18- Quand le rêve vire au cauchemar.

17 ÈME JOUR / 90.

Trois jours se sont écroulés, trois jours pendant lesquels je n'ai guère quitté mon lit et exactement cinq jours aujourd'hui que mes yeux n'ont pas reconnu le dauphin. Soit il m'évitait et il le faisait très bien; soit il était très occupé. Je songeais cependant à la première hypothèse.

Je n'ai pu oublier cette fureur que j'ai lu sur son visage, cette manière dont il m'avait dévisagée avec mépris, cette déception dans ses yeux.

Où était passé son affection subite ?

Quel changement d'état en si peu de temps !

Mais qui avait bien pu lui raconter, cela ?
Sam l'avait-il donc appris et s'est empressé de le révéler à son maître, -lui qui paraît si dévoué - ?
Rose lui a-t-il tout raconté sous la contrainte ?
La princesse de Pologne m'a-t-elle donc trahie - elle qui prétend être mon amie - ?
Gérard lui a-t-il fait savoir pour le cheval disparu - emprunté par moi - ?
L'une des servantes commères m'a-t-elle entendue comploter avec Rose et m'a-t-elle vue exécuter mon plan ?

Tant d'hypothèses pour un/une seul(e) responsable. Même si je sais qu'au fond, l'unique responsable c'est moi !

Pourtant, il n'était sorti juste qu'un instant et le voilà qui revient la mine changée. Je m'en veux de lui avoir menti mais qu'aurais-je pu bien y faire ?

Et cette phrase selon laquelle, nous sommes toutes pareilles que sous-entend t-elle ?

Quel personnage abscons !

Voulant oublier cette affaire, je m'assis sur mon bureau, pris ma plume et un encrier et commençais à calligraphier quelques mots sur du papier, pour en faire une missive destinée à Charles et oublier ainsi mon obsession pour Louis.
Depuis mon arrivée, je ne lui avais donné aucune nouvelle comme il m'en avait demandée.

Après trois heures de temps, je jetais un coup d'œil sur mon œuvre. Je m'assurais de n'avoir pas raconté la vie du palais comme me l'a suggérée la Reine lors de notre entretien, il y a plusieurs jours.

Mon cher frère,

Je t'écris en ce jour de printemps depuis le palais de Louis XV pour te donner de mes nouvelles même si je sais que nos relations ne sont pas des plus courtoises !

En quittant le château de Madrid, j'ai pu visiter des endroits qui m'étaient jadis inconnus. Sans te le cacher, j'avais peur, je tremblais comme la gamine que je suis surtout en pensant au fait que je ne te verrai plus, ainsi que père, mère et Susanne.

Susanne me manque, sa tendresse aussi. Je te conjurais de lui faire part de mes salutations et de lui faire comprendre que je ne l'ai pas oubliée.

Quant-à père et mère, dis leur que je me porte bien et que je serai plus que ravie qu'ils songent à moi de temps en temps et me donnent de leurs nouvelles.

Je te mentirai si je te disais qu'ici, je suis pleinement à mon aise. Malgré tous les efforts de la famille de Louis XV, pour rendre mon séjour des plus plaisants, je dois t'avouer que j'ai plusieurs manques à savoir la chaleur madrilène, tes petits asticotages, nos moments passés ensemble, la cordialité de Susanne et même le caractère ardu de père et mère !

Je n'ai jamais réellement eu d'amie, la seule étant Suzanne comme tu le sais et même cette dernière, est une employée du palais.
Mais, ici, j'ai fait la rencontre de beaucoup de gens qui se sont montrés fort agréables et avec qui je crois qu'on deviendra amis si Dieu le veut.

La famille royale de France est telle qu'on me l'a décrite.

Tu serais surpris par le fort caractère d'Adelaide, l'indulgence d'Henriette et l'alacrité de la petite Louise ! Je n'ai pas encore eu l'honneur de rencontrer l'attrayante Thérèse mais, j'espère que ce jour arrivera plus tôt que prévu.

Les garçons quant-à-eux, sont semblables à une poésie ésotérique. À première vue, ils paraissent blâmants, méchants, acariâtres mais en les connaissant mieux, on se rend compte qu'ils ont juste une personnalité différente des autres.

Benoît, est un jeune homme en quête d'indépendance .
Le Dauphin, Louis de France, la raison de mon départ d'Espagne, est une personne fort aimable quand il le veut mais il ne faudrait pas s'attirer ces foudres sinon on regrette aussitôt son geste !
Si vous vous étiez rencontrés, vous vous seriez sûrement entendus. Je trouve que vous avez quelques ressemblances : Le même humour, la même prestance. Vous êtes aussi mystérieux l'un que l'autre.

Savais-tu cependant que Ferdinand, le chef d'armée de France qui avait fait irruption avec sa horde d'hommes au palais de Madrid il y a presque quatre ans, n'était nul autre que le fils de Louis XV ?

Imagine le choc que j'ai eu en le découvrant ! Père et mère le savaient et ne m'en n'ont rien dit ! Je présume que toi aussi !
Enfin bref, c'est juste hallucinant de constater à quel point quelqu'un peut être doué pour jouer le rôle d'une autre personne !

J'ai le pressentiment que mon intégration dans cette cour, ne sera pas aussi facile avec la princesse de Pologne et les secrets de famille si bien conservés. La princesse de Pologne raconte que nous sommes amies, je me demande bien pourquoi car je n'ai guère le souvenir d'un bon moment passé en sa compagnie. Je me souviens juste de son de son défaut de bienséance lors de notre première rencontre.

J'ai tant d'événements à te conter mon frère mais, je crois qu'une lettre ne suffira pas pour te les relater.

J'espère que tu prends bien soin de toi comme promis et que tu ne te laisses plus influencer par ton titre. Parlant de ce que mère nous a appris par rapport au bonheur qui est prohibé pour les gens tels que nous, je pense qu'elle a tort et que l'on a tous droit à cela. Garde cela en tête.

À bientôt, Charles.

Je faisais fondre la cité à cacheter à l'aide d'une chandelle.

- Sophie, veuillez m'envoyer ceci en Espagne. Exigeais-je en remarquant que cette dernière m'avait rejoint.

J'allais me recueillir au bord du lac, espérant secrètement que Louis y sera ou viendra me rejoindre plus tard comme autrefois.

Mais lorsque j'y arrivais, je fus accueillie par un horizon privé d'une quelconque présence.

Juste un tout petit mensonge, et il veut ma tête ?

Je prenais place au bord et ne faisais plus qu'un avec la nature jusqu'à ce qu'une voix familière vienne briser cette communion.

- Je vous cherchais et j'ai appris que vous êtes ici.

- Bonjour Louise, j'espère que vous allez bien.

- Oui, mais j'ai l'impression que chez vous ce n'est pas le cas.

- Ça va... J'ai quelque chose à vous demander.

Elle me rejoignit.

- Que voulez-vous savoir ?

- C'était un matin, l'on déjeunait avec toute la famille; c'était d'ailleurs mon premier petit déjeuner avec vous. On compte une dizaine de jours à présent. Vous m'aviez dit : « Peut-être vous, vous l'aiderez à se sentir mieux. Vous savez, il n'a pas l'air bien depuis ce qui s'est passé avec elle ». Que vouliez-vous dire ?

Elle barguignait.

- Louise, ne me dites pas que vous aussi, vous allez vous y mettre !

- ... Louis a été témoin de ce qui est arrivé à son amie... En fait, il se sent coupable.

- Quelle amie ?

- Lady Caroline de Sackville, son amie d'enfance.

- Qu'est-ce qui lui est arrivé ?

Une servante s'avançait avec un papier dans la main. Elle baissait la tête lorsqu'elle se trouvait à notre hauteur.

- Je suis désolée de vous interrompre.

- Qui y a-t-il ?

- Cette missive est arrivée pour vous depuis deux jours mais l'on a oublié de vous la monter.

Je me retrouvais sur mes jambes immédiatement.

Deux jours ? Qui peut donc bien l'avoir écrit ? Ça ne peut pas être Charles ! Il n'a pas encore reçu ma missive !

- Vous pouvez nous laisser.

Je l'ouvrais à la hâte suite au regard curieux de Louise.

« Votre bal d'anniversaire a été

organisé dans le but de séduire

Louis XV, mais, moi aussi j'ai été

séduit, tellement exceptionnel et

étonnante vous êtes !

Je pourrais vous offrir le monde

entier si seulement vous me le

permettez ...

J'espère qu'on pourra se

rencontrer plus tôt que prévu ! ».

La dernière fille de Louis XV était aussi ébaubie que moi.

Petite histoire

Lady Caroline Sackville ( 1718-1775 ) était la fille de Lionel Cranfield Sackville, 7e comte puis 1er duc de Dorset, dirigeant politique anglais et Lord lieutenant d'Irlande.

_______________

Encore un autre mot chelou et un nouveau personnage !

Mais qui peut bien se cacher derrière ses écrits ?

Et qui est cette Caroline de Sackville ?

Lisons, et nous saurons !

⚠️️Désolée de ne pas être régulière dans mes publications, je dois subir une opération cette semaine et je passe beaucoup de temps à l'hôpital donc, ce sera un peu compliqué cette semaine mais, je me rattraperai comme toujours ! ⚠️

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top