Chapitre 6 - Joshua


CHAPITRE 6

JOSHUA

Il était neuf heures du matin, la cafétéria était presque vide, les étudiants étant soit partis en cours, soit restés au fond de leur lit. Joshua aimait y venir aussi tôt ; personne à l'horizon, le café y était peu cher et il pouvait travailler dans un coin en restant branché sur secteur. Depuis trois ans, l'université était devenue sa deuxième maison. Il connaissait chaque recoin, chaque couloir, les heures les plus propices au travail et celles où ils valaient mieux abandonner toute idée d'étudier. Il ne commençait que dans deux heures et il profitait du temps qu'il avait devant lui pour terminer un de ses devoirs de philosophie pour son autre université où il suivait un double cursus.

Son café étant terminé et la première partie de sa dissertation aussi, le brun décida de s'accorder une pause en retournant au comptoir pour prendre un autre expresso. Il y avait un peu d'attente et, dans la file, il le croisa de nouveau. Eliott. Trois semaines qu'il ne l'avait pas vu. Il soupçonnait le brun de le fuir comme la peste. Le regard de Joshua ne put s'empêcher de le détailler avec ses cheveux en pic, son manteau couleur cuivre très ajusté au niveau de sa taille, son pantalon un peu serré dévoilant ses courbes fines sans être trop minces non plus. Son cœur battit un peu plus fort lorsque le jeune homme se tourna vers lui et que ses prunelles plongèrent dans les siennes. Le sourire qu'Eliott arborait quelques instants plus tôt s'évanouit. N'y tenant plus, le brun décida d'aller vers lui. Après lui, le déluge !

« Salut, ça fait un bail qu'on ne s'est pas vu. »

Joshua lui avait adressé un léger sourire tout en passant sa main dans ses cheveux pour se donner une contenance, replaçant par la même occasion une mèche qui le gênait. Il sentit immédiatement que son vis-à-vis avait envie de partir en courant.

« Je ne reprends pas avant quelques heures, si tu as une pause, ça te dirait qu'on discute un peu ? »

Une longue seconde d'hésitation, peut-être même deux. Puis l'éternel sourire sur les lèvres d'Eliott qui finit par accepter et l'attendit à sa table pendant que Joshua commandait son café. En arrivant à sa table, le brun remarqua qu'il avait retiré sa veste et portait en dessous un pull noir qui galbait particulièrement bien son torse.

« Tu es venu ici pour travailler ? finit par demander Eliott alors que Joshua s'asseyait.

- Oui, j'ai une dissertation à faire en philosophie.

- Il n'y a pas de philo ici, si ?

- Je suis sur deux universités : Paris 1 et Paris 3. Je dépends plus de Paris 1 en philo que de Paris 3 en lettres. Mais je préfère travailler ici. On peut s'asseoir pour travailler. Et toi, tu suis quel cursus ?

- Je suis en deuxième année de Lettres Modernes.

- Ça nous fait un point commun. »

Un autre silence, beaucoup de gêne en fait. Et ce sourire plaqué sur ces lèvres, ce sourire qui, Joshua l'avait bien compris, n'avait aucun sens.

« Tu sais, tu n'es pas obligé de sourire si tu n'en as pas envie.

- Et qu'est-ce qui te fait croire que j'en ai pas envie ? »

Sa voix sur la défensive, un ton presque de défi, ses yeux qui fuyaient son regard, ses mains un peu crispées, son maintien un peu trop droit pour être détendu.

« Comme ça. J'avais envie de te connaître un peu plus. Effacer ce qu'il s'est passé et se rencontrer, vraiment.

- Je n'ai pas l'habitude de parler à mes histoires d'un soir. Tu es le premier.

- Ah, je vois. Au passage, ce n'est pas mon genre 'les histoires d'un soir'. J'avais un peu bu et... Tu as été assez entreprenant faut dire aussi. »

Joshua se replaça sur sa chaise de bar, posant ses deux mains derrière sa nuque pour s'étirer, son regard irrémédiablement attiré vers les lèvres de son voisin. Eliott n'avait peut-être aucun souvenir, mais lui, il lui en restait quelques-uns ; notamment ces baisers passionnés qu'ils avaient échangés. Et ça aurait été un mensonge de dire qu'il n'y pensait pas depuis trois semaines.

« On s'est bien amusé c'est vrai, enfin, c'est le sentiment que j'en ai. Je n'ai presque aucun souvenir.

- En même temps... tu étais quasiment ivre quand je t'ai ramené chez moi !

- Ça explique la gueule de bois au réveil. »

Un sourire, un vrai cette fois, naquit sur les lèvres et dans ses yeux gris. Il était donc possible d'obtenir une émotion honnête de sa part, c'était un bon début et un défi qu'il avait de plus en plus envie de relever. Vraiment.

« Tu sais Eliott, j'aimerais bien t'inviter à boire un verre ce soir, si ça te dit. J'ai envie d'apprendre à te connaître.

- Le peu que tu as vu ne t'a pas suffi ?

- Pas vraiment, pourquoi ?

- En général, les gens sont déçus quand ils apprennent à me connaître, comme tu dis.

- Laisse-moi me faire mon opinion et on verra. »

En disant ces mots, Joshua avait effleuré les mains d'Eliott qui tenaient son gobelet de café, le regard dans le vague. Il le sentit frissonner à son contact. Sa peau un peu mate était particulièrement douce. Ça aussi, il s'en souvenait.

« D'accord. Ce soir vingt heures devant la fac ?

- Nickel, je t'attendrai. »

Eliott termina son café, le salua et partit, laissant Josh dans ses pensées. Sa dissertation attendrait, il n'avait plus la tête à ça.


L'université de Panthéon Sorbonne Paris 1 et l'université de la Sorbonne Nouvelle Paris 3 proposent un double cursus en philosophie-lettres. La moitié des heures se fait en philosophie et l'autre moitié en lettres. A la fin de la troisième année, les élèves obtiennent donc un diplôme en philosophie parcours Lettres Modernes.

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