La lune, les étoiles et les rêves
Depuis toujours, il y avait la lune.
Depuis toujours, il y avait les étoiles.
Depuis toujours, il y avait les rêves.
Depuis toujours, il y avait la lune, les étoiles, les rêves.
Depuis toujours, il était certain qu'il y avait la lune, les étoiles et les rêves, ses rêves à lui.
Le garçon avait toujours aimé la lune, les étoiles et les rêves. Il ne savait plus d'où lui venait cette passion, cet amour pour la lune, les étoiles et les rêves, mais il n'avait jamais cessé de les aimer.
Cela avait peut-être commencé cette nuit là.
Cette nuit, commune à tant d'autres. Cette nuit, l'été chaud et caniculaire. Cette nuit, fraîche et douce. Cette nuit, où sa mère lui avait demandé d'aller poster un courrier à la boîte aux lettres.
Il était sorti par la porte de la cave, avant de rejoindre la route, puis après l'avoir traversé, le trottoir. Le ciel était sombre du côté de sa maison, tandis que de l'autre il était toujours bleu clair. Les fleurs fermées pour la nuitée se balançaient tendrement et les feuilles des arbres dansaient leur habituel ballet.
Il marchait sur la ligne grise parsemée de trous à de nombreux endroits et ce depuis quelques années déjà. Le sol n'était plus constitué que de gravillons par intermittence, ces derniers faisaient un drôle de bruit lorsque ses bottes noires les écrasaient.
Les cailloux craquaient et les grillons chantaient. Les insectes cachés par l'herbe et rendus invisibles par la nuit jouaient leur éternel concerto.
Mais mis à part les pas et la symphonie des créatures bienveillantes de l'obscurité, il n'y avait pas d'autre son. Pas d'autre présence. Personne n'était présent pour les importuner, ni pour rompre leur lien, ni pour ressentir la magie de l'instant ne lui appartenant pas. Personne, il n'y avait que la lune et lui.
L'enfant était presque arrivé devant la boîte aux lettres. Bleue, tout comme les fleurs du jardin de tatie Martine. Il y a toujours plein de fleurs dans son immense jardin, plein de fleurs bleues.
Il avance encore, puis soudain, il s'arrête. Au milieu du village, il s'avance sur la route, toujours vide à cette heure trop tardive, et l'observe.
L'astre est perché tout là-haut. Elle est l'unique, se tenant en maîtresse de cette horizon infini, sans limites, sans nuages. Sa majesté la reine est blanche, au milieu d'un océan de sombre bleu, vide à cette heure trop tardive.
Si blanche qu'elle lui rappelle toutes les vacances passées chez tatie Martine et lui fait songer aux prochaines. Les étés là-bas, les nuits dans la piscine, les aurores dans le jardin, à faire les fous, à rêver le monde et à ne se soucier de rien. Il y avait les assiettes blanches, toujours les mêmes, au petit déjeuner, à midi, au goûter, au dîner. Elles étaient créatrices d'un grand nombre de souvenirs.
Les assiettes blanches, les souvenirs, les vacances chez tatie Martine.
D'ailleurs, la lettre que l'enfant venait de déposer à l'instant même dans la boîte aux lettres lui était destinée. Tatie adorait les lettres, et le garçon adorait tatie.
Il fit demi tour. Un instant plus tard, il décida de ralentir son pas. Il voulait écouter le silence de la lune et profiter de la douce brise de cette nuit d'été. Un sourire se dessina sur ses lèvres. Celui-ci eut dû mal à s'en aller.
Mais il y avait cette autre nuit aussi. Cette soirée près du plan d'eau, à attendre le feu d'artifices.
Le garçon était assis dans l'herbe sèche, sur une couverture orange. Des proches l'accompagnaient. Il avait un sac à dos à fleurs, une chemise à carreaux et des étoiles plein les yeux. Tout autour de lui, l'herbe était recouverte de couvertures et de personnes. Il n'y avait plus un seul espace de libre, une foule humaine avait pris possession du lieu.
Emplissant l'air, il y avait du jazz et le bruit continu des conversations. Certains se plaignaient de ceux qui se tenaient debout devant eux, leur cachant le lac, et donc, le feu d'artifices à venir.
D'autres, dont les voisins de derrière, débattaient des activités prévues durant la semaine, le sujet le plus évoqué étant les courses du lendemain au supermarché.
Le groupe d'adolescents à peu plus à droite parlaient fort et riaient. Ils se remémoraient des souvenirs communs qui semblaient très joyeux. Tout comme le garçon avait l'habitude de le faire lors des vacances chez tatie Martine. Il adorait les vacances chez tatie et il adorait les soirées passées à se créer des souvenirs au milieu des fleurs bleues de son jardin.
Les derniers voisins dont le garçon arrivait à percevoir leur conversation était ceux tout de suite à sa droite. C'était un couple. Celui-ci était muré dans le silence. Ils n'avaient pas parlé une seule fois depuis l'arrivé des voisins à la couverture orange. Peut-être étaient-ils furieux contre ces imbéciles toujours debout mais se contentaient de simplement le penser, peut-être songeaient t'ils à leur liste de courses ou peut-être se rappelaient t'ils des souvenirs heureux.
Ils étaient bloqués dans le silence et le garçon l'était aussi, mais pas pour la même raison. Il était en pleine observation de la lune.
Peu après, le premier feu fut tiré, mais le garçon n'en vu pas grand-chose. Les personnes étaient toujours debout. Quelques adolescents ont commencé à crier.
« Assis ! »
Un instant plus tard, d'autres personnes se joignaient au mouvement.
« Assis ! »
La foule n'était toujours pas assise. Une dame s'est retournée, un air faussement indigné déformant son visage, refusant visiblement d'accepter qu'elle était la source d'une partie des indignations des centaines des personnes assises ici depuis des heures. D'autres feux sont élevés dans le ciel et la foule restait immobile. Soudain, d'autres personnes se sont ajoutées, scandant de plus en plus fort l'exact même mot.
« Assis ! Assis ! Assis ! »
Les occupants de la couverture orange et même le garçon s'étaient finalement joints au mouvement. Les personnes battaient en retraite et s'asseyaient. La dame, elle, se tenait toujours immobile, seule encore debout au combat. Enfin, après quelques autres cris, elle termina par s'asseoir.
Les lumières, la musique, l'eau, la lune, la nuit. Puis, le feu d'artifice a réellement commencé.
Voilà, c'était de ces moments là que lui venait sa passion, son amour pour la lune. Ça avait commencé ces nuits là.
Depuis toujours, il y avait la lune.
Il y avait son amour pour la lune et aussi son amour pour les étoiles. Celui-ci avait débuté une autre nuit encore.
Cela avait eu lieu lors d'une nuit froide. L'adolescent était sorti sur le pas de la porte d'entrée, une légère couche de neige maculait le sol. Son souffle chaud formait de la buée devant son visage.
La température était très basse, mais le ciel était magnifique. En cette nuit, le grand voile bleu était parsemés d'étoiles et le garçon n'aurait loupé ce spectacle pour rien au monde. Les étoiles scintillaient de milles feux, et ce soir, le garçon ne voyait plus qu'elles.
Le garçon avait besoin de prendre l'air, de s'échapper durant un temps. Toujours dans ses études secondaires, il venait d'entrer au lycée au début de l'année et tout ne se passait pas merveilleusement bien. Il n'aimait pas tellement la classe, ni ses camarades de classes d'ailleurs. L'adolescent passait tout son temps libre à lire des magazines sur l'espace. Les autres personnes de sa classe ne comprenaient en rien sa passion et elles avaient décidé de ne pas lui adresser la parole.
Il ne sentait pas très bien et avait décidé de profiter de cette nuit de décembre pour chercher conseil au près de la lune. Comme l'adolescent avait pris l'habitude le faire depuis de nombreuses années déjà.
Cette nuit de décembre, il avait trouvé les étoiles et la force de s'accrocher.
Les jours suivants, il s'était décidé à faire connaissance d'une petit groupe de personnes. Les semaines suivantes, il discutait et riait avec eux. Les mois suivants, ils prenaient leur déjeuner ensemble et ne passaient jamais un moment de libre sans se voir. De plus, il pouvait sans soucis poursuivre sa passion de l'espace.
Ces personnes, elles étaient devenues les étoiles de sa vie. Comme les étoiles, elles étaient venues éclairer son quotidien dans une période très sombre de son existence. Ces personnes brillaient et rendaient le garçon heureux.
Mais ce n'étaient ces amis les astres les plus étincelants.
Grâce à une revue scientifique, le garçon savait que lorsqu'une étoile s'éteignait, elle explosait, mais l'humain ne le savait pas, car la lumière des étoiles mettait des années lumière à nous parvenir. L'étoile continuait à briller de milles feux et apparaissait encore dans le ciel, alors qu'elle était déjà morte.
C'est de cette manière qu'un jour, alors qu'il continuait à envoyer des lettres à tatie Martine - l'étoile la plus brillante de son existence - mais restant toujours sans réponse, qu'il appris qu'elle avait explosé.
Depuis, lorsqu'il observait le ciel durant la nuit, il repérait toujours d'abord celle qui était la plus étincelante. Cet astre, c'était la lumière de tatie Martine, et si effectivement, l'étoile s'arrêterait de briller seulement après bien des années lumières, le garçon en était certain, tatie serait toujours présente pour veiller sur lui.
C'était de cette manière que lui était venu son amour pour les étoiles, ça avait commencé cette nuit de décembre.
Depuis toujours, il y avait les étoiles.
Il y avait son amour pour la lune, son amour pour les étoiles et son amour pour les rêves. Celui-ci avait débuté cette première nuit à observer la lune, lors de la deuxième aussi. Lors de cette nuit de décembre à regarder les étoiles, ce jour où il avait arrêté de marcher jusqu'à la boîte aux lettres bleue, ce jour depuis lequel il n'avait jamais cessé d'admirer cette étoile si lumineuse. Lors de la lecture de toutes ces revues et magazines sur l'espace, son brevet de pilote, ses études sur l'aéronautique, la découverte du projet Apollo, sa désignation en tant que commandant de la mission Apollo 8.
Depuis toujours, il y avait les rêves.
L'homme avait toujours aimé la lune, les étoiles et les rêves. Cette passion, cet amour pour la lune, les étoiles et les rêves, tout cela avait débuté à ces moments mais à beaucoup d'autres aussi. Mais l'enfant, le garçon, puis l'homme en était certain, il n'avait jamais cessé d'aimer la lune, les étoiles et les rêves. Il n'avait jamais cessé de croire en ses rêves.
Tout autour de lui, du bleu, partout, du bleu, encore et encore. Il n'y avait pas de mot assez puissant pour décrire le spectacle qui s'offrait à lui, il y avait seulement des émotions et des sentiments.
Enfin, il réalisait son rêve : aller sur la lune. Il y était ! Voilà qu'après toutes ces nuits à regarder la lune, il s'y trouvait ! Neil Armstrong allait devenir le premier Homme à marcher la lune !
Il abandonna l'espace du regard quelques instants et posa son pied sur la première marche. Il descendait tout doucement. Il avait pleinement conscience de l'instant et de ce qu'il représentait pour l'humanité toute entière.
Puis, enfin, la dernière marche. Il allait le faire ! Il allait faire un grand pas pour l'humanité ! Il allait changer le monde ! Il s'apprêtait à poser le pied sur la lune !
Dans trois, deux...
« Mince ! Je crois avoir oublié d'éteindre la lumière de la salle de bain ! La lune peut bien attendre. On rentre ? »
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