3 juillet 2022

Je suis épuisée.

Je n'ai pas fait grand-chose de ma journée, pourtant, je suis au bout du rouleau.

Je n'ai plus d'énergie.

Plus de volonté.

Plus de motivation.

Je suis vide.

Ressentir tout ça me rend extrêmement triste et nostalgique des derniers jours passés à Paris, dans ma vie, où tout allait pour le mieux. J'allais bien. Enfin. Et je vais de nouveau mal. Ça me détruit toujours un peu plus de voir à quelle vitesse peut disparaître la minuscule et fragile flamme qui m'anime. Parfois, brusquement, elle s'éteint, pour pratiquement rien, et met des mois à se rallumer, pendant lesquels je lutte, et fais de mon mieux pour m'en sortir, mais perds un peu plus en motivation à chaque fois. C'est dur d'admettre que tomber fait partie du chemin. Parce qu'en ce qui me concerne, j'ai plus l'impression de tomber et reculer que d'avancer. À chaque fois je régresse. À ce rythme, je ne vais jamais franchir la ligne d'arrivée, c'est certain.

Je dois être une quelconque exception à la règle. Je dois être différente. C'est la seule explication plausible que je trouve.

Bref, je suis actuellement dans mon lit, comme hier soir, comme ce matin. À peu de choses près, j'ai passé ma journée ainsi.

— Coucou ma chérie ! me crie la voix de ma mère, alors qu'elle franchit le seuil de la porte d'entrée.

— Salut m'an.

— Oula, toi ça va pas mieux, dit-elle du bas des escaliers.

Je lève les yeux au ciel, et murmure pour moi-même :

— C'est bien la première fois que tu t'en rends compte.

Je l'entends monter les escaliers, et lorsqu'elle se trouve devant mon lit, je réponds simplement :

— Je suis allée déposer des CV aujourd'hui. Ils ont dit qu'ils me recontacteraient peut-être. Je te tiens au courant.

— C'est bien, mon cœur, dit-elle en déposant un bisou sur mon front.

Quelque chose cloche.

Elle ne me donne jamais ces surnoms à la con.

— T'as passé une bonne journée ?

— Merveilleuse, me répond-elle d'un ton mielleux.

Je sais pas ce qu'elle a foutu mais c'est sûr qu'il y a un truc pas normal. Elle n'agit jamais comme ça.

— J'ai rencontré un homme fabuleux, lâche-t-elle, alors qu'elle plane sur un nuage.

Je lève les yeux au ciel, c'est plus fort que moi.

J'aurais dû m'en douter. À quoi d'autre est-ce que je m'attendais ? Une promotion ? Une surprise pour le repas ? Une sortie shopping ? Pfff quelle erreur de débutante... je devrais la connaître depuis le temps.

J'ai presque honte de m'être fait avoir, une fois de plus. Je suis dépitée de voir qu'elle ne changera jamais. Les hommes qu'elle fréquente seront toujours entre elle et moi. Ils me bloqueront à jamais le chemin.

— Il va nous passer un peu d'argent pour nous éviter de nous prendre la tête avec ça, dit-elle d'un ton joyeux qui me donne envie de gerber.

— Tu le sautes ?

Mon ton est rempli d'un dédain si puissant que je me surprends moi-même. Je n'ai jamais formulé tout haut ce que je pensais par rapport à ses comportements, mais je crois que ce soir, c'est la goutte de trop.

— C'est comme ça qu'on parle à sa mère ? demande-t-elle, en faisant mine d'être offusquée.

Je sais très bien qu'elle est beaucoup trop flattée d'avoir reçu cet homme pour être affectée par ma remarque.

— Et puis, si ça peut nous permettre de mettre un peu d'argent de côté...

Je lâche un soupir d'agacement et réponds froidement :

— On sait toutes les deux très bien que cet argent ne sera JAMAIS mis de côté. Cherche pas à me faire gober une chose pareille. Franchement ça me surprend de ta part que t'essaie encore de te justifier en vendant du rêve. Tu fais ce que tu veux de ton corps, j'en ai rien à foutre. Tu veux baiser des mecs en échange de fric ? Ça te regarde. Par contre, t'as pas intérêt à en ramener à la maison.

Elle me fait les yeux noirs, mais se contente de me répondre :

— C'est encore ma maison jeune fille, alors je fais ce que j'veux.

— C'est eux ou moi, répondis-je du tac au tac, sans vraiment savoir ce que je fais.

Le sourire narquois qu'elle me lance à cet instant en dit long sur ce qu'elle pense.

Je ne suis plus la bienvenue ici.