[TW: scène à caractère sexuel à partir de ***]

Jimin ne parvenait pas à dormir.

Déjà plus d'une heure qu'il se tournait et se retournait sur sa couche mais rien n'y faisait : la journée avait été trop intense, les émotions trop fortes.

Il laissa une main pendre hors du lit et commença distraitement à suivre du bout du doigt les sculptures raffinées qui en ornaient le cadre. Des scènes de combat et surtout de jeux sportifs, avait-il répondu à sa mère lorsqu'elle avait voulu lui faire cadeau d'un nouveau mobilier pour ses appartements et lui avait demandé le type de décorations qu'il préférait.

Quelques mois plus tard, il avait reçu ces meubles : un lit, une grande table et une plus petite, deux sièges, tous ornés de scènes toutes plus réalistes les unes que les autres, sculptées dans du bois d'olivier. Sa mère n'avait pas lésiné sur les moyens pour lui faire plaisir, une fois de plus, et Jimin n'avait pu, cette fois, cacher la joie qu'il avait ressentie à la vue de ces merveilles.

Le sourire heureux de sa mère face à sa propre joie l'avait rendu un peu honteux de ne pas plus souvent lui donner satisfaction. Pourquoi était-ce toujours si difficile avec elle?

Jimin tenta de chasser de son esprit ces pensées maintes fois ressassées, le médecin qu'il avait visité pour parler de ses difficultés avait dit que c'était à cause de ça qu'il ne réussissait pas à dormir.

Il pensait trop, avait-il dit. Il fallait arrêter de penser.

Alors, ces soirs-là, ces soirs où le sommeil ne venait pas, Jimin s'amusait à tracer les contours des reliefs de son lit, pour poser son esprit sur autre chose. Il essayait de deviner, à l'aveugle, le sport pratiqué par les personnages sculptés, même si, la répétition des nuits étant ce qu'elle était, il connaissait déjà par cœur chaque emplacement, chaque position sur le bois.

Là c'était des lutteurs, enlacés l'un contre l'autre, chose que eux, boxeurs, n'avaient pas le droit de faire, et heureusement.

Là, du pancrace : Jimin devinait la jambe tendue que l'athlète utilisait pour frapper.

Et là, enfin, sa scène préférée : des boxeurs. L'un lançant un coup sur le visage, l'autre demandant grâce, les bras levés. Encore un peu et il se tournerait vers l'arbitre, là, sur le côté avec son long fouet, et lèverait le doigt vers le ciel pour montrer son abandon. La domination était trop forte, la position des corps le montrait. L'issue du combat ne faisait aucun doute.

Jimin pouffa dans l'obscurité de sa chambre.

Tout comme l'issue du combat n'avait fait aucun doute après quelques secondes, lorsque Jungkook et lui s'étaient affrontés quelques jours auparavant.

Jimin se demandait bien pourquoi il s'était tant inquiété de lui, pourquoi il avait craint pendant longtemps être battu par Jungkook avant même les Jeux de la Cité.

Oui, Jungkook était fort, oui, il avait énormément progressé grâce à Namjoon, et un peu grâce à Yoongi, même s'il semblait moins réceptif à ses entraînements à lui.

Mais tout semblait avoir simplement consisté à lui donner des bases et à le canaliser. Jungkook manquait de vraie expérience de combat, même s'il avait celle des combats de rue, d'après ce qu'on disait de lui. Mais ce devait être différent, supposait Jimin, la boxe était faite de règles, même si elles étaient peu nombreuses. Le combat était codifié.

Alors Jungkook s'était fait écraser par Jimin.

Et Jimin riait encore de son visage dépité, de son air buté lorsque Jungkook avait, quand même, accepté de lui faire des excuses pour ce qu'il lui avait fait à la fabrique. Jimin en avait été surpris, il ne s'attendait pas à ce que l'autre ait cette noblesse, d'une part d'accepter l'idée, d'autre part de le faire réellement, malgré la honte de la défaite.

Car Jimin avait lu la honte dans les yeux de Jungkook, la honte d'avoir perdu si franchement, la honte de devoir dire ces mots. La satisfaction de sa propre vengeance, s'il s'en était délecté un instant, s'était vite tarie.

Jimin n'aimait pas voir les autres ressentir ce que lui ressentait si souvent, cette honte, ce sentiment d'être plus bas que terre. C'était comme si le malaise qu'il connaissait si bien, cette douleur dans la poitrine, se propageait jusqu'à lui, comme si son corps était tellement habitué à ce ressenti qu'il absorbait, en plus, celui des autres.

Alors il avait tenté des mots pour apaiser cette douleur, celle de Jungkook devenue sienne un instant.

"Dépêche-toi, parce que j'ai toujours hâte."

Des mots-baume. Des mots qui, il l'espérait, avaient fait écho en Jungkook aux premiers mots de respect qu'ils avaient échangés, il y a déjà longtemps. Ces mots qui avaient fait naître leur premier sourire partagé : "J'ai hâte".

Jimin sourit dans le noir, la main s'attardant sur la scène de boxe, sur les bras levés du perdant.

Pourquoi Jimin avait-il si souvent hâte, avec Jungkook?

Hâte de le combattre, hâte de le vaincre.

Hâte de le vaincre, vraiment? Mais, maintenant qu'il l'avait vaincu, hâte de quoi? De le vaincre à nouveau? De le combattre à nouveau?

Ce jour-là, Jimin était parti avant de voir la réaction de Jungkook à ses mots, était rentré chez lui vaguement apaisé. Les mots-baume étaient pour lui-même, avant tout. Ne pas être ceux qu'il haïssait.

Jungkook était rustre, médiocre encore, incontrôlable. Animal. Et il l'avait meurtri, par ses gestes et par ses mots. Ces excuses arrachées n'effaçaient rien, elles permettaient juste de continuer, d'avancer côte à côte sans trop de haine.

Jungkook était tout ça, mais personne ne méritait de vivre ce que Jimin vivait au quotidien, la honte et l'écrasement.

Et puis...

Jimin sourit, seul dans sa chambre, pour lui-même. Il était plus détendu désormais, un bras sous la tête, l'autre contre le bois, ses yeux aveugles à chercher un ciel inaccessible.

Et puis, Jungkook l'amusait.

Ses piques à chaque fois qu'ils se voyaient, avant, ses vaines tentatives pour rétablir un contact après les insultes et leur bagarre dans le couloir. Jimin avait été trop perdu alors, trop sonné par tout ça, par Yoongi, par le métèque. Il avait eu besoin de s'isoler dans un cocon, en lui-même. Les gestes, les jours, s'étaient faits automatiques, jusqu'à ce que le temps fasse son œuvre et atténue la douleur.

Puis, finalement, ce combat, cette victoire nette contre Jungkook lui avaient fait du bien. Il n'était donc pas si nul, le métèque avait bien écrasé le citoyen!

Et Jimin riait presque au souvenir du visage de Jungkook, à son air concentré entre ses cestes, au début du combat, quand il pensait vraiment pouvoir vaincre Jimin. Sa garde était si maladroite, si inadaptée à leur différence de taille, Jimin n'avait pu s'empêcher de rire. Jungkook savait les bases, mais ne savait pas encore les adapter à l'adversaire. La suite avait été un jeu d'enfant.

Et, l'air surpris qu'il avait eu, à un moment, lorsqu'il avait semblé comprendre que Jimin était gaucher! Jimin ne savait même pas comment il était possible pour un boxeur d'ignorer cela, alors qu'ils boxaient ensemble avec Yoongi depuis quelques semaines maintenant, alors que Jungkook avait passé des jours et des jours à venir l'observer le midi, au début.

Jungkook n'avait finalement rien pu faire contre la technique, contre l'expérience de plusieurs années.

Malgré sa force, malgré sa puissance. Malgré sa taille et sa carrure bien plus imposantes que celles de Jimin. Malgré ses muscles, qui se dessinaient à chaque frappe.

Malgré ces yeux de feu devenus de plus en plus noirs, de plus en plus lourds au cours du combat, à mesure que la rage de Jungkook augmentait, qu'il perdait peu à peu le contrôle.

[***]

Jimin eut chaud tout à coup, une vague de chaleur venue du bas, comme...

Non, il ne voulait pas repenser à ce jour-là.

Il se dégagea du drap enroulé autour de lui, battit des jambes pour en sortir. Ainsi il se sentait mieux, l'air frais venu de la fenêtre était agréable, caressait sa peau.

Sa main rejoignit le bois, reprit son chemin sur les contours. Le boxeur vaincu, ses bras levés, ses jambes repliées sous lui, ses cuisses...

Les cuisses de Jungkook étaient impressionnantes. Larges, bien plus larges que celles de Jimin. Bien plus large que ce qu'il n'obtiendrait jamais de son corps, malgré tous ses efforts.

Les cuisses larges, les mollets saillants, si bien dessinés.

Et ses bras, les muscles de ses bras qui ressortaient à chaque coup, bloqué ou donné. Les biceps de Jimin faisaient pâle figure à côté.

Distraitement il plia le bras, banda le muscle, l'effleura. Non, c'était bien différent de ceux de Jungkook, bien moins dessiné.

Son torse aussi était différent, pensa-t-il en passant sa main sur sa poitrine, sur son ventre. Chez Jungkook, les abdominaux ressortaient plus, chez lui... Il se caressa le ventre, sentit la douceur de sa peau, tenta de retrouver les démarcations de chaque muscle. Non, rien, ou si peu. La faute à sa position allongée, il l'espérait.

Sa main resta là un instant, à toucher le plat de son ventre, miroir des caresses du bois.

Les pectoraux de Jungkook, aussi...

Instinctivement, la main de Jimin remonta.

Il aurait tout donné pour avoir des pectoraux comme les siens, forts, puissants. Ceux de Jimin étaient là, il les sentait, mais c'était différent. Les pectoraux de Jungkook étaient larges, à l'image de son torse. Tout chez lui était plus grand, enveloppant. Jimin aurait tant aimé avoir un corps comme le sien, un corps qui en imposait, un corps qui dominait par sa seule apparence.

Le ventre de Jungkook, ses pectoraux... Et ses tétons, légèrement plus sombres, au milieu de l'étendue lisse de la peau. Qui ressortaient parfois, Jimin l'avait vu, comme les siens en cet instant sous ses doigts.

Il effleura ses tétons en pensant aux muscles de Jungkook, dessina le contour du boxeur vaincu, à nouveau, de l'autre main.

Il avait chaud, encore, voulait bouger ses jambes, les serrer l'une contre l'autre. Enserrer ce feu, en bas.

Et le dos de Jungkook, était-il différent du sien? Son dos... Un triangle magnifique, de vallées et collines... Tout était tellement plus marqué, tellement plus puissant que son propre corps.

Il voulait un corps comme le sien, il voulait le corps de Jungkook.

La main de Jimin avait quitté le cadre, était remontée se poser sur son ventre à tracer des cercles, tirait vers le bas, vers la chaleur qui appelait.

Jimin était sûr qu'on sentait le dessin des muscles, en passant la main sur le dos de Jungkook. On devait sentir les creux, les remontées, on devait glisser allègrement sur sa peau huilée. Sentir les épaules, la base du cou, et descendre peu à peu, les deux mains posées comme en massage, ressentir le moindre relief, le moindre millimètre. On devait pouvoir descendre plus bas, là où le torse se faisait fin, toucher des pouces les derniers creux, juste au-dessus de...

Jimin se tendit tout à coup, une nouvelle vague de chaleur, un peu douloureuse, venait de naître entre ses cuisses obstinément fermées. Il voulait...

Il voulait le dos de Jungkook, il voulait ses fesses et son corps.

Jimin s'imagina descendre plus bas, effleurer la rondeur des fesses, poser ses paumes dessus pour les envelopper.

Ses cuisses s'ouvrirent d'elles-mêmes, en un soupir, Jimin posa doucement la main pour apaiser cette brûlure, cette envie.

Jungkook se retournait, le fixait de ses yeux noirs, enveloppait ses mains des siennes.

Regardait ses lèvres, comme ce jour-là.

Jimin gémit, se passa la langue sur la lèvre, se cambra en appuyant sur son sexe.

Pourquoi n'arrêtait-il pas? Il devait arrêter, Taehyung disait...

Jungkook sourit, lui sourit comme il le faisait si rarement. Et accompagna ses mains bas, plus bas, posa les mains de Jimin sur son sexe à lui. Le sexe de Jungkook, déjà dur, comme le sien en cet instant. Imposant entre ses mains.

Il voulait ce sexe, aussi, il voulait tout comme lui, tout de lui.

Les mains de Jungkook bougèrent les siennes, appuyèrent plus fortement autour de lui. Un mouvement lent, glissant, délicieux. Un mouvement qui n'apaisait pas, pourtant, qui demandait plus, exigeait plus. Plus de pression, plus de vitesse, plus de force...

Et Jungkook qui souriait, les yeux noirs sur Jimin, en lui, ses mains partout sur son corps, ses muscles, sa peau, douce, chaude, brûlante.

Le corps de Jungkook autour du sien, sa langue qui caressait la sienne...

La brûlure délicieuse se resserra tout à coup en lui, monta encore, puis explosa soudain, sans que Jimin n'ait le temps de réaliser. Son corps se crispa, se releva à moitié.

Jimin fut submergé d'un plaisir puissant, un plaisir oublié, qui le laissa haletant et étourdi, épuisé. Il s'effondra à nouveau sur le dos, tentant de garder un peu de la sensation merveilleuse, continuant malgré lui les mouvements.

Mais déjà le plaisir n'était plus, restait le frottement douloureux maintenant, les doigts poisseux, la honte qui s'invitait peu à peu, alors que Jimin prenait conscience de ce qu'il venait de faire.

Il avait cédé, cédé à son corps, cédé à un désir primaire.

Taehyung allait le tuer.

Et, pire, c'était pour Jungkook qu'il avait faibli.

Jimin avait cédé au corps de Jungkook, tout comme il avait cédé au sien.