Chapitre 2 : Ingoing


Chacun s'installe à sa place, soit Robin en bout de table, maman à sa droite et moi à sa gauche. Louis s'installe à côté de ma mère, soit en diagonale en face de moi.
Ma mère nous sert à tous une quantité acceptable, et la conversation commence naturellement. C'est presque étonnant ; lorsque nous sommes que tous les trois, un silence de plomb règne au dîner. Et ça, c'est quand je mange avec eux.

Alors Louis, commence-t-elle, tu aimes la maison ?

Si j'aime la maison ? il demande, les sourcils haussés. Elle est géniale ! C'est juste, wow. Je ne m'attendais pas à ça.

Je ravale un sourire. Les autres personnes qui ont pu venir à la maison pour l'échange n'ont jamais été si emballées par la maison. Cela fait plaisir de voir que ça fait d'autres heureux. Et Louis semble si émerveillé qu'on dirait un enfant de quatre ans devant un magasin de sucreries.

Je suis contente que ça te plaise, reprend ma mère en se servant de la salade.

Hmhm. Comme je disais à Harry, j'ai une maison assez grande aussi mais on est un peu les uns sur les autres alors - il hausse les épaules - c'est pas pareil.

Tu as des frères et soeurs c'est ça ?

Oui, enfin, des soeurs. Quatre.

Oh ça fait une sacrée tribu !

C'est sûr, il rétorque en riant, mais ça me dérange pas. Elles sont géniales et puis je suis un peu l'homme de la maison.

Ma mère continue à lui poser des questions auxquelles il répond fièrement. Il semble réellement content qu'elle s'intéresse à lui et sa vie d'anglais nordique, mais je sens quand même qu'il est claqué par le trajet et surtout le décalage horaire.

Au fait, c'est vraiment bon, intervient à nouveau Louis. Le plat, je veux dire. C'est super.

Merci beaucoup Louis.

Je note alors dans un coin de ma tête que Louis est un garçon poli, et qu'il aime la cuisine de ma mère. Préférable étant donné qu'il va y avoir droit pendant encore environ 36 semaines.
Silencieusement, je continue à manger. Jusqu'à ce que Robin s'adresse à moi.

Et toi Harry, ça va ? Tu es bien silencieux.

Ça va, je souffle. Excusez-moi si je suis comme ça, j'ai juste mal au crâne.

Ainsi qu'à la mâchoire, et au coeur.

Chéri les cachets sont dans le placard de la salle de bain commune tu sais hein ?

Oui maman, t'inquiète pas, mais c'est pas nécessaire. J'ai juste pas beaucoup dormi.

Je me suis levé à 17 heures mais je ne dormais que depuis à peine trois petites heures. J'ai dû aller voir Eliott hier soir, et comme je ne pouvais pas rentrer à l'aube sous risque de tomber sur ma mère s'apprêtant à partir travailler, j'ai été chez mon meilleur ami Liam.

Sauf qu'il dormait, bien sûr.

Je suis resté dans son jardin, sur le transat, pendant des heures. Puis son père m'a remarqué et fait entrer, alors je suis resté un peu avec Liam jusqu'à ce que le bus pour ma rue passe. J'ai ensuite fait ce que j'avais à faire pour Louis - ranger ma chambre, faire son lit, nettoyer le placard lui étant destiné - et me suis finalement accordé du repos bien mérité avec un peu de glace sur ma joue. Puis le réveil a sonné, ma mère m'a appelé, et direction chercher l'anglais.

Tu as fait quoi aujourd'hui Harry ? S'intéresse ma mère.

Migraine. J'ai dormi. Et rangé ma chambre.

Ce n'est pas totalement faux, mais ce n'est pas totalement la vérité non plus.

J'esquive les questions plus complexes en allant chercher de l'eau. J'apprécie le fait que mes tuteurs veuillent s'intéresser à moi, mais ils ne sont pas très doués dans ce domaine. Cela s'est déjà montré par le passé.

Nous finissons tous de manger et après d'énièmes questions de la part de ma mère à Louis, je débarrasse et invite ce dernier à me suivre. Il monte les escaliers derrière moi, ses mains enfoncées dans les poches de son jean.

Ta famille est sympa, note t-il. Ta mère a l'air géniale.

— Elle l'est. Elle est parfois un peu... envahissante. Mais c'est une bonne mère.

La mienne aussi, sourit Louis. Elles s'entendraient bien je crois.

Je vois dans son regard un petit élan de tristesse, et je crois deviner que sa mère lui manque déjà. Mais il chasse bien vite cela en regardant les bibelots posés sur le meuble dans le couloir de l'étage. Il s'arrête sur le cadre photo posé sur la commode.

Wow, dit-il en haussant les sourcils, absolument magnifique celle-là. Tu joues dans la cour des grands ! C'est ta copine ?

Quoi ? je réponds, incrédule.

Elle. Il me montre le cadre où je suis affiché, mon bras autour d'une jolie blonde. Excuse-moi mais elle est canon.

Je roule des yeux et lui prends le cadre des mains pour le remettre à sa place. Puis j'entre dans ma chambre et vais m'asseoir sur mon lit, mais Louis n'en démord pas.

Faudra que tu me la présentes quand même, il dit en s'asseyant sur le sien. Je te la piquerai pas t'en fais pas, mais elle est vraiment belle !

Tu es vraiment sérieux ?

Mon ton n'est pas sympathique et je ne cherche pas à ce qu'il le soit. Je vais mettre ça sur le dos de la fatigue en espérant qu'il ne soit pas réellement un gros lourd, pourtant poli et sympa. Quel triste mélange cela ferait.

Quoi ? il rétorque naturellement. Elle est belle. Tu ne peux pas le nier. J'admire la beauté.

On dirait plus que tu parles d'un bout de viande que d'une jolie fille.

Après je peux la manger mais...

Il rigole un petit peu, puis s'arrête net et ne finit pas sa phrase lorsqu'il voit mon expression.

C'est ma soeur, connard, je grogne.

Oh. Oh, merde.

Il semble tout penaud.

Oui, oh. Ma grande soeur de 21 ans, Gemma. Tu es toujours aussi lourd ?

Mon ton est agressif, et je me rends compte qu'il faut que je me calme. Il n'y a pas mort d'homme non plus.

Excuse-moi, il répond choqué, je ne pensais pas que tu réagirais comme ça. Je déconne toujours comme ça avec mes potes, on parle des filles entre nous, mais je les respecte ! Il ajoute rapidement. Je les respecte. Je voulais juste, je sais pas, faire un truc de potes avec toi.

Évidemment, comment lui en vouloir ? Il ressemble à une sorte d'hérisson apeuré. Je ne lui en veux pas, mais ce n'est pas une raison pour parler comme ça de ma soeur, ou des filles en général. Ah, ces hétéros...

Je profite du silence pour fermer les yeux, allongé sur mon lit. Cela permet à mon esprit de se calmer un instant, même si mes pensées ne se tournent que vers Eliott.

Ta mère cuisine bien, il dit finalement.

J'hausse un sourcil, intérieurement amusé. J'ouvre les yeux et répond sans me redresser, donc sans le voir :

Tu viens de dire que ma soeur est bonne et tu enchaînes en parlant de la cuisine de ma mère ?

Il rit et je me prends à penser qu'il le fait beaucoup. Il est bon public. J'ai l'impression qu'il sourit et rigole beaucoup, car il a dû le faire une dizaine de fois en deux heures. Je ne suis pas malheureux mais je ne souris jamais autant, c'est évident.

Je n'ai pas utilisé le terme "bonne" ! il se défend, toujours souriant, cela s'entend dans sa voix. Ne joue pas avec les mots Styles, tu les tournes à ton avantage. Démon du dico.

Je lève les yeux au ciel, un sourire aux coins des lèvres.

Peu importe. Merci pour ma mère, mais ce n'est pas non plus un chef étoilé.

Peut-être mais elle cuisine super bien. Ma mère à moi, c'est genre, un danger public. Elle tuerait une armée avec ses plats, elle est dangereuse, je t'assure. Adorable mais dangereuse.

Et toi amusant, Louis.

Ça doit être un trait de famille parce que je suis un désastre culinaire aussi. Bref, je suis content d'être tombé chez des gens qui ne sont pas pro du micro-ondes !

Malgré que je pense qu'il peut être un gros lourd qui va me courir sur le système par moments, je suis content d'être tombé sur quelqu'un comme lui pour l'échange. Il est souriant, discret, lumineux. J'espère que l'irlandais sera un minimum agréable aussi.

Après quelques instants, je me redresse et me passe une main sur le visage. Je me retiens de grimacer lorsque je touche ma mâchoire, et enlève tout de suite ma main.

Je vais prendre une douche, je dis. Tu as besoin de quelque chose dans la salle de bain ?

Non, ne t'en fais pas. Et si j'ai besoin d'un truc, il y a l'autre salle de bain au fond du couloir, j'ai retenu !

Son enthousiasme est dingue ; je veux dire, comment on peut sourire et faire des blagues à longueur de temps ? Il est si heureux que ça ? C'est admirable.

Tu as bien retenu, je réponds en souriant.

Je verrouille la porte - je sais qu'il ne viendrait pas à l'esprit de Louis d'ouvrir la porte alors que je me lave, mais c'est un réflexe - et me déshabille avant d'entrer dans la douche. L'eau chaude coule contre mon dos et c'est probablement une sensation que j'aime le plus au monde. Je fais contraste en appuyant mon front contre le carrelage mural glacé et reste ainsi un instant. Cela me détend.

Puis je me lave simplement, me sèche, et enfile un simple t-shirt noir ainsi qu'un jogging. Habituellement, je dors en caleçon, mais je ne vais peut-être pas traumatiser Louis en jouant au garçon sans gêne. Justement ; cela le gênerait, et c'est normal. Je n'aimerais pas qu'on me mette mal à l'aise comme ça.

Voilà, tu peux aller te doucher si tu...

Je m'arrête en pleine phrase quand je le remarque tout habillé, endormi sur son lit, à moitié en boule. Je ferme silencieusement la porte de la salle de bain et pose ce que j'ai dans les bras avant de m'approcher pour le couvrir.

Il n'est pas en tenue pour dormir, mais je ne vais pas remédier à ça. Il n'y a également que dans les films où les gens déshabillent les autres pendant leur sommeil pour les mettre en pyjama, c'est ridicule. Seul quelqu'un dans le coma ne se réveillerait pas alors qu'on lui retire ses vêtements pour en mettre d'autres !

Je fais glisser la couette sur lui en me disant que oui, en effet, il semble épuisé, probablement autant que je le suis. Alors je m'en vais rejoindre mon lit également, désireux d'une bonne nuit de sommeil.

Et comme chaque soir, avant de m'endormir, je me prends à espérer que peut-être, pour une fois, mes rêves ne seront pas hantés par lui.

Mais comme chaque soir, c'est un échec.








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QUESTION N*2 : Quel est votre plat préféré ?

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