"Le bonheur est au bout du chagrin."

Dimanche

Amélia lui manque, à Saylor.

Car elle, elle aurait su quoi dire à Béatrice, non ?

Dire. Haha. Dire.

Saylor s'est demandée plusieurs fois pourquoi elle ne disait pas simplement les choses.

Peut être que le fait qu'on puisse la comprendre sans qu'elle n'ait à s'exprimer la rassure.

Elle pourra mourir en paix, avec elles.

Béatrice est absente. Elle l'est beaucoup sans l'être vraiment.

Elle tourne toujours sur elle même et croise toujours sa jambe.

La même jambe sur le même genou.

Et ses yeux sont toujours couronnés d'une auréole rose.

Saylor a arrêté de la regarder, gênée de ne plus savoir comment se comporter en sa présence.

Le silence.

Le silence reste de marbre un moment avant que Béatrice ne se mette à rire.

Rire d'un petit rire cristallin.

Saylor reste hébétée devant ce spectacle. Il ne lui semblait plus avoir déjà entendu quelqu'un rire, encore moins Béatrice, qui passait pourtant le plus clair de son temps assise à ses côtés.

Et c'est à ce moment que celle-ci fit quelque chose d'extraordinaire envers Saylor, cette petite Saylor remplie de vide.

Elle lui adresse la parole.

- Bonjour.

Presque aussitôt, Béatrice détourne son regard vers le banc d'en face, un sourire énigmatique aux lèvres.

La bouche de Saylor s'entrouvre, comme pour laisser entrer la douceur de ce moment.

Son accent. L'accent de Béatrice. Un petit accent canadien qui a envoûté Saylor, le temps d'un mot.

Un mot magique.

Saylor articule en silence une réponse que Béatrice semble remarquer du coin de l'oeil.

Se levant alors, elle part en trottinant joyeusement.

Saylor sait qu'elle se répétera toute la nuit ce petit mot qui fait toute la différence, remplissant de bonheur son âme égoïste.