Aujourd'hui, c'est le dernier jour avant les vacances de Noël, Emily se sent toute excitée à cette nouvelle. La ville est décorée alors les soirs où elle passe devant le centre-ville de Bayonne, elle a le bonheur d'y découvrir ses illuminations, les chocolats chauds et les gens emmitouflés dans les gros manteaux. C'est doux l'hiver, le contact de l'autre, les échanges apportent du baume au cœur, on se fait plaisir en mangeant du gratin, de la raclette, des clémentines et puis certains ont le bonheur de voir des flocons tomber du ciel, les yeux émerveillés par cette couverture blanche qui recouvre le paysage. La collégienne aime cette saison, même si de l'air frais s'échappe souvent de ses lèvres et que son corps tremblote parfois.

En cette matinée, son quotidien ne change pas, c'est toujours un peu la course. Le froid la décourage de s'aventurer en dehors de sa couette et Thomas doit souvent se battre avec elle pour la tirer hors de son lit, mélangé entre le rire et le désespoir. Ses yeux s'accommodent peu à peu à la lumière de la pièce, Emily a pris pour habitude de le saluer en le serrant dans ses bras, cherchant la douceur de ses nuits et l'apaisement de la chaleur humaine. Sa boisson chaude l'attend dans le salon, il y a toujours de délicates attentions en la faveur d'Emily qui essaie tant bien que mal de rendre la pareille. Elle ne traîne pas trop des pieds ce matin, sa classe a beaucoup parler d'activités à faire pour rendre ce jour plus agréable tant pour les élèves que pour certains des professeurs qui ont facilement accepté de regarder un film ou d'organiser un goûter avec des jeux. Ce vendredi va être encore mieux que les précédents, surtout qu'à la fin de la journée, elle sait qu'elle va retrouver Aileen. C'est pour cette raison qu'elle soigne un peu plus son apparence que d'habitude en portant un pull à col V bordeaux que son amoureuse lui a offert récemment ainsi que son large pantalon noir qu'elle adore plus que tout, en passant devant le miroir, elle s'observe un instant, elle ne sait pas combien de kilos elle a pris depuis qu'elle est ici, néanmoins, elle se sent mieux. Un corps plus lourd, en bonne santé, il n'y a rien de plus beau, elle s'étonne même de voir un sourire se dessiner sur ses lèvres. Tellement de choses ont changé depuis son arrivée. Elle coiffe ses cheveux en faisant deux petites tresses à l'avant, maquille ses yeux de mascara et ses joues d'un blush rosé. Elle n'est pas encore particulièrement à l'aise avec ses artifices, malgré tout, elle se sent sublimée et c'est ce qui compte le plus. Anaïs la complimente, ce qui la fait rougir de plaisir. Les mots ont le pouvoir sur son mental, un mot pour aimer, un pour haïr, un pour être triste. Il ne faut jamais les sous-estimer, ils peuvent tout construire comme tout détruire.

Une notification d'Aileen apparaît sur son téléphone tirant l'adolescente de ses pensées.

J'ai hâte que tu puisses voir le spectacle de danse et que tu comprennes tout ce que ça signifie pour moi. 

Elle sourit, encore une fois avant de lui répondre qu'elle aussi, elle est pressée et qu'elle l'aime. Ça va fait déjà deux mois que sa copine s'est fait opérée du coude, elle récupère peu à peu à l'aide des séances de rééducation, cependant, il y a de fortes chances qu'elle ne puisse pas reprendre la danse cette année, ce qui la rend triste. Pouvoir être présent à certains cours et admirer les spectacles de ses camarades comptent énormément à ses yeux. À cause de tout ça, Emily a la boule au ventre, elle a peur de ne pas réagir comme Aileen le voudrait, elle ne veut pas la décevoir sur ce point si important à ses yeux. Elle respire un grand coup puis se dirige vers la voiture pour se rendre au collège.

Sur place comme à son habitude, elle retrouve Mathis qui arrive toujours en premier. Le châtain passe sa main dans les cheveux de son amie en guise de bonjour, elle le réprimande toujours, déclarant qu'il est chiant de la décoiffer, mais au fond, elle apprécie ce côté taquin qu'il a avec elle. Louise, en troisième, les rejoint quelques minutes plus tard suivies du reste du groupe. Ils se font la bise, échangent deux-trois mots avant de se séparer, laissant la plus grande rejoindre ses camarades. L'heure d'histoire-géographie se passe bien, ils finissent le chapitre sur la Révolution et les femmes, Emily aime bien cette matière, le passé l'a toujours intéressé. La matinée se poursuit avec deux heures de Français, où leur professeur décide de faire des quiz pour mélanger apprentissage et bonne humeur, puis d'une heure d'Anglais où ils terminent The Social Dilemna, un documentaire dénonçant les conséquences des médias sociaux à travers la dépendance, leur utilisation en politique ou encore leur impact sur la santé mentale. L'humeur d'Emily est plutôt aléatoire sans qu'elle ne sache réellement pourquoi ses pensées partent à droite, à gauche. Elle se perd pendant plusieurs minutes à fixer au même endroit et son ami l'a remarqué, alors, durant la pause-déjeuner, il décide de la prendre à part. 

— Tu vas bien Emily ? Tu as l'air absente depuis quelques jours, qu'est-ce qu'il se passe ? interroge Mathis inquiet.

— Je ne sais pas vraiment... répond-elle embarrassée. J'ai un mauvais pressentiment et il ne veut pas quitter mon esprit depuis un moment, mais rien de grave, t'inquiètes pas.

— Bon, dit-il en se grattant la tête. Si tu as un problème, tu sais que tu peux m'en parler ?

— Ouais, pas de soucis. Merci pour tout.

Emily décide de le décoiffer à son tour pour détendre l'atmosphère. Ils rejoignent ensuite leurs amis pour aller manger. L'après-midi passe rapidement, le cours de technologie n'est pas très intéressant et la plupart des élèves traînent sur jeux.fr avec leur ordinateur pour jouer au uno, à des jeux de beauté ou de guerre ainsi que des tests de compatibilité amoureuse pour taquiner les élèves qui s'entendent bien. Le goûter se fait à quinze heures, certains ont apporté des chips, du coca, de l'ice tea et d'autres ont apporté des gâteaux industriels, des gâteaux maisons, des crêpes, des bonbons, ... Ils s'amusent en faisant un blind test des musiques des années 2000, puis un sur les films, séries, animés, dessins animés de leur enfance. Emily adore ça, elle est très compétitive et fait de son mieux pour apporter un maximum de point à son équipe. C'est ensuite la dernière récréation pour les latinistes et la fin des cours pour les autres. La bande de copains se dit au revoir, Emily reste encore une fois avec Mathis derrière le portail.

— Oh, au fait, commence le châtain, je voulais t'offrir un petit truc pour Noël, déclare-t-il en ouvrant la petite pochette de son sac à dos, avant de lui tendre un petit paquet assez mal emballé.

— Oh, je, c'est vraiment adorable, répond-elle gênée.

L'adolescente concentre son attention sur l'objet pour le déballer proprement. Ses yeux s'écarquillent de plaisir lorsqu'elle découvre un porte-clé à l'effigie d'une plume.

— C'est sublime, vraiment ! Merci beaucoup ! affirme-t-elle en le serrant dans ses bras.

— Je trouvais que ça te correspondait bien, comme tu écris beaucoup, énonce-t-il en souriant.

— C'est adorable ! murmure Emily. Désolé de ne rien avoir à t'offrir...

— Oh, ne t'en fais pas, je ne fais pas ça pour la reconnaissance ou les cadeaux. Bon, je dois te laisser, mon cours va commencer, bisous Emily, passe de bonnes vacances, termine Mathis en ébouriffant une dernière fois les cheveux de son amie.

Mathis part, elle se retrouve seule. Thomas devrait arriver d'une minute à l'autre, seulement à la place de sa 5008 marron, c'est la camionnette verte qui s'arrête devant elle, la fenêtre passagère s'ouvre et une voix grave se fait entendre.

— Bonjour Emily, ça fait longtemps non ? Déclare son géniteur d'une voix mauvaise.