Chapitre 1
Park Jimin vivait au nord de la Corée, dans la plus belle maison de la ville, avec son père et sa mère. Il avait eu la chance de descendre d'une lignée riche et impériale. En effet, son père était Comte, et très proche de la famille de l'Empereur. Il se rendait au palais une fois par mois pour dîner en compagnie du souverain. Autant dire que Jimin était très bien éduqué. Il vivait pratiquement dans les parures d'un prince. Et il en était digne. Il n'avait jamais été un enfant capricieux et faisait tout pour faire plaisir à ses parents. Il les aimait tous les deux tendrement. Ils étaient tout pour lui. N'ayant aucun ami, cela se comprenait.
Aujourd'hui, âgé de dix-huit ans, il était de toute beauté. Son père décida qu'il était temps pour lui de se marier. Seulement, Jimin ne voulait pas. Dans sa tête, il n'était pas prêt. Il était encore assez immature et ne pensait qu'à s'amuser. Pourtant, son père le força à aller voir une marieuse. Il avait donc mit son plus beau costume, brillant comme un sou neuf. Mais avant de se rendre au rendez-vous, il passa plus d'une heure à prier dans le kiosque où se tenait les pierres tombales de ses ancêtres. C'était devenu un rituel. En faisant cela, il pensait que peut-être, ses aïeux l'aideraient à tout affronter dans la vie, à faire les bons choix.
- Es-tu prêt ?
Jimin se releva précipitamment en entendant la voix de son père. Il s'inclina poliment devant lui, comme il le faisait toujours lorsqu'il apparaissait dans la pièce.
- Oui, Père.
Le regard dur et ferme, son père s'avança vers lui. Il lui frotta les épaules pleine de poussière et recoiffa ses cheveux ébouriffés sans aucune émotion reflétée sur le visage. Jimin se laissa faire, fixant son père sans le gêner.
- Là, tu es prêt.
- Merci, Père.
- Ne me déçois pas, surtout.
- Jamais.
Le jeune adulte lui adressa un petit sourire. Mais son père n'y répondit pas. Il avait toujours été froid avec tout le monde, mais surtout avec son fils. Le plus âgé s'écarta, lui indiquant de se rendre à son rendez-vous. Le dernier né de la famille Park s'inclina une dernière fois, avant de se rendre au salon de leur gigantesque maison. La marieuse était déjà arrivée. Elle faisait le tour de la pièce, scrutant chaque meuble, chaque objet présent dans la pièce. Lorsque Jimin entra, il s'inclina en un parfait angle droit.
- Bonjour, Dame Marieuse. C'est un honneur de vous recevoir.
La femme lui fit un signe de la main, lui indiquant qu'il pouvait se relever. Elle se posta face à lui, le regardant sous toutes les coutures. Cela gêna légèrement le jeune adulte. Elle faisait une tête de moins, mais paraissait tout de même intimidante.
- Vos parents ne vous ont pas raté, dites-moi.
- Eh bien, je crois que non, Madame.
C'est vrai qu'avec ses yeux noisettes, ses lèvres pulpeuses, ses joues parfaitement rondes et un peu roses, et ses cheveux bruns qui descendaient jusqu'au milieu de son dos, Park Jimin ressemblait à une fleur. La marieuse fixa sa tâche de naissance dans son cou, reconnaissable entre milles. En forme de lune, c'est le petit détail qui le faisait connaître partout dans le royaume. La femme fit un dernier sourire narquois avant de s'asseoir sur l'une des nombreuses chaises autour de la table.
- Il sera évident que vous trouverez une femme très bientôt. Nous organiserons une journée afin que vous puissiez rencontrer la fille de la cousine de l'empereur. Elle a seulement un an de moins que vous.
- Ce sera un mariage... d'intérêt ? demanda le jeune en ne bougeant pas de sa place.
- Bien sûr. Vous êtes très riche. Et il est évident que nous devons trouver le meilleur parti pour vous et votre famille, si vous voulez lui faire honneur.
- Et si je ne veux pas d'une fille comme épouse ?
La marieuse arqua un sourcil.
- Que voulez-vous dire ?
- Je ne suis pas de ce genre-là, Madame.
L'expression de la femme changea. On aurait pu croire qu'elle venait de voir un fantôme.
- Mon Dieu, mais vous n'y pensez pas ! Notre pays interdit les relations entre deux hommes, ne le savez-vous pas ?
- Bien sûr que je le sais ! Et je trouve ça bien dommage. Nous sommes au 5ème siècle, il serait temps d'évoluer.
La marieuse soupira.
- Votre père ne sera pas content d'apprendre ça.
- Je me fiche de ce que mon père pense. Je veux d'un mariage d'amour, et rien d'autre.
La femme le fixa longtemps. Jamais, de toute sa vie, elle n'était tombée sur un cas aussi têtu et désespéré.
~
Au dîné, l'ambiance fut plus que tendue. Personne ne parlait. Jimin versa lentement du thé dans chacune des tasses, alors que ses parents commencèrent à manger. Ce n'était pas bon signe. Et l'orage qui grondait dehors n'arrangeait rien. Il commença à manger à son tour, ne quittant pas son assiette des yeux. La nourriture paraissait fade dans sa bouche. Il mâcha difficilement, avant d'avaler sa bouchée. Finalement, la faim n'était pas là.
- Tu m'as menti, Jimin, finit par dire le Comte sans lever le nez de son plat.
Jimin, lui, releva la tête.
- Menti ?
- Oui. Tu m'as dit que tu ne me décevrais pas.
Le jeune adulte reposa ses baguettes en expirant fortement par le nez.
- Père, je...
- Tu ne fera pas un mariage d'amour, Jimin. Nous n'avons jamais envisagé cela comme ça. Ce mariage est prévu depuis ta naissance. Tu n'as rien à redire.
- Si, bien sûr que si au contraire. C'est de moi qu'on parle, de ma vie !
- Tu crois vraiment que tu pourrais te marier avec un garçon ? Sérieusement ? Tu imagines si quelqu'un l'apprenait ? Nous serions la risée du pays. L'empereur nous enverrait tous au bûcher, que je sois son ami ou non. Tu sais comment j'ai réagi quand la marieuse me l'a annoncé ? J'ai vomi. J'ai rendu mes tripes, Jimin. Tu ne m'as jamais fait autant honte. Tu me déshonores et tu déshonores cette famille entière. Mon Dieu, faites que nos ancêtres ne nous entendent pas...
L'enfant unique avait envie de pleurer. Une boule s'installa dans sa gorge. Il se tourna vers sa mère pour voir une quelconque réaction sur son visage, mais il n'y en avait aucune. Les femmes n'avaient pas le droit de donner leur avis, dans n'importe quelle situation. Jimin soupira. D'un côté, il comprenait parfaitement la colère de son père. Il voulait que le nom Park se perpétue. Qu'il ait des petits-enfants et que le nom Park reste à jamais.
Un homme entra soudainement dans la pièce. Jimin reconnut son identité grâce à sa tenue : c'était un messager de l'empereur. Ce dernier s'inclina poliment devant le maître de maison.
- Monsieur Park, un message de l'empereur Kim.
L'homme lui donna le parchemin, et le quitta. Le comte n'attendit pas pour dérouler le papier. Sa femme et son fils ne le quittèrent pas des yeux. Cela devait être important pour qu'un homme se déplace. Au fur et à mesure qu'il lisait, il serra la mâchoire. Jimin s'inquiéta.
- Père, que se passe-t-il ?
L'homme replia le parchemin et soupira discrètement.
- Les Huns ont envahit la Corée. Notre pays est en guerre.
Jimin porta une main à sa bouche.
- C'est épouvantable.
- Et l'empereur décrète la mobilisation d'un homme par famille. Je dois me rendre au camp demain, à l'aube.
- Si tôt ? Papa, n'y va pas. Avec ta blessure de guerre, tu ne tiendrais pas une seconde sur le champ de bataille. Et tu n'es plus aussi jeune qu'autrefois. Tu t'es déjà battu bravement, mais tu ne peux plus.
- C'est un honneur pour moi de m'y rendre et de me battre au nom de mon ami l'empereur Kim.
Jimin ricana.
- L'empereur Kim ? Ton ami ? Il t'envoie à la mort ! Laisse-moi y aller à ta place.
- Non. Tu dois rester en vie. Tu dois rester pour te marier, avoir des enfants et perpétuer le nom de la famille. Si jamais je ne revenais pas, ta mère prendra soin de toi, je le sais.
C'en était trop pour Jimin. Il se leva de table sans même s'excuser et s'en alla vers sa chambre. Une fois à l'intérieur, il fit les cent pas. Il ne savait pas du tout quoi faire. Sa raison lui disait de reste ici comme lui avait dit son père, de grandir et vieillir pour se marier et avoir des enfants, laissant son père partir au front et se battre jusqu'à la mort. Mais son cœur lui disait d'y aller à sa place, de le sauver et de se sacrifier pour lui. L'imaginer dans un champ de bataille, raide mort lui donnait la nausée. Une pulsion enfouit au fond de lui le poussa à le faire. Il prendrait la place de son père dans l'armée pour se battre contre les Huns. Il attendit patiemment que ses parents sortent de table afin de récupérer l'avis de conscription. Une fois parti, il se glissa hors de sa chambre et se rendit de nouveau au salon. Par chance, le parchemin était encore sur la table. Il déroula le papier jauni et le lu rapidement. S'il devait remplacer son père, il devait se faire passer pour quelqu'un d'autre. L'empereur ne devait pas savoir que le futur mari de la fille de sa cousine entrerait dans l'armée, car il n'en avait pas le droit. Alors il prit de l'encre et changea les lettres du nom de son père. Désormais, il s'appellerait Hua Ling. Il ne savait pas s'il avait une tête à s'appeler comme ça, mais il ne pouvait plus changer. Il souffla sur l'encre pour qu'elle sèche plus vite. Il roula ensuite le papier et se dépêcha d'aller dans la salle d'entraînement de son père. Il n'y allait plus depuis des années, suite à la blessure de sa jambe. Le garçon ouvrit l'armoire au fond de la salle. Il découvrit alors l'armure de son père. Elle était magnifique, malgré qu'elle soit légèrement endommagée par les coups d'épée qu'elle avait reçu. Le jeune homme la toucha du bout des doigts. Dès l'instant où il rentra en contact avec elle, il put ressentir sa force et sa hargne, comme si elle était vivante. Des flashs apparurent devant ses yeux. Des images de batailles, de sang et de flèches. Jimin déglutit. C'est ce qu'il allait vivre très bientôt.
Son attention se porta vers l'épée de son père. Le manche était sculpté dans de l'ivoire. Le brun la prit et la brandit au-dessus de sa tête. Elle était légère, souple, brillante, comme si elle n'avait jamais été utilisée. Pourtant, il savait très bien qu'elle avait servi, tranchant quelques gorges, ôtant quelques vies. Cette arme dégageait quelque chose de fort, de puissant et d'impénétrable. Jimin se mit à genoux sur le sol. S'il devait se faire passer pour quelqu'un d'autre, il devait aussi changer un minimum d'apparence. Alors il détacha ses cheveux longs et les ramena en une queue. La lame se posa contre sa chevelure et il retint son souffle. Il coupa le tout, à ras ou presque. Voir ses cheveux au sol lui fit ressentir un sentiment étrange. Comme si c'était l'annonce d'un grand changement, chez lui mais aussi dans sa vie. Il alla se regarder dans un miroir. Il ne se reconnut pas. Mais une chose était sûr, il était toujours aussi attirant. Une fois de nouveau devant l'armoire, il se déshabilla entièrement et enfila l'armure de son père. Elle était parfaitement à sa taille, mais un peu lourde. Il s'y habituerait. Il prit l'épée et se dirigea d'un pas décidé vers les écuries. En se rendant là-bas, il passa devant la chambre de ses parents. Ils dormaient à poings fermés. Jimin les regarda une dernière fois. Ils ressemblaient à des anges. Il ne put s'empêcher de lâcher une larme. Qu'est-ce qu'ils allaient lui manquer. Il n'avait jamais passé une journée sans eux. Il allait être sans repères, mais c'était pour le bien de son père.
Une fois à l'écurie, il monta sur le cheval qu'on lui avait offert à ses quinze ans. Le plus beau cadeau qu'il ait jamais eu. Le garçon regarda une dernière fois sa demeure. Sa maison si grande, en haut de la colline, qui surplombait la ville. Beaucoup de gens les enviaient. Et il comprenait pourquoi.
- Yah !
Et il quitta son monde, tout ce qu'il connaissait, pour se perdre dans le néant. Il se plongea dans cet endroit inconnu. D'un côté, cela l'excitait. Il n'était jamais sorti de sa maison et découvrir le monde l'avait toujours tenté. Une nouvelle aventure l'attendait. L'aventure de sa mort prochaine, peut-être. Mais en attendant, il allait devoir s'intégrer au reste des soldats et se faire passer pour quelqu'un du petit peuple. Il devra se comporter comme eux, chose qu'il n'avait jamais fait. Il n'était pratiquement jamais descendu au village admirer ces personnes qui travaillaient sans cesse dans les champs ou qui aidaient la ville à rester telle qu'elle était. Cela allait changer. D'un côté, il avait peur. Peur que l'on découvre son identité. Peur que l'on ne le tue pour ce secret. Peur d'être renvoyé chez lui et de déshonorer sa famille à jamais. Peur de mourir sur le champ de bataille. Alors que le vent lui fouettait le visage, la réalité le frappa. N'était-il pas entrain de faire une bêtise ? Il était encore temps de renoncer... Non. Jimin ne devait pas reculer. Il se l'interdisait.
Après des heures de route, il aperçut le camp. Des centaines de tentes étaient déjà installées. Caché dans la forêt, personne ne pouvait le voir, mais il pouvait tout observer. Que c'était impressionnant. Il faisait encore nuit, et le brun était encore fatigué. Jimin attacha son cheval à un arbre et s'installa à même le sol pour faire un somme. Demain, sa vie allait changer.
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