Chapitre 7


Note :

J'anticipe juste une remarque ^^ : Je pars du principe qu'Adrien ne se rend pas compte que Marinette et Ladybug ont la même voix parce qu'il est tellement persuadé d'avoir affaire à deux personnes différentes qu'il ne se pose même pas la question. En revanche, quand il sait qu'il parle à Ladybug, il identifie parfaitement sa voix comme étant celle de sa coéquipière.

Bonne lecture ! 

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Le cœur d'Adrien bondit avec autant de force que s'il cherchait à jaillir de sa poitrine.

« Chat ».

Ce n'est qu'un mot, un simple et unique mot, mais le jeune homme reconnait cette voix sans l'ombre d'un doute. Il l'a trop longtemps espérée, en a trop souvent entendu les échos dans ses rêves les plus fous pour ne pas l'identifier aussitôt.

La voix de Ladybug.

Prit d'un soudain vertige, Adrien se cramponne au chambranle de la fenêtre.

L'émotion le rattrape, vite et fort.

Après avoir passé tant d'années noyé dans un étouffant cauchemar, Adrien a brusquement l'impression d'avoir un trop-plein d'oxygène. Son pouls est rapide, bien, bien trop rapide, et fait déferler son sang dans ses veines à un rythme infernal. Le jeune homme a la sensation que sa poitrine s'embrase, que ses poumons explosent, que le monde entier tangue et bascule autour de lui.

- « Chat ? », répète Ladybug d'une voix inquiète, qu'il perçoit à peine à travers le son étourdissant de ses propres battements de cœur. « Ce... C'est toi ? »

Une vague de panique s'empare aussitôt d'Adrien.

Il faut qu'il réponde.

Il faut qu'il réponde tout de suite.

Vite, vite, avant que sa Lady ne s'affole et ne raccroche.

Le jeune homme ouvre la bouche, mais aucun son n'en sort. Sa langue lui parait être faite de plomb, l'émotion noue ses cordes vocales.

Adrien a envie de hurler de frustration. Parler n'a pourtant jamais été un problème, surtout pas pour Chat Noir. Alors pourquoi ? Pourquoi maintenant ?

Mais hors de question qu'il laisse passer sa chance. Pas alors qu'il est plus proche de Ladybug qu'il ne l'a été depuis des années, pas quand il ne lui faudrait peut-être que quelques mots pour la retrouver enfin.

Le jeune homme secoue vivement la tête, et, dans un extraordinaire effort de volonté, réussit enfin à reprendre le contrôle de son corps.

- « M-Ma... Ma Lady ? », murmure-t-il d'une voix rauque.

A l'autre bout du fil, il entend un hoquet étouffé. Comme quelqu'un qui tente désespérément de reprendre son souffle. Comme un sanglot.

Ou comme les deux à la fois, peut-être.

- « Oui », reprend-elle après un instant de silence. « Oui, je... C'est moi, Chat. C'est bien moi. »

Une puissante déferlante d'émotions s'abat aussitôt sur Adrien. Joie, incrédulité, soulagement indicible se confondent, s'unissent pour le frapper avec une force si dévastatrice qu'elle le laisse presque sonné. Les quelques mots de Ladybug le touchent en plein cœur, se glissent dans ses veines, sillonnent les moindres recoins de son être en embrasant tout sur leur passage.

Ladybug.

Sentant que ses jambes menacent de le trahir, Adrien vacille, tremble, se raccroche de plus belle à cette fenêtre qui semble être devenue sa ligne de vie.

Ladybug.

Il l'a trouvée.

Il l'a enfin retrouvée.

- « Ma Lady... », articule-t-il d'une voix émue. « J-Je... Je suis... »

Incapable de poursuivre, il se tait brusquement.

Au bonheur d'avoir retrouvé Ladybug se mêlent soudain la honte et la culpabilité de l'avoir abandonnée. Les remords étouffent Adrien, l'écrasent, menacent de le priver des dernières bribes de sang-froid qui lui restent encore.

Il n'arrive plus à parler, n'arrive plus à réfléchir.

N'arrive plus à respirer.

C'est comme si tout l'oxygène avait été soudain aspiré de la pièce.

Front pressé contre le verre froid de la vitre, Adrien porte machinalement sa main libre à sa gorge et prend une profonde inspiration. Puis une autre, et une autre encore, se focalisant sur ces précieuses goulées d'air pour essayer de retrouver son calme.

Il se sent pris dans un maëlstrom de sentiments dont la puissance le dépasse. C'est trop, trop d'un coup. Ses émotions prennent le contrôle de son être, font frissonner son corps, accélèrent sa respiration. Elles s'emparent implacablement de son cœur, le faisant battre fort, si fort que les lourdes pulsations de cet organe vital résonnent jusqu'au plus profond de ses os.

Adrien a la sensation d'avoir été propulsé en plein cœur d'une effroyable tempête.

Il tremble, lutte, se raccroche à la seule chose qui peut lui permettre de garder un semblant de raison.

Ladybug.

Encore et toujours.

Le regard rivé au portrait géant de sa coéquipière, Adrien déglutit péniblement.

- « Je suis désolée », reprend-il enfin. « Je suis tellement désolé d'être parti comme ça. Je... »

De nouveau, Adrien s'interrompt.

Ses nerfs sont à fleur de peau, exacerbant ses émotions au point que ces dernières deviennent difficilement supportable. La peur d'être rejeté le paralyse, et ses mots se coincent dans sa gorge une fois de plus.

Il faut qu'il parle à Ladybug. Qu'il lui avoue les raisons de son départ, qu'il lui explique l'enfer étouffant que sa vie est devenue depuis la trahison de son père.

Mais pas aujourd'hui.

Mais pas comme ça, pas maintenant.

Ce n'est pas qu'il veut fuir encore, mais pour l'instant, une seule pensée l'obsède. Un besoin primitif, vital, qui éclipse tout le reste.

- « Je veux te voir », confesse-t-il dans un souffle.

Rien n'a jamais été plus vrai.

Il veut la revoir. De tout son cœur, de toute son âme.

Sans Ladybug, il n'est plus que la moitié de lui-même. Une ombre, un écho, une créature qui ne pourra pleinement vivre qu'une fois qu'il l'aura retrouvée.

- « Je... Je ne le mérite sûrement pas après ce qui s'est passé, mais je veux te revoir », poursuit-il péniblement, puisant dans toutes ses réserves d'énergie pour réussir à parler. « Je regrette, si tu savais à quel point je regrette... »

Sa voix le trahit, s'étrangle, et Adrien doit se taire encore une fois.

Ce combat implacable entre son corps et ses émotions le vide de toutes ses forces. Adrien est épuisé, plus encore que s'il venait de mener la plus rude des batailles. Son pouls résonne dans ses tempes comme un tambour, son souffle est toujours bien trop rapide, et à présent, des larmes brûlantes lui piquent les yeux.

Adrien bat furieusement des paupières, tentant comme il le peut de contenir cette nouvelle manifestation d'émotion.

- « Chat... », murmure Ladybug d'une voix étranglée.

La partie encore lucide du cerveau d'Adrien se demande distraitement si sa coéquipière est en proie à des sentiments aussi intenses que les sien. Mais le reste de son esprit se consume, emporté par le son de la voix de la jeune femme.

Ladybug est le centre de son univers.

En cet instant, Adrien a l'impression de ne plus vivre que pour l'entendre, que pour espérer la retrouver un jour.

- « Tu m'as manqué, ma Lady », reprend enfin Adrien. « Tu m'as tellement manqué. »

- « Tu m'as manqué aussi », répond Ladybug sans la moindre trace d'hésitation. « Et je... Je veux te revoir moi aussi. Je ne peux pas continuer comme ça. Tu me manques trop. Oh, chaton, tu n'imagines même pas à quel point tu me manques ! », s'exclame-t-elle avec un rire qui ressemble un peu trop à un sanglot.

Sous le choc, Adrien se fige.

Les paroles de Ladybug résonnent dans sa tête, font battre son cœur si fort qu'il lui semble être au bord de l'explosion.

« Je veux te revoir. »

Ladybug ne lui en veut pas. Ou tout du moins, pas assez pour avoir envie qu'il disparaisse définitivement de sa vie.

Autour du jeune homme, le monde vacille, bascule de nouveau. Adrien a soudain l'impression que son univers se pare de couleurs plus éclatantes, plus brillantes. Que l'air est plus pur, que les lumières se font tout à coup plus vives.

Peut-être la gravité a-t-elle aussi brusquement changé car Adrien se sent maintenant extraordinairement léger, comme si un poids immense avait été retiré de ses épaules. Il se redresse machinalement et respire, enfin.

- « Je te demande pardon... », reprend-il avec une émotion difficilement contenue. « Je n'aurai jamais dû aller voir Maître Fu sans t'en parler avant. Je n'aurai... Je n'aurai jamais dû partir comme ça... »

De l'autre côté de la ligne, il entend Ladybug laisser échapper un léger hoquet à la mention de Maître Fu.

- « J'aurais préféré que les choses se passent autrement », acquiesce-t-elle doucement. « J'aurais... »

Ladybug marque un léger temps d'arrêt.

- « Enfin, c'est le passé », soupire-t-elle finalement. « On ne pourra rien y changer, mais peu importe. Je t'ai retrouvé, Chat. C'est tout ce qui compte pour moi », conclut-elle avec ferveur.

- « Ce... C'est tout ce qui compte pour moi aussi », balbutie Adrien, encore étourdi par la tournure des évènements.

Le jeune homme peine toujours à croire que sa Lady ne le déteste pas pour sa terrible erreur. Qu'au contraire, elle tient toujours à lui. Qu'il lui manque.

C'est un véritable miracle.

- « Est-ce que tu es toujours à Paris ? », reprend brusquement Ladybug, l'arrachant à ses pensées. « Si... Si tu es libre dans les jours qui viennent, on pourrait se retrouver dans un café. Ou sous la tour Eiffel. Ou... Ou où tu veux en fait. Comme ça t'arrange. Je me débrouillerai. »

Sous le choc, Adrien se fige, mâchoire grande ouverte. Il fixe sans le voir son propre reflet dans la vitre, ne remarquant même pas à quel point ses yeux se sont écarquillés de surprise. Au bout de plusieurs secondes de stupéfaction incrédule, il ferme lentement la bouche, la rouvre , lareferme encore, comme un poisson hors de l'eau.

- « T-tu...Tu.. Tu me proposes un rendez-vous, ma Lady ? », bredouille-t-il fébrilement, craignant soudain que ses oreilles ne lui aient joué un tour cruel.

- « Je n'aurai jamais cru dire ça un jour, mais oui, Chat. Je te propose un rendez-vous », réplique Ladybug d'un ton amusé. « A moins que tu préfères qu'on se contente de se parler par téléphone ? »

- « Non ! » s'exclame aussitôt Adrien, tout en secouant instinctivement la tête pour appuyer ses paroles. « Non. Surtout pas. Je... Ce n'est pas que je n'aime pas ça, au contraire. Je... ça fait longtemps que je n'avais pas été aussi heureux », confie-t-il en se passant nerveusement sa main libre sur la nuque. « C'est juste... Plagg n'est plus là. Je ne pourrai pas me transformer. Tu verras qui je suis. »

- « Tikki n'est plus avec moi non plus, chaton », rétorque immédiatement sa coéquipière.

Adrien tressaille à la mention de ce nom.

Tikki.

Le kwami de Ladybug.

Voilà qui explique pourquoi l'héroïne de Paris ne s'est plus jamais montrée au grand jour depuis leur dernier combat.

Mais pas pourquoi sa coéquipière s'est séparée de son kwami.

Adrien se mord machinalement la lèvre inférieure. Il a beau être de nature curieuse, il n'ose pas demander à sa Lady les raisons qui l'ont poussée à abandonner elle aussi son Miraculous. Ce n'est pas qu'il ne veut pas savoir, bien sûr, mais il n'est pas certain qu'il aimera la réponse.

- « Que... qu'est-ce qu'il s'est passé ? », s'entend-il cependant dire malgré lui.

Ladybug marque un temps d'hésitation, comme si elle n'était pas non plus sûre qu'il soit judicieux de répondre. Puis, après de longues secondes, elle laisse échapper un lourd soupir.

- « Elle... Maître Fu est passé me voir après ton départ », répond-elle enfin. « Il a repris mes boucles d'oreilles. Je ne suis plus une héroïne depuis ce jour-là, chaton. Ladybug a disparu en même temps que Chat Noir. »

Les paroles de la jeune femme frappent Adrien comme une gifle. Il sent un violent frisson parcourir sa peau, à la mesure de la sensation de douche froide qui le saisit à présent. La douce chaleur qui avait auparavant enveloppé Adrien s'évanouit, laissant au jeune homme l'impression que son sang charrie désormais des rivières de glace.

Jamais il n'aurait imaginé que son départ précipité puisse avoir des conséquences aussi désastreuses.

Pour en avoir beaucoup discuté avec sa coéquipière, le jeune homme sait très bien combien Ladybug et son kwami étaient proches. Et à cause de son impulsivité, non seulement sa Lady a perdu son partenaire, mais elle a en plus été privée de sa plus fidèle amie.

Les remords ressurgissent, étreignant son cœur comme une main gelée. Adrien ouvre la bouche pour tenter de prononcer quelques mots d'excuse, de repentir, de n'importe quoi pour dire à sa Lady combien il regrette d'avoir été aussi stupide.

Mais cette dernière ne lui en laisse pas le temps.

- « Tu ne pouvais pas savoir », lance-t-elle d'une voix ferme. « Et si jamais tu y penses, sache que ce n'est pas la peine de te faire des reproches. Tu n'avais aucun moyen de savoir ce que ferait Maître Fu. Je ne t'en veux plus. »

- « Plus ? », souligne machinalement Adrien, regrettant ses paroles au moment même où elles franchissent ses lèvres.

La culpabilité laisse un goût amer sur sa langue, et les regrets qu'il avait réussi à écarter se rappellent douloureusement à ses souvenirs.

- « Je mentirais si je te disais que je n'ai jamais été fâchée contre toi », confie Ladybug d'une voix hésitante. « Mais encore une fois, c'est du passé », martèle-t-elle avec conviction. « Donc tu n'as pas intérêt à te morfondre à cause de ça, espèce d'idiot de Chat ! »

Alors qu'Adrien reste muet de stupéfaction, assimilant lentement les paroles de sa Lady, la jeune femme continue son discours.

- « Si je t'en voulais toujours, je n'aurais jamais essayé de te retrouver », poursuit-elle. « Je ne sais pas ce qu'il s'est passé pour que tu partes comme ça, mais je sais que tu ne pensais pas à mal. Je te connais, chaton. Tu es idiot, tu es impulsif. Mais tu es aussi la personne la plus généreuse et la plus courageuse que je connaisse », conclut-elle d'une voix gorgée de tendresse. « Je suis contente que tu sois là. »

Un sourire de bonheur incrédule se dessine lentement sur les lèvres d'Adrien. Les mots de sa coéquipière se glissent jusqu'au plus profond de son cœur, chassent les ombres qui menaçaient de s'en emparer.

Le soutien sans faille de Ladybug est pour Adrien comme la plus douce des flammes. Chaleureuse, réconfortante, et synonyme d'un foyer qu'il n'aurait jamais dû quitter. Il réchauffe son âme meurtrie, fait disparaître ses dernières traces de culpabilité.

- « Donc pour notre rendez-vous, tu verras aussi qui je suis et ce n'est pas ça qui me fera reculer », reprend Ladybug d'un ton sans réplique. « Je n'en peux plus de ses histoires d'identités secrètes. Ça n'a plus de sens aujourd'hui et déjà à l'époque, j'ai été idiote de rester aussi stricte sur le sujet. Si je n'avais pas... Si j'avais accepté qu'on se dise qui on est, je ne t'aurai jamais perdu, Chat », laisse-t-elle échapper d'une voix tremblante. « Alors peu importe qu'on soit transformés ou non. Tu me manques. Tu me manques beaucoup trop pour que je me préoccupe de ça. »

- « Donc, tu veux me voir ? », insiste Adrien. « Même sans le masque ? »

- « Même sans le masque », réplique Ladybug d'une voix émue, mais ferme.

Adrien ferme brièvement les yeux. En lui, soudain, tout bouillonne, tout s'agite.

Tout vit.

Libéré de toute contrainte, son cœur chante, danse d'allégresse, ravive en lui des sentiments d'une intensité presque terrifiante. Le jeune homme porte machinalement la main à sa poitrine, comme pour tenter de contenir les violentes palpitations qu'il sent pulser entre ses côtes. Il a envie de rire, de pleurer, de tout abandonner à l'instant même pour aller retrouver sa Lady et la serrer de toutes ses forces entre ses bras.

Les yeux brillants de larmes, il pose le regard sur le portrait souriant de Ladybug.

- « Un rendez-vous... », articule-t-il précautionneusement, savourant ce mot si simple et pourtant si lourd de sens.

Un sourire se dessine malgré lui sur ses lèvres.

Un rendez-vous.

- « Je te laisse choisir l'heure et l'endroit, ma Lady », répond-il finalement. « Fais vraiment comme ça t'arrange. »

Alors que Ladybug proteste, argumentant qu'elle ne tient pas à le déranger plus que nécessaire, Adrien l'interrompt gentiment.

- « Je t'assure, il n'y a vraiment pas de quoi fouetter un chat », réplique-t-il d'un ton malicieux. « Je n'ai pas de contraintes particulières, je m'adapterai à ton emploi du temps. Et ça me laissera le temps de me préparer », poursuit-il aussitôt. « Hors de question que je me présente à une aussi chat-rmante demoiselle sans être parfaitement é-patte-ant. Il en va de mon honneur de félin ! »

Les jeux de mots roulent sur sa langue avec aisance, comme s'il n'avait jamais cessé d'en faire depuis qu'il a abandonné son rôle de protecteur de Paris. En cet instant, il se sent plus proche de Chat Noir qu'il ne l'a été depuis des années.

Pour autant, il n'a pas complètement l'impression d'être dans la peau son alter-ego héroïque, et il n'est plus tout à fait Adrien non plus.

Il est lui.

Pour la première fois depuis bien trop longtemps.





Dans le calme feutré qui règne dans la pièce, Adrien peut entendre distinctement le rire cristallin de sa Lady s'élever de son téléphone.

Et soudain, en l'espace d'une fraction de seconde, son univers bascule.

Adrien se fige, comme frappé par la foudre. Ses muscles se tétanisent, son souffle se bloque, tandis qu'un brusque court-circuit paralyse violement son cerveau.

Impossible.

C'est impossible.

Il a entendu le rire de sa Lady.

Il l'a entendu, deux fois.

Une première depuis son téléphone. Et une seconde, au même instant, depuis les profondeurs de l'appartement.

Comme dans un rêve, Adrien lève la tête dans la direction d'où venait le rire.

Impossible.

Elle ne peut pas être là.

Pas si proche.

Pas sans qu'il le sache.

La situation est tellement irréelle, tellement absurde, qu'Adrien se sent tout à coup étrangement dissocié de son corps. Sans même qu'il ne le réalise, ses yeux scannent la pièce, cherchent l'origine de ce son qui vient de faire voler ses certitudes en éclat. Avec un curieux détachement, le jeune homme observe les murs. La commode ornant un des côtés du salon. Le couloir où ont disparu Alya et...

Et Marinette.

Adrien a soudain l'impression de regagner brutalement son corps, et de recevoir en même temps un violent coup de poing dans l'estomac.

Marinette.

Marinette et ses cheveux noirs, son sourire lumineux, ses yeux d'une couleur azur inimitable.

Marinette, qui n'a jamais été akumatisée.

Marinette, qui, c'est l'évidence même, n'aurait eu aucun mal à entrer en contact avec Alya pour poster un message sur le Ladyblog.

Le sang reflue rapidement du visage d'Adrien, fuyant dans ses veines à une telle vitesse que le jeune homme se sent soudain au bord du malaise. A présent aussi pâle qu'un mort, il chancelle légèrement, bat des paupières pour tenter de chasser le trouble qui gagne les extrémités de son champ de vision.

Doigts crispés autour de son téléphone, Adrien avance machinalement d'un pas pour retrouver son équilibre, tout en cherchant Nino du regard. Il ne lui faut qu'une fraction de seconde pour localiser son meilleur ami, occupé à discuter tranquillement avec Chloé, Sabrina et Max.

- « Ma Lady, excuse-moi », lance-t-il brusquement. « Je dois m'absenter une minute. Juste une toute petite minute. S'il te plait, attend-moi. »

Au bout du fil, Ladybug acquiesce, et Adrien éloigne vivement le téléphone de son oreille. Il se dirige vers Nino, l'attrape par le coude pour l'entraîner à l'écart.

- « Nino », souffle-t-il d'une voix pressante. « Est-ce tu crois que Marinette pourrait être Ladybug ? »

Peinant manifestement à en croire ses oreilles, Nino reste un instant bouche bée. Adrien a parfaitement conscience de ne pas avoir pris le temps de mettre les formes pour poser sa question, mais jamais il n'a été aussi pressé. Il a besoin d'une réponse, et il en a besoin maintenant.

Sa Lady est peut-être là.

Certainement, même.

- « Que... Hein ? », bafouille Nino, visiblement pris de court. « Quoi ? »

- « Marinette. Ladybug », insiste Adrien. « Tu penses que c'est la même personne ? »

- « Je... Je ne sais pas », réplique son ami, toujours sous le choc. « Mais... C'est... C'est possible. C'est même tout à fait possible », poursuit-il en hochant vivement la tête. « Ça expliquerait p- »

Mais déjà, Adrien s'éloigne.

Nino ne sait rien, c'est évident. Il aurait dû s'en douter. Les chances pour que son ami lui ait dissimulé l'identité de sa Lady tout en sachant combien son absence le rongeait étaient minces.

Nino ne sait rien.

Mais peu importe.

Adrien sait exactement où trouver les réponses à ses questions.

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