La ronde des sentiments

"Je pense à toi tout le temps. Je pense à toi le matin, en marchant dans le froid. Je fais exprès de marcher lentement pour pouvoir penser à toi plus longtemps. Je pense à toi le soir, quand tu me manques au milieu des fêtes, où je me saoule pour penser à autre chose qu'à toi, avec l'effet contraire. Je pense à toi quand je te vois et aussi quand je ne te vois pas. J'aimerais tant faire autre chose que penser à  toi mais je n'y arrive pas. Si tu connais un truc pour t'oublier, fais-le-moi savoir."

Mardi

Saylor et Amélia s'observent toujours aussi longuement.

De la naissance de deux yeux verts à la fin de yeux bruns.

Elles ne pensent à rien dans ces instants, juste à l'avenir devant elles.

Saylor à sa mort, Amélia à ce qui peut bien hanter sa protégée.

Rien n'a pu les réveiller de leur sorte de transe communicative.

Pas même Béatrice qui est venue s'asseoir près de Saylor, toujours de la même façon.

L'échange a perduré des heures. 

Au moins trois. Béatrice a fini par compter, ennuyée par ce spectacle qu'elle ne peut pas comprendre.

Cette connexion qui lie Amélia à Saylor semble presque irréaliste.

Seule avec ses maux, Béatrice a sorti son carnet pour y écrire les quelques sonnets qui lui ont trotté dans la tête sur le chemin.

Mais ils sont irrémédiablement tâchés de noir.

Le soir venu, Amélia prend Saylor dans ses bras avant de partir.

Ce simple geste réconforte tellement la fille aux cheveux bleus qu'elle en oublie la présence de Béatrice.

Quand elle s'en rend compte, Saylor l'entend s'éloigner et elle demande à son âme pourquoi est-ce que dieu lui a fait don d'un tel égoïsme, honteuse de l'avoir laissée filer.

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