5ème mois - Partie 2
Le réveil résonna dans mes oreilles, telle une intrusion dans mon sommeil. En grognant, je tâtonnai ma table de chevet dans l'espoir que cette agression sonore cesse. Un objet dur rencontra alors mes doigts qui ne trouvèrent rien de plus intelligent que de le pousser. L'alarme, totalement indifférente au sort que je lui faisais subir, continua son vacarme incessant entre ma commode et le mur. Maudissant intérieurement l'inventeur de cette machine du diable, je me levai d'un geste brusque. La différence de température me prit à la poitrine tandis que j'attrapai mes vêtements et courrai jusqu'à la salle de bain. L'eau termina de me réveiller et, alors que je profitais de ce temps de détente, reculant le moment où je devrais sortir de cette bulle de chaleur, je sentis mon fils se coller contre mon ventre. Sentir cette petite boule contre ma peau m'emplis instantanément d'amour. Je me mis alors à la caresser tendrement.
-Salut toi. Je t'ai réveillé n'est-ce pas?
Je restai encore quelques minutes à câliner amoureusement mon ventre avant de me décider à sortir de l'eau et me sécher. J'avais rendez-vous à pôle emploi et il ne me restait pas beaucoup de temps pour me préparer. J'enfilais un pantalon de grossesse noir, le remontant jusqu'en dessous des seins. Je ne pus m'empêcher de penser que je ressemblais à ma grand-mère Mariette, celle du côté de mon père. Grimaçant, je m'octroyai une touche de couleur en mettant un tee-shirt de grossesse rouge légèrement décolleté. J'enfilai par la suite une paire de bottine rouge en tissu ayant un nœud papillon sur les côtés extérieur et ma veste en cuir noir. Une queue de cheval, un rouge à lèvre assorti à mes bottes, un coup de crayon noir autour des yeux et me voila prête à partir.
Le trajet en bus me parut interminable. Il y avait beaucoup de monde et je me retrouvais collée contre les portes de sorties. N'osant pas déranger tout cet attroupement saucissonné, je me contentai de serrer les dents en comptant les stations. Une fois hors du bus, je jetai un coup d'œil à mon portable afin de voir combien de temps j'avais devant moi et fus agréablement surprise d'avoir une réponse d'Eric. On conversait pas mal depuis notre rencontre et on se voyait régulièrement. On ne faisait rien d'extraordinaire bien sur, mais nos activités suffisaient à me faire prendre conscience qu'il avait une place particulière dans mon cœur. Cette fois, il me proposait un marathon star wars. J'avais, durant l'une de nos nombreuses discussions, eu le malheur de lui révéler que je n'avais jamais vu plus de la moitié du premier volet de la saga. Depuis, il s'était mis en tête de me faire visionner ce qui était, selon lui, un incontournable. Je lui répondis alors positivement, lui demandant par la même occasion de venir me chercher dans une heure afin que nous puissions commencer cette fameuse session de rattrapage. Ce fut donc avec un sourire étincelant que je franchis les portes de l'agence.
Mon rendez-vous s'était plutôt bien passé. Mon conseiller m'avait donné quelques annonces à pourvoir et m'avait envoyé vers une session afin de refaire mon CV. Je trouvais ce dernier très bien comme il était, mais ce devait-être leur procédure. En sortant de l'agence, j'aperçus de suite Eric au loin et lui adressai un large sourire. Alors que je me dirigeais vers lui, mon sang se glaça quand mon regard croisa celui d'un grand brun ténébreux. Je déglutis, tentant de masquer mon ventre proéminent, sans succès, espérant qu'il ne reconnaisse pas. Sans succès non plus de toute évidence puisqu'il se dirigeait à présent dans ma direction.
-Tiens donc, je ne pensais pas te revoir toi, vu comme tu es partie...précipitamment la dernière fois. On peut remettre le couvert si ça te dis?
Son regard en disait long. Je savais pour quoi il me prenait, et qui pourrait l'en blâmer? Face à ma passivité, il ajouta alors, un sourire carnassier aux lèvres:
-J'ai quelques amis qui se feraient une joie de....te rencontrer.
Mon corps se mit à trembler, me criant de fuir par tous les pores. Ce n'était pourtant pas ce qu'il me disait quelques mois plus tôt. A la fois perturbée par ce changement et par cette retrouvaille indésirable, je restai figée.
-Ce n'était pas très gentil de t'en aller comme ça ma belle. On s'amusait pourtant bien. T'avais l'air de l'apprécier le petit Alex. Continua-t-il en désignant son entrejambe.
Oui, c'est vrai qu'il s'appelait Alex. Je me souviens vaguement l'avoir entendu me le dire, mais j'étais bien trop focalisée sur la partie de jambes en l'air qui allait arriver pour me préoccuper de son nom. Et..Sérieusement, il venait de qualifier son sexe de petit? Non pas qu'il ait tort, mais généralement les hommes ont tendance à valoriser cette partie de leur anatomie.
Une bourrasque de vent fit alors voler mon manteau, dévoilant durant quelques secondes la rondeur de mon ventre. Son regard ne manquant rien du spectacle, il referma la bouche, interdit. Je déglutis tandis que je me demandais comment me sortir de ce pétrin. Heureusement, Eric arriva à ce moment là, me demandant si tout aller bien.
-Profites en bien, Lança alors le jeune brun en se tournant vers mon ami, il parait que les femmes enceintes sont les plus chaudes.
La mâchoire de ce dernier se tendit sous les paroles de mon coup d'un soir. Eric se contracta alors et je vis ses poings se serrer.
-Et celle là, pour l'avoir testée...Une vraie salope! Fanfaronna celui dont je n'arrivais même pas à me rappeler le nom tout en réduisant l'espace qui nous séparait.
Il posa alors sa main sur mon épaule, comme un champion exposant ses trophée. Je n'eut rien le temps de dire, ou de faire, que le poing d'Eric alla se loger dans la mâchoire du chômeur. Ce dernier tenta de riposter, mais Eric était plus rapide. A sa façon de bouger et de se tenir, j'en déduisis qu'il devait pratiquer un sport de combat. D'ailleurs, en quelques minutes, le blondinet réussit à maîtriser l'individu. Il le releva et l'envoya paître quelques mètres plus loin.
-Si tu t'approches d'elle encore une fois, je te le ferai regretter ! Compris?
Son regard était froid, sa réplique sèche et cinglante. J'en eu la chair de poule, bien que cela ne me soit pas adressé.
-Et tu feras quoi? Tu me casseras la gueule? Se mit à rire le jeune homme en se passant une main dans les cheveux.
Eric ne répondit rien et m'entraîna vers sa voiture sans lâcher Alex du regard. Nous restâmes silencieux durant tout le trajet. Seule la voix du GPS dans lequel j'avais enregistré mon adresse brisait ce moment de calme absolu.
-Si tu préfères te reposer, je comprendrais.
La voix d'Eric me sortit de mes pensées. Tournant la tête vers la vitre, je me rendis compte que nous étions arrivés en bas de chez moi. Je secouai la tête. La perspective de rester seule ne m'enchantait guère.
-Non, se serait bien si tu restais un peu. J'aimerai me changer les idées. Si ça te convient.
Il m'adressa alors un sourire avant de descendre de la voiture. Durant les quelques mètres nous séparant de mon appartement, je lui racontai brièvement la façon dont j'avais rencontré Alex. Contrairement à ce que je pensais, Eric ne me jugea pas. Ou en tout cas, il ne le fit pas oralement. J'étais déconcertée par la facilité avec laquelle j'arrivais à me confier au jeune homme. On ne se connaissait que depuis un mois, et, même si nous discutions tous les jours, que l'on se voyait régulièrement, j'avais encore du mal à comprendre cette confiance que je lui avais si facilement accordée.
Alice m'aurait dis que c'était l'amour, l'âme sœur ou une connerie dans le genre. Pour ma part, je n'y croyais pas. Je me connaissais après tout. Et Eric était plutôt bel homme je devais le reconnaître. Il ne m'était clairement pas indifférent. Ses beaux yeux bleus. Je voulais me le taper voila tout. Comme pour un nombre incalculable d'autres avant lui. Eric était simplement une nouvelle proie à ajouter à mon tableau de chasse, rien de plus.
Et comme j'étais enceinte, que ma vie sexuelle ressemblait au désert d'Atacama, et que les hormones parcouraient mon corps aussi efficacement qu'un aphrodisiaque boosté aux méthamphétamine, ce ne pouvait-être que sexuel. Le fait que l'on s'entendait bien, qu'il me faisait rire, que juste le fait de le voir me remontait le moral, que j'attendais impatiemment ses messages, que ma peau semblait magnétiquement attirée par lui, que je ressentais sa chaleur à chaque frôlement....Ce n'était que du bonus. Juste un petit plus qui pourrait rendre nos potentiels ébats extrêmement satisfaisants. N'est-ce pas? Et puis je spéculais peut-être après tout. Eric était peut-être le pire coup au monde. Et nous étions amis...en quelque sorte. Avais-je vraiment envie de gâcher ça afin de vérifier comment il s'en sortait au pieu? Merde....Non, ce ne pouvait-être ça. Non non non. Reprends-toi Marion. Tu vas avoir un bébé.
Je me dirigeai telle un automate dans le salon et lui désigna le canapé de la main. Je me retournai alors vers ma collections de dvds. Coup de foudre à Nothing Hills? Ho que non. Le secret de Brokeback Mountain? Je me tournai discrètement vers Eric qui admirait la décoration. Etait-il de ce bord? Dans le doute, mieux valait éviter ce film. Dans un cas comme dans l'autre, le message risquerait de mal passé. Et puis quelle message d'abord?
Marion arrête un peu de cogiter et trouve ce foutu film, pensai-je en me re-concentrant sur mes films.
Fermant les yeux, j'attrapai un dvd au hasard. Shawn of the dead... J'haussai les épaules. Pourquoi pas après tout. Je me retournai alors vers Eric, tout en lui montrant le dvd.
-Ça te convient?
-Oui, pourquoi pas. J'aime beaucoup ta déco au passage.
-Merci, c'est ma sœur qui me l'a conseillée, enfin en partie. Lui répondis-je en insérant le dvd dans le lecteur.
Je m'installai par la suite à côté de lui sur le canapé. Alors que le film démarrait, je le vis se rapprocher doucement et passer un bras derrière moi, en prenant garde de ne pas me toucher. Je me mordis la lèvre inférieur afin de ne pas lui sauter dessus. Ce que j'aurais fais, par le passé, dans n'importe quelle autre circonstance.
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