36. Maï

 Le mercredi après-midi, je retrouve Aï au hangar. Elle voulait séché les cours du matin mais elle ne doit pas faire de faux pas pour son entrée à Fukurodani. Elle s'entraîne seule cette fois, et en musique. Quand j'entre, j'ai la bonne surprise de voir qu'elle a commencé à le personnaliser. Il y a un vieux canapé marron, un peu abimé. Ils ont empilé des caisses en plusieurs colonnes et en ont fait une sorte de petit étage d'une vingtaine de mètre carré. A côté de la pauvre table abandonnée ici, elle a mit un porte manteau qui tient encore par miracle. Quelqu'un a apporter une vieille machine à café qui fait un bruit d'enfer quand elle est allumée. Les caisses vides qui n'ont pas servis pour agrandir leur petit étage improvisé ont été utilisés pour faire des étagères. Dedans sont rangés une bonne centaine de livres, de toute les tailles et de toutes les couleurs.
Tyse les ranges par ordre alphabétique quand j'entre. Aï est en train de tirer avec ses flèches de concours et Nash est perché sur les piles de caisses. Je ne sais pas trop à quoi il est en train de jouer sur la console. Sab est allongé sur le canapé, un livre entre les mains. Tiens, il sait lire autre chose que des lignes de code? La brune, Nash et Sab me saluent sans même se retourner. Tyse se tourne vers moi avant de s'incliner respectueusement et de reprendre son tri. Je ne me formalise pas sur leurs comportements, je commence à m'y habitué.
Nash se redresse soudainement en râlant. Aï dévie son arc pour le prendre pour cible. Elle lâche sa flèche, qui lui égratigne l'oreille et va briser la vitre, deux mètre plus loin et un mètre plus haut.

– J'ai dit que je ne voulais rien entendre pendant mon entraînement, c'est trop demander?
– Non, pardon.
– Va chercher ma flèche. Et arrête de râler ou je ne me contenterai pas d'une petite égratignure la prochaine fois.
– Tout de suite.

Il saute sur le sol et pose la switch sur la table avant de se diriger vers la porte. Il me passe à côté avec un petit signe de tête. Aï, qui l'a suivit du regard, me sourie avant de s'adresser à Sab et de lui demander de me laisser une place sur le canapé. Il lève enfin les yeux de son bouquin et s'assoit correctement, la cheville droite sur le genoux gauche et un bras sur le dossier du canapé. On dirait un parrain de la mafia. Aï se remet en position. Comme dans un film, sa flèche se plante au centre de la cible au moment où Nash revient avec celle qu'elle a perdu. En passant à côté de moi, je peux voir qu'il a le bras plein de sang. Avant d'aller la rendre à Aï, il va laver la flèche à un vieux robinet au fin fond du hangar. Quand il la lui rends, la princesse la détaille avant de lever ses yeux vers lui.

– Qu'as-tu fait du corps?
– Je l'ai défiguré avant de le découper et de le mettre dans une benne où je sais qu'il y a des rats.
– Tu veux me dire pourquoi tu l'as tué?
– Raisons... personnelles.
– Ne commence pas à tuer tous ceux qui m'insultent, sinon il n'y auras plus personnes à Miyagi bientôt.

Nash ne répond pas, il se contente de la fixer dans les yeux. Sans bouger le regard, il lui prends la main et l'amène à ses lèvres. Il s'incline ensuite profondément et retourne prendre la console. Il n'en fait pas un peu trop? Tyse et Sab, qui s'étaient figé, reprennent leurs activités. Je me lève pour enfin aller parler à Aï, puisqu'elle est en train de démonter son arc. En m'approchant, je peux voir ses yeux brillés un court instant. Elle les fermes une demi-seconde et ça à disparu. J'ai rêver? Elle m'accueille avec un grand sourire.

– Désolé pour ça. Ça va?
– Ouais. Il faut que je te parles d'un truc.
– Bien sur. Viens, je vais décrocher mes flèches.
– En fait, nous nous sommes dit avec mon père qu'il vous faudrait un endroit où aller quand vous avez besoin de vous faire soigner ou de vous cacher. On ne peut pas dire que l'appart de Nash est particulièrement sécurisé et je ne veux pas que vos ennemis débarquent chez moi. Mon père en a déjà bien assez comme ça.
– Tu n'as pas tord. Que proposes-tu?
– Vous allez rencontrer ma mère. Elle gère une chaîne d'immobilier, nous lui en parlerons. Nous pourrons sûrement vous trouver quelque chose.
– Pour l'instant, nos activités ne nous ramène pas des masses d'argent. Avec nos vies d'adolescents bien remplies, on a pas une seule mission avant les vacances d'été. Qui dit pas de missions, pas d'argent. Nash a des cours pratiquement tous les soirs depuis hier et il bosse la théorie une fois par semaine. Stella passe son temps à former Sab aux bonnes manières. Elle lui impose de lire des livres dont je ne connaissais même pas l'existence. Pour l'instant, c'est moi qui apprends les bases de l'assassinat à Tyse. Seulement je ne suis pas professeur et je ne suis pas très douée. Il semble comprendre mais je ne suis pas sûre qu'il ose me dire quand il ne comprends pas. Mon problème, c'est qu'il est très intelligent mais qu'il a une mémoire relativement mauvaise. Je ne peux pas lui faire travailler le physique. Je veux dire, il manque de me casser deux côtes dès que l'on s'entraîne ensemble. Du coup, je lui fait faire des exercices de mémoire et des mouvements de base, sans adversaire. Je l'entraînerait bien au tir mais nous n'avons pas d'endroit où le faire.
– Et ici? Tu t'entraînes bien au tir à l'arc.
– Il y a une différence entre le petit bruit mat d'une flèche et le vacarme d'une arme à feu.
– Et les couteaux?
– Inutile, il est déjà expert en la matière. Il est même meilleur que moi et c'est lui qui me donne des conseils.
– Je vois.

Je sort un carnet et note ce qu'elle me dit. Il faudra que je demande à Kita ses revenus. Je suis en train de réfléchir, adossée à la table, quand la porte s'ouvre en fracas. Stella entre, agacée. Sab se lève d'un bond avant de mettre un genoux à terre. Je lève un sourcil et Aï m'explique les coutumes des assassins. Enfin, elle en fait vite référence rapidement puisque son attention est retenue par un homme dans la cinquantaine qui suit Stella, les mains liées dans le dos. La femme, sans ordonner à Sab de se relever, nous le présente. Alors qu'elle est en train de dire qu'il sera le prochain prof de Tyse, Aï la coupe en fermant sa mallette d'un claquement sec. Le bruit provoque un silence retentissant. L'intéressée reste un moment immobile, les yeux dans le vague. Un raclement de gorge, à l'autre bout du hangar, nous fait tous sursauter. Nous nous retournons tous et Nash et Aï se mettent en rang avant de poser un genoux à terre. Aï se relève sans attendre la confirmation de son maître et se tourne vers Stella. Personne ne parle. Finalement, c'est Tyse qui s'avance. Il fixe Aï.

– Je me fierais à ta décision.
– A la bonne heure! Râle Stella en levant les yeux au ciel.
– Nash, relève toi. Stella, n'oublie pas Sab. Il va se faire mal à rester comme ça.
– Oui oui! Aller debout, et ne reste pas dans le passage.
– Alors? Demande Nash en venant s'asseoir sur la table, à côté de moi.
– Tyse ne peut pas rester dans instructeur. Seulement j'ai des réserves, jusque là nous n'avons pas eu de chances.
– Et personne n'a pensé à demander son avis au principal intéressé? Je propose après un petit silence.
– Il serait compliqué pour moi de retourner à une vie normale après tout ce qu'il s'est passé, mais j'en sais trop peu pour pouvoir faire partie intégralement de leurs mondes. Je suis dans un entre-deux qui me force à faire un choix. Mourir ou les rejoindre.
– Tu ne mourras pas. Tranche Aï. Si tu ne veux plus en entendre parler, alors nous ferons en sorte de facilité ton retour à une vie normale.
– Dans combien de temps Aï aura-t-elle terminé son apprentissage? Demande Sab.
– Environ un an et demi si tout se passe bien. Bien sûr, elle se fera aussi de l'expérience sur le terrain.
– C'est long, un an et demi... Soupire Tyse.
– Vous! Approchez vous, ne vous cachez pas derrière elle.

L'homme s'avance pour se placer devant elle. Il fait à peu près sa taille, à des cheveux poivre et sel tirés en arrière à la manière des militaires et le dos un peu courbé. Son oeil droit est d'un bleu presque transparent et l'autre est totalement blanc. Il a une balafre de la tempe au menton du côté gauche. Aï le détaille attentivement, les yeux à moitié dans le vague. Soudain, l'homme bouge. Aï l'arrête et lui coince un poignards sous l'aisselle.

– Il est doué. Commente Kita d'un air approbateur.
– Il est honnête. Murmure Aï. Et il est loyal envers ses élèves.
– Comment tu sais ça? Demande Nash.
– Son bras droit tremble légèrement mais pas son bras gauche. Il est droitier. Je suppose donc qu'il se protégera plutôt avec celui-ci. Seulement il est habile, rapide et intelligent. Il savait où il me tuerait et comment faire pour que je puisse le bloquer que d'une seule façon. Je doute qu'en combattant seul, il ai eu besoin de se protéger en levant le bras. Non, il protégeait quelqu'un d'autre.
– Ça pourrait être sa famille.
– Exceptés Aï qui est un cas a part, les assassins ont rarement de la famille. Souvent, ce sont des orphelins. Si le maître de Nao ne m'avait pas prise en tant qu'élève, je serais surement morte bien plus tôt et Nao serait seul.
– Je suis d'accord avec leurs propos. Aï, pourquoi est il honnête?
– Il est dans une pièce où il se sait en désavantage. J'interviens. Depuis tout à l'heure, tous les regards se tournent constamment vers Aï.
– Ça ne fait pas de lui quelqu'un de bien.
– Laisse moi finir. Toutes les attentions sont portés sur Aï et pourtant il l'a mortellement attaqué.
– C'est ce que je dis.
– Nash ferme la! Soupire l'adolescente. Même si je comprends ce que tu veux dire Maï, c'est un peu tiré par les cheveux. En plus, ce n'est absolument pas pour ça que je le dis.
– Alors pourquoi?
– Parce que je le connais.
– Ravi de vous revoir, mademoiselle Iwaizumi. S'incline l'homme.

Sa voix est éraillé par l'âge pas il est sûr de lui. Aï croise les bras et fais la moue.

– Tu savais. Tu m'as reconnu d'emblée, et pas moi.
– C'est vrai.
– Comment l'as-tu connus? Demande Kita, nous laissant abasourdis par la question.
– Il a été professeur particulier au collège, le premier mois. Je ne savais pas qu'il était assassin.
– Évidemment, jeune fille. Comment va ce vieil Honokaya?
– Bien. Son mariage a couler et c'est sa femme qui a eu la garde de leurs fille. Il boit encore plus qu'avant mais vu qu'il arrive toujours sobre en cours, on ne lui reproche rien. Pour l'instant. Bref, t'acceptes de prendre Tyse sous ton aile?
– Tu tutoies tes profs toi?
– C'est compliqué à expliquer...
– Je lui ai appris toutes les bases du tir à l'arc. Elle était petite à l'époque et elle m'as instinctivement tutoyer. Je n'ai pas chercher à l'en empêcher alors que je partais bientôt à la retraite.
– Je vois.

Kita s'approche et tend la main au vieil homme. Celui-ci la serre et les trois adultes repartent vers la porte. A ce moment là, les téléphones de Nash et Aï sonnent en simultanés.

– Hono. Salut Nash en décrochant.
– Haj'... Soupire Aï avant de reposer son téléphone et de mettre sa veste. Une veste trois fois trop grande pour elle, je remarque.
– Elle est a qui?
– Tooru....

A suivre... 

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