Chapitre 4 - par @MagentA369
C'est la salle de danse. Je l'ai toujours appelée comme ça. Vous savez, la salle d'interrogatoire où on vous observe à travers les miroirs sans tain dans une salle sombre, tandis que vous êtes seule avec un policier. Bien sûr, j'en ai déjà fait l'expérience juste après avoir commis l'interdit. Mais cette fois-ci, c'est différent. La salle d'observation a sa lumière allumée, et j'ai juste le temps de voir de l'autre côté un homme cerné, à moitié assommé entre les mains de quatre autres, une cagoule noire sur la tête. Cela m'étonne que le choc me permette de le détailler autant en une fraction de seconde. Je remarque une grosse cicatrice sur son bras gauche, le sac de tissu qui lui étouffe le visage lui coller à la peau... comme si... comme s'il y avait du sang.
J'ai littéralement le souffle coupé. Je retrouve cette transe que j'ai eue quand je m'étais emparée de mon arme, l'étrange transport par le sang et la violence.
Il disparaît en quittant la pièce. Tout va très vite, une seconde tout au plus pour prendre le temps de m'horrifier et le voilà parti, et le miroir reflète à nouveau comme il le devrait.
J'ai du mal à bouger. Je pense que le policier derrière moi n'a pas vu l'erreur qu'ils ont commise en me faisant venir... trop tôt. Trop tôt. Pour une fois que ça m'arrive...Je supplie mon sang de circuler dans mes jambes que la peur a refroidies, et j'entre d'un pas chancelant. Je serre les poings pour dissimuler mes tremblements.
La pièce me paraît glacée, le gris des murs étouffant, et je n'ai jamais senti mon esprit peser aussi lourd. Le policier me fait asseoir et me dit d'attendre. J'ai juste envie de me lever et de partir.
Qu'est-ce que je vais m'imaginer ? Un trafic de prisonniers... James était revenu... intact bien qu'un peu déséquilibré tandis que j'étais presque sûr que l'homme que j'avais vu à l'instant avait du mal à tenir sur ses jambes tant on l'avait tabassé devait être lui qui était absent au retour des quatre autres. Surtout, lui avait une cagoule. Je ne comprends pas et j'ai peur.
Allait-on me faire partir ? Dans quelles conditions ? Avec un sac qui me mangerait la tête, humide par mon sang, également. Il n'y a personne pour m'aider ; je jette un regard autour de moi. Je me rends compte à quel point je me sens seule, tout d'un coup. Après avoir vu une horreur pareille, je n'ai personne avec qui partager cela, personne pour me venir en aide. Je suis dans une salle d'interrogatoire, parmi d'autres centaines de pièce, tout ça dans une prison, au milieu de nulle part. Ma place est insignifiante dans tout ce bourbier, et appeler à l'aide serait ridicule.
Je me secoue la tête. Peut-être que j'ai mal vu, je me fais des films et je m'égare dans le désespoir. Je me ressasse cette pensée dans la tête, tant pour m'occuper que pour éviter mes pensées parasites m'alourdir le corps. Ma concentration vole en éclat quand j'entends la porte grincer, ce même grincement qui a accompagné l'affreuse vision de tout à l'heure ; malgré mes efforts, je revis la scène, ce qui me fait l'effet d'une claque émotionnelle, je me remets à trembler et à sentir le froid de la pièce me ronger.
C'est un homme. Il me contourne.
-Navré de vous avoir fait attendre, Mademoiselle.
Le type est bien habillé ; chemise repassée, cravate droite, ceinture serrée... Je me dis que tout est trop parfait ; il a dû se rhabiller après avoir tabassé l'autre et remettre ses cheveux en place avec du gel... Non. N'y pense pas. N'y pense pas. Réponds plus tôt. Il vient de te parler, idiote !
-Pas grave, je marmonne.
Il prend son temps et me lance un sourire hypocrite. C'est ça, essaie de me faire croire que tu es gentil, espèce de petit...
-Vous avez passé une bonne journée?
Il se fiche de moi ou... Il m'énerve. La colère remplace ma peur. Il va me faire tabasser, et il me demande de mes nouvelles ?
-Très. J'ai bien digéré le repas de midi pour une fois...
-Vous vous demandez pourquoi on vous a fait venir ici ? sourit-il.
Je déteste ça. Changement de sujet brutal, il n'en a rien à foutre si j'ai passé une bonne journée ou non. C'est une question pour la forme... Je me sens déjà piégée dans un jeu psychologique que je ne comprends pas. Je le regarde et plante mes yeux dans les siens, mais son sourire est encore plus impitoyable.
-Non. Ça m'arrive de temps en temps d'aller dans une salle d'interrogatoire, seule, au bout de quelques semaines d'enfermement déjà, sans rien me dire, ironisai-je.
Il sent que je suis sur la défensive, et il se redresse d'un coup pour ouvrir un dossier sur la table que je n'ai même pas remarqué. C'est celui qui doit contenir tout me concernant ; je ne me rappelle plus du tout de ce que j'ai dit. Je n'avais pas nié la vérité quand la police m'avait emmenée.
:-Nous allons parler un peu de vous, continue-t-il.
-Super. J'aurai l'impression d'avoir une vie.
Je dois être une gamine insolente à ses yeux, mais j'ai juste peur.
-Vous en avez une, affirma-t-il d'un air doucereux écœurant. Mais vous vous êtes donné le droit de l'ôter à quelqu'un.
Il se tait et me laisse digérer ça. Je tremble.
-Je m'en souviens à peine, je laisse échapper.
-Comment cela ? s'étonne-t-il.
Je l'ai surpris et j'en suis heureuse. Un plan minable me vient en tête pour essayer de revenir dans ma cellule, retrouver mon cahier et mon stylo. Je repense à l'air dingue de James et au vieux qui braille sans cesse comme un fou, au concert de cris de dégénérés qui me bercent nuit et jour. Eux sont là où je voudrais me trouver. Je libère ma peur, et je me mets à faire basculer ma tête sur le côté avec un air pervers que je me dessine sur le visage.
-Je n'ai pas encore mesuré l'ampleur de mon geste, je n'ai rien à dire là-dessus...
-Vous l'avez tué, dit-il avec sérieux.
-Il m'a quittée. C'est un crevard. Et encore, j'ai été gentille, je l'ai eu en une fois...
Je me mets à rire. Je reprends le dessus... ça aide.
-Vous voulez savoir ce que j'ai pensé, hein ? Je voulais que ça aille vite. Je voulais qu'il se fasse minablement troué par une balle alors qu'il savourait sa petite supériorité de connard qui vient de jeter sa copine, avant de mourir malheureux...
Je fais monter ma voix agitée par l'hilarité. Il a peur, révulsé. Ça marche.
-Comme avec Balavoine ! « Je veux mourir malheureux, pour ne rien regretter... »
C'est pas mal, ça, de sauter d'une idée à une autre pour essayer de paraître dérangée. Je me mets à brailler la chanson.
-Je vais demander de vous calmer, Mademoiselle,
-Vous préférez quoi ? Du Goldman ? Vous en voulez un de votre temps qui est encore vivant ?
Il se lève tandis que je me remets à chanter, et ferme la porte derrière lui. Moins d'une minute après, on vient me chercher.
Pas de sac noir.
Pas quatre paires de gros bras pour me refaire le visage.
Victorieuse, je suis reconduite dans ma cellule pour retourner parmi eux. Je m'avance dans le couloir, encore secouée par le rire. Je me rends compte qu'à cet étage de la prison, pas un seul d'entre nous n'est stable mentalement...
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Alors voici le chapitre 4 par @MagentA369! Merci à toi!
Merci aussi à @manon9449pour sa proposition de chapitre! J'ai dû choisir entre vos deux chapitres, et comme l'idée de @manon9449 pouvait être réutilisée plus tard dans l'histoire, j'ai pris l'autre!
Pour ne plus à avoir à faire ce choix, j'ai eu une petite idée, qui est à compléter. Dites-moi votre avis!
Donc mon idée est de faire des "inscriptions" et pour chaque chapitre, je désigne une personne qui s'est inscrite pour l'écrire! Si cette personne n'a pas d'inspiration, je pourrais toujours changer! Cette idée serait pour éviter des choix difficiles comme j'ai eu à faire aujourd'hui!
Pour l'instant, on va continuer comme d'habitude, mais dites-moi votre avis pour cette nouvelle idée!
Si vous avez des idées pour le chapitre 5, écrivez un commentaire!
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