Chapitre 19
Note :
Pour rappel, je ne veux rien savoir des futurs épisodes (pas de titres d'épisodes, de noms de persos, d'éléments de grande ou moindre importance, RIEN). Merci de me pas me spoiler dans les commentaires.
S'il y a des épisodes récemment diffusés, il est également possible que je ne sois pas à jour. Alors au besoin demandez-moi où j'en suis avant d'en parler dans les commentaires de mes fics.
Merci.
***
Le reste de la journée se déroule dans le plus grand des calmes.
Avec ces rudes montagnes russes émotionnelles qui n'ont cessé de les secouer depuis la veille, ni Marinette ni Adrien ne souhaitent le moindre surplus d'agitation pour le moment. Bien qu'un peu plus sereine à présent qu'elle sait ses parents en sécurité, la jeune femme n'en reste pas moins à fleur de peau, à ce point sur les nerfs qu'il suffirait d'un rien pour qu'elle ne s'effondre de nouveau sur elle-même. Elle en a parfaitement conscience.
Et Adrien aussi.
Rarement le jeune homme a été aussi inquiet au sujet de sa partenaire. L'attaque de la veille a ravivé ses angoisses la concernant avec la violence d'une allumette jetée dans une flaque d'essence, et ce terrible feu n'a cessé de le consumer depuis. La peur est là, couvant comme un incendie sous la surface et dévorant lentement son esprit.
Bien sûr, Adrien sait que quoi que tenteront le Papillon et Lila, sa Lady trouvera toujours la force de lutter.
Elle est forte, courageuse, déterminée.
Plus que quiconque.
Plus que lui-même.
Mais il sait aussi qu'en cet instant précis, il craint tellement pour sa sécurité à elle qu'il n'est pas certain de pouvoir se battre comme il le fait d'ordinaire. L'image des immenses yeux bleus écarquillés d'horreur de sa coéquipière restent gravés dans son esprit et la sensation de ses doigts tremblants sous les siens s'attarde sur sa peau.
Réussira-t-il à penser clairement lors d'une attaque s'il ne voit que la fille derrière le masque, au lieu de Ladybug ?
Rien n'est moins sûr.
Alors, bien que sachant pertinemment que la situation précaire de Tom et Sabine ne leur offre guère le luxe de perdre du temps, Adrien et Marinette décident malgré tout de s'accorder une parenthèse dans les recherches qu'ils mènent habituellement entre deux combats. Les enquêtes sur le terrain, les interrogatoires des connaissances de Lila et les suppositions quant à la localisation de la jeune femme ou du Papillon devront attendre un jour de plus.
Là, ils ont besoin de tranquillité.
De repos.
D'une pause, plus que bienvenue au milieu de ce tourbillon de rage et de folie au cœur duquel le Papillon les a entraînés malgré eux.
Plus vite ils seront de nouveau en pleine possession de leurs moyens, plus vite leur duo retrouvera cet équilibre qui est l'une de leurs plus grandes forces.
Et alors, songent-ils avec l'ardeur du désespoir, plus vite ils réussiront à vaincre enfin leurs ennemis.
Confortablement pelotonnés l'un contre l'autre sur le canapé d'Adrien, les deux coéquipiers passent toute la matinée à regarder des films sur le gigantesque écran de télévision qui orne l'un des murs du salon.
Non pas qu'ils se soient pris d'une soudaine passion cinématographique, loin de là.
Adrien peine à se concentrer sur autre chose que la jeune femme qu'il tient entre ses bras, et Marinette peine à se concentrer tout court.
Mais s'ils seraient bien incapables de raconter les histoires qu'ils viennent pourtant tout juste de voir, tous deux n'en apprécient pas moins cet instant de détente. Les images qui dansent sous leurs yeux offrent une distraction bienvenue et les paroles qui s'élèvent dans la pièce empêchent leurs pensées de résonner trop fort sous leurs crânes.
Marinette n'espère rien de plus.
Elle veut juste débrancher son esprit.
Effacer, pendant quelques merveilleuses secondes, toute la crainte qu'elle éprouve pour ses proches et toute la souffrance que lui ont infligés le Papillon et Volpina.
Pour tenter de faire fondre cette peur qui la glace jusqu'au plus profond des os, la jeune femme cherche la douce chaleur du corps d'Adrien. Elle se blottit contre lui, puisant du réconfort dans sa présence, dans le poids de son bras autour de sa taille et dans son pouls qu'elle sent résonner sous ses doigts.
Les battements de son propre cœur accélèrent lorsqu'il la serre un peu plus fort contre lui.
Elle est avec Adrien, songe-t-elle avec une infinie reconnaissance. Avec Chat Noir.
Tout finira par s'arranger.
L'heure de manger arrive sans même que les deux coéquipiers ne le réalisent. Ce n'est que lorsque Tikki leur fait remarquer que le frigo a été pris d'assaut par un Plagg affamé et qu'il serait grand temps qu'eux-mêmes songent à se nourrir qu'ils se rendent soudain compte que l'heure du déjeuner est déjà passée depuis longtemps.
« Allez ! », les encourage-t-elle de sa petite voix flûtée. « Ce n'est pas bon de rater un repas. »
« D'accord, d'accord », réplique Marinette avec un léger sourire, tout en levant les mains en geste de reddition. « On fait une pause. »
« Et on la fait tout de suite », renchérit son partenaire, immédiatement récompensé par un regard approbateur de la part de Tikki.
Joignant le geste à la parole, les deux jeunes gens s'extirpent péniblement du canapé et se dirigent droit vers la cuisine. Ils mangent tranquillement, discutant de tout, de rien - et surtout pas du Papillon.
Une fois leur repas fini, ils retournent s'installer sur le canapé d'Adrien, bavardent un peu, puis remettent quelques films. Entre deux visionnages, Marinette ne manque jamais de demander de leurs nouvelles à ses parents, ni de donner des siennes à Alya.
Les heures continuent de défiler paisiblement, tandis que le soleil amorce une lente descente vers l'horizon. Ses rayons rasants nimbent l'appartement d'une chaleureuse lueur dorée, puis s'évanouissent pour laisser place à une semi-pénombre uniquement percée par l'écran de la télévision.
Marinette regarde sans réellement les voir ces formes qui se meuvent devant elle.
La fatigue trouble sa vision, l'empêchant de réussir à focaliser son regard. Elle étouffe péniblement un premier bâillement, en laisse franchement échapper un deuxième, puis sourit machinalement en voyant son coéquipier imiter son geste malgré lui.
« Et si on allait dormir ? », suggère-t-elle doucement.
Adrien lui jette un coup d'œil embrumé de sommeil et hoche mécaniquement la tête.
« Excellente suggestion, ma Lady », réplique-t-il en se passant inconsciemment les doigts dans les cheveux.
Le sourire de Marinette se fait un peu plus large encore lorsqu'Adrien laisse retomber sa main et qu'elle découvre les épis improbables qui se dressent à présent au sommet de sa tête.
Chat Noir lui-même s'en sort rarement avec des coiffures aussi désastreuses, y compris après une bataille difficile.
« Alors allons-y, chaton », lui lance-t-elle d'une voix amusée.
Sans perdre une seconde de plus, les deux coéquipiers se lèvent, éteignent la télévision et partent se coucher.
Un jour passe ainsi, puis deux.
Il ne faut que peu de temps à Marinette et Adrien pour réaliser que les récents évènements ont altéré encore un peu plus le fragile équilibre qui définit leur relation.
Ils ont toujours été proches. Plus proches que des amis, plus proches que de simples partenaires.
Mais désormais, cette proximité qui les unit se traduit aussi de manière physique.
Non pas que ce soit totalement nouveau, quelque part. Force est de reconnaître que cela fait déjà des mois qu'ils oscillent entre amitié et quelque chose d'une toute autre nature, et qu'une indéniable ambiguïté s'est installée dans la moindre de leurs interactions.
Ce qui sort de l'ordinaire, en revanche, c'est la fréquence à laquelle ils initient un contact entre eux.
Ils sont toujours, toujours en train de chercher la présence de l'autre.
Que ce soit une main glissée autour de la taille, une tête posée sur l'épaule, un baiser sur le front ou sur la tempe, ce sont des nuées touches affectueuses qu'ils entreprennent avant même de le réaliser.
C'est un mécanisme purement automatique.
Instinctif.
Ils se surprennent à se rapprocher sans cesse un peu plus, puisant dans la présence de l'autre un réconfort qui leur réchauffe le cœur à tous les deux. La chambre d'Adrien est même devenue celle de Marinette sans qu'ils se concertent ne serait-ce qu'une fois, comme s'ils craignaient inconsciemment que se séparer ne serait-ce qu'une nuit ne leur soit insupportable.
Et peut-être est-ce le cas, quelque part.
Cette présence, cette chaleur leur est devenue aussi indispensable que l'air qu'ils respirent.
Ils ont besoin l'un de l'autre.
Besoin de ces sourires, de ces encouragements énoncés avec tendresse ou manifestés silencieusement, de ces innombrables petits gestes de soutien qui les aident à croire que tout ira mieux un jour.
Ils sont proches, plus proches que jamais, et la ligne invisible qui les sépare s'atténue de jour en jour.
Elle se brouille, se désagrège, laissant l'amour et l'amitié s'entremêler un peu plus à chaque nouveau contact.
Mais peu importe.
S'ils ont tous deux parfaitement conscience de la profonde ambiguïté qui se cache désormais derrière chacune des nombreuses marques d'affection qu'ils partagent, Adrien et Marinette ne s'en formalisent pas pour autant. Ils ont bien d'autres choses à penser pour le moment.
Paris. Le Papillon. Lila. Le danger incessant qui plane sur leurs propres têtes et celles de leurs proches.
Cette terrible responsabilité les écrase, les empêchant de s'attarder sur leurs sentiments et sur ce qu'ils pourraient devenir si l'un d'eux n'osait faire qu'un pas de plus.
Et si l'un d'eux laissait ses lèvres s'attarder un peu plus loin ?
Et si l'un d'eux prononçait enfin une parole plus équivoque ?
Et si... ?
Mais hélas, le temps n'est pas venu pour de pareilles questions.
Alors, Adrien et Marinette se laissent porter sans réfléchir, laissant leur relation évoluer naturellement au gré de leur ressenti. Ils ont besoin l'un de l'autre, c'est une certitude.
Et pour l'heure c'est tout ce qui importe.
Avec le soutien inconditionnel d'Adrien, et avec celui de Tikki, Plagg, Alya, Tom et Sabine, Marinette reprend peu à peu du poil de la bête.
Voire un peu trop, même.
Après l'abattement et la mélancolie vient la colère. Une rage sourde, irrépressible, qui bouillonne en elle sans qu'elle réussisse à l'éteindre. Impossible pour elle de résister. Des envies de revanches sans cesses renouvelées consument son esprit avec une férocité alarmante, étouffant son instinct qui l'implore de garder la tête froide.
Si Marinette semble ne pas s'alarmer de la présence de ces nouvelles – et dangereuses - émotions, il n'en est pas de même pour Adrien et Tikki. Par leur intermédiaire, même Plagg en vient à craindre pour la santé de la jeune femme.
Vu de l'extérieur, le changement est subtil.
Invisible, presque.
La plupart du temps, Marinette reste égale à elle-même. Elle ébouriffe affectueusement les cheveux de son coéquipier, le taquine gentiment quand l'occasion se présente, bavarde aimablement avec son kwami.
Mais Adrien et Tikki la connaissent trop bien pour ne pas remarquer le feu qui couve sous la surface et qui transparaît dès qu'il est question de leurs ennemis. Chaque fois que le regard de la jeune femme se durcit en évoquant Volpina, chaque fois qu'elle serre rageusement les points en mentionnant le Papillon, ils échangent un coup d'œil inquiet.
Oh bien sûr, ils sont soulagés de voir que Marinette a su dépasser le choc que lui a causé l'attaque dont a été victime sa famille. Mais à présent, ils redoutent que la colère l'aveugle et ne lui fasse prendre des risques inconsidérés.
Alors, lorsqu'une attaque frappe Paris dès le lendemain, c'est avec la plus grande angoisse que Chat Noir guette les faits et gestes de sa coéquipière.
Et malheureusement, ses craintes semblent rapidement on ne peut plus justifiées.
Lorsqu'il voit sa partenaire se jeter dans la bataille comme si rien ni personne ne pouvait l'arrêter, l'évidence le frappe avec la violence d'un coup de poing dans l'estomac.
Ladybug n'est plus une héroïne.
C'est une déesse guerrière.
Une divinité brutale et vengeresse, prête à s'abattre sur ses ennemis tel un impitoyable éclair écarlate.
Le cœur au bord des lèvres, Chat Noir suit du regard cette furie vêtue de rouge qui porte les traits de sa coéquipière. Ladybug n'a jamais reculé par peur du combat, il le sait. Mais si elle a très (trop) souvent fait face au danger, ça a toujours été avec l'un de ses ingénieux plans en tête ou guidée par la conviction profonde qu'elle seule pouvait se dresser comme rempart entre son ennemi et cette ville qu'elle s'est jurée de protéger.
Là, Ladybug n'est pas en quête de justice.
Elle est en quête de revanche, et le courage dont elle fait preuve confine dangereusement à la folie.
« Attention ! », s'exclame Chat Noir avec horreur, alors qu'une attaque frôle sa partenaire de beaucoup, beaucoup trop près.
Mais Ladybug ne semble pas l'entendre.
Ou du moins, ne pas se formaliser suffisamment du fait qu'un lampadaire vient de manquer de lui écraser le crâne pour songer à ralentir.
Elle fonce tête baissée vers ses adversaires, visiblement uniquement pilotée par la volonté de réduire ces derniers à néant. Elle bondit, esquive, attaque avec un mépris du danger dont Chat Noir lui-même n'a jamais fait preuve au cours de sa carrière.
(Alors que force est de reconnaître qu'il est lui-même loin d'être un parfait exemple de sens de l'auto-préservation.)
Et à mesure que le combat se poursuit, Chat Noir sent son inquiétude croître de seconde en seconde. Sa Lady danse sur le fil du rasoir et il redoute l'instant où elle perdra définitivement pied.
Soudain, alors que le jeune homme continue de se ronger les sangs pour sa partenaire, c'est lui-même qui frôle la catastrophe.
Un saut au mauvais moment, dans la mauvaise direction, qui le place en pleine trajectoire d'une attaque dévastatrice.
Ce n'est que grâce à Ladybug et un lancer de yo-yo particulièrement habile qu'il évite le pire.
Le filin s'enroule autour de la taille de Chat Noir, se tend, et en une fraction de seconde, Ladybug extrait son partenaire du piège dans lequel il a failli basculer.
« Est-ce que ça va ? », s'inquiète-t-elle en se tournant vers lui, le visage livide.
« Je... oui », réplique aussitôt le jeune homme, faisant machinalement rouler ses muscles sous sa peau à la recherche de la moindre douleur indiquant une potentielle blessure. « Merci. »
Visiblement rassurée, Ladybug lui décoche un faible sourire.
Puis, à la vitesse d'une balle de fusil, son regard se détache de lui pour se river à leurs adversaires. Ses yeux d'un bleu si clair étincellent de colère, ses lèvres se pincent en une fine ligne, sa mâchoire se contracte.
Son coéquipier a à peine le temps d'essayer de l'exhorter à la prudence que déjà, la jeune femme fait tournoyer son yo-yo et se replonge au cœur de la bataille.
L'affrontement reprend avec une ardeur renouvelée. Si Chat Noir avait cru Ladybug furieuse, ce n'est rien en comparaison de ce qu'il voit à présent. Le besoin de revanche de la jeune femme s'est transformé en une rage pure, incandescente, qui paraît éclipser tout autre sentiment.
Plus déchaînée que jamais, elle saute, court, virevolte dans les airs, pare et riposte avec une intensité démentielle, et Chat Noir sent son cœur se décrocher de sa poitrine chaque fois qu'il la voit n'esquiver certaines attaques que d'un cheveu.
Quand le combat se termine enfin, le jeune homme n'arrive même pas à ressentir la moindre once de déception en voyant Volpina leur glisser une fois de plus entre les doigts. La peur qui lui noue les entrailles est encore bien trop vive pour ça. Pour l'heure, il est juste infiniment soulagé que Ladybug ne soit pas blessée.
Et alors que la jeune femme répond gracieusement aux questions des journalistes, Chat Noir serre machinalement les poings, une implacable résolution en tête.
Il faut qu'il ait une sérieuse discussion avec sa Lady.
Au plus vite.
A peine les deux coéquipiers se sont-ils glissés dans l'appartement d'Adrien que le jeune homme décide d'amorcer cette conversation qui, il en est convaincu, est plus que nécessaire. Il échange un bref regard avec Tikki puis, voyant cette dernière hocher la tête en signe d'approbation, se tourne vers Marinette.
« Est-ce que je peux te parler quelques minutes ? », lui demande-t-il sans autre forme de préambule.
Prise de court, la jeune femme écarquille légèrement les yeux de surprise, puis acquiesce.
Adrien se dirige vers le canapé et, d'un geste, l'invite à l'y rejoindre. Une fois Marinette assise à ses côtés, il se passe nerveusement la main dans les cheveux et prend une profonde inspiration pour calmer ses battements de cœur. Il n'aime guère confronter sa Lady à ses failles, mais il sait mieux que personne à quel point elle peut parfois être obstinée.
Hors de question pour lui de la laisser agir de façon aussi inconsciente sans rien dire.
« Je voulais te parler du combat d'aujourd'hui », commence-t-il en plongeant son regard dans le sien. « De la façon dont tu t'es battue... »
Le jeune homme laisse échapper un léger soupir et prend doucement la main de Marinette dans la sienne.
« Je sais que tu es en colère contre Lila et le Papillon », continue-t-il, alors que le regard de la jeune femme se durcit soudain. « C'est légitime, surtout après ce qu'ils ont fait à tes parents. Mais aujourd'hui... Jamais je ne t'ai vu prendre autant de risques. »
Alors que Marinette lui jette un coup d'œil interloqué, le jeune homme poursuit son discours.
Il doit lui faire comprendre.
À tout prix.
« Je ne sais pas comment t'expliquer ça », reprend-t-il en passant une nouvelle fois sa main libre derrière sa nuque, « mais d'habitude, tu fais toujours preuve de prudence. Ou au moins, tu ne te mets pas en danger sans une bonne raison. Le casse-cou de la bande, c'est censé être moi », ajoute-t-il avec un sourire triste. « Mais là, on aurait dit que tu te moquais de ce qui pouvait t'arriver du moment que tu réussissais attaquer Volpina. Je t'ai vu prendre plus de risques inutiles en cinq minutes qu'en cinq ans », conclut-il d'un ton désespéré.
« Je n'ai pas particulièrement pris de risques inutiles », proteste Marinette, sur la défensive.
« Tu as foncé droit sur le vilain alors qu'il préparait son attaque », riposte aussitôt Adrien pour mieux illustrer son propos.
« C'était une bonne opportunité pour l'arrêter », réplique la jeune femme. « Et j'ai esquivé à temps. »
« Tu n'as pas remarqué que Volpina utilisait des illusions pour t'attirer dans un piège. »
« Ce qui ne m'a pas empêché de m'en sortir parfaitement bien. »
« Tu as failli te prendre une plaque d'égout en pleine tête ! »
« Failli. »
« Justement », assène Adrien en se retenant de lever les yeux au ciel. « Et si tu avais réagi ne serait-ce qu'une fraction de seconde trop tard ? Tu aurais pu être gravement blessée. C'était dangereux. Très dangereux, Marinette. »
« On est des héros », répond obstinément la jeune femme. « Le danger fait partie du métier. C'est normal. »
« Mais ça ne l'est pas de foncer tête baissée sans prendre la moindre précaution », réplique aussitôt Adrien.
Le jeune homme s'interrompt une seconde, le temps de prendre une profonde inspiration. Le moment n'est pas venu de perdre son calme, ni de braquer inutilement sa coéquipière.
« Écoute » reprend-il d'une voix conciliante, « je sais que tu voulais bien faire et que tu ne pensais pas à mal mais... Mais mets-toi à ma place. Rappelle-toi toutes les fois où j'ai pris des risques inutiles. De toutes les fois où je t'ai fait peur en me mettant volontairement en danger et de tous les discours que tu m'as fait sur l'importance de ma propre sécurité », insiste-t-il, « En ce moment, je ressens la même chose que toi à l'époque. »
Le regard qu'Adrien plonge dans celui de Marinette est intense, comme si le jeune homme cherchait à lui offrir la possibilité de lire jusqu'au plus profond de son âme.
« Je tiens autant que toi à arrêter le Papillon et Volpina », conclut-il, la gorge serrée d'émotion. « Mais je ne veux pas te perdre. »
Et rien n'est plus vrai.
Si le prix de la victoire doit être la vie de Marinette, alors il préfère autant échouer éternellement.
Prise de court par les propos d'Adrien et par l'angoisse évidente qui émane de lui, la jeune femme reste silencieuse pendant plusieurs minutes. Elle s'imprègne lentement de ses paroles, tournant et retournant dans sa tête chacun de ses mots, chacune de ses phrases.
Perdue dans son propre monde, elle se remémore cette bataille qui vient de se produire et ses sentiments de ces derniers jours.
Cette colère sourde qui couvait en elle.
Cette indifférence quant à sa propre sécurité.
Cette volonté d'en découdre, peu importe le prix.
Peu à peu, elle réalise que son envie – son besoin - de se passer les nerfs sur Volpina a pris le pas sur toute pensée lucide qui aurait pu tenter de se frayer un chemin dans son esprit et sur tout instinct de préservation.
Et alors qu'elle se souvient enfin des mille frayeurs que Chat Noir a pu lui causer lorsque lui-même se mettait en danger, elle sent une bouffée de culpabilité enfler au creux de sa poitrine.
Levant un regard peiné sur Adrien, elle serre doucement ses doigts dans les siens.
« Je... Je suis désolée », lâche-t-elle dans un souffle.
Et elle le pense sincèrement. De tout son cœur, de toute son âme.
Jamais elle n'a voulu lui causer tant de soucis.
Un faible sourire éclaire le visage d'Adrien, qui porte la main de Marinette à ses lèvres pour y déposer un tendre baiser.
« Je t'aime, et tu le sais », lâche-t-il avec une franchise désarmante. « S'il te plaît, fais attention à toi. »
Cette soudaine confession prend Marinette par surprise.
Non pas qu'elle ait effectivement encore eu des doutes sur la nature des sentiments qu'elle inspire à son coéquipier, non. Chat Noir n'a jamais pris la peine de faire preuve de particulièrement de subtilité quant à ce qu'il éprouve pour Ladybug, et ni le temps ni les récents évènements ne l'ont manifestement fait changer d'avis.
Mais c'est bien la première fois qu'il lui avoue aussi clairement ce qu'il ressent pour elle.
Le cœur de Marinette se gonfle d'affection alors qu'un tendre sourire se dessine lentement sur les lèvres de la jeune femme.
« Je t'aime aussi », répond-elle posément, postant sur lui un regard limpide comme du cristal.
Sa voix est calme et affirmée alors qu'elle énonce cette parfaite évidence.
Rien n'est plus vrai en ce bas monde.
De toutes les formes d'amour qui soient, elle l'aime et l'a toujours aimé. Amour, amitié ou autre chose qui n'appartient qu'à eux, avec ou sans le masque, peu importe. Ce garçon s'est glissé dans son cœur dès le premier jour, s'y créant une place à part qu'il n'a plus jamais quitté depuis.
Visiblement ému, Adrien passe un bras autour des épaules de sa coéquipière et la serre maladroitement contre lui. Marinette enfoui son visage dans son col, glissant ses mains de part et d'autre de sa taille pour mieux lui rendre son étreinte.
« Je suis vraiment désolée », murmure-t-elle d'une voix à peine audible. « Je ne voulais pas t'inquiéter. »
« Je sais, ma Lady », répond doucement son partenaire. « Je sais. »
Les deux jeunes gens restent un instant immobile, avant de s'écarter lentement pour reprendre leur place sur le canapé.
La tête posée sur l'épaule de son coéquipier, Marinette baisse les yeux sur leurs mains de nouveau jointes et leurs doigts entrelacés. Elle prend une profonde inspiration, puis se redresse et se tourne une fois de plus vers Adrien.
Dans cette étrange relation qui est la leur, son partenaire et elle ont eu largement leur part de contacts ambigus.
Des étreintes un peu trop longues.
Des regards qui en disent plus que mille paroles.
Des bises qui atterrissent un peu trop près de la bouche, dans l'espoir secret que peut-être, peut-être l'autre tournerait légèrement la tête pour effacer ces derniers centimètres qui les séparent encore.
Le premier baiser que la jeune femme dépose sur la joue de son coéquipier entre parfaitement dans cette catégorie.
Mais cette fois, Marinette ne recule pas.
Ou du moins, pas beaucoup, et pas très longtemps non plus.
Son second baiser est lent, ferme, délibéré, et il emprisonne les lèvres d'Adrien sans la moindre équivoque possible.
Tant pis pour le Papillon, tant pis pour le danger, tant pis si le monde s'écroule autour de son partenaire et elle.
Ce n'est peut-être pas le meilleur moment qui soit pour franchir enfin ce cap de leur relation devant lequel ils n'ont que trop longtemps hésité, mais ce n'est pas le pire non plus. La vie est trop courte, ses sentiments pour Adrien trop forts pour qu'elle veuille rester plus longtemps sans exprimer plus longtemps ce qu'elle éprouve pour lui.
Elle l'aime.
Et elle ne reculera plus.
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Note : J'espère que ce chapitre vous a plu ! Personnellement j'avais hâte de le voir arriver (surtout la dernière partie ;) ) , et je suppose que certains d'entre vous aussi ^^. J'espère que ça aura été à la hauteur de vos attentes et à la semaine prochaine pour la suite :)
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