Dernier chapitre de la deuxième partie, bonne lecture !

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Ils sont là, devant le temple à Athéna, et Jungkook se sent presque petit.

C'est la taille de l'édifice ? L'immense statue casquée qui les surplombe ? Ou le fait que, déjà, on l'a reconnu, déjà on lui sourit, déjà on l'apostrophe ou lui tape sur l'épaule ? Jungkook est le champion d'Athènes, désormais, et sa vie a changé.

A ses côtés, Jimin.

Presque rétabli, presque redevenu le Jimin du Soleil d'Or.

Il se sont croisés devant le gymnase, hier, bien qu'aucun d'eux n'ait encore repris la boxe : Jimin était blessé, Jungkook doit apprécier. "Prends des vacances", lui a conseillé Hoseok. Alors Jungkook en profite, depuis plus d'un mois, il se repose, passe du temps avec sa famille, avec ses amis du port. Mais il revient sans cesse au gymnase, même s'il ne boxe pas, comme irrésistiblement attiré. Il court, flâne, discute avec les uns les autres. Et peut-être, aussi, attend de revoir Jimin.

— Ça m'avait manqué de venir ici, lui a dit Jimin quand ils se sont croisés la veille.

— A moi aussi, ça m'avait manqué... de te voir ici.

Puis Jungkook est parti, vite, parce que Jimin a souri en réponse, et qu'il se noie toujours un peu dans ses sourires, maintenant.

Oui, la vie de Jungkook a beaucoup changé.

Yoongi va remplacer Namjoon. Et Jungkook a bien dû l'accepter.

Parce que c'est quand même un peu grâce à lui s'il a vaincu Lion en finale. Yoongi est secret, Yoongi est trouble parfois, mais ses conseils sont justes. Et Jimin a aussi expliqué à Jungkook comment Yoongi est venu, chaque jour, pour l'accompagner dans la guérison, pour le porter quand lui ne pouvait plus, pour lui donner force et courage, envie de vivre et de se battre encore. Jungkook en est heureux, pour Jimin qui rayonne à nouveau, pour lui qui a cru le perdre. Ce jour-là, lorsque Lion a terrassé Jimin, puis cet autre jour, lorsque Jungkook l'a vengé, ont changé beaucoup de choses, en lui. Beaucoup de choses qu'il n'a pas encore bien comprises. Mais il sait que si Jimin est heureux, s'il sourit, alors tout va mieux.

Mais il y a ce sentiment nouveau, là, juste là, à la seule mention du prénom de Yoongi dans la bouche de Jimin. Car, quand Jimin parle de Yoongi, il y a toujours cette admiration infaillible, cette confiance revenue qui horripile Jungkook. C'est peut-être aussi pour ça qu'il n'aime pas trop Yoongi.

Alors il se promet qu'il va se surpasser à l'entraînement, démontrer qu'il est le meilleur, meilleur que ne l'était Yoongi peut-être même.

Et puis, Jungkook a dit oui quand Hoseok lui a demandé si Namjoon lui manquait. S'il voudrait l'accompagner lui rendre visite, un jour. Pour parler. S'expliquer. Pardonner peut-être.

Jungkook a dit oui car le pardon est déjà là. Depuis le premier jour. Depuis ce soir-là. Jungkook sait ce que c'est de devoir survivre, au dépens des autres parfois.

Jimin se tourne vers lui, soudain, il lui sourit, puis pose son regard sur les cestes que Jungkook a en main.

— On y va ? Athéna déteste attendre, et tu es déjà en retard.

— La faute à qui ? C'est pas moi qui pouvais à peine marcher il y a quelques semaines.

Ils montent les marches du temple, ensemble. Jimin est presque aussi leste qu'avant, son bras droit est de nouveau libre et Jungkook attraperait bien cette main, juste pour sentir si les callosités des cestes ont totalement disparu, si sa main est devenue douce, elle aussi. Car la peau du corps de Jimin est douce et parfumée, tendre lorsque ses doigts s'y enfoncent, dans la petite chambre où ils se retrouvent parfois. Et Jungkook sent le frisson sur sa peau à y penser.

— Tu pouvais y aller sans moi.

— J'avais pas envie.

Jimin sourit, encore. Un sourire bien trop doux, qui l'entoure comme une étreinte odorante.

— Et pourquoi donc ?

— Parce que je voulais y aller avec toi.

— Pourqu...

— Ta gueule Jimin.

Jimin rit, puis finit de monter les marches en silence. Jungkook ralentit un peu, juste pour le laisser passer devant lui. Il n'a pas l'habitude de ce temple en plein centre, pas l'habitude des cérémonies d'offrande comme celle qu'ils vont faire. Lui, dépose juste des dattes et un peu d'huile au temple d'Héphaïstos, le dieu protecteur du quartier, lorsqu'il a besoin de demander quelque chose.

Mais là, il faut remercier. Remercier Athéna, de l'avoir protégé. La remercier de lui avoir permis de gagner contre Lion, de lui avoir permis de venger Jimin.

De lui avoir permis d'accomplir son rêve.

Pour la première fois, Jungkook se sent quelqu'un. Pour la première fois, Jungkook est fier de qui il est.

Pour la première fois, il a pu payer les onguents pour soulager son père, offrir une tunique à sa mère, à ses sœurs. Ils ont même déménagé. Toujours dans le même quartier, a demandé son père, mais c'est plus grand, c'est plus beau. Sa mère est heureuse, elle n'a plus à s'inquiéter pour la nourriture, pour les ardoises à payer.

Alors, Jungkook est heureux, lui aussi.

Mais il faut remercier, Jimin a raison. Les Dieux se fâchent vite.

Jungkook lève la tête et voit les jambes de Jimin, nues et bronzées, caracoler à quelques marches au-dessus de lui.

Il voudrait fermer les yeux pour y échapper mais il sait que même ainsi il les verrait. Jimin est partout maintenant, partout en lui.

Ce type le rend fou. Il a ensorcelé son corps. Puis il a aussi fait je ne sais quoi qui rend son cœur immense dès que Jungkook le voit. Jimin en vient même à lui manquer, chaque jour qu'ils ne se voient pas. C'est étrange, c'est embêtant, mais c'est comme ça maintenant.

La vie de Jungkook a bien changé.

Jimin s'approche d'un prêtre responsable du culte, tire quelques piécettes de sa bourse avant que Jungkook ait le temps de réaliser, et lui fait signe de les suivre.

Le prêtre les mène au cœur du temple, là où peu de gens peuvent se rendre. Où il fait sombre et froid, et où l'encens se déroule en volutes lancinantes. Puis le prêtre s'éclipse.

Athéna est là, toute en couleurs sculptées, plus petite, plus accessible qu'à l'entrée du temple.

Jimin se tient droit devant elle, droit mais la tête inclinée, respectueuse, les mains jointes devant lui.

Jungkook l'imite, les cestes dans les mains.

Ils prient ainsi un instant, en silence, côte à côte. Chacun à ses problèmes, chacun avec ses gratitudes.

Puis Jimin se râcle la gorge, lui fait signe de tendre les cestes vers Athéna. Et il parle. Pour eux. Parce qu'il sait que Jungkook n'aime pas ça. Parce qu'il sait que Jungkook est ému.

Jungkook l'écoute longuement honorer puis remercier la déesse, expliquer le combat, Lion, les blessures de leurs corps, celles plus insidieuses de l'âme. Remercier encore, pour ceux qui accompagnent. Puis demander courage pour la suite, pour Jungkook et pour lui-même.

— J'ai décidé de rester, Déesse, de ne pas suivre la proposition de ma mère.

Jungkook lève les yeux, il est surpris. Où donc Jimin voulait-il aller ?

— Ma vie est ici, à Athènes, si vous l'acceptez. Ce n'est pas la vie dont je rêvais mais je crois que je l'aime, maintenant. Telle qu'elle est. Avec tous ceux qui la composent.

Jungkook accroche le bref coup d'œil de Jimin, les joues qui se colorent. Il est troublé.

Mais déjà Jimin continue :

— Faites que nous ayons la force de continuer à nous battre, sur le sable et dans la vie.

Un signe, et Jungkook s'avance, plus près. Il s'incline profondément et pose avec délicatesse les lanières aux pieds de la statue, à rejoindre le monticule d'offrandes à la déesse.

Les cestes de la victoire.

Les cestes de Jimin, autour des poings de Jungkook.

Lorsqu'ils sortent du temple, le soleil se couche. Le ciel s'est paré d'or et baigne la cité de sa lumière, alors qu'une brise fait voler les tuniques. Les sons de la ville leur parviennent étouffés, les cris se sont faits chuchotis. Jungkook est bien.

A ses côtés, Jimin est silencieux, lui aussi. Il contemple.

Jungkook a furieusement envie de l'embrasser.

Ils restent là, immobiles, proches et loin à la fois, un long moment.

Puis Jimin semble se réveiller, rencontre son regard et se pare d'un rictus amusé. Il lui agrippe brusquement la main et le tire à sa suite, à dévaler les marches quatre à quatre. Le monde se renverse.

Jungkook jure, se concentre pour ne pas s'étaler, tient fort la main dans la sienne. Ils arrivent en bas, sur la place, Jimin rit à gorge déployée de son air courroucé. Les gens les regardent, alors Jungkook ancre mieux sa main dans celle de Jimin et le tire à son tour, vif, vers l'ombre d'une ruelle.

Les yeux de Jimin ne rient plus lorsque Jungkook le pousse doucement contre un mur blanc doré. Ils se perdent.

Ses lèvres sont douces, si douces lorsqu'il l'embrasse. Jungkook prend son temps, s'immerge dans cette douceur, dans son cœur qui s'ouvre tout entier en cet instant, dans cette odeur qu'il aime tant maintenant. Jimin a soupiré de bien-être, il dit son nom entre deux baisers. Et, alors que la douceur se prolonge, que l'or les enveloppe, Jungkook sent des mots au bord de l'âme, là, au milieu d'eux.

Le monde vacille. Il pourrait presque mourir en cet instant.

Le monde vacille, et Jungkook est heureux.

Il presse plus fort Jimin contre lui, à sentir le désir monter et s'étendre dans son corps, dans ses gestes qu'il sait plus impatients. Ils ont tout l'après-midi devant eux.

Jungkook est heureux, oui.

Jusqu'à ce que l'instant se brise.

Qu'il se brise de ces mots chuchotés, doux mais terribles. De cette main qui lui caresse la joue puis le repousse doucement.

— Je dois y aller, Jungkook.

Jimin lui sourit, mais Jungkook n'aime pas la légère rougeur sur ses joues.

— Je dois aller voir Yoongi. On se voit demain au gymnase, peut-être ?

Jungkook hoche la tête, la poitrine trop douloureuse pour parler, soudain.

Et il reste seul, alors que Jimin s'éloigne déjà de sa démarche légère.

Seul, dans la bruyante cité d'Athènes.

Il ne sait pas encore qu'il ne reverra plus jamais Jimin au Soleil d'Or.

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Voilà, c'est la fin de la deuxième partie, centrée sur les Jeux d'Athènes. 

On se retrouve la semaine prochaine pour commencer la troisième (et dernière) partie !