7ème mois - Partie 3

-Marion..Marion je te parle!

-Oui? Désolée Alice, j'étais ailleurs.

-Je te disais, tu es resplendissante dans cette robe.

-C'est gentil, mais je ressemble à un cachalot échoué sur la plage.

-Mais dis pas n'importe quoi, tu es enceinte, tu es resplendissante je t'assure.

Je lui souris, à moitié convaincue. Le taxi s'arrêta devant un bâtiment aux murs noirs. Une entrée composée de deux portes blindées était garder par deux vigiles costumés à la men in black. Au-dessus d'eux, un immense néon clignotait, passant du bleu au rouge et inversement. D'après ce qui était écris, l'endroit s'appelait «Phoenix in ashes», littéralement «Phoenix en cendres». Tout en me demandant pourquoi tous les endroits à peu prés huppés de France s'évertuaient à utiliser l'anglais, je descendis de la voiture. Alice m'avait parlé d'une soirée tranquille entre filles, mais visiblement, elle avait manigancé autre chose. On entra dans la boite et allâmes nous installer dans un des carré autour de la piste de danse. Le club n'avait rien d'original en soit. Les tables étaient disposées de telle façon à créer un demi-cercle autour d'une grande estrade accolée au mur du fond qui faisait office de piste de danse. Face à elle, contre le mur opposé se trouvait le comptoir avec un barman au regard d'aigle, à l'affut du moindre comportement passible de se faire éjecter. Sur le mur perpendiculaire au comptoir, face à la porte d'entrée se trouvait la zone des toilettes.

Je soupirai tandis que je me tournai vers mon amie. Que faisions-nous ici? D'une part je n'avais aucunement l'intention de jouer à frotti-frotta avec des jeunes hommes en rut. J'avais déjà donnée et on voyait bien où cela m'avait mené. De plus, j'étais parfaitement bien avec Eric et je n'avais pas l'intention de tout gâcher. D'ailleurs je n'en avais même pas l'envie. Et pour finir, j'étais enceinte jusqu'aux yeux, mon ventre me tirait, j'avais des bouffées de chaleur, de la sueur dégoulinait déjà dans mon dos et je faisais de la rétention d'eau au point de me demander si vivre pieds nus n'tait pas l'avenir de l'humanité...Et peut-être même tout nu, mais bon n'exagérons rien....Quoi que je me déshabillerai bien là de suite. Je donnerai tout pour pouvoir me balader en petite culotte juste pour avoir le plaisir de sentir ma peau respirer et faire disparaître le sentiment de compression que me donnait cette foutue robe noire soit disant de grossesse... Grossesse de qui? Madame Curedent? La blague...

-Ouai...Commentai-je, un tantinet irritée, Alice.. tu sais que je ne peux pas danser...

-Bien sur, on est pas là pour ça. Me répondit-elle toute guillerette.

Oui Alice, c'était évident....Tout le monde allait dans les clubs pour regarder la piste et admirer la déco...

-Ni boire...a part du coca... Je veux du coca! Le coca... C'est la vie!

-Oui je sais rolala c'est la grossesse qui te rend raisonnable ou quoi?

-Possible, riai-je, mais dis moi, Arnaud t'a laissé sortir comme ça?

Mon amie devint soudain silencieuse. Je me rapprochai d'elle afin de la prendre dans mes bras, mais elle reprit un peu brusquement.

-Je l'ai quitté. Notre relation tournait en rond. Il..Je lui ai parlé de toi, du bébé que tu allais avoir, je voulais en profiter pour mettre le sujet du mariage et du bébé sur le tapis....Ça...Ça ne s'est pas très bien passé et j'ai réalisé que nous n'avions pas les mêmes attentes. Alors je l'ai quitté.

-Je suis désolée Alice...Tu tiens le coup?

-Oui, oui ça va. En fait, je me sens soulagée. Cela faisait un moment que ça me rongeait et que je ne savais pas quelle décision prendre. Je me sens libérée, même si c'est parfois un peu dur. Il ne me manque pas lui, c'est plutôt la présence masculine qui me manque. Il est passé récupérer ses dernières affaires tout à l'heure. Alors je crois que...enfin...voir l'appartement vidé de moitié m'a fait réaliser que c'était bel et bien fini. Il n'a même pas cherché à recoller les morceaux, ni riposter. Je...Je me demande si finalement il ne restait pas juste parce que c'était plus facile ainsi...

Je la pris dans mes bras. Je n'aimais certes pas spécialement Arnaud, mais savoir mon Alice triste me fendait le coeur. Après un câlin aussi long que celui des Bisounours en mal d'amour, la jeune femme s'écarta de moi et fixa un point derrière moi en plissant les yeux. Puis elle déclara:

-En parlant de présence masculine...un magnifique jeune homme se dirige droit vers nous.

-Qu'est ce que tu...?

Je me retournai, me demandant dans quel plan Alice allait encore nous emmener. Mon cœur loupa un battement tandis qu'Eric arrivait à notre rencontre, passant un bras derrière mes hanches et déposant un baiser sur mon front.

- Tu me suis? Lui demandai-je du tac au tac, méfiante.

Eric était peut-être adorable, prévenant, attentionné et amoureux, je savais qu'il avait aussi des défauts. Déjà, il ronflait. Non mais vraiment. Plusieurs fois, je m'étais réveillée en sursaut à cause de ses bruits étranges émanant de ses cordes vocales. Et pour se rendormir, un vrai calvaire. Il m'avait aussi dit qu'il pouvait se montrer jaloux, mais je n'avais pas encore eu l'occasion d'en faire les frais. Je me demandai alors si il n'était pas en réalité un psychopathe. Du moins dans le genre possessif à en mourir. Mon esprit se l'imagina alors sortir de l'appartement quelques minutes après moi, annulant l'enterrement de vie de garçon de son frère, enterrement qui était peut-être tout bonnement un mensonge afin de me tester et de m'épier à mon insu. Donc il serait sorti peu de temps après moi, m'aurait suivi jusqu'ici et observé jusqu'à maintenant. Peut-être même qu'il avait piraté mon téléphone afin de lire et écouter mes conversations, qu'elles soient téléphoniques ou non. Peut-être...

-Alice, enchantée! C'est donc toi le fameux Eric! Je peux te tutoyer? Marion m'a énormément parlé de toi.

Je lui donnai un coup de coude dans les côtes tout en souriant. Cela faisait à peine deux mois qu'on était ensemble avec Eric, et même si au vu de tout le temps qu'on passait ensemble, j'avais l'impression que cela faisait bien plus longtemps, je n'avais pas spécialement envie de le faire fuir à cause des divagations de ma meilleure amie.

-Enchanté aussi! Puisqu'on est tous là, pourquoi vous ne vous joindriez pas à nous? On fête l'enterrement de vie de garçon de mon frère, et je pense que c'est une bonne occasion pour te le présenter, enfin si tu es d'accord, Marion?

Son regard croisa alors le mien. J'y lu plusieurs sentiments différents. Du désir, de l'appréhension, de l'hésitation. Quoi qu'avec du recul, j'y lisais certainement le reflet de mes propres sensations.

-Avec grand plaisir, lui répondit Alice avant que je n'ai pu dire quoi que se soit.

La jeune femme, surexcitée à l'idée de faire de nouvelles rencontres, passa devant nous. Eric m'attira alors à lui avant de m'embrasser avec passion.

-J'avais envie de faire ça depuis ton départ... Viens, je vais te présenter.

-Eric... Je le retins, hésitante. Tu es sur de toi? Je veux dire...

Je me montrai d'un geste de la main, insistant sur la rondeur de mon ventre. Ses parents n'étaient toujours pas au courant de la situation, et je me demandai si me dévoiler ainsi à son frère ne risquait pas de détruire sa famille. Il faut avouer que j'étais encore sous le choc de la réaction de mon père vis à vis de ma grossesse. Je m'attendais à ce qu'il le prenne mal, mais jamais je n'aurai imaginé qu'il tienne de tels propos. Cela faisait déjà un mois et demi que je ne lui avais pas adressé la parole. Et bien que je voyais Louis et Sophie de façon hebdomadaire, je n'avais pas eu l'occasion de revoir notre mère. Je l'avais eu au téléphone plusieurs fois depuis, dont un coup de fil qui remontait deux jours en arrière où elle m'avait expliqué qu'elle essayait de calmer mon géniteur et qu'elle essayerait de passer dés qu'elle le pourrait, mais je ne pouvais m'empêcher de m'inquiéter. Elle ne m'avait pas encore donné son avis sur ma situation, préférant me réconforter, et je redoutais ce moment. Ses propos ne seraient certes pas aussi virulent que ceux que j'avais subis de mon père, mais elle était celle dont l'avis importait le plus pour moi. Me dire que je l'avais potentiellement déçue me broyait le cœur.

Je chassai mes problèmes familiaux de mes pensées tandis qu'on arrivait à la table d'Eric. Il fit alors les présentations et je ne pus m'empêcher de rougir, mal à l'aise. J'avais l'impression de me faire juger par toute la tablée et je croisai les bras sur mon ventre dans l'espoir de le dissimuler un minimum.

-Alors c'est toi qui a retourné la tête de mon frère?

- Heu..Je...Le regard sérieux que Jason me lançait termina de me déstabiliser. Je...

-Je plaisante! Eclata-t-il de rire, je suis heureux de faire enfin ta connaissance. Installez-vous toutes les deux. Je vous présente Clément, Antoine, Baptiste...Ho et puis on s'en fout, les seuls stars ici sont Eric et moi.

Il m'adressa un clin d'œil tandis que je m'asseyais à côté d'Eric. Alice commença par s'installer à côté de moi, mas bien vite elle partie aux côtés de Clément. Je ne pouvais m'empêcher de m'inquiéter pour elle, me demandant si elle n'essayait pas d'oublier Arnaud par tous les moyens.

Jason et ses amis se révélèrent très gentils. La soirée se passait à merveille, si bien qu'on ne vit pas le temps passer. Deux heures s'étaient écoulées et je commençai à sentir les effets indésirables de la grossesse. J'avais une envie irrépressible de dormir, mon dos me tirait, mon ventre me lançait, mes jambes s'étaient transformés en deux gros jambons saucissonnés et mon fils avait eu la brillante idée d'utiliser mes côtes comme sac de couchage hyperlaxe. Bref j'avais mal de partout et je voulais juste rentrer dormir.

-Il se fait tard, je vais rentrer.

Je grimaçai alors que mon enfant à naître me donna un coup un peu rude. Eric fronça les sourcils et acquiesça.

-Je dis au-revoir et on y va

- Non ce n'est pas...

Il plaça un doigt sur mes lèvres, me faisant taire instantanément. Ce touché m'électrisa et je ne me privai pas pour le mordiller.

-Jay' Jay' On va rentrer d'accord? On se voit demain. Les gars, prenez bien soin de lui sinon je vous botte le cul.

Alice me regarda avec un grand sourire, me fit un clin d'œil, me montra le jeune homme à ses côté et profita qu'il avait le dos tourner pour faire un geste très explicite avec un doigt tendu d'une main et deux autres en formes de cercle de l'autre main...Je levais les yeux au ciel. Moi qui m'inquiétais pour elle, j'avais bien l'impression qu'elle avait trouvé de quoi se consoler. Je lui murmurai un «amuse toi bien» avant de lui envoyer un baiser et de m'éclipser au bras d'Eric.

Je m'endormis comme une masse à peine la voiture démarrée, et ce ne fut que lorsque je sentis les bras chaud et douillets d'Eric me déposer sur le lit glacial que j'ouvris les yeux.

-On est rentré mon amour. Repose toi, j'arrive dans deux minutes.

Je luttai de toute mes forces afin de me redresser pour retirer ma robe et mes chaussures. Une fois cet effort colossal effectué, je me laissai retomber lourdement sur mon oreiller. En simple culotte noire, ayant abandonné l'idée de porter des soutiens gorges qui de toute façon me comprimaient la poitrine et était trop petit un mois après l'achat, j'accueillis le sommeil comme une délivrance. La soirée m'avait complètement épuisée. Je sentis Eric s'allonger à mes côtés. Ses lèvres déposèrent un tendre baiser dans mon dos dénudé. La couverture remonta au-dessus de mon épaule. Son corps chaud et nu se colla contre moi. Puis je fus happée, engloutie dans la torpeur de mes rêves.

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