Case du 08/12 de l'avent

Heya ! Cette nouvelle est en réalité la 8ème case du calendrier de l'avent (collaboratif, vous l'aurez compris) de trois_poney ! Je la publie donc quand même sur mon compte :)
Elle n'a pour l'instant ni titre ni couverture, d'où l'intitulé du chapitre, mais peut-être que je changerai !
Bonne lecture !!
-Quinoa
PS : Pour plus d'adeptes des fins sadiques, jetez un coup d'œil aux autres nouvelles du calendrier... x)

~~~~~~



     Chloé se hissa sur la pointe des pieds. Derrière son sourire serein et ses yeux rieurs se délimitèrent alors les contours d'un souvenir. Des contours flous, perdus dans une brume épaisse. Son père la portait, à bout de bras, elle faisait mine de tomber... et riait aux éclats. Puis elle déposait, avec une concentration presque solennelle, la pointe dorée en haut du sapin, achevant ainsi sa décoration.

     Celle que Chloé déposa doucement était, cette fois-ci, taillée dans du verre d'un transparent bleuté, qui brillait mille fois plus que celle de son enfance. Mais lorsqu'elle l'enfonça sur la plus haute branche, cette dernière ploya, ploya... Et le verre délicat tomba. Catastrophée, Chloé suivit sa chute des yeux. Puis le verre se brisa, et les mille et un éclats rebondirent, accrochant le soleil comme au ralenti, avant de retomber. Immobiles.

     Elle ferma les yeux. Éclats.

     Au-dehors, il faisait de plus en plus froid. C'était inévitable. Emmitouflée dans plusieurs couches de vêtements, la tête rentrée dans ses épaules et son écharpe, et les poings serrées dans ses poches, glacés malgré ses gants, Chloé avançait presque à l'aveuglette à cause de son bonnet trop grand qui descendait sur ses yeux. Lorsqu'une pièce tomba de sa poche et roula sur les pavés jusqu'à quelques mètres d'elle, elle s'arrêta une seconde. Une femme se pencha pour ramasser l'euro, et le lui tendit.

     — Gardez-le, lui lança Chloé avec un sourire. Gardez-le.

     Et elle continua sa marche. Mélancolie.


     Mathilde sourit. Elle sourit d'un sourire lumineux, à l'adresse de la passante qui lui laissait l'euro, un simple euro qui ferait, pour elle, la différence. Elle le serra dans sa main, comme pour réchauffer le métal.

     Indécise, elle parcourut la rue, s'arrêtant parfois devant une vitrine. Mais ce fut devant la plus petite d'entre elles qu'elle s'arrêta.

     Pour une fois, ses filles auraient un cadeau de Noël. Pour une fois, elle leur offrirait des clémentines. Un sourire se dessina sur ses lèvres. Allégresse.


     La caissière reçut la pièce machinalement, comme toutes les autres. C'était devenu un automatisme. La femme repartit avec ses clémentines, toute sourire, et Alizée rangea l'argent, puis regarda sa montre. Il était encore tôt, et les personnes arrivaient au compte-goutte. Elle soupira, mais déjà les petites cloches sur la porte carillonnèrent, annonçant une venue. C'était un garçon d'une dizaine d'années, dont les doigts gauches triaient des pièces dans ses mains en coupe. Il salua d'un « Bonjour » timide, et demanda deux baguettes. Alizée ne comprenait pas pourquoi les gens venaient ici pour acheter leur pain, ils auraient mieux fait d'aller dans une vraie boulangerie, mais c'était leur choix. Alors qu'il s'apprêtait à repartir, elle l'arrêta :

     — Tiens, lui dit-elle en lui tendant le bol de chocolats offerts posé devant sa caisse. Choisis-en un.

     Le jeune garçon sourit et en prit un, avant de filer.

     Alizée murmura pour elle-même : « Et les "au revoir", hein ? Ces jeunes, je vous jure... ». Elle souriait. Tendresse.


     Corentin fila, le rouge aux joues. Sa mère savait pourtant qu'il détestait aller acheter le pain tout seul, et l'autorisation d'en manger le quignon ne compensait rien. Mais autant en profiter ; il arracha le bout de la baguette, creusa du bout des doigts un trou dans la mie, et y glissa son chocolat, avant de croquer dans son goûter improvisé.

     Arrivé devant la boutique de ses parents, il se dépêcha d'entrer au chaud. Tout en enlevant sa veste, il tendit le pain à son père, qui rit :

     — Tu en profité, Co, dis-moi.

     Corentin lui lança un clin d'œil. Rires.


     Luc prit le pain, le sourire aux lèvres.

     — Allez, file, Co.

     Ce dernier ne se fit pas prier, tandis que Luc rangeait les baguettes et reprenait sa place derrière le comptoir, au milieu des pots de peinture. Bientôt, la porte s'ouvrit, et entra une femme dont le bonnet, apparemment trop grand pour elle, lui tombait sur les yeux. Elle sortit les mains de ses poches, visiblement à contrecœur, et regarda autour d'elle, dans les allées.

     — Je peux vous aider ? s'enquit Luc.

     — Eh bien, je cherche de l'encre pour verre, répondit la femme d'une voix un peu sourde. Vous avez ça ?

     — Oui, bien sûr. Venez, c'est par ici.

     Il guida la femme jusqu'aux rangées de pots, de multiples tailles et de multiples couleurs. Elle en choisit quelques-uns, les acheta, puis partit, toujours mutique à l'exception d'un « Au revoir ». Il la regarda partir, un peu intrigué. Curiosité.

     Chloé avait enfin trouvé ce qu'elle cherchait. Les trois pots d'encre – les couleurs primaires – sous le bras, elle rentra chez elle. La tête ailleurs, elle ramassa les bouts de verre, mettant les plus gros de côté, puis nettoya les bris qui restaient sur le sol. Puis elle prit les morceaux aux formes et aux tailles hétéroclites, et les peignit, de toutes les couleurs possibles et imaginables, pourvu qu'elles soient gaies. Elle les attacha avec des ficelles de nylon aux tringles de ses rideaux, devant les fenêtres où s'engouffrait le soleil, et s'assit pour admirer son travail. Les morceaux de verre, agissant comme des vitraux, projetaient des ombres colorées et mouvantes qui dansaient sur le sol. La plus haute branche du sapin, restait, quant à elle, dénuée de décoration. Peu importait. La maison était à présent colorée.
     Créativité.

     Ce qu'elle n'avait pas prévu, c'était l'effet loupe du verre convexe – ou concave, tout dépend du côté d'où on se place.
     Ce qu'elle avait prévu – et elle s'en était servie – c'était que le soleil passe aux travers des morceaux.
     Mais ce qu'elle n'avait pas vu, c'était que le soleil filait droit vers le sapin.
     Ce qu'elle n'avait pas prévu, c'étaient les premières flammèches qui commençaient à lécher les épines des branches les plus basses.
     Ce qu'elle n'avait pas prévu, c'était l'incendie.
                                                                                                      Flammes.


Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top