Chapitre 22 : Everything

Comment va Harry ?

Du haut de l'escalier, j'entends la voix de ma mère qui s'adresse à, je devine, Louis, étant donné que c'est le seul à m'avoir approché hier et qui puisse donc répondre à la question.

Mieux je pense, il répond.

Bonjour, je dis en entrant dans la cuisine.

Oh est la seule chose que ma mère sort lorsqu'elle me voit, tandis que le châtain reste silencieux.

C'est pas beau à voir, je sais, je grogne.

Tu as mis de la glace ?

Oui, répond Louis à ma mère. Hier je lui en ai fait mettre un peu. Mais ça n'empêche que c'est gonflé...

C'est un beau coquard.

Ma mère hoche doucement la tête puis elle me donne ma tasse de café. Je la remercie du bout des lèvres et apporte le liquide chaud à celles-ci. Puis je m'arrête lorsque je remarque le regard insistant et pensif de ma mère sur moi.

Qu'est-ce qu'il y a ? je demande en posant la tasse.

Je me disais... j'ai un peu de fond de teint si tu veux. Je dois avoir ta couleur.

Maman, je réponds en secouant la tête, je ne porte pas de maquillage.

Tu portes bien du vernis de temps en temps, tu peux bien mettre un peu de fond de teint pour... comment dire, limiter les dégâts.

Je n'ai absolument rien contre les garçons qui portent du maquillage, ou contre les filles qui n'en portent pas ; je ne pense pas que les critères de la société doivent être suivis à la ligne. En fait, j'ai beaucoup de respect pour les gens qui ont le courage d'être ce qu'ils veulent sans se soucier du regard des autres — mais je ne pense pas faire partie de ces personnes.

Je dis ce que je pense et je porte ce que je veux mais c'est vrai que les regards méprisants ne me passent pas au dessus.

Je les remarque et c'est triste.

Non merci maman, je rétorque finalement. C'est bon, j'assume ce... truc.

Je désigne mon oeil gauche.

Sacrée porte vitrée, marmonne ma mère.

C'est à ce moment précis que je sais que la journée va être longue.

»

La stridente sonnerie retentit dans les couloirs et l'agitation se créée soudainement. Les lycéens ne deviennent qu'une masse, presque une fourmilière — le chahut monte et les bruits de pas sont plus prononcés. Chaque personne part presque dans une direction différente, emprunte un couloir, entre dans une salle de classe. Des casiers claquent, des portes se ferment, les conversations s'emmêlent et se perdent dans les airs. C'est un matin normal à la Green Valley High School.

Mes cahiers plaqués contre mon torse avec mes bras, je marche en direction de la salle de mathématiques, Louis à mes côtés. Je n'ai franchement pas envie de faire des calculs aujourd'hui mais je n'ai pas le choix.

Certains étudiants se retournent sur moi, d'autres me regardent simplement passer. J'essaie d'ignorer mais cela m'est impossible ; je serre un peu plus les cahiers contre moi.

Et si on le croise ? Louis brise le silence. Je ne vais sûrement pas le regarder passer en sachant qu'il t'a frappé.

Je l'ai frappé aussi. On est quittes.

Tu ne seras jamais à son niveau Harry, et bien heureusement.

Je sais. Mais je ne suis même pas sûr qu'il soit venu en cours aujourd'hui. Arrête de penser à lui, il ne le mérite pas.

Louis hausse simplement les épaules puis nous tournons et entrons dans la salle. Je passe devant le bureau de madame Breston pour rejoindre ma place au fond, mais elle arque un sourcil à ma vue.

Pour calmer vos pulsions de violence, vous pouvez vous détendre avec les mathématiques, Styles.

J'affiche un sourire faux.

Merci mais je préfère encore me faire latter la gueule.

Elle roule des yeux et je vais m'asseoir à ma place puis Louis prend place à mes côtés. Nous sortons nos affaires comme à chaque début de cours et je croise les bras sur mon torse puisque j'ai quelques instants à perdre. La classe n'est qu'à moitié remplie, il reste trois minutes avant que la deuxième sonnerie retentisse et que le cours ne commence vraiment.

Je balaie la salle du regard et je croise celui de quelques personnes. Ils doivent faire partie de ceux qui tentent de deviner ce qu'il m'est arrivé.

Briana me regarde tellement mal qu'elle doit penser que c'est moi qui t'ait fait ça, me dit Louis.

Je tourne les yeux vers la blonde et en effet, elle regarde Louis. Mais elle ne doit pas se soucier de moi non.

Pourquoi tu l'as repoussé l'autre jour ? je demande en regardant Louis.

Quoi ?

Quand j'étais à la maison parce que ma mère voulait être sûr que j'étais plus malade. Niall m'a raconté. Pourquoi tu l'as repoussée ?

Il fronce les sourcils et papillonne des cils.

Euh...

Harry !

Je lève les yeux vers Liam qui s'empresse de s'asseoir à sa place, soit la table devant nous. Le plan de classe de madame Breston selon l'ordre alphabétique n'est pas très intelligent puisque j'ai tous mes amis à mes côtés, mais ce n'est pas pour me déplaire.

Le brun se retourne vers nous, essoufflé d'avoir couru jusqu'ici afin de ne pas être en retard.

J'ai vu Eliott devant le lycée. Et maintenant je te vois. Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

On a eu un... je grimace. Différend. Il n'a pas aimé que je le quitte.

C'est toi qui lui a fait ça ?!

C'est si moche à voir que ça... ?

Liam hoche vigoureusement la tête, les yeux ronds.

Merde, je soupire.

Il le mérite, intervient Louis.

Tu ne peux pas dire ça.

Si, je peux et je le fais. Tu lui as réglé son compte c'est mérité.

Je me suis emporté parce que je suis devenu incontrôlable, je n'aime pas savoir que je peux être comme ça. Je ne voulais pas le défigurer ! C'est comme insulter son ex une fois la rupture déclarée simplement parce que notre fierté en a prit un coup.

Eliott doit être très présentement en train de t'insulter de connard, dit Liam.

Mais je crois qu'on est tous d'accord sur le fait que je ne suis pas comme Eliott.

Les garçons se taisent, presque épatés par ma réplique.

Ta mère a vu ton état ? me demande mon meilleur ami après le silence.

Oui, bien sûr, je réponds. Elle n'aurait pas pu rater ça de toute manière. Je désigne mon coquard. Je lui ai dit que je me suis pris ta porte vitrée.

Attends, tu as quoi ? il est mort de rire.

Eh, écoute, j'ai improvisé ok !

Et elle t'a cru ?

Bien sûr que non Liam, elle n'est pas stupide.

Évidemment. Ça sent Gemma ça, non ?

Je secoue la tête en haussant faiblement les épaules.

Ta soeur ? Pourquoi ? Demande Louis.

C'est un truc que ma mère fait, je soupire. Enfin, qu'elle a fait une fois... dans une dure période de ma vie. Elle ne réussissait pas du tout à me parler ni à m'atteindre et plutôt que d'essayer réellement, elle est devenue absente et a envoyé ma soeur au front. Dès que j'allais plus mal qu'un autre jour, ma soeur surgissait de nul part.

Donc typiquement comme là, rétorque Louis.

Je pense pas, je réponds aux deux garçons. Ma mère a fait des efforts là-dessus, m'envoyer Gemma serait juste... reculer. Puis c'est bon, c'est juste une petite marque.

Mais tu connais ta mère...

J'acquiesce puis la voix stridente de madame Breston résonne, annonçant le début du cours... et c'est parti pour une interminable heure à se noyer dans les calculs.

»

Le long véhicule jaune s'arrête devant l'arrêt prévu à cet effet et Liam, Niall, Louis et moi montons. J'ai à peine fini de monter les marches que les regards se tournent vers moi.

Je roule des yeux et commence à marcher dans l'allée.

Étonnement, je n'ai aucune remarque désobligeante et lourde sur mon oeil. J'aurais pensé en avoir quelques unes, des blagues pas drôles et ridicules de personnes se sentant supérieures, mais pas du tout. On m'a beaucoup regardé, analysé, tout ce qu'on veut — les gens ont sûrement parlé de moi entre eux, car ils n'ont rien d'autre à se dire, mais je n'ai eu aucune question directe. Seuls Liam, Louis et Niall savent officiellement la vraie version ; ainsi que Paul et Calvin puisqu'ils ont deviné et que nous mangeons ensemble à la cafétéria. D'autres lycéens vraiment curieux ont dû faire le rapprochement entre l'état d'Eliott et le mien, mais ils n'ont aucune confirmation. Je ne sais pas ce que lui a été raconté... mais cela m'étonnerait qu'il ait été faire le fier. Il a dû taire l'affaire.

À mesure que j'avance dans l'allée, derrière mes trois amis, je croise les regards des gens dont certains que je connais plus que d'autres. Paul, Calvin, Daisy, l'ancienne meilleure amie de Matt, Jeff, le meilleur ami d'Eliott... évidemment, ce dernier est assis aux côtés de son meilleur ami. Évidemment.

Son regard croise rapidement le mien, mais cela ne dure pas longtemps. J'ai juste le temps de voir qu'il a les deux yeux noirs, un pansement à la lèvre et la joue droite griffée.

Je déglutis à cette vue et continue ma marche.

Finalement nous arrivons au fond du bus, là où nous nous asseyons toujours et nous prenons place. De gauche à droite : Niall, Liam, moi, Louis.

Donc... je conclus une fois un petit silence retombé, c'était une journée bizarre.

Pourquoi ? demande Liam. Parce que c'est ta première journée en tant qu'homme libre et heureux ? Belle définition du mot bizarre.

Qu'est-ce que tu penses de ça plutôt ? Bizarre : adjectif qualificatif, signifiant que tout votre lycée vous regarde comme si vous étiez un mélange sordide entre Rocky Balboa et un catcheur basse gamme.

Ma définition est mieux, rétorque mon meilleur ami. T'as plus de bâtons dans les roues, ou plutôt de roues dans les bâtons... Vous avez saisi ? Bâtons dans les roues... roux, Eliott...

Je roule exagérément des yeux et Niall explose de rire avant de taper dans la main de Liam, fier de sa blague.

Honnêtement, c'était une bonne journée, ajoute le blond.

Parle pour toi... je grogne.

Ce n'était pas une mauvaise journée. C'est juste loin d'être une des meilleures de ma vie.

Non, franchement, poursuit Niall en ignorant ma plainte, les cours de ce matin n'était pas si terribles et j'ai presque l'impression de m'améliorer en français ; pas vrai ?

Non, dit Louis.

Niall l'ignore tandis que Liam rit.

Puis à la cafétéria c'était drôle. Paul a réussi à mettre cinq bouts de pain dans sa bouche, c'était absolument dingue.

Passionnant, commente Louis ironiquement.

Puis madame Breston m'a mit un petit smiley sur ma copie même si j'ai eu un B moins. C'est pas top mais c'est déjà un grand pas, pas vrai ?

On acquiesce tous et le véhicule devient silencieux.

Oh, au fait, Harry. Je me tourne vers Louis. Je vais chez Calvin demain.

D'accord, je réponds.

Ouais, super. Je voulais juste... Te le dire.

Tu n'as pas besoin. Tu fais ce que tu veux.

Bien sûr. Mais si tu as besoin de moi, que tu es plus à l'aise si je reste avec toi, alors...

Je pose ma main sur sa cuisse et il se coupe lui-même. Je maintiens le contact visuel.

Il n'y a aucun problème Louis, vas-y. J'ai rien de prévu demain, je vais juste... je sais pas. Je vais voir. Mais t'en fais pas.

Il hoche lentement la tête, rassuré, et je retire ma main.

Le trajet se passe en silence comme je m'y attends. Eliott ne se retourne pas à un seul instant et les garçons ne discutent pas.

À demain H, m'envoie mon meilleur ami lorsque nous descendons du bus, passe le bonjour à ta soeur ! Je roule des yeux.

Elle ne viendra pas.

Liam hausse les épaules puis les portes se ferment et le bus s'éloigne jusqu'à tourner et être hors de mon champ de vision. Niall, Louis et moi marchons jusqu'à la maison. L'anglais amuse son monde et l'irlandais rit à gorge déployée. En soit, c'est un jour normal. Sauf que j'ai un oeil au beurre noir.

Dans 21 jours, c'est mon anniversaire, dit Louis, fièrement.

Dans 21 jours c'est Noël, je réponds.

Merci Harry, je vois que t'as le sens des priorités. Le Père-Noël ne te caresse pas, lui.

L'expression faciale de Niall se change en... en choc, oui, c'est le mot. Mais j'ignore et préfère rouler des yeux face à Louis et son art d'avoir une répartie beaucoup trop grande.

Honnêtement, je sais pas quoi t'offrir, dit finalement le blond.

T'embêtes pas pour moi. Un petit truc et je suis comblé.

Et toi Harry ? Je tourne la tête vers Niall puisqu'il s'adresse à moi. Tu comptes offrir quoi à Lou ?

Ouais, tu vas m'offrir quoi Harry ? Me taquine Louis.

Des centimètres. Allez, on est à la maison.

Louis mime le choc et s'arrête net. Niall et moi tournons dans mon allée alors il finit par nous rejoindre, marmonnant des grand bouclé mignon de merde. Je ne peux m'empêcher de sourire en coin.

Cependant, une fois arrivés à la porte d'entrée, alors que j'ai déjà mis ma clé dans la serrure, Niall parle ; ce qui me fait m'arrêter.

Ton beau-père s'est acheté une nouvelle voiture ?

Je tourne délicatement la tête vers l'allée du garage et découvre un véhicule que je ne connais pas. C'est une petite voiture noire, classique. Modèle assez ancien, pas vraiment abîmé. Je fronce les sourcils.

Pas que je sache, je réponds finalement à Niall.

Je tourne expressément la clé et entre dans la maison, suivi des deux garçons. Je dépose mon sac au passage et me dirige vers la cuisine au pas de course. Je reconnais ma mère, Robin... mais il y a deux autres personnes. Un homme basané que je ne connais vraiment pas et une blonde assise sur un tabouret du bar. Cette dernière se tourne vers moi, le sourire étendu jusqu'aux oreilles.

Salut, petit frère.

Merde.

»

Qu'est-ce qu'elle fait là ?

Je ne crie pas, je chuchote. Mais je crie en chuchotant. C'est assez complexe à décrire mais je sais juste que je suis dans le sellier avec ma mère parce que je viens de l'y traîner, presque en détresse.

Tu n'as pas l'air très heureux de voir ta soeur toi.

Ce n'est pas ça et tu le sais. Pourquoi elle est là ?

C'est chez elle alors...

Son chez elle c'est l'appartement qu'elle loue à Londres.

Ma mère détourne le regard.

Quoi ? je demande, m'attendant au pire.

Il y a eu un problème. Elle va rester quelques temps à la maison le temps de retrouver un logement. Il y a son copain aussi, il s'appelle Zayn, tu verras il est gentil.

J'ai un peu envie de me frapper la tête contre le mur. De savoir que ma soeur et son petit-ami vont rester ici, que nous allons vivre à sept dans une maison avec trois chambres.

Tu m'assures qu'elle n'est pas là pour moi ? Qu'il n'y a aucun rapport avec ça ?

Elle soupire et se passe une main sur la nuque.

Je n'ai pas besoin qu'elle soit là, maman.

Je marque une pause.

Je vais bien.

Elle n'est pas là pour toi Harry. Elle est là à cause de l'appartement. Sinon elle serait venue seule.

Donc tu m'assures que le fait qu'elle arrive le lendemain de mon oeil gonflé, c'est un pur hasard ? Tu ne l'as pas appelé pour me gérer ?

Je peux croire le fait que cela soit une coïncidence — mais je connais le passé, ma mère, ma soeur.

Tu vas mal, Harry, elle répond en soupirant.

Non maman, je te jure que ça va.

J'accepte que tu ne me le dises pas, mais ne me mens pas. Tu vas mal jeune homme et avoir ta grande soeur à la maison n'est pas discutable.

Je ne vais pas aussi mal qu'il y a un an, je soupire. Je ne vais pas... te faire vivre la même chose. J'ai le droit d'être triste et de ne pas avoir envie de parler.

Je sais Harry. Mais je m'inquiète tout de même. Puis, je dois lui annoncer.

Elle désigne son ventre.

Je soupire et hoche finalement la tête, résigné. Ma mère m'embrasse la joue et quitte ensuite le sellier ; alors je la suis.

Le fait que ma grande soeur soit là ne me dérange pas. Je ne la vois pas souvent, nous nous entendons bien et rencontrer son nouveau petit-ami m'enchante. Je ne suis pas un petit frère problématique et elle n'est pas une grande soeur encombrante. Le seul problème est que sa présence pour ces raisons me fait mal. Cela me rappelle à quel point nous avons été une famille dysfonctionnelle, tellement pas capable de communiquer qu'on envoyait autrui. Cela me rappelle mon état lamentable après Matt, cela me rappelle la colère que je ressentais contre ma mère de ne pas être capable d'être là. Cela me rappelle toute la colère que je ressentais contre le monde entier. Les choses sont différentes, mais je suis fatigué d'être en colère.

Harry ! Comment tu vas fripouille ?

Fripouille ? Je grogne.

Ma blonde de soeur me prend dans ses bras et je lui rends l'étreinte. Je suis content de la voir malgré tout — c'est juste les circonstances et les conséquences que je déplore.

Bien. Je vais bien. Et toi ? Je vois que tu t'es trouvée quelqu'un.

Je fais un signe de tête vers le fameux Zayn.

Oui ! Tu vas l'adorer, elle répond toute contente.

Salut, je dis en tendant ma main au concerné.

Salut Harry, j'ai beaucoup entendu parler de toi.

Il rétorque en me la serrant.

Très honnêtement, sans mentir, je peux dire que Zayn est un bel homme. Je n'ai jamais réellement douté des goûts de ma grande soeur, mais il est vrai que son petit-ami est plus beau que je ne l'aurais imaginé. Elle nous m'avait pas dit qu'elle s'est mise en couple — nous ne pouvons pas dire que nous sommes les plus proches du monde — mais le fait qu'il soit là avec elle aujourd'hui prouve que cela semble sérieux entre eux. Il a l'air gentil et cela me convient. En tant que petit frère, je ne peux pas vraiment arriver, simuler les gros bras et dire avec une voix menaçante si tu lui fais du mal je te pète la gueule, alors cela m'arrangerait si Zayn n'était pas un connard qui veut seulement faire souffrir Gemma.

Tu es pakistanais ?

Zayn lâche ma main et se tourne doucement vers la voix qui vient de s'adresser à lui : Louis.

D'origine, répond-il. Mais je suis anglais.

Oh, eh, bienvenue au club !

Ils se tapent dans la main, fiers et ravis. Je peux déjà voir à quel point ils vont bien s'entendre.

Eh, Zayn. La voix de Niall retentit. Ta mèche de cheveux là, c'est une décolo ?

Ouais ! Et tes cheveux ?

Pareil ! Tu la fais avec quel produit ?

Je décroche à peu près à ce moment-là. Ce n'est pas que les conversations sur les tendances capillaires de Zayn et Niall ne m'intéressent pas mais... les conversations sur les tendances capillaires de Zayn et Niall ne m'intéressent pas du tout.

Cela semble cependant leur faire un bon point commun qui signe le début de leur bonne entente.

Ayant besoin de respirer, je monte dans ma chambre.

Je ne peux pas m'empêcher de réfléchir. Ils vont rester vivre avec nous un temps ? Comment ils vont faire pour dormir ? Tenir à sept dans la maison, c'est possible, mais pour dormir ? Vais-je devoir laisser mon lit ? Ou Louis le sien ? Ou peut-être Niall, étant donné qu'il occupe l'ancienne chambre de ma soeur.

Et puis, pourquoi Gemma n'a même pas louché sur mon oeil foncé ? Elle l'a vu — elle l'a forcément vu — mais elle n'a même pas regardé une seule seconde comme si ce n'était pas normal.

Puis, même si je déteste l'admettre, j'ai peur. Je suis habitué aux visites de ma grande soeur, qui a pour but de me faire parler et aller mieux, même si cela n'a jamais réellement fonctionné — mais cela me fait peur. L'histoire de Matt était une chose, l'histoire avec Eliott en est une toute autre. Je ne suis pas sûr d'être prêt à raconter l'histoire entièrement, à assumer l'abus que j'ai subi, à mettre des mots sur mes maux.

Ça va ?

Je relève la tête d'entre mes mains pour regarder Louis entrer dans la chambre. Je hoche la tête, soupirant, puis me lève et entame les cents pas.

Ouais, ouais, ça va, juste... Nouveau soupir. Je ne m'attendais vraiment pas à ce que ma soeur débarque.

Liam t'a prévenu...

Non, il m'a taquiné, c'est différent. Lui non plus n'en a aucune idée, il faisait juste ça pour m'embêter.

N'empêche qu'il avait raison.

Je soupire à nouveau et envoie un regard à Louis qui hausse simplement les épaules, l'air de dire j'y suis pour rien. Oui, il n'y est pour rien. Mais j'aurais préféré que cela ne soit pas le cas.

Je retourne m'asseoir sur mon lit.

Je ne comprends pas bien où est le problème, reprend Louis, s'asseyant sur le sien, donc en face. Tu ne t'entends pas bien avec ta soeur ?

Non, non ! Je reprends rapidement. Non, pas du tout... J'aime Gemma, on s'entend bien pour un frère et une soeur. Je souffle. Elle débarque quand je me sens mal et je n'aimais pas ça. Je n'aime pas ça. J'ai toujours trouvé ridicule qu'on soit une famille terrible au point d'envoyer les uns et les autres pour parler. Je sais que j'ai ma part de responsabilité là-dedans mais ça me touche. Et là... ça va mieux, avec ma mère, avec Robin. J'ai été surpris qu'elle soit là parce que je vais mal, alors que cela va mieux avec ma mère et qu'elle pourrait me parler, plutôt que m'envoyer ma soeur. Je ne sais pas si cela a du sens...

Pas totalement, mais assez, répond Louis. Tu te sens mal ?

Non, je me sens bien. Je ne suis pas au top de ma forme et j'ai un oeil défoncé mais je me sens bien. Ça va.

Louis m'offre un petit sourire compatissant et je pourrais jurer qu'il y a un brin de fierté dedans. Alors je lui rends.

T'as pas envie de lui dire pour Eliott, c'est ça ? ajoute Louis après un petit silence agréable.

Non, je rétorque franchement. Par fierté, par peur, je sais pas... Comment dire à Gemma que j'ai été avec un type comme ça pendant un an ? Que j'ai été faible au point de ne rien faire ? Elle va me trouver... pathétique.

Un an ? s'offusque Louis.

Tu vois, je soupire. Pathétique.

Non, t'es pas pathétique, c'est pas... Non. Ce connard t'a eu... pendant... un an...

Dès le début, je le savais. Dès le début. Mais je ne me l'avouais pas...

Maintenant tu t'en es rendu compte.

Maintenant je m'en suis rendu compte.

Et je peux avancer que sans Liam, mais également un peu Louis, je ne serais pas encore à ce stade-là. Je leur dois à tous les deux. Et à moi. Je suis passé au dessus de mes démons, de mes fantômes, de mon fantôme... Et c'est déjà bien.

Tu me sembles plutôt paniqué, conclut Louis.

Et je le suis.

Pourquoi ?

Je soupire.

Parce qu'en général, lorsque ma soeur débarque comme ça parce que ma mère pense que j'ai besoin d'un soutien moral parce que je vais mal, on part en voyage pour — je fais des guillemets avec mes doigts — resserrer les liens familiaux dans nos coeurs.

Je vois que Louis se retient de rire, et je comprends.

Ok, rétorque ce dernier. Mais là ça va mieux entre vous, non ?

Oui. Enfin, je crois... mais votre présence a beaucoup aidé.

Toujours là pour aider, sourit-il.

Mais comme vous êtes là et que ça va mieux, ça ne devrait pas avoir lieu. Mais, tu sais... ma mère est prête à tout.

Ça, c'est sûr, rigole Louis.

Nous partageons un rire qui me rend un peu plus léger. Mais alors que je m'autorise enfin à souffler sur toute cette situation, la voix de ma mère retentit depuis le rez-de-chaussée :

Harry, chéri, on part à New-York !

Louis rit davantage.









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Lorsque j'ai publié ce chapitre pour la première fois, l'histoire avait 5000 lectures. C'était déjà énorme ; mais je n'imaginais à aucun moment atteindre un jour les 280 000. 🤍

QUESTION N*22 : Quelle est votre destination de rêve ?

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