12| Nombre d'Avogadro ✔

/!\ Please, commentez tous 🙏. Je suis trop désespérée ! De plus, c'est un beau cadeau du mercredi, non ? /!\

La bouche grande ouverte, les yeux écarquillés et les mouvements sur pause. Voilà exactement ma réaction. Je suis sur le point de parler, quand je me rends compte qu'en fait, je n'ai pas de vraie réponse. Après tout, quand j'ai passé tout le mois de Juillet à me morfondre sur mon sort, je n'ai pas réfléchi un seul instant à une réponse potable. D'un côté car personne ne pose généralement jamais la question ; et de l'autre car la réponse paraît évidente : on est trop bête, nous les redoublé.

Je dépose alors soigneusement mon milkshake sur la table basse et affronte les yeux aiguës marines de mon nouveau professeur de chimie, une sentiment de malaise résidant toujours dans l'air. D'ailleurs, je ne suis pas la seule que la question brutale met mal à l'aise. Erwan a mis ses mains dans les poches de son sweat-shirt — il n'en a pas marre de devoir porter toujours de larges pull ? — et il a un regard  fuyant.

— Je n'aurais pas dû te poser la question, je sais, déclare-t-il enfin.

Par contre, je suis quasiment sûr qu'il ne regrette pas. Et il en a parfaitement le droit. Après tout, si je n'avais pas combattue ma curiosité, qui sait le nombre de questions que je lui aurai déjà posé ? À commencer par son comportement taquin du premier jour, qui diffère totalement de celui d'aujourd'hui. Et la deuxième question qui me torture l'esprit, c'est la raison pour laquelle il porte toujours des sweat-shirt. Ce n'est certainement pas pour le style ; il est loin d'être gothique.

— Ce n'est pas grave, répondis-je quand même.

D'un coup sec, je reprends mon crayon mauve et commence la série d'exercices qui me tombent sous les yeux. Ce n'est pas le travail idéal à mon niveau, mais j'ai besoin de m'occuper l'esprit. Avant que ce dernier ne déraille sur le sujet épineux que je tiens absolument à éviter. Ce n'est pas ses yeux marrons ni sa chevelure blonde qui vont me faire basculer du côté obscur de la force. J'ai longtemps combattu pour en arriver au résultat d'aujourd'hui. Je ne vais pas anéantir mes efforts pour une simple question.

Alors que je grogne parce que l'exercice est trop compliqué, Erwan me tire soudainement de mes pensées.

— Le nombre d'Avogadro c'est six point dix exposant vingt-trois.

Je m'apprête à rétorquer que c'est exactement ce que j'ai écris, quand je réalise que j'ai écris moins vingt quatre. Je râle, grommelant un merci et recommence le calcul. N'oubliant pas au passage de donner un message particulièrement rédigé à l'attention de ma deuxième pire ennemie.

Chère Chimie,

Je te hais.

Cordialement, Mélanie aka Sun aka une adolescente qui en a marre.

Concentrée, et surtout parce que je suis sur la bonne voie dans la résolution, je sens néanmoins Erwan qui me fixe un peu trop. Sait-il que c'est une violation à la vie privée ? Bon, OK, je ne suis pas la mieux placée pour le juger ainsi. Premièrement car moi aussi je l'ai fait quelque minutes plus tôt. Deuxièmement car on est dans un lieu public. Il n'enfreint légalement aucune loi.

— Tu as quel âge ?

Bon, décidément il n'a nullement l'intention de s'arrêter. Cependant, contente qu'il me pose une question un peu normal, je relève la tête et lui réponds presque automatiquement.

— J'en ai seize. Et maintenant, on peut continuer ?

Il hoche la tête, mais je peux apercevoir qu'il n'est pas vraiment normal. Il corrige l'exercice que j'ai fait — et raté — puis, agacée, en recommence un autre. Erwan se racle la gorge, prêt à reparler et je suis sur le point de l'arrêter, quand il me devance.

— Et Justin ? Il a quinze ans, non ? Ça ne sera pas gênant quand vos enfants vous demanderont votre âge ? Je veux dire, je vous ai vu une fois ensemble et je me suis dit qu'il y avait sûrement quelque chose entre vous.

OK. À ajouter sur la liste de défauts de Erwan. Honnêteté excessive. Aucune réaction ne vient trahir mes émotions intérieures. Je ne fais que me mordre la lèvre inférieure. Finalement, il n'a peut-être pas tort sur ce sujet. Je ne parle pas d'enfants, loin de là. Mais de notre différence d'âge. Faudrait que je me renseigne sur son mois exact de naissance. Si c'est un grand écart, tant pis. Après tout, je ne suis pas sûre qu'il ressente la même chose que moi, ni d'ailleurs qu'il veuille plus que de l'amitié. Mais une chose est sûre, si c'est le cas, il sait que j'ai redoublé donc que je suis potentiellement plus âgé que lui.

— Je peux savoir où tu trouves toutes ces questions ? Et d'ailleurs, elles n'ont pas de sens. Il n'y a rien entre moi et Justin.

Il hausse un sourcil, ne me croyant certainement pas. C'est si visible que je craque pour lui ? Sans pour autant insister, il corrige l'exercice que je viens de terminer.

— C'est parfait.

Eurêka ! Je manifeste ma joie par un petit cri, qui me vaut l'attention de la jeune fille à mes côtés. Je ne prends pas la peine de m'excuser, après tout, c'est mon droit d'exprimer mes sentiments. Épuisée, quatre heures sans manger, c'est pas top, je décide qu'il est temps de mettre fin à notre révision.

— Je crois que c'est tout pour aujourd'hui ! On reprend dimanche ?

Il s'apprête à hocher la tête, quand il se reprend.

— J'ai un empêchement, je peux pas venir.

Je me pince les lèvres, mais le rassure aussitôt que ce n'est pas grave. Chacun a sa propre vie à côté. Alors que je sors ma porte-monnaie pour régler l'addition, Erwan sort une carte bleue, qu'elle tend à la serveuse. Dès qu'elle part, je ne peux m'empêcher de le taquiner.

— Tu veux jouer au gentleman ?

Il fronce les sourcils et rétorque immédiatement.

— Pas du tout ! C'est juste que tu as trop attendu ma venue. La moindre des choses, c'est payer ton milkshake.

J'ai envie de lui dire qu'il n'a pas été en retard. Qu'il est même venu dix minutes en avance. Mais je me retiens. Nous rangeons alors nos affaires et il récupère sa carte. Une fois dehors, je ne peux m'empêcher d'inspirer profondément et de relâcher mon souffle.

— Tu écris des histoires ? Interroge-t-il.

Habituée à ses questions du jour — sans queue ni tête —, je me stoppe et décide de me prêter au jeu. Ça sera également l'occasion pour moi d'en apprendre plus à son sujet.

— Non, mais j'écris des poèmes. Pourquoi ?

Il hausse les épaules.

— Le choix d'un café, la joie sur ton visage comme si tu respirais pour la première fois et le fait que tu n'es pas du tout à l'aise avec les sciences.

Avait-il réellement remarqué toutes ces petites détails sur moi ? Détails dont moi-même je n'avais pas conscience jusqu'à aujourd'hui. Et bêtement, je souris.

— Je me sens à l'aise avec les sciences. Ce sont elles qui ne m'aiment pas. Un amour à sens unique, dit-on.

Il lâche un rire. Vrai. Sincère. Pour la première fois. Et ça me paraît si merveilleux. Si unique. Je suis pratiquement sûre que si j'avais un caméra, je l'aurais déjà pris en photo. Pour immortaliser ce moment. Et surtout ses deux fossettes.

— Et tes dires ne sont que des préjugés à propos des écrivains. Ce n'est pas parce que tu portes toujours un sweat-shirt, que tu as les cheveux toujours coiffés et que tu es le parfait petit élève que je vais dire que tu es un geek.

Sa race ! Si le médaille de la maladresse existait, je suis sûre qu'il me serait discerné. Cependant, à mon plus grand étonnement, il ne bronche pas. Il ne grogne. Il y a vraiment quelque chose qui cloche. Il s'apprête alors à reparler quand je le devance.

— Tu vas encore me poser une question ?

— Comment tu as deviné ?

Je lui lance un regard, l'air de dire que c'était complètement prévisible.

— Tu t'es assez amusé. C'est à mon tour de t'en poser, quatre comme toi aussi.

Il semble surprise. Mais ne réfute pas ma proposition — qui n'en est pas vraiment une. D'ailleurs, il rajoute une indication.

— Tu n'a pas répondu à ma première question. Ça fait donc trois.

Ma tête fourmillant de questions, je ne peux m'empêcher de me défendre.

— Mais tu l'as posé. Donc, j'en pose quatre. Mais tu ne réponds qu'à trois questions. Un peu un joker à utiliser au bon moment.

Mon petit jeu lui plaisant bien, il accepte. Il sort son téléphone et compose un numéro. J'entends toute la conversation, sans pour autant comprendre. Quand il raccroche, il m'explique qu'il demandait à son chauffeur de ne pas venir, préférant rentrer à pied. Cela m'indique dans l'immédiat que c'est sûrement un gosse de riche.

On se met dès lors en route. Un silence règne. Silence dont je profite pour réfléchir à mes quatre questions, dont une sans réponse. La première me venant presque automatiquement, je me lance.

— Pourquoi tu t'es moquée de moi le jour de la rentrée ?

Et je comme je devais m'y attendre, la réponse ne vient pas dans la seconde qui suit. Nous continuons de marcher sur le sentier des belles rues de France. Le vent d'automne souffle sans grande force, mais suffisamment pour faire voler mes cheveux en l'air. Look de fille négligée, bonjour. Je lance un regard à la pâtisserie à ma droite. Endroit que je fréquentais énormément lors de mes balades avec Loïc en ville. Notre principal point commun était la gourmandise. Et heureusement, grâce à lui, je n'avais pas de complexe face à ma petite taille et à mon poids disproportionné. 

Il avait sa petite touche à lui. Et il était toujours là au moment où j'avais besoin de lui. Lors de mes peines, quand ma mère me délaissait et laissait place à ses impulsions ; en passant par mes moments de joie, quand j'obtenais la moyenne dans un contrôle de mathématique. De petites choses qui m'ont vraiment aidé à tenir durant mon année de seconde. Jusqu'en mai du moins.

— Je m'étais disputé la veille avec mon père a propos de mon futur. Et disons que j'ai voulu vaincre les émotions par les émotions, en essayant de ne pas être le seul sur les nerfs, avoue-t-il enfin.

D'un côté, je suis plutôt contente qu'il décide enfin de mettre fin à mes théories plus farfelues les unes que les autres en me répondant sincèrement. Ce jour-là, j'ai vraiment crue que j'étais maudite. De l'autre, il ne s'en est peut-être pas rendu compte, mais ses soucis avec son père me rappellent les miens avec ma mère. Et je meurs d'envie de creuser un peu plus pour en savoir davantage. Par contre, si je lui pose d'autres questions, mon forfait à questions sera comme gaspillé.

— Ce n'est pas un peu égoïste ? Je n'y étais pour rien, moi !

Il regarde un moment le ciel avant de refaire descendre son regard bleuté devant lui.

— Si. Mais excuse-moi, tu as exactement la même couleur d'yeux et de cheveux que mon père.

Je fronce les sourcils un moment avant de rire. En remettant une mèche rebelle derrière mon oreille, je récupère un peu de souffle. Ma sœur m'a déjà parlé à propos du fait que quand elle est énervée, elle aime bien passer sa rage sur quelque qui ressemble à la cause de sa colère. Et je ne l'ai jamais prise au sérieux jusqu'à présent.

— Pourquoi tu rigoles ? demande-t-il comme si c'était tout à fait normal pour lui de dire de telles choses.

J'étouffe le nouveau rire qui s'apprête à naître, en essayant tant bien que mal de cacher mon hilarité.

— C'est juste que je trouve ça bizarre. Ma sœur est ainsi également, et je trouve ça étrange mais en même temps, drôle.

Erwan ne dit rien en échange, tandis que on vire à gauche, approchant de la rue de chez mon père. Réfléchissant déjà à une deuxième question, faisant attention à ne pas vendre le joker rapidement, je joue carte sur table.

— Quand je t'ai vu dans le stock lors de la fête chez Élodie, tu as dit des choses bizarres. Et j'ai cru entendre que tu avais déjà eu le béguin pour une autre fille avant Jessica. C'était qui ?

Oui, je risque gros. Il va potentiellement utiliser l'arme secrète. Mais qui ne tente rien n'a rien après tout, non ?

— Attention, réfléchis bien. Tu vas sûrement avoir bien du joker après, le préviens-je, un sourire sadique au visage.

Je vois clairement sur son visage qu'il hésite énormément. Entre me répondre ou abandonner. Et je me dis clairement qu'il doit cacher beaucoup de secrets. Dont lui seul détient la clé. Finalement, il décide de m'en révéler plus.

— Tu ne la connais pas et vu les circonstances dans lesquelles on a mis fin à notre relation, je préfère que tu n'en saches pas plus. Est-ce une réponse claire pour toi ?

Je hoche la tête. Puis me rappelle qu'il ne me reste plus qu'une seule question en ma possession. C'est bien dommage, je commençais à bien m'amuser. Voyant que je suis presque arrivée, je constate qu'il est temps de mettre un terme à ce petit jeu.

— Tu n'a pas de bonne relation avec ton père, pourquoi ?

Erwan se gratte nerveusement l'arrière du crâne et je comprends que là aussi, je me suis aventurée sur un terrain glissant. Pourtant, je ne recule pas. C'est le but du jeu, non ? L'espace d'une seconde, j'imagine qu'il va jouer le joker, mais il décide finalement de tout me dire.

— Parce qu'il a tué ma mère, annonce-t-il sèchement.

La réponse est si brutale et anormalement sauvage. Il l'a dit d'une voix haute, comme d'habitude. Mais rempli de tant de haine et de sécheresse. Et ça tourne en rond dans ma tête. Son père a tué sa mère ? Je déglutis durement. Ce n'est pas possible, non ? Comment quelqu'un peut-il commettre un tel acte ?

— Pas au sens propre, mais en partie en si.

Je ne suis plus sûre de bien suivre. Évidemment, la phrase qu'il ajoute me rassure. Mais elle m'inquiète aussi. En partie, si. Je me rends compte à présent, que je ne suis pas la personne la plus malheureuse au monde. Au contraire. D'autres vivent pire que moi. Ils luttent. Ils se battent. Mais moi, je suis tellement absorbée par ma peine, que je ne prends pas le temps de penser aux autres. C'est toujours mes petits problèmes qui comptent. Quelle égoïste, je suis !

Nous nous arrêtons dès lors devant la rue qui mène chez lui, moi qui doit prendre un autre chemin. Je me mords la lèvre inférieure, tandis que lui, face à moi, observe le vide. Puis soudainement, il déclare :

— Merci de m'avoir écouté, Soleil. Je crois que c'est la première fois que je parle autant.

Son sourire a disparu, ses mains sont dans ses poches, ses yeux semblent porter tout le fardeau du monde et sa peau devient encore plus pâle sous le soleil de l'après-midi. Là, je reconnais bien Erwan.

— C'était rien. D'ailleurs, ma dernière question ! Pourquoi portes-tu toujours un sweat-shirt ?

Pour la première fois, je crois que Erwan se rend compte à quel point ce jeu peut devenir très dangereux. Les yeux écarquillés, comme si il venait de le réaliser et se demandait pourquoi il a accepte d'y jouer, il ouvre la bouche. Prêt à parler. Quand il la referme, garde silence et articule tout doucement de sa voix grave :

— Joker.

Sa race, le chimpanzé de l'Amérique du Nord, trouvé en Éthiopie ! C'était exactement la question à laquelle je souhaitais une réponse. Celle que j'aurais même du poser en premier. Je tape sur le sol et grogne.

— Tu n'a pas le droit !

— Si, c'était ça les règles du jeu, non ?

Et voilà le retour de Erwan l'ennuyeux. Un souvenir me revient en tête.

— Ah, Erwan, écris mon numéro. Comme ça, si j'avance de Jessica, je pourras facilement te prévenir.

Il sort son portable — un iPhone 8  —, sans piper mot, j'écris mon numéro et met un moment à choisir mon prénom. Si j'écris Sun ou Mélanie, il risque de chercher dans Soleil. Toute fière du pseudo qui me vient à l'esprit, je le tape rapidement et lui rends son appareil électronique.

— Future chimiste ? il est à haute voix.

Je hausse les sourcils, souriant, sans pour autant dévoiler mes dents.

— Bah oui, t'es un super professeur, alors pourquoi pas ! Et c'est pour aussi mettre fin à tes préjugés des fans de la littérature, car...

Je ferme automatique ma bouche quand je me rends compte que je viens de lui donner une qualité. De le complimenter. Je ne sais pas s'il a entendu car il n'y a aucune réaction sur son visage. Il se contente seulement de ranger son téléphone et de remettre ses mains à leurs places. Indéchiffrable. C'est exactement ce qu'il représente pour moi. Une énigme. Un mystère. Et que je me dois d'éclaircir.

— Bon, à demain alors, déclaré-je.

— Ouais, ajoute-t-il simplement.

J'hésite entre partir immédiatement ou lui serrer la main, en guise d'au revoir. Je n'ai pu le toucher qu'une fois, lors de la soirée de Élodie. Mais là aussi, il ne m'a que effleuré. Finalement, c'est lui qui fait le grand pas, en me tendant la main. Tremblante, je la lui sers. Et nous restons un bon moment comme ça. La sensation est étrange, sans être désagréable. Quand il me relâche la main, il s'éloigne aussitôt, et je ne tarde pas à faire de même.

Quelle après midi de folies !

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Surprise ! Un long chapitre, de 3000 mots, et en plus de quatre jours en avance ! Uiiii, j'ai carburé grâce à une certaine Luna qui a dit que attendre dimanche c'était trop long ! Et grâce à elle aussi, à qui j'avais promis un chapitre excitant, bah, j'ai dû recommencer mon chapitre et changer les plans ! J'espère que ça te plaît et que tu es contente 😍❤.

Toutefois, ça reste une surprise pour tous mes lecteurs que j'aime. De petites questions s'imposent et n'oubliez surtout pas d'y répondre 😮.

—Que pensez-vous de ce rapprochement ? Des questions ? Des réponses ? Oui, j'ai révélé des trucs, je ne suis pas si sadique que ça enfaite 😂

—Hâte du prochain cours ?

Qu'attendez-vous du prochain chapitre ?

C'est tout ! Merci de me lire, de voter et de commenter, vous êtes les meilleurs 💙

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