14- Une excursion à la capitale.
11 ÈME JOUR / 90.
Nous étions tous assis autour d'une grande table garnie en train de déguster nos plats en silence.
- Anne, j'espère que le déjeuner est à votre goût. S'intéressait le père du dauphin.
J'hochais la tête en signe d'approbation. Comment ne le serait-il pas de toutes les façons ? Les servantes avaient concocté des plats de mon pays, sûrement sous les recommandations du Roi et de la Reine pour que je puisse me sentir à mon aise.
- Une missive de votre sœur Thérèse, m'est parvenue hier. Je suis tellement heureuse d'avoir de ses nouvelles après plusieurs mois de silence. Énonçait la Reine Leszczynska, remplie de joie.
- Comment se porte-elle, elle et son mari ? S'empressait d'interroger Henriette, soucieuse.
- J'espère qu'elle me ramènera quelques souvenirs du Danemark comme je le lui ai expressément demandés. Ajoutait Louise précipitamment.
- Pas si vite Louise, laissez d'abord mère répondre à votre sœur aînée. Requerrait Louis Ferdinand.
- Merci mon fils. Elle se porte bien Henriette et m'a informée qu'elle et son mari feront une escale ici dans quelques jours.
Tous les regards étaient dirigés vers Adélaïde.
- Qui y a-t-il ? Arrêtez de me regarder de la sorte ! Je ne m'opposerai pas à ce qu'elle vienne rendre visite à sa famille, je ne suis pas si cruelle. S'indignait Adélaïde.
- Je me retire, une affaire urgente requiert mon attention. Exposa Louis XV après qu'un garde soit entré et lui ait chuchoté quelques chose à l'oreille, avant de s'en aller.
Les deux sœurs ne s'étaient pas parlé depuis plus de deux ans car la sœur aînée reprochait quelque chose à sa cadette depuis tout ce temps. C'était donc normal que tout le monde s'inquiète de la réaction que pouvait avoir Adélaïde.
- Navré... Adélaïde... Nous croyions que ... hésitait Benoît.
- Peu importe ce que vous croyiez. Mère, quand est-ce qu'elle nous fera honneur de sa visite ?
- Elle ne l'a pas mentionnée. Votre sœur a été vague dans ses écrits. Cependant, je me réjouis du fait que vous vous préoccupiez autant de l'arrivée de votre sœur Adélaïde !
Adélaïde souriait tandis que de l'étonnement se lisait sur le visage de tous, la réaction d'Adelaide était incroyablement surprenante. Ce sourire malicieux qui s'était dessiné sur ses lèvres, cachait beaucoup de choses.
Avait-elle enfin enterré l'âge de pierre ? Ou était-ce simplement une ruse pour nous détourner de sa réelle impression ? Ou encore, se trompait-on sur toute la ligne ? Autant de questions qui ne nécessitent qu'une seule explication. Le déjeuner se finit sans plus aucun commentaire.
Après le déjeuner avec la famille royale, je me rendais dans mes appartements. J'étais épuisée et je ne voulais que dormir et encore dormir, la nuit dernière avait été difficile.
Lorsque je montais les escaliers, je surprenais une conversation entre deux servantes. L'une portait le linge sale et l'autre, n'avait rien dans ses bras.
Celle qui n'avait rien se penchait vers l'autre pour s'exprimer :
- Mirabelle, connaissez-vous la nouvelle ?
- De quelle nouvelle parlez-vous ?
- Je constate que vous n'êtes pas au courant.
- Vous attisez ma curiosité.
- Attendez.
Les deux servantes avaient cessé de placoter car je passais devant elles. Elles exécutaient des révérences et je les souriais faiblement.
- Que disiez-vous à propos déjà ?
- Depuis hier, une rumeur circule à propos du dauphin.
Je m'arrêtais dans ma marche et discrètement, me cachais derrière une colonne en marbre pas très loin d'elles pour pourvoir les entendre.
- A-t-il fait quelque chose de mal ?
- L'on raconte que ses allées et venues à la capitale ne sont pas anodines. Qu'il y va pour rencontrer sa maîtresse. Essayait de chuchoter la servante.
- Aaaaaa! ( elle mettait la main sur sa bouche ) Et l'infante Anne le sait ?
- Je n'en sais rien. Tout ce que je peux vous dire c'est que tout le monde est déjà au courant dans les cuisines.
- Allons parler de ça dans un autre endroit. On pourrait nous surprendre ici.
- Oui c'est vrai.
Et elles disparaissaient aussitôt. Je restais immobile pendant un bon moment, choquée par cette nouvelle était-ce vrai ? Ou s'agissait-il seulement d'une rumeur répandue par quelqu'un qui s'ennuie de la vie ?
Une ombre s'approchait de moi.
- Allez-vous bien ?
Que m'arrive-t-il ? Suis-je morte ou quoi ? C'était la première fois qu'il m'adressait la parole. Pourquoi un tel changement ?
- Venez, on s'en va dans votre chambre. Il me semble que vous avez besoin de repos.
Il était soucieux, en plus !
- Pourquoi faites-vous cela ? Je croyais que vous m'aviez en horreur.
- Je vous avais en horreur en effet parce que je croyais que vous étiez comme toutes ces snobes de l'aristocratie. Dans le monde, il y a une part de lumière et une part d'ombre en chacun de nous, ce qui compte c'est celle qu'on choisit de montrer dans nos actes, ça c'est ce que l'on est vraiment. Vos actes ont parlé pour vous. Argumentait-il en enroulant mon bras autour de son cou.
- De quoi parlez-vous Benoît ?
Pour la première fois, il ne m'avait pas regardé avec dédain.
- Vous êtes humble en plus.
- Je suis sincère lorsque je vous dis que je ne comprends rien. Qu'est-ce qui vous a fait changer d'avis à mon sujet ?
- Tant que je me comprends, ça va.
Il me conduisait jusqu'à ma chambre en me soutenant. Lorsqu'on y arrivait, il m'aidait à m'allonger.
- Vous pouvez à présent vous abandonner dans les bras de Morphée. Exprimait-il dans un sourire.
- Avec cette angoisse, ce sera impossible.
Il fronçait ses sourcils.
- Qu'est-ce qui vous arrive ? On dirait que vous avez reçu une mauvaise nouvelle.
Je tournais le dos à Benoît, les yeux tristes.
- C'est dur vous savez, d'être celle d'à côté... celle qu'on aime toujours qu'à moitié ou... qu'on n'aime point.
- Que vous a fait ou dit Louis ?
- Il n'a pas besoin de me faire quelque chose pour que je me sente ainsi.
Quelqu'un débarquait dans la pièce.
- Votre fiancée n'a pas l'air de se sentir bien. Fît Benoît.
- Laissez-moi voir ce qu'elle a. S'inquiétait le fils aîné de Louis XV.
- Je crois que je vais vous laisser. Se précipitait d'ajouter Benoît en rejoignant la porte de sortie.
Louis s'asseyait au bord de mon lit.
- Anne ? Quel est votre problème ?
- C'est vous mon problème.
Je me redressais, pliait mes genoux et les ramenait à ma poitrine en les serrant très fort.
- Moi ? Que vous ai-je fait ? Fît-il abasourdi.
- Vous n'avez guère besoin de me faire quelque chose pour m'attrister.
- Je sais que j'ai dû faire quelque chose pour vous mettre dans cet état. Dites-moi concrètement, s'il vous plaît, ce que je vous ai fait.
- Vos déplacements. Qu'allez-vous faire à la capitale tout le temps ?
- Vous savez très bien que j'y vais pour régler uniquement des affaires.
- N'avez-vous point des serviteurs qui pourraient s'y rendre à votre place ?
- J'y vais pour représenter mon père. Je suis quand même le futur Roi et j'ai des obligations.
- Ça, on le sait tous. Dis-je en roulant des yeux.
Je détournais mon regard de lui.
Il semblait nerveux malgré sa contenance, comme s'il sentait que j'avais découvert son petit secret.
- De quel blâme m'accusez-vous réellement ?
Quelqu'un demanda à entrer.
Lorsqu'il franchît le seuil, je découvrais que ce n'était ni plus ni moins un garde. Il se courba pour une révérence.
- Mon prince...
- Bernard, je suis occupé. Plus tard s'il te plaît.
- Mais, mon prince c'est urgent.
- Y-a-t-il un problème ?
Il se regardait intensément comme s'ils arrivaient à communiquer par un mystérieux sortilège. Louis avait compris de quoi il parlait.
- Bernard, j'arrive.
- D'accord mon prince.
Il s'en alla dans l'immédiat.
- Pourquoi autant de mystères sur votre personne ?
- Pourquoi autant de curiosité en vous ?
- Vous connaissez tout de moi. Pourquoi ne pourrais-je pas aussi connaître tout de vous ?
- Ne pouvez-vous pas vous contenter de ce que je peux vous donner ?
- Que me donnez-vous ? Rien, rien du tout.
- N'en soyez pas aussi convaincu.
Il se préparait à s'en aller.
- Où allez-vous encore ?
- À la capitale, pour une affaire.
Je dépliais mes jambes et me tenais debout, droite comme une aiguille.
- Encore ? Emmenez-moi avec vous.
- Vous emmener ? Où je vais, n'est pas un endroit indiqué pour les femmes.
- Me sous-estimez-vous ?
- Non, bien-sûr que non. Comment pourrais-je ? Rigolait-il.
- Arrêtez de plaisanter et Emmenez-moi donc !
Il s'avança, arrêta mes épaules et m'observa d'un regard plein de tendresse et de bons sentiments. Ce genre de geste me rend encore plus amoureuse de lui.
- Une prochaine fois.
- Et si je veux y aller aujourd'hui ?
Ferdinand enleva ses mains sur mes épaules.
- Vous êtes vraiment têtue. Mais, je suis navrée d'insister sur le "non" ma toute belle.
Ma toute belle ? Quel agréable surnom.
- D'accord.
- D'accord ?
- Oui. Si vous y allez seul pourquoi ne devrais-je pas moi aussi sortir toute seule ?
Il changeait de mine, semblait inquiet.
- Non, c'est dangereux.
- Qu'est-ce qui est dangereux ? Arrêtez de me prendre pour votre pot de fleurs !
- Faites donc comme il vous plaira.
Il avait facilement accepté, c'était étrange alors que je m'étais préparée à lui dire que je sortirai peu importe son avis .
Mon fiancé déposa un doux et tendre baiser sur mon front.
- Je viendrai vous voir ce soir, à mon retour. Termina-t-il.
******
J'avais mis ma tenue d'équitation et j'étais dans les écuries. Je cherchais un cheval. Mon grand frère Charles m'avait appris à monter à cheval et j'étais devenue l'une des meilleures cavalières d'Espagne.
- S'il vous plaît, comment celui-ci s'appelle-t-il ?
Un jeune dresseur de chevaux, brun du prénom de Gérard qui voue une passion pour les chevaux, me répondait gentiment :
- Il n'a pas encore de nom celui-ci. Il est nouveau et on est encore en train de le dresser pour les soldats de la cour. Je vous conseillerai de prendre Barth, il est très sociable votre altesse. C'est pour une balade ?
- Oui, une balade en effet. Je prendrai Max.
- Max ?
- Oui, Max. Je l'ai baptisé Max, le cheval qui n'a pas de nom et qui n'est pas encore dressé.
- D'accord comme vous voudrez même comme je vous le déconseille.
- J'insiste. C'est lui que je veux.
Obligé, il accepta, fît sortir Max et m'aida à grimper.
******
- Veuillez ouvrir la grille s'il vous plaît. Demandais-je aimablement, assise sur Max, au gardien de la grille du château Saint-Germain-En-Laye.
- Votre altesse.
Il esquissait une révérence.
- Je suis navré de ne pas pouvoir.
- Pour quelle raison ?
Il abaissa son visage, et posait une main sur sa poitrine.
- Le dauphin me l'a interdit. Il a dit que je ne devrais vous ouvrir la grille sous aucun prétexte.
Comment a-t-il osé ? Voilà la raison pour laquelle il n'avait pas discuté avec moi. Je sortirai qu'il le veuille ou pas. J'irai en excursion à la capitale !
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