Rouge et noire ( Histoire d'halloween non confinée bien sympathique)

Alors que l'obscurité était tombée dans les rues, les monstres s'étaient déversés à sa suite. Ils avaient envahi la ville et ce, selon un ordre très précis. Les princes et les chevalières, mignons en apparence mais prêts à tout pour obtenir ce qu'ils désiraient, étaient apparus les premiers. Ils furent suivis de près par toutes sortes d'animaux, aussi bien réels qu'imaginaires. Puis, pour terminer ce cortège funèbre, se tenaient à l'arrière ceux qui avaient le goût du sang. Des sorcières, des démons, des anges déchus, des criminelles, des bandits et des créatures de cauchemars. Tous, le visage balafré d'hémoglobine et les bras marqués de blessures plus affreuses les unes que les autres, faisaient peur à voir.

Le moindre de leur pas résonnait dans la ruelle. Le bruit qui en résultait faisait fuir quiconque avait le malheur de se mettre en travers de leur chemin.

Alors que le brouillard était leur terrain de jeu préféré, il n'y avait plus aucun chat dans la rue. Même eux avaient peur des monstres. Les villageois, pour leur part, s'étaient enfermés chez eux, observant ces êtres nés des entrailles même des enfers à l'abri derrière leurs fenêtres.

Les lampadaires eux aussi manifestaient leur crainte : leur lumière vacillait. Même si honnêtement, il y avait de fortes chances que cela ne soit lié qu'à un simple problème technique et non pas aux pouvoirs de forces obscures.

Après tout, rien de cette nuit d'horreur ne l'était vraiment. Les monstres qui donnaient la chair de poule ? Les dragons mangeur d'Hommes ? Les sorcières aux pouvoirs datant de l'avènement du monde ? Ce n'était que des enfants qui s'amusaient en ce soir d'Halloween. Il n'y avait ni flamme, ni crocs, ni potion, ni balai, ni lame qui avait le réel pouvoir de faire mal.

Enfin... à part une.

Car il y avait bien un couteau. Un couteau, à la lame aiguisée, prêt à tuer, soigneusement caché sous une longue et épaisse cape rouge. Les bottes elles-aussi étaient rouges, tout comme le vernis qui colorait ses ongles. Ainsi vêtue, l'adolescente ne serait pas passée inaperçue en temps normal. Elle aurait même attiré tous les regards. Ce soir cependant, se fondant dans la masse, sa tenue n'avait plus rien d'inhabituelle ou de dérangeant, elle convenait même parfaitement aux circonstances.

Elle portait une cape rouge. Rouge comme le sang. Aussi rouge que le sang qu'elle s'apprêtait à faire couler en cette douce nuit d'automne.

Laissant les pans de sa cape noire virevolter derrière lui, le jeune homme aux yeux bleus fut le premier à sortir dans la rue. Armé de son seau à bonbons, il se retourna, observant un instant la maison de son meilleur ami. Autrement dit, la plus décorée de tout le village. Et alors que le lycéen était perdu dans la contemplation d'une citrouille tout à fait effrayante, des bras lui encerclèrent soudain la taille par l'arrière.

Il se trouva momentanément incapable de respirer.

Il n'était plus capable de réfléchir. Il n'y avait plus qu'une seule pensée qui tournait en boucle dans sa tête : allait-il mourir ce soir ?

Puis, tout aussi brusquement qu'il l'avait attaqué, son assaillant se décida à le relâcher. Il fallut à l'adolescent moins d'une seconde pour que les rires lui parviennent. Il se retourna et ses amis firent leur entrée dans son champ de vision. Ils étaient tous tordus de rire. Son meilleur ami semblait même au bord de l'asphyxie. Il fallut à toute cette petite troupe plusieurs minutes pour se calmer et pour permettre à l'adolescent aux bouclettes de réaliser pleinement qu'il était encore en vie. Une fois que tout le petit groupe fut en état de respirer normalement, ils se joignirent à la foule obscure qui avait assombrit les rues.

L'adolescent blond, vêtu d'une longue cape noire et avec ses ongles vernis de la même teinte, prit la tête du groupe. Barbouillé de faux sang, il fit des grimaces et joua des mauvais tours. Il sonna aux maisons, lança des sorts et récolta des bonbons.

Alors que la joyeuse bande de monstres poursuivait sa quête de sucrerie, que les membres du club théâtre s'esclaffaient en se remémorant la farce et la réaction de l'adolescent, que le principal intéressé faisait mine d'avoir tout oublié, le ciel s'assombrit soudain.

Et minuit sonna.

Les adolescents n'avaient pas arrêté de bavarder. Ils n'avaient pas non plus cessé de rire. Ces éclats étaient d'ailleurs si fort qu'ils auraient pu réveiller les morts. Mais en vérité, il y avait tant de bruit qu'ils étaient quasiment silencieux. Ils se perdaient dans l'agitation qui régnait dans la rue malgré l'heure tardive.

Personne n'aurait pu capter ce bruit tant celle qui le produisit était agile et rapide. Personne n'aurait pu entendre la lame quitter sa cachette. Personne n'aurait pu apercevoir le moment, précisément, où le couteau se planta dans la chair.

Les capes rouge et noire se croisèrent.

Il y avait toujours autant d'agitation dans la rue. Les lampadaires avaient toujours autant de mal à rester allumés. La Lune brillait toujours aussi fort. La nuit était toujours aussi noire.

L'hémoglobine brûlante remplaça bien vite le faux sang.

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