La jeune femme monte les escaliers délabrés. Elle effleure les moisissures qui couvrent les murs. Chacun de ses pas résonne dans l'immeuble abandonné. Les fissures et les trous béants des façades laissent deviner l'agitation qui anime le centre-ville un peu plus loin.

L'air de la nuit la fait frissonner.

Elle continue sa progression.

Et enfin, elle débouche sur le toit.

Son regard se pose sur la lune, immense et ronde, qui semblait l'attendre. Malheureusement, la mère des cieux est le seul astre que l'on peut apercevoir ; les lumières de la cité cachent les étoiles.

La jeune femme observe les alentours. La noirceur du quartier isolé où elle se trouve contraste fortement avec les éclairages du centre. Mais cela lui importe peu, ici, dans cet espace quasiment en ruines où plus personne ne vit depuis des lustres, elle est tranquille.

Une bourrasque de vent agite ses cheveux et elle prend cela comme un signal. Elle jette un dernier coup d'œil à ce qui l'entoure et se dirige vers le parapet.

Puis elle grimpe sur le petit muret qui la sépare du vide.

La lune est au-dessus de sa tête et veille sur elle.

La jeune femme lève les yeux vers l'astre et sourit. Elle sourit comme elle n'a jamais sourit avant. Sa contemplation est silencieuse mais passionnée.

Le moment est venu.

Le moment est venu de rejoindre le ciel et d'abandonner cette terre.

Alors, doucement, elle se laisse tomber en arrière, vers le vide, les pupilles toujours encrées dans celle de sa mère céleste.

Et elle tombe, tombe.

Sa chute ressemble à celle d'un ange déchu, frêle silhouette qui se fait happer par le vide.

En même temps que son corps se laisse entraîner vers le sol, son esprit monte vers les cieux.

Et vient le moment, inévitable, où la scission se fait entre les deux. Le moment où son enveloppe charnelle se fracasse contre le béton dur et froid d'une petite cour abandonnée. Ses os se brisent et une tâche rougeâtre macabre se forme sous le corps étendu.

Ses yeux vides sont ouverts sur le ciel. Vers l'endroit où son âme a déjà disparue.

Cette nuit, les citadins pourront voir les étoiles. Et une brillera plus que les autres.