désavantagés face aux titans, nous le savons. L'obscurité semble nous entourer, nous étouffer. Ce soir, je ne veux pas que nous nous souvenions uniquement de leur bravoure au combat. Je voudrais que nous nous souvenions de qui ils étaient, eux. De quels étaient leur rêves, leurs espoirs. 

Il fit une légère pause avant de reprendre :

— Ils luttaient pour la survie et la libération de l'humanité. C'est en leur mémoire que nous continuerons de marcher, guidés par cet idéal. Ce soir, remercions les de ce qu'ils ont apportés. Remercions-les de nous indiquer la voie à suivre. 

Quand le major se tut, quelques-uns avaient recommencé à pleurer. 

D'un hochement de tête, Fynn fit signe à quatre soldats qui tenaient en main des torches allumées. Ils s'approchèrent du bûcher et y mirent le feu tous ensemble. 

Le bois crépita et peu à peu, les flammes enflèrent, réchauffant la cour tout entière. La fumée s'éleva vers le ciel et la lumière enveloppait les soldats présents. 

Au fur et à mesure que le bûcher brûlait, les soldats sentaient leurs cœurs s'apaiser. Même si c'était dur, la vie continuait. 

Livaï regardait le ciel, les larmes aux yeux. 

Furlan. Isabel. Adieu..

Plusieurs minutes passèrent, longues, seulement troublées par le son des branches craquant dans le feu. 

Quand le foyer commença à s'amenuiser, plusieurs d'entre eux s'en furent rejoindre leurs chambres. Il ne resta bientôt plus que le major, Ida, Fynn, Hansi, Egon, Livaï et une dizaine d'autres. 

Le bûcher s'était transformé en un tas de braises encore rougeoyantes. Les soldats encore présents regardaient pensivement le feu mourant. 

Soudain, un son étouffé parvint à leurs oreilles. Comme une chute. Tous tournèrent la tête, à temps pour voir une silhouette s'effondrer sur la pierre froide, souillant de son sang le sol blanc.

***

C'était un rayon de soleil qui l'avait réveillée, avec grand mal. Elle était coincée dans les branchages d'un arbuste, au pied d'un arbre. Avec une grimace, elle inspira douloureusement. Peut-être était-il temps de faire un état de lieux. Quels dégâts son corps avait-il subi ? 

Au vu de la douleur dans sa cage thoracique, elle aurait dit qu'elle devait avoir une ou deux côtes fêlées. Son dos.. ça allait. Sa tête ? Ah misère.. sa tête était très douloureuse. Portant une main tremblante à sa tempe et à son front, elle sentit sous ses doigts la consistance du sang séché. Elle essaya de bouger son autre main et étouffa un gémissement de douleur. 

Son poignet était tordu en un angle étrange et elle sut qu'il devait être cassé. Ses jambes ? Semblaient aller bien. 

Où était-elle ? Que c'était-il passé ? 

Peu à peu, les évènements lui revinrent en mémoire. Ils étaient en expédition extra muros. Attend.. Est-ce que cela voulait dire qu'elle était encore en dehors des murs ? Blessée en plus ? 

Se redressant contre le tronc de l'arbre, elle souffla. Avait-elle au moins une infime chance de survie ? 

De ce qu'elle voyait, il devait être la fin de l'après-midi. Mais de quel jour ? Est-ce qu'elle était restée inconsciente longtemps ? 

Se relevant difficilement, elle se mit sur ses pieds et ses jambes manquèrent de la lâcher. Sa tête lui tourna et elle soupira longuement. 

Devant elle, au-delà des fourrés, elle discerna les restes des morts du bataillon. Après quelques pas, elle arriva auprès de la tête aux cheveux bruns d'Isabel. Ses yeux, écarquillés, n'exprimaient que la plus pure des terreurs. 

Elle se retint de vomir, horrifiée. Comment une telle horreur pouvait arriver ?!

Elenore ! Elenore ! 

Elle s'était retournée vers la brune qui l'avait interpellée. 

Isabel ?! Qu'est-ce qui se passe ?!

La jeune fille souriait largement. 

Tu te souviens de ce que tu m'avais conseillé ? Par rapport à Furlan ? 

Elenore entrouvrit les lèvres, surprise. 

Oui ! Bien sûr ! Me dis pas que.. Tu lui a dit ? 

La jeune brune sourit en rougissant. 

Oui. Je lui ai dit..

Elenore sourit, ravie. 

Alors ? 

Le visage d'Isabel exprima un bonheur à peine contenu. 

Il.. c'est réciproque. 

Elenore sourit largement. Elle en était persuadée. 

Et.. Vous avez prévu quelque chose ? 

La jeune fille sourit. 

Oui.. Au retour de l'expédition, on ira en ville pour la journée et on annoncera aux autres à ce moment là. 

Elenore avait sauté au cou d'Isabel. 

Je suis si heureuse pour vous !

La soirée qui avait suivi avait été occupée à parler de l'évolution de leur relation, de leurs projets..

Savoir, là, maintenant, debout devant la tête décapitée de son amie, que tout ce dont elles avaient parlé n'aurait jamais lieu.. C'était dur. Très dur. 

Quelques larmes affluèrent à ses yeux et elle les essuya d'un revers de la manche. 

Elle devait avancer, où elle mourait ici sans rien pouvoir faire d'autre. Encore quelques pas, et cette fois, elle tomba sur le corps de Furlan. Sans partie inferieure. 

Le titan avait probablement seulement mangé la moitié de son corps. Se baissant, elle effleura des doigts la cape de Furlan avait d'en arracher un bout, sur lequel était brodé l'insigne du bataillon. 

Douloureusement, elle avança avant de tomber sur un corps sans tête qu'elle reconnut immédiatement. Ainsi, Isabel n'avait pas été mangée. Seulement décapitée.. 

Tombant à genoux à côté du cadavre, elle ne put se retenir et, pleurant amèrement, elle vomit le peu de chose qu'il restait dans son estomac. 

C'était un cauchemar. Rien de ce qui se passait ne pouvait être réel ! 

Au bout d'environ dix minutes, ses nausées se calmèrent, et, en essayant de ne pas regarder le cou tranché de la morte, elle prit sur sa tenue l'écusson. 

Se redressant, et détournant le regard de la scène macabre, elle songea :

À quelle distance du mur se trouvait-elle ? C'était déjà un miracle en soit qu'elle soit encore en vie.. 

Pour survivre, il ne lui restait qu'une solution. Courir. Heureusement pour elle, ses jambes étaient intactes.. 

Elle commença à courir, remerciant intérieurement l'instructeur Shadiz de l'avoir autant fait courir.. 

Cependant, les fois précédentes, elle n'avait pas les côtes mal en point et le poignet brisé.. 

Au bout de quelques kilomètres, elle eut l'impression qu'elle allait mourir si elle continuait de courir. Trouvant un arbre immense, elle y grimpa au prix d'immenses efforts et s'assit sur la plus haute des branches capables de soutenir son poids. 

— Misère.. je n'ai presque plus de gaz.. Et seulement deux lames de rechanges.. Je suis blessée. Si je crois un titan.. Je risque d'y rester.

Elle était embêtée. Le mur n'était plus excessivement loin, elle discernait son contour régulier à l'horizon. Mais qui lui dit qu'un titan ne viendra pas lui courir après ? 

Alors qu'elle songeait à tout cela, elle finit par s'endormir, épuisée. 

Quand elle s'éveilla à nouveau, le dos lui faisant affreusement mal à cause de la position dans laquelle elle s'était endormie, Le soleil était haut dans le ciel. Elle avait certainement dormi la nuit entière ainsi qu'une partie de la matinée. 

Est-ce que le bataillon la pensait morte ? Certainement.. Raison de plus pour essayer de tout faire pour rejoindre le mur. La prochaine expédition n'aurait lieu que dans deux ou trois mois, elle ne pouvait compter sur l'aide de personne.  

Il lui fallait repartir, et au plus vite. 

Quand elle eut examiné les environs, elle se laissa tomber au sol et recommença à courir. Pas le temps de pinailler, sa survie en dépendait. Ses muscles douloureusement meurtris la faisait souffrir et sa cage thoracique semblait vouloir se déchirer à chacune de ses respirations. Son poignet engourdi se réveilla peu à peu, à cause des vibrations de sa course et elle grimaça. Elle ne devait pas s'arrêter. 

Deux ou trois heures passèrent ainsi. Quand elle longea une large bande boisée, elle se crispa. Qui sait si un titan n'allait pas surgir pour la dévorer ? 

Accélérant légèrement l'allure, essayant en vain de rendre son souffle moins douloureux, elle continua sa route. 

Soudain, alors qu'elle se pensait hors d'atteinte, une ombre passa à l'extrémité de sa vision périphérique. En un réflexe inouï, elle se décala sur la droite, et, faisant fi de la douleur intense de son poignet, planta ses grappins dans la nuque du titan avant de se hisser sur lui à l'aide du gaz. 

Il n'était pas beau. Hideux même. Ses grands yeux noirs fixaient le ciel en louchant, sa tête disproportionnée ne ressemblait à rien, ses bras minuscules étaient ridicules. Ses longs cheveux noirs avait la texture de la paille.

Au moment où elle levait ses lames, Elenore eut soudain une idée. Une idée complètement folle, certes, mais une idée tout de même. 

Puisqu'il avait des si petits bras, il était bien incapable de l'attraper. Ses mains ne pouvaient pas atteindre sa nuque. 

Avec un sourire, Elenore enroula un de ses câbles autour du cou du titan. Saisissant deux mèches de ses cheveux à pleines mains, elle tenta de le diriger. 

Le titan n'était visiblement pas d'accord avec cette idée puisqu'il tenta de se débarrasser d'elle pendant plus de deux heures. Mais elle tenait bon et le titan, vaincu, finit par se mettre à courir vers le mur, à son plus grand ravissement. 

Le mur approchait, et avec lui, la fin de l'après-midi. Le soleil se coucherait bientôt et Elenore devait se rapprocher le plus possible du mur pour espérer pouvoir y accrocher son grappin libre. 

Plus qu'une centaine de mètres. Plus qu'une cinquantaine. 

Sur le sommet du mur, des soldats de la garnison remarquèrent ce titan seul, courant vers le mur, l'air complètement fou. 

— Un titan de six mètre, seul, à cinquante mètres ! Préparez les canons ! Cria Hannes, perché sur le mur. 

Mais alors qu'il disait cela, il aperçut une frêle silhouette sur l'épaule du titan. Un animal ? un humain ?! Non, ça c'était tout bonnement impossible. 

Il stoppa l'ordre de tir et attendit que le titan se rapproche. Effectivement, sur sa nuque, une jeune femme, arborant l'uniforme et le symbole du Bataillon tenait fermement deux mèches de cheveux, ordonnant par les gestes au titan de se rapprocher du mur. 

Il était stupéfait.. jamais, de toute sa vie, il n'eut cru voir quelque chose de similaire.. 

Le titan s'approchait toujours au point qu'il finit par entrer violemment en collision avec le mur. 

À cet instant, elle sauta, agrippant son grappin libre sur le mur avant d'utiliser du gaz pour trancher proprement la nuque du titan étourdi.

Au moment où le cadavre du titan commença à fumer, elle voulut se hisser le long du mur vers le sommet, mais réalisa à cet instant que ses réserves de gaz étaient à plat. 

Soupirant, elle contracta ses muscles pour se hisser à la force de ses bras jusqu'au niveau où son grappin était accroché. 

Rien que cette action lui coûta tant d'efforts.. Elle était épuisée. Un liquide chaud et poisseux commença à couler le long de son visage. Visiblement, sous l'effort, sa plaie à la tête s'était rouverte. 

Comment faire pour monter maintenant ? Son poignet cassé était tellement douloureux qu'elle ne pouvait pas l'utiliser pour quoi que se soit. Mais elle n'avait pas le choix.

À plusieurs centaines de mètre d'elle, sur le mur, Hannes regardait cette jeune femme grimper jusqu'à son grappin et s'arrêter, le temps de réfléchir. 

Dégainant à nouveau une de ses lames, elle l'enfonça dans le mur, profondément, au-dessus de sa tête. Puis, à l'aide de sa main libre, elle s'y hissa avant de planter l'autre lame un peu plus haut. Elle se tenait à une lame en même temps qu'elle plantait l'autre. 

Elle ne pouvait pas lâcher ses lames qui étaient sa seule chance de salut mais d'un autre côté, chaque fois qu'elle serrait sa main, l'acier entaillait sa chair. 

À un moment, à cause du sang qui lui tombait sur les yeux et du sang qui empoissait ses main, elle faillit lâcher prise et sa main droite tenta désespérément d'agripper le mur. Ses doigts, complètement écorchés aux extrémités, se mirent bien vite à saigner de plus belle. 

Mais elle avait réussi, elle était toujours accrochée au mur, plus qu'à une vingtaine de mètres du sommet. 

En rigolant intérieurement, elle songea qu'il fallait suggérer à l'instructeur Shadiz l'exercice escalade du mur en cas de panne de gaz pour entraîner ses recrues. 

Un sourire passa sur ses lèvres alors qu'un gémissement lui échappait. Elle avait si mal. Et il lui restait encore une distance à parcourir qui lui paraissait interminable. 

Prenant son courage à deux mains, elle inspira, essayant d'ignorer la douleur qui enflammait son corps tout entier. 

Mètre après mètre, elle montait lentement et chacun de ses gestes la faisait souffrir davantage. 

Elle n'y voyait plus rien du tout, mais continuait à grimper, son corps tout entier traversé par une énergie désespérée. Quand, au bout de ce qu'il lui parut une éternité, elle sentit sous sa main la surface plate du sommet du mur, elle soupira de soulagement. Encore un effort et elle s'effondra sur le sommet du mur, respirant profondément. 

Bon sang.. J'ai réussi, je suis en vie. 

Elle n'avait maintenant plus qu'un objectif. Rejoindre le quartier général et assurer ses amis de sa survie. Maintenant qu'elle se sentait en sécurité, une faiblesse semblait guetter le moindre moment de relâchement mais sa hâte de rejoindre les autres était bien plus forte. 

Essuyant ses yeux, elle put enfin y voir davantage et vit une silhouette arriver vers elle.

Un soldat un peu plus âgé qu'elle s'approcha, lui posant mille questions. Elle n'avait pas la force d'y répondre. Chose curieuse, il ne portait pas son équipement tridimensionnel.

— Je vous en prie.. Aidez-moi à rejoindre le sol, je vous expliquerai tout demain ou après demain, pour l'heure, j'ai quelque chose d'urgent à faire. 

L'hommes sembla comprendre et acquiesça. 

— Faites monter la plateforme du monte charge ! Demanda t-il et quand ils furent tous les deux dans la plateforme qui descendait vers le sol, il demanda :

— Comment vous appelez-vous ? Puis-je au moins savoir votre nom ? 

— Elenore Brooke. 

Il sourit. 

— C'est un honneur de rencontrer la première dompteuse de titan. 

Elenore esquissa un faible sourire.  

Quand la plateforme eut touché le sol, le soleil venait de disparaître à l'horizon et elle se mit à courir pour rejoindre le quartier général du bataillon. 

— Attendez ! Vous êtes blessée ! Cria Hannes à son encontre.

— Je suis pressée, je serais soignée là-bas ! 

Ses forces s'amenuisait et elle était véritablement épuisée. Quand, au bout d'une heure et demie de course supplémentaire, elle arriva au château, elle ne vit personne dans la cour principale. 

Etrange.. Songea t-elle. Où sont-ils tous ? Est-ce qu'ils sont tous morts ? 

Si elle eut soudain peur en pensant ça, elle se rassura. 

Mais non.. Il y a des chevaux dans les écuries.. Quelques lumières dans les bâtiments.. il  y a des gens en vie ici, j'en suis certaine. 

Entendant le bruit crépitant d'un feu qui se meurt, elle fit quelques pas pour aller vers la cour arrière. 

Chaque mouvement était une torture. Le sang avait recommencé à couler à flots et elle n'y voyait pas grand chose. Elle put apercevoir les silhouettes de Livaï, d'Hansi et d'Egon avant de sentir sa tête l'élancer. 

Elle avait perdu beaucoup de sang. Elle était épuisée et maintenant qu'elle était en sécurité, toutes ses forces l'abandonnaient. 

Sombrant dans l'inconscience, elle s'effondra au sol. 

***

Les soldats présents se tournèrent vers cette soldate dont le sang salissait la pierre blanche. La première à réagir fut Hansi. 

— Elenore ! 

Elle se précipita vers elle et s'agenouilla à ses côtés. 

Egon, Livaï, Erwin et Fynn s'approchèrent également, pour voir Hansi pencher son oreille vers le visage d'Elenore. 

Un faible souffle saccadé vint chatouiller sa peau et la brune releva la tête, profondément inquiète mais infiniment soulagée. 

— Elle respire encore. Elle est en vie. 

Le silence accueillit ses paroles avant que finalement, Fynn ne finisse par prendre dans ses bras la blessée avant de courir le plus vite possible à l'infirmerie où elle pourrait être soignée.  

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