10 septembre 2016
10 septembre 2016
Désolée de ne pas être revenue avant !
Les choses se sont enchaînées et je n'ai pas eu l'occasion de me poser pour écrire, bien que l'envie ne m'ait manqué. Je ne pensais vraiment pas prendre plaisir à coucher ainsi mes mots sur papier, à raconter ma vie, et pourtant, je crois que ça me fait vraiment du bien. Alors je vais continuer sur cette lancée.
Il est 18h05 et je suis chez moi. Je viens de rentrer des cours. Mais je n'ai pas pu venir écrire directement, puisque maman m'a demandé de l'aider à préparer le repas et après, j'ai dû faire mes devoirs.
Oui, j'ai déjà des devoirs. Ma prof de maths est folle ! Personne ne l'aime. Elle est froide, stricte et semble sans cœur. Mais bon, j'aime les maths et je suis assez bonne élève, donc je pense que ça va bien se passer. Du moins, j'espère ! Je n'ai pas besoin d'une relation compliquée avec mes profs. C'est déjà assez dur avec mes camarades...
Je n'ai toujours pas d'amis. Et je déteste toujours autant être seule. Mais il y a un grand CDI, donc je me réfugie entre les livres dès qu'il est ouvert.
Je suis seule dans la plupart de mes salles de classe. Tout le monde m'évite, mais je n'arrive pas vraiment à comprendre pourquoi. Enfin, avant-hier, je n'arrivais pas à comprendre. Maintenant, j'ai compris.
Jade, une fille populaire, superficielle, aimée et admirée de tous, est venue me parler. Au début, j'étais étonnée, je ne comprenais pas vraiment pourquoi, parce qu'elle n'avait aucune raison de venir me parler, à moi !
On était en maths justement. Dans le rang. On attendait que la prof nous fasse entrer dans la salle de classe.
— Eh, la rousse ! a-t-elle crié.
Je me suis retournée. Je savais très bien qu'elle me parlait, parce que je suis la seule rousse de ma classe. Probablement la seule rousse du collège même.
Bref, je l'ai regardé, sans trop comprendre ce qu'elle voulait.
— C'est vrai que les roux ça pue ? me demanda-t-elle d'un ton cinglant.
Je n'ai rien dit. Je n'avais rien à répondre.
Ma couleur de cheveux ne m'avait jamais posé problème jusque-là, je l'aimais bien, d'ailleurs. Mais depuis qu'elle m'a dit ça, je n'arrête pas de me regarder dans le miroir et de poser un regard dégoûté sur ces derniers et leur carnation. Comme si... j'étais salie.
Les gens autour de nous ont ri. Je ne vois pas ce qu'il y avait de drôle, mais ça leur a plu.
— Et t'es une sorcière ? Comme celles qu'on brûlait au Moyen Âge ?
Nouveaux rires.
— Et toi t'es aussi conne qu'on le dit des blonds ? ai-je alors renchéri avec malice sans la quitter des yeux.
Elle m'a dévisagé, surprise que je réplique. Quelques rires moqueurs ont fusé dans l'assemblée, ce qui m'a rendu mon sourire. Elle ne s'y attendait définitivement pas et je suis parvenue à la déstabiliser. Je n'en suis pas peu fière ! En même temps, c'était une erreur de sa part de croire que j'allais la laisser m'insulter sans que je réponde. C'est sacrément mal me connaître.
J'ai toujours dit ce que je pensais, j'ai toujours été franche, c'est pas aujourd'hui que ça va changer !
Elle a fait un tour sur elle-même, et a dit, à voix haute :
— Moi j'vous dis, faut pas se frotter à elle, c'est un monstre. Personne ne doit la fréquenter. Fuyez là comme la peste. Elle ne nous mérite pas.
Le regard des personnes de ma classe oscillait entre elle et moi sans savoir qui croire et suivre.
La prof est sortie de sa salle de classe et nous a dit d'entrer. Je me suis, avec dignité, dirigée vers l'intérieur de la salle et je me suis installée, sachant très bien que personne ne s'installerait à côté de moi, mais aussi que je venais de montrer pour la première fois que je ne me laissais pas marcher sur les pieds, et que j'avais du caractère, et ça m'a rassuré. Je ne suis pas certaine que ce genre de choses donnent envie aux gens de se faire des amis tels que moi, mais j'étais tout de même, dans l'ensemble, fière de moi...
Malgré tout, une pointe de douleur me tiraillait le ventre. Je me rappelle encore ce sentiment, cette incapacité à reprendre ma respiration et cette peur qui me rongeait. J'avais peur que cet échange ne rende ma tâche encore plus difficile et ne m'empêche de développer de nouvelles relations. Je redoutais le fait que mes camarades l'écoutent et la suivent plus qu'ils ne le ferraient avec moi.
Je n'avais jamais eu de problème de ce genre avant, et je ne savais pas quoi faire. Je suis restée silencieuse pendant tout le reste de la journée. J'ai mangé seule. Je n'ai parlé à personne. Pas même à mes anciens amis, ceux du CM2.
Ils s'éloignent déjà de moi après une semaine. Je crois que je vais très vite me retrouver seule.
Lucie m'a bien proposé de rencontrer une de ses amis d'équitation, qui est dans ma classe, mais j'avais trop peur qu'elle ait entendu ce qu'avait dit Jade et qu'elle refuse de me parler à cause de ça.
Finalement, Estelle, son amie, est quand même venue me parler. Elle a dit qu'elle était désolée de ce qu'avait dit Jade, qu'elle ne le pensait pas, qu'il ne fallait pas que je le prenne mal.
Mais comment aurai-je pu le prendre autrement ?!
Je n'en ai pas parlé à mes parents. J'avais bien trop honte pour leur annoncer ça. Ils m'ont toujours appris à m'affirmer et à me défendre quoiqu'il en coûte (sans entrer dans la violence, bien évidemment) et il est hors de question qu'ils apprennent que certains de mes camarades se permettent de me juger et de me critiquer sans me connaître. Ma mère m'a toujours dit de ne pas juger un livre à sa couverture, et même si dans la lecture, c'est ce que je fais tout le temps, je m'efforce de faire attention lorsqu'il s'agit des gens. J'essaie donc de me rassurer et de me réconforter en me disant que ce qu'ils voient en moi n'est fondé que sur les préjugés et ne correspond pas à la vraie personne que je suis réellement. Ils me jugent à ma couverture.
Estelle est avec moi la plupart du temps. Je suis contente qu'elle reste à mes côtés. J'ai besoin de quelqu'un. Ça me fait du bien. En plus elle est gentille, et on s'entend bien. On a pas beaucoup de points communs, mais pas grave.
Elle m'a fait rencontrer sa grande sœur, en troisième. Elle vante tous ses mérites, ça se voit qu'elle l'adore et qu'elle l'admire.
J'étais super gênée quand je l'ai rencontré : je ne parle pratiquement jamais à des gens plus âgés que moi ! Mais elle était très gentille. Et qu'est-ce qu'elle est belle ! Je crois que je n'ai jamais vu quelqu'un d'aussi élégante et parfaite !
Aujourd'hui, Jade m'a de nouveau malmené. Elle me pousse dans les couloirs quand elle peut, me charrie, me sort toute une tripotée de clichés sur les roux. Clichés dont je n'avais d'ailleurs jamais entendu parler avant qu'elle ne me les présente ! Mais tout le monde adhère à ses propos. Tout le monde se soulève contre moi. J'ai l'impression de me retrouver face à un mur, ou même une immense muraille, que je ne pourrais jamais franchir. Je réponds, dès que l'occasion se présente, mais je crois que finalement, il est plus sage de faire comme si ça ne me touchait pas. En réalité, ça m'impacte, mais je sais qu'ils ont tort, alors ça ne m'affecte pas tant que ça. Je sais ce que je vaux, quelles sont mes qualités et mes défauts, mes forces et mes faiblesses, mais je sais surtout que je me suis toujours fait respecter et entendre, et que c'est pas dans mon habitude de baisser si vite les bras face à une difficulté.
Estelle reste à mes côtés, mais ne dit jamais rien. Comme pleins d'autres gens de ma classe d'ailleurs. Ils voient, mais restent silencieux. Tous n'adhèrent pas, mais personne ne me défend. Je ne leur en veux pas. Je crois même que je comprends assez bien ce qu'il se passe dans leurs têtes. C'est juste frustrant de se dire qu'en étant le souffre-douleur, je leur évite bien des souffrances. Mais d'un autre côté, je crois que je préfère que ce soit moi, qui ait la force nécessaire pour prendre du recul, que quelqu'un qui se ferait totalement détruire par ces propos et actions. C'est probablement un mal pour un bien.
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