Chapitre 16
« Le voyage est le meilleur moyen de se perdre et de se retrouver en même temps » - Brenna Smith
Point de vue Elio
Il était encore tôt, le soleil pointait à peine le bout de son nez. Pourtant la maison était déjà plongée dans une agitation sans nom. Isaac qui faisait toujours ses sacs aux derniers moments nous avait mis en retard, et ma mère avait oublié de nous faire des sandwichs pour la route, elle était donc en pleine préparation. Mon père que l'on avait réveillé, nous regarda avec agacement en nous pressant et en criant à travers la maison.
— T'as pris ton maillot de bain ? criai-je depuis la salle de bain.
— Un maillot de bain ? En plein mois d'octobre ? T'as envie que je chope une pneumonie ? répondit-il avec perplexité.
— Il y a un jacuzzi, patate, et bouge-toi, on est en retard, m'exclamai-je.
Juste après avoir fini ma phrase, un bruit de klaxon se fit entendre, signe que les autres nous attendaient dehors. Je venais de finir d'enfiler mes habits, j'attrapai mon sac déjà prêt en pressant une fois de plus Isaac qui n'était pas assez rapide à mon goût. J'agrippai le sac de provision que nous avait préparé ma mère et enfilai mes chaussures quand Isaac se décida enfin à dévaler les escaliers.
Nous sortîmes au bout du troisième coup de klaxon qui devait avoir réveillé tout le quartier à cette heure matinale. Ayden était au volant du combi bleu pastel de son oncle qui nous le prêtait tous les ans, ce qui était pratique puisque nous étions six. A côté de lui se trouvait Nino, en tant que copilote. Livia et Amy sa meilleure amie d'enfance se partageaient la banquette arrière, il restait donc les places juste derrière pour Isaac et moi.
Isaac plaça nos sacs dans le coffre, sauf celui contenant les collations, et nous montâmes dans la voiture. Il y avait environ cinq heures de trajet jusqu'au chalet, Ayden se mis en route dès que tout le monde fut attaché. Nous saluâmes le groupe et le début de l'aventure commença.
— Salut, moi c'est Amy, je suis une amie de Livia, je crois pas qu'on se connaisse, se présenta-t-elle à Isaac.
Elle s'était retournée dans son siège et tendis la main à Isaac, qui la saisit. C'était une fille plutôt petite de taille, un joli carré brun et des yeux légèrement bridés, dus à ses origines japonaises. Elle était plutôt jolie, des yeux gris rieurs et toujours de bonne humeur, je la préférais à Livia mais nous n'avions pas l'occasion de nous voir beaucoup car elle était dans un lycée privé.
— Moi c'est Isaac, je suis français et je suis là pour un an et j'habite chez Elio, annonça-t-il en souriant.
Elle se tourna vers moi et m'ébouriffa les cheveux en riant.
— Oh mon petit Elio, ça fait longtemps. Alors comme ça on héberge un joli français ? rigola-t-elle en me faisant un clin d'œil.
Cette remarque me fit rougir, Amy adorait me taquiner sur les garçons et Livia avait dû lui expliquer la petite guerre entre nous. Après quoi, elle se remit sur son siège. Le silence flottait dans le combi, tout le monde était à la fois endormi et excité de partir pour une semaine.
Il y avait un fond de musique que Nino augmenta, les filles se mirent à chanter à tue-tête, Riptide de Vance Joy et d'autres titres comme What's Up ? des 4 Non Blondes, ce qui me fit sourire. Les garçons à l'avant suivirent les filles rapidement et le van se transforma rapidement en un karaoké. La différence de température entre l'extérieur et l'intérieur créa de la buée sur les vitres, je me tournai vers Isaac qui me regardait amuser. Je haussai un sourcil d'un air interrogateur et il pencha la tête, ce qui lui donnait l'air d'un chiot.
Sa main était à plat sur la banquette et j'avançai la mienne pour l'approcher. Notre proximité me manquait, depuis notre rapprochement nocturne, Isaac n'était plus très tactile. Nos petits doigts se chevauchaient et il jeta un regard attendri sur notre contact. Dans un moment de courage, je la saisis et l'attirais à moi. Il avait l'air surpris mais il ne broncha pas et je passais le reste de la route ma tête contre son épaule, à faire des dessins sur les vitres embuées, à dormir et parfois à chantonner.
Le paysage montagneux d'Aspen commençait à se dessiner, ce qui était une bonne nouvelle car tout le monde commençait à s'agiter. Mais on avait également faim, alors nous nous arrêtâmes dans un diner typiquement américain. Isaac avait l'air enchanté du cadre de l'endroit, il regardait partout. Intéressé, il prit même quelques photos avec son téléphone.
— Si je savais pas qu'il était français, j'aurais directement compris que c'est un touriste, regarde le faire ses petites photos, je parie qu'il va te demander de le prendre avec son burger, ricana Amy.
Sa remarque me fit sourire, nous nous assîmes à une table et passâmes nos commandes.
— Du coup, on fait comment pour les chambres ? Vu qu'on est six et qu'il y a seulement trois chambres, demanda Amy en jetant un regard rempli de sous-entendus à Ayden.
Isaac me lança un regard interrogateur qui devait être lié à la tension particulière qui se dégageait entre ces deux-là. Ils avaient eu quelques aventures nocturnes tous les deux, ils remettaient souvent ça lors de nos voyages mais ça n'avait jamais été très sérieux.
— Je propose une chambre avec Nino et Elio, Amy et Ayden dans une autre chambre et moi je dormirais avec Isaac, proposa Livia d'un air innocent.
Cette attitude m'énerva, d'où elle se permettait de choisir avec qui je pouvais dormir ? Isaac ne fit aucune remarque, il n'avait pas l'air de rejeter la proposition de Livia, et je ne comprenais pas son attitude. Je pensais que l'incident à la soirée avait été initié par Livia et que par conséquent Isaac n'était pas tombé dans ses filets, mais son air nonchalant me fit douter.
— Je vois pas pourquoi tu pourrais choisir les chambres, lâchai-je d'un ton froid.
Tous les regards se tournèrent vers moi, je n'avais pas l'habitude d'avoir ce genre de comportement, j'avais même plutôt tendance à m'écraser mais j'étais irrité. Ayden me lança un regard amusé avec un sourire en coin.
— Moi personnellement, ça me va, susurra Amy.
Elle avait fixé Ayden droit dans les yeux en se mordant la lèvre, si c'est deux-là ne remettaient pas le couvert, ce serait un miracle. Livia avait l'air de jubiler de cette approbation, j'interrogeai Nino du regard et il haussa les épaules.
— Qu'est-ce que tu en dis Isaac ? interrogea Livia.
Ce dernier me lança un regard incertain puis regarda Livia avant de s'enfoncer dans son siège.
— Je suppose que c'est bon si ça convient à tout le monde, répondit-il.
Il avait lâché ça d'un air détaché, je n'en croyais pas mes yeux, ni mes oreilles. Je le fixai d'un air étonné, son attitude me blessait, j'imaginai que nous allions nous retrouver dans la même chambre et peut-être dans le même lit mais ce n'était apparemment pas dans ses plans.
Les autres continuèrent de parler de l'organisation mais je n'écoutais plus, j'étais vexé et déçu. Je ne savais plus quoi penser de son attitude. Il passait du chaud au froid, dansait d'un pied sur l'autre et cela commençait à me peser lourd sur le cœur. Je commençais à avoir besoin de réponses. J'étais décidé à lui laisser de l'espace et du temps tout en étant près de lui, mais cela ne pourrait pas continuer éternellement.
Perdu dans mes pensées, je ne me rendis pas compte que nous étions arrivés au chalet, tout le monde bougeait et était content d'être enfin arrivé. Pourtant, j'avais du mal à me réjouir, je ne savais pas si j'allais pouvoir supporter qu'Isaac et Livia dorment ensemble pendant une semaine. Tout le monde ramenait ses affaires à l'intérieur et toute cette agitation me donnait le tournis. Je sortis sur la terrasse qui était assez spacieuse. Il y avait un jacuzzi extérieur ainsi qu'un coin avec une table et des chaises pour manger dehors l'été. L'air était frais mais cela ne me dérangeait pas, je m'assis sur l'une des chaises en regardant le magnifique paysage qui s'offrait à moi. La terrasse donnait sur un lac, avec des chemins de terre, des arbres, et les montagnes enneigées. J'étais en pleine réflexion sur la température de l'eau du lac lorsque la baie vitrée s'ouvrit sur Isaac qui sortit sur la terrasse.
— Quelque chose te contrarie ? demanda-t-il doucement en s'asseyant à côté de moi.
Il fixait lui aussi l'horizon. Il avait un air un peu contrit, j'avais envie de rire face à sa question.
— A ton avis ? répondis-je d'un air contrarié.
Il me jeta un regard étonné, j'avais répondu un peu plus sèchement que je ne le voulais mais toute cette situation commençait à m'agacer.
— Qu'est-ce que tu ressens pour elle ? continuai-je avant qu'il ait eu le temps de répondre.
— Pourquoi tu me demande ça si soudainement ? répliqua-t-il d'un air perdu.
— Réponds-moi.
Un silence s'abattit entre nous. Isaac me regardait avec surprise, puis il tourna son regard vers l'horizon pendant un certain temps. Je supposai qu'il réfléchissait à ma question. Mais je n'aimais pas ce silence gênant.
— Je ne la connais pas depuis longtemps, elle est gentille et je sais que je lui plais, finit-il par lâcher.
— Et elle ? Elle te plait ?
J'avais du mal à contenir mes émotions, ma voix tremblait légèrement, je n'aimais pas sa réponse. J'avais une impression de déjà-vu qui me laissa un gout amer sur la langue. Il y avait eu une histoire de garçon avec Livia mais, c'était il y a un moment, j'avais fini par lui pardonner. Je ne voulais pas gâcher une amitié à cause d'une amourette et le temps avait fait son œuvre. Je pensais que c'était derrière nous. Mais je ne lui pardonnerais pas une deuxième fois. Surtout avec Isaac, il va habiter chez moi jusqu'à la fin de l'année. La situation serait vraiment gênante s'il me repoussait pour se mettre avec elle. Ce que je n'osais pas dire, c'est qu'Isaac me plaisait bien plus que ce que je voulais l'avouer. Et la chute ne serait que plus douloureuse.
— Pourquoi tu me poses la question ? T'es jaloux ? plaisanta-t-il.
— Non, j'en ai juste marre de me faire mener en bateau. Si elle te plait, dis-le. Ne me fait pas espérer alors que tu sais ce que je ressens pour toi, Isaac, m'écriai-je.
J'avais haussé le ton, je ne pouvais pas garder ça pour moi et sa plaisanterie avait défait le peu de retenue que j'essayais de garder. Les barrières qui retenaient mes larmes étaient sur le point de lâcher, et j'avais une peur bleue de sa réaction.
—Je veux que tu me dises ce que tu veux, sans détour, juste la vérité, ajoutai-je.
L'ambiance était passée d'un peu gênante à lourde, son expression était fermée, il avait la tête baissée, sa jambe s'agitait et il triturait son pull. Il avait l'air dans une réflexion intense et compliquée, j'essayais de me concentrer sur ma respiration pour ne pas craquer.
— Honnêtement, j'en sais rien, j'ai besoin de temps, je ne sais moi-même pas ce que je ressens alors je ne peux pas te donner de réponses pour l'instant.
Il avait relevé la tête et m'avait déballé ça en fixant le vide.
— Mais moi, j'en peux plus de cette situation, tu joues avec mes nerfs Isaac, je t'ai laissé du temps mais là j'étouffe, j'étouffe de ne pas pouvoir te toucher et t'embrasser comme je veux, j'étouffe de ne rien pouvoir dire quand Livia te tourne autour. J'étouffe de garder ça pour moi à longueur de temps.
Je m'étais levé de ma chaise en criant ce que j'avais à dire. Les barrières brisées, des larmes dévalèrent mes joues et je m'en voulais d'être aussi faible. Je ne voulais pas lui mettre la pression mais j'avais besoin de lui dire ce que je ressentais. J'avais peur de voir sa réaction. Je fixai mes pieds en en attendant une de sa part, mes mains tremblaient légèrement et ma vue était trouble. J'entendis la chaise qui crissa contre le sol, signe qu'il s'était mis debout, et ses pieds apparurent dans mon champ de vision. Je sentis ses mains se placer sur mes joues et relever ma tête, il appuya son front contre le mien. Il me fixait d'un regard profond et peiné. Il essuya mes larmes avec ses pouces.
— Je suis désolé mais c'est la première fois qu'un garçon m'avoue que je lui plais, j'ai besoin de réfléchir à tout ce que ça implique, chuchota-t-il.
Sa façon douce et ses gestes me réconfortèrent un peu, il m'attira dans ses bras, dans lesquels je me blottis, et il me caressa le dos.
— Quand ça va pas dis-le-moi d'accord ? Et je vais prévenir Livia que je dors pas avec elle, poursuivit-il.
Cette réponse me réchauffa le cœur, je hochai la tête contre son épaule. Lorsque nous nous séparâmes, j'essuyai mes larmes et je remarquai qu'Ayden et Amy nous regardaient de l'autre côté de la baie vitrée. Lorsqu'ils se rendirent compte que je les avais remarqués, ils levèrent leurs pouces en l'air avec un grand sourire, ce qui me fit rire.
Isaac se mit aussi à rire, nous décidâmes de rentrer, et il me demanda de l'attendre dans la chambre où il avait posé ses affaires, en me promettant qu'il dormirait avec moi. Je montai donc les miennes. C'était une jolie chambre, il y avait un grand lit baldaquin, un parquet foncé et du gris sur les murs. Les draps et les rideaux étaient blanc, il y avait une armoire, une bibliothèque et des bancs contre les fenêtres larges qui donnaient vue sur la forêt. Le chalet était en bois, il y avait deux étages, et malgré qu'il y ne comporte seulement trois chambres, il était spacieux, et chaque chambre avait sa salle de bain privée.
— Bon, du coup, Livia et Amy dorment ensemble, Ayden fait la tronche, ricana Isaac en arrivant dans la chambre.
—Tu m'étonnes. Je suis sûr qu'ils trouveront quand même l'occasion de le faire.
— Ils ont été ensembles ? Demanda-t-il curieux.
— Non, juste une histoire de galipettes, expliquai-je.
— Je vois.
Il haussa les sourcils d'une manière suggestive, qui était assez marrante. Après cela, nous déballâmes nos affaires.
J'avais hâte de me glisser dans ces draps blancs le soir venu, cette semaine promettait d'être riche en émotions.
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Hey, je finis mes examens mercredi donc après j'aurais plus de temps pour écrire, j'espère que je réussirais à vous sortir des chapitres plus souvent. J'espère que ce chapitre vous a plu, n'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez ça me fait toujours plaisir !
Des bisous chocolatés :)
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