Chapitre 6

Un air sec emplissait les narines de Sakura. Quelques grains de sable se prenaient dans ses courts cheveux bougeant au rythme de la brise. L'odeur typique de la marque de cigarettes de Shikamaru s'écoulait pareussement dans l'atmosphère. Le garçon observait vaguement le paysage leur faisant face. Ils ne parlaient pas. Qu'y avait-il à dire à ce moment ? Le duo ne faisait qu'attendre le verdict du conseil de Suna concernant les négociations proposées. Aucun mot ne pouvait porter d'importance quand ils ne faisaient que patienter. Le silence confortable les entourait lourd de paroles inexistantes, léger de paroles inutiles.

Un chuunin interrompit leur contemplation quelques instants plus tard. Le duo entreprit de suivre le ninja dans des couloirs désormais familiers. Leurs pas se réverbèrent sur la pierre de la tour du Hokage, le silence les enlaçant. Un silence qui pesait le pauvre messager, intimidé par l'intelligence qui émanait des deux jonins. Quand le groupuscule arriva enfin aux deux lourdes portes menant à ce que Sakura considérait comme un enfer, le chuunin ne put que ressentir un sentiment de soulagement. Il ne connaissait rien de ces deux Konoha-nin, mais il sentait le danger que leur esprit représentait. Moins il se frottait à cette atmosphère calculatrice où chaque personne était un pion, mieux il se portait.

Les vieux conseillers parlaient, s'épanchaient sur des détails qui irritaient Sakura. Son sang pulsait dans ses veines, menaçant d'en sortir à chaque nouvelle voix rauque qui s'exprimait, un son ressemblant à du papier sablé, la décapant à petit feu. Elle pouvait presque voir sa peau se retirer morceau par morceau à chaque nouvelle parole, sentir la brûlure de tout son corps. L'adolescente n'avait qu'une envie; retourner dehors où seuls la cigarette et le silence existaient.

Shikamaru sentait les vagues d'irritation s'échappant de sa collègue. Ce n'était pas la première fois que Sakura semblait sur le point d'envoyer un conseiller dans un mur. Cependant, c'était la première fois que le visage de la fille se tournait vers le sien pour rechercher une issue hors de ces propos abrutissants. Ils n'étaient pas amis, ni même camarades. Pourtant, peut-être à cause de la surprise que cette requête amenait, il se racla la gorge pour interrompre ces discussions futiles. Un soupir soulagé atteignit ses oreilles alors que sa voix se déversait dans la salle. Une partie de lui se fascina pour ce simple son et la simplicité de la cause de ce bruit.

Le soleil leur piquait les yeux tandis que des nuages de poussière s'élevaient de l'arène où des genins s'affrontaient. Une odeur de sueur mélangée avec celle du tabac circulait dans l'air. L'effluve était désagréable, mais Sakura ne pouvait que se réjouir d'assister aux matchs des finales plutôt que d'être enfermée dans une pièce. Les négociations étaient finies pour le plus grand plaisir de la médecin. Il ne restait au duo qu'à attendre la fin des épreuves de l'examen des chuunins pour rentrer. Sakura s'en réjouissait d'avance, car cela signifiait la fin de peu importe ce qu'était sa relation avec Shikamaru. Ils ne redeviendraient que deux vagues connaissances.

Pourtant, un soir, alors que les plus jeunes ninjas dormaient et que le vent faisait flamber les flammes du feu, elle sut qu'ils ne redeviendraient jamais que des inconnus. La lueur de curiosité dans les perles brunes qui brûlait avec autant de force que le feu les réchauffant le lui promettait. Les Nara n'étaient pas connus pour leur effort, mais une fois que leur curiosité était titillée, rien ne les détournait de leur quête de réponses. Sakura était devenue le plus intéressant casse-tête que Shikamaru n'ait jamais à résoudre.

Quand il lui proposa de disputer une partie de Shogi devant les portes rouges de Konoha, l'adolescente refusa. Un air curieux emplit les traits du garçon, plissant son front. Elle savait qu'elle ne faisait qu'augmenter sa détermination à trouver le pourquoi du comment, mais sur le moment, elle ne voulait qu'aller chez elle et noyer ce sentiment de ne pas avoir de libre-arbitre dans l'alcool.

La tête de la médecin lui faisait mal tandis que les larmes irradiaient sur ses joues rouges. Elle n'avait bu que deux verres avant que des sanglots ne s'échappent de son corps fatigué. Sakura avait sincèrement pensé que ça allait mieux, que vivre ne lui demanderait plus autant d'effort. Toutefois, lorsqu'elle était rentrée chez elle et que la réalité des derniers jours l'avait frappée, l'éthanol avait été son refuge. Comment avait-elle pu croire un seul instant qu'accepter ce garçon dans sa vie n'allait pas la détruire ? Comment avait-elle pu envisager une vie où chaque jour ce fil circulerait dans sa vision, l'hantant de vision du passé ? Elle était fatiguée de s'effondrer et de s'épuiser à vivre quand la douleur finissait par la consumer un jour ou l'autre. Ses poings vinrent s'écraser contre ses paupières, compressant ses orbites. Elle n'était pas sûre de pouvoir tenir sa promesse à sa sœur, pas quand chaque respiration lui râpait la gorge en essayant d'oxygéner un cerveau qui n'entrevoyait que sa mort.

Éventuellement, la poitrine de Sakura cessa de se soulever à toute allure. Les mouvements devinrent graduellement de plus en plus lents jusqu'à ce que les yeux de celles-ci ne se ferment, s'abandonnant à un sommeil rempli de corps pendus avec un fil noir.

Des coups sur la porte sortirent Sakura de son sommeil agité. Ses paupières étaient trop lourdes et son corps trop vivant. À contrecoeur, elle se leva, un mal-être l'étouffant presque. Des traces de larmes du soir d'avant décoraient ses joues. Ses yeux s'agitaient, brûlant à cause du manque d'hydratation. Le temps qu'elle parvint à la porte, une irritation l'habitait. Elle voulait retourner dans cette béatitude gore que le sommeil lui apportait. À la vue de Shikamaru, la fille sut qu'elle pouvait oublier son repos, surtout quand il tenait le traité comportant les négociations.

La fermeture que le visage de Sakura afficha lorsqu'elle ouvrit la porte agaça profondément Shikamaru. Il n'était pas prompt à se laisser aller aux émotions. Cependant, là, observant tous leurs efforts communs partir en fumée, les battements de son cœur s'accélèrèrent. Sa mâchoire se serra en voyant le regard éteint de l'adolescente. Elle le regardait comme si il n'était qu'un autre individu lui mettant des bâtons dans les roues. La trêve qu'il avait cru continuelle venait de s'évaporer. Ses sourcils se froncèrent en voyant les traces de larmes sur les joues de la fille. Il ne comprenait rien de tout ce foutoir. Un jour, Sakura lui souriait. Le lendemain, elle était aussi fermée qu'une huître. Shikamaru ne pouvait jamais prévoir les humeurs de la médecin, ne connaissant même pas les causes de son retranchement. Il ne savait jamais sur quel pied danser et ça lui tapait sur les nerfs. Ses doigts s'agitaient, cherchant le calme l'habitant habituellement dans une cigarette. Toutefois, quand la kunoichi lui dit de ne pas fumer dans le hall, sa bouche agit plus vite que son cerveau ne réflechit.

-Une nouvelle mine renfrognée, youhou ! s'exclama le garçon en fixant son regard dans les prunelles vertes.

L'offense l'emporta sur sa surprise. Qu'un Nara dépense de son énergie pour insulter quelqu'un était une des plus grandes offenses connues dans le monde ninja.

-En quel honneur, ai-je le droit à ta merveilleuse présence en ce matin ensoleillé ?

Du venin s'écoulait de chaque mot tirant sa source de ce ressentiment qu'elle avait envers ce concept qu'il représentait. Leurs yeux se fusillaient et la seule réponse qu'il lui fournit fut de présenter le rouleau, son regard parlant pour sa bouche. Il savait qu'elle avait bu, il le sentait. Elle savait qu'il le savait et lui reprochait. La fureur se déversa en raz de marée dans les veines de la ninja à ce regard presque paternaliste. Sakura n'avait jamais été une fille à tourner sa langue sept fois dans sa bouche avant de parler, encore moins dans la ferveur du moment. Et Dieu, elle aurait dû en ce moment.

-Peut-être que j'essayais d'oublier ton existence, à toi et ce foutu fil avec lequel je préférais me pendre plutôt que de me le passer au doigt !

Son hurlement se perdit dans le silence qui menaçait de les étouffer. La poitrine de l'adolescente se soulevait rapidement tandis que la réalisation de ses propos cheminait à travers son esprit. Les yeux surpris de Shikamaru suivirent les mouvements frénétiques qu'entreprirent les orbes de la fille dès que les connexions se firent. Des larmes emplirent ces billes paniquées. Il la vit lentement s'effondrer au sol en boule, murmurant des paroles incompréhensibles. Shikamaru avait entendu parler des situations civiles où les enfants étaient imposés des conditions strictes en raison de standards stupides pour leur âme-soeur. Il en avait entendu parler, il n'avait juste jamais cru qu'il se retrouvait face à sa propre âme sœur en crise de panique, probablement traumatisée par cet ancien contexte de vie. Honnêtement, à partir du moment où le shinobi avait été assez vieux pour comprendre la nature du geste de coupure du fil, il n'avait jamais vraiment attendu de cette supposée destinée. Il n'avait jamais cru possible que cette destinée se tienne en face de lui. Et même si théoriquement, c'était sa destinée de marier cette fille, sur le moment, cela lui semblait la plus ridicule des idées. Le garçon s'accroupit, soupirant. Il n'était vraiment pas bon pour conforter les filles en pleurs atteintes de souvenirs traumatisants. Shikamaru ne fit qu'écarter les mains couvrant les yeux rougis, les lèvres déformées dans des mots qui changeraient leur vie.

-J'ai toujours cru que ce concept d'âme sœur était une galère trop grande pour y dépenser de l'énergie.

Certes, ce furent probablement les pires mots de réconfort. Shikamaru en convenait, mais ce dut suffire, car Sakura s'effondra sans ménagement sur lui, murmurant des remerciements hantant le garçon par le désespoir les habitant.

Sa veste se tacha éventuellement de larmes. Les sanglots se turent à un moment. Des yeux verts rencontrèrent des bruns, cherchant une confirmation des mots dits précédemment. Sakura trouva sa confirmation en remarquant l'absence de fil noir dans son champs de vision. Shikamaru prit conscience de la constatation de la médecin et sourit doucement.

-Je ne voudrais quand même pas que tu te pendes avec, femme-galère.

Peut-être que la fille laissa un rire lui échapper contre l'épaule du garçon. 

***Désolée pour le retard et la longueur du chapitre. Manque de motivation. Je ne l'ai révisé qu'une seule fois, donc, je le réviserai probablement ultérieurement. Sinon, merci de la lecture et bonne journée !***

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