Chapitre 5 : Step and Fall

Chapitre 5 : Step and Fall

5.

Le monde s'effondrait. Ou, en tout cas, celui de Peter s'effondrait.

Et est-ce que ça importait vraiment que le sol soit encore sous ses pieds, quand ce qui le gardait sur terre avait disparu ? Tout avait disparu.

Ils étaient tous morts.

Tous à cause de Peter.

Plus haut.

Il y avait une voix dans la tête de Peter – ce devait être la sienne, sans doute. Qui d'autre pouvait être à l'intérieur ? Qui d'autre pouvait-il rester, d'ailleurs ?

Plus haut. Ça murmurait. Plus haut. Tu auras moins mal. Plus haut.

Mais bon sang, les jambes de Peter lui faisaient mal. Chaque parcelle de son corps était douloureuse, mais il continuait à monter, une marche après l'autre. C'était tout ce qu'il pouvait encore faire. Un pied après l'autre. Il ne pouvait pas s'arrêter. Jamais. Arrêter voulait dire penser. Penser voulait dire ressentir.

Et il ne pouvait pas ressentir ça. Il ne pouvait pas. Ça le tuerait.

Plus haut.

Il s'agrippa à la rampe, s'appuyant dessus pour se redresser à chaque fois qu'il trébuchait, et il continua à monter. Les marches en béton étaient froides sous ses pieds nus. Il avait perdu ses chaussures quelque part, sur le long chemin qui le menait à la maison.

Les murs blancs commencèrent à se brouiller. Et Peter se brouilla avec eux.

Oh, mon Dieu. Il était seul. Seul.

Plus haut.

Les mains de Peter heurtèrent la porte en métal en haut des escaliers. Cela lui prit une minute pour se rendre compte qu'il ne pouvait pas aller plus loin, et quand il s'en aperçut, les pensées qui menaçaient de l'achever commencèrent à revenir. Non. Non, il ne pouvait pas. Il ne pouvait pas penser à ça. Il ne pouvait pas –

Continue.

La porte grinça lourdement contre l'encadrement métallique quand Peter l'ouvrit. Le verrou avait été cassé depuis aussi longtemps que Peter vivait dans cet immeuble, et de fait, le toit était devenu une véritable cachette pour lui depuis qu'il était petit. Il avait l'habitude d'y venir avec une couverture, et une paire de jumelles, et d'observer l'horizon Newyorkais. Oncle Ben ou May lui apportaient du chocolat chaud et s'asseyaient avec lui – Ben lui parlait des planètes, et May parlait à Peter de l'école. Et quand ils avaient fini d'en parler, ils chantaient des chansons des Beatles pendant des heures. Ils essayaient, en tout cas. Ils massacraient les paroles, et finissaient par créer les leurs.

May.

Mon Dieu, May.

Non. Non. Il ne pouvait pas penser à ça. Pas ça.

Le toit était désert. Il était seulement vingt-deux heures, la vie nocturne de la ville démarrait à peine, en-dessous de lui, mais il y avait déjà une froideur dans l'air qui heurtait Peter et qui le menaçait de le mettre à genoux.

Il trébucha hors des escaliers et jusqu'au toit, ses pieds nus portant son hébétude jusqu'au rebord. Ce n'était pas réel. Si ? ça ne pouvait pas être réel. L'horizon était entièrement falsifié. Il était... vide. Il n'y avait plus aucun émerveillement. Plus aucune excitation. Peter avait regardé cette ligne d'horizon pendant une grande majorité de sa vie, et jamais il n'avait été incapable d'y trouver quelque chose de magnifique. Aucune possibilité cachée.

Il avait pris l'habitude de s'asseoir seul et de regarder le ciel pendant des heures, juste pour capturer le soupçon de rouge et d'or exploser au-dessus de Manhattan.

Mais le rouge et l'or étaient partis.

Ils étaient retombés, et ne reviendraient pas.

Tout comme Peter.

Monte sur le rebord.

Quoi. Quoi ? Attendez –

Monte sur le rebord.

Ses pieds bougèrent avant même qu'il sache vraiment ce qui était en train de se passer. Ils le rapprochaient plus près du rebord. Ils montèrent sur les briques fraiches.

Peter n'avait jamais connu un New-York silencieux. Pas une fois. Il avait détesté ça, au début. Comme les sirènes ne semblaient jamais s'arrêter, et la foule ne jamais désemplir, mais il avait appris à aimer ça. Maintenant, il ne pouvait pas imaginer sa vie sans ces bruits – sans ce constant rappel de la vie autour de lui.

C'était fini, désormais. Le bruit et la vie.

Mon Dieu. Qu'est-ce qu'il –

Approche-toi plus près du bord.

Les pieds de Peter firent quelques centimètres.

Qu'est-ce qu'il était en train de faire ? Pourquoi était-il debout ici ? Non. C'était mal. Tout ça était mal –

Ils ont disparu. Ils ont tous disparu.

A cause de toi.

Oh, Seigneur. Ils avaient disparu. Qu'est-ce qu'il avait fait ?

Un son étranglé déchira la gorge de Peter. La force pure d'un sanglot qui souleva sa poitrine le fit presque s'effondrer par-dessus le rebord.

L'horizon se brouilla alors que des larmes lui brûlaient les yeux. Salirent ses joues. Il ne pouvait pas respirer. Des sanglots le déchiraient désormais, et il n'arrivait pas à reprendre sa respiration.

Seigneur. Il était en train de mourir.

Il ne pouvait plus respirer. Il était en train de mourir

Un vrombissement se fit entendre au-dessus de Peter, mais il pouvait à peine l'entendre par-dessus ses propres halètements. Ça n'avait plus d'importance, de toute façon. Plus rien n'avait d'importance désormais. Tout ce qui comptait s'était évanoui.

Un pas en avant.

La voix dans sa tête était douce. Raisonnable. Ça semblait raisonnable. N'est-ce pas ? Mais. Non. Attendez –

Un pas en avant.

Seigneur, sa poitrine lui faisait mal. Il ne pouvait pas respirer. Ça lui faisait tellement mal –

Quelque chose de dur et métallique atterrit sur le toit derrière lui – et dans un souffle, Peter ne fut plus seul sur le toit.

- Petit ?

Non. Non. Pas sa voix. Pas maintenant.

- Gamin ?

- Non, suffoqua Peter.

Il ne pouvait toujours pas respirer.

- Vous n'êtes pas là. Vous êtes pas réel. Vous avez disparu.

Quelque chose se brisa à l'intérieur de Peter. Il le sentit. Quelque part, profondément dans sa poitrine, quelque chose s'était brisé, et le trou que cela laissa le fit souffrir. Tout ce qui le constituait commença à s'effondrer. Sa vie. Son avenir. Tout s'effondra dans ce trou béant.

Un pas en avant –

- Je n'ai pas disparu. Je suis là ! Je suis juste là. Tourne-toi. Je suis juste là.

Ne te retourne pas, souffla la voix dans sa tête. Fais juste un pas en avant –

- Peter, retourne-toi ! Regarde-moi !

Ne l'écoute pas. Tout ça n'est que mensonge. Fais un pas en avant.

La voix dans sa tête avait l'air si sûre d'elle. Si calme. Tellement différente de Peter. Il voulait faire ce qu'elle lui disait. Tout irait bien du moment qu'il l'écoutait. Tout irait bien –

Mais Peter n'avait jamais été capable de s'opposer à Tony.

Doucement – le plus doucement que Peter ait jamais bougé dans sa vie – Peter jeta un œil derrière lui.

Tony se tenait à quelques pas derrière Peter, vêtu seulement d'un t-shirt tâché d'huile et d'un pantalon de survêtement – les bras tendus. Ses yeux s'agrandirent quand il le regarda.

Il était terrifié.

Un des bras de Tony se tendit un peu plus vers lui, et il fit un pas en avant.

- Hey. Hey, c'est juste moi, souffla Tony, s'avançant légèrement.

Ses mains tremblaient. Peter ne pouvait pas regarder autre chose. Les mains de Tony ne tremblaient jamais. Jamais. C'était un ingénieur. Ses mains stables étaient ce pour quoi il était connu – mais elles étaient définitivement en train de trembler, en cet instant.

- Juste moi. Juste Tony et Peter.

- Non.

Peter secoua la tête.

- Non, vous avez disparu.

Tout avait disparu, maintenant. Le trou dans sa poitrine aspirait tout ce qui faisait Peter. Tout ce qu'il était disparaissait avec un étrange sentiment d'apesanteur.

Fais un pas en avant. Peter glissa un pied vers le bord.

- NON !

Tony se précipita en avant, mais s'arrêta très vite quand Peter se retourna vers l'horizon, encore plus près du bord.

- Non, je suis là. Je suis vraiment là, je te le promets ! J-juste reviens, et on pourra parler.

Peter se retourna pour regarder Tony avec un regard vide. Il était à peine conscient qu'il respirait de nouveau. Ses sanglots avaient été avalés par le trou dans sa poitrine. Il était juste engourdi maintenant. Et quoi qui l'ait fait suffoquer, ça devait être contagieux parce que maintenant, Tony semblait avoir du mal à respirer. La poitrine du plus âgé était secouée, sa respiration se résumant à des halètements, alors que ses yeux grands ouverts ne quittaient pas Peter. Une main encore tendue, et à seulement un pied ou deux derrière Peter.

- Je sais que tu es perdu en ce moment, dit Tony, sa main ne s'abaissant jamais. Mais ça, ce n'est pas toi. Ok ? Tu ne veux pas faire ça, ajouta-t-il, les mots se bousculant dans sa volonté de tous les dire rapidement. Tu te rappelles ? Il y avait un homme, un homme qui infectait les enfants avec quelque chose, et après ils – ils... mouraient. Tu t'en rappelles ? Tu en as rattrapé un. Tu as rattrapé un garçon qui tombait d'un immeuble – tu lui as sauvé la vie. Tu as commencé à chercher cet homme – même quand je t'ai dit de ne pas le faire !

Tony s'arrêta, prenant une grande inspiration dont il avait l'air d'avoir désespérément besoin. Si Peter n'avait pas été certain que l'homme derrière lui n'était pas une hallucination, il aurait été un peu inquiet. Il était si pâle que Peter pouvait voir les veines de ses tempes pulser frénétiquement – même avec la faible lueur qui brillait sur le toit.

- Peter, tu ne veux pas faire ça. Tu dois te rappeler. Tu dois te rappeler de l'homme – ok ? Je pense qu'il s'en est pris à toi. S'il-te-plait. T-tu dois essayer de te rappeler –

Peter secoua la tête, fort. Essayant d'éloigner au loin cette image de Tony. Il n'était pas réel. Il était juste là pour le torturer.

- Vous avez disparu, marmonna Peter, secouant toujours sa tête.

Sa vision commençait à se brouiller.

- Vous avez disparu.

- Je n'ai pas disparu. Je le jure, je suis juste là, Peter, plaida Tony, ses yeux grands ouverts et honnêtes – plus grands que Peter ne les avait jamais vus. Je vieillis de dix ans à chaque minute que tu passes ici, mais à part ça, je vais bien. J-juste reviens –

Non. L'autre voix était de retour. Non. Fais un pas en avant. Tu te sentiras mieux. C'est ce que tu mérites.

- Non. Je peux pas. Je peux pas –

Peter n'était pas certain de savoir s'il parlait à la voix ou à Tony. Ou aux deux. Il ne pouvait suivre aucun des deux. Faire un pas en arrière ou en avant. Il resta simplement où il était, debout sur le bord du toit.

- Tu peux le faire ! Tu peux. Juste un pas – fais juste un pas et reviens. Ok ? insista Tony, s'avançant encore légèrement avec sa main toujours tendue. Viens, je vais t'aider. Je –

- Non, dit Peter, en devenant de plus en plus agité.

Tout son corps commençait à trembler.

- Vous êtes mort. Mort. Vous. May. Ned.

Ses mots résonnèrent, mais apparaissaient comme dans un brouillard, dans sa tête. Ils lui étaient tellement étrangers qu'ils ne faisaient pas sens à ses yeux.

- Ma faute. Ma faute.

- Non. Non, on n'est pas morts. Je suis juste là, May est en bas – je te jure, le coupa Tony, une main toujours tendue. Et Ned, où que soit Ned, je te promets qu'il va bien. On va tous bien. Tu es le seul à avoir été blessé. Cet homme, il t'a fait quelque chose – mais ça va, on peut l'arranger. On va l'arranger, toi et moi, je te le promets. Tout ce que tu as à faire c'est prendre ma main.

Peter baissa les yeux vers la main. Elle était juste à quelques centimètres de lui, maintenant. Il aurait pu tendre le bras et l'attraper sans même avoir à s'étirer – et, mon Dieu, il le voulait. N'était-ce pas ce qu'il avait toujours fait depuis le jour où il avait rencontré Tony ? Tendre le bras.

L'homme représentait tellement pour lui. Un mentor. Un modèle.

Un ami.

Et Peter avait tendu le bras et avait tout pris. C'était tout ce qu'il avait toujours voulu. Compter. Faire quelque chose. Et Tony lui avait donné la chance de faire les deux.

Tony lui avait tellement donné. Tellement.

Et Peter l'avait déçu encore, et encore.

Et maintenant – c'était la dernière fois.

Un pas en avant.

- Je suis désolé, murmura Peter. Je suis vraiment désolé, Mr. Stark.

- NON !

Peter glissa un pied en avant. Et tomba.

Ou, du moins, il commença à tomber. Il commença à sentir l'air sous ses pieds, et la sensation familière d'apesanteur qui venait avec la chute à travers les rues qu'il ne connaissait que trop bien.

Et ensuite, quelque chose de fort, et désespéré, accrocha fortement son bras et s'y cramponna.

Tony était au-dessus de lui – à moitié penché par-dessus le rebord, pour essayer d'empêcher Peter de tomber du trentième étage jusqu'au trottoir en contrebas – s'agrippant au bras de Peter avec une main forte.

- Accroche-toi à moi !

La voix de Tony hurlait au-dessus de Peter – mais Peter ne pouvait pas vraiment l'entendre. Ou peut-être qu'il pouvait – mais les mots étaient troubles. Tout devenait trouble.

Il avait fait ce qu'on lui avait dit de faire. Il avait sauté – comme l'homme lui avait dit de faire. Mais il ne se sentait pas mieux. L'homme avait dit qu'il se sentirait mieux. Que ça arrangerait tout – mais rien n'était arrangé. Ça ne pouvait pas l'être.

- Accroche-toi à moi ! cria l'homme plus âgé au-dessus de lui – sa respiration devenant bien vite de l'hyperventilation alors qu'il s'accrochait à Peter avec des yeux enragés.

Il était tellement pâle maintenant. Il devait vraiment être mort. M-mais. Il était là. Il s'accrochait à Peter. Seigneur. La tête de Peter commençait à lui faire mal.

L'homme avait dit. L-l'homme avait dit –

- Ne me lâche pas !

Mais Peter l'avait déjà fait.

Et maintenant, le monde le laissait partir.

Quelque part – au bout de ses doigts engourdis – Peter se sentit glisser. Et alors il avait chuté à nouveau.

Quelque chose de dur et froid heurta alors le dos de Peter – lui faisant relâcher tout l'air qu'il avait dans ses poumons. Mais après, quoi que ce fut, ce n'était plus seulement contre son dos. Ça entourait ses bras. Ses jambes. Se serrant autour de sa poitrine et de sa tête. L'encapsulant. Et alors il ne chutait plus vraiment.

Enfin, il ne pensait pas être en train de chuter.

Non. Maintenant, il volait.

Peut-être qu'il était déjà tombé – qu'il avait déjà heurté le sol à mille kilomètres à l'heure. L'homme avait promis que tout irait mieux. Est-ce que c'était ça ? Est-ce que c'était mieux ?

Le pied en métal de Peter heurta le sol, et ensuite, sans prévenir, sa prison s'ouvrit et Peter s'effondra. Chaque parcelle de son corps était engourdie maintenant. Rien ne bougeait. Rien n'avait besoin de bouger – il avait atteint son but. Il avait sauté.

L'homme ne lui avait pas dit quoi faire après.

Avant que Peter puisse heurter le sol, quelque chose d'autre l'attrapa. Ce quelque chose était chaud, cependant. Sa poigne sur Peter était forte, et ferme, mais elle était chaude. Si différente de l'air glacial, du bêton froid et de sa prison de métal.

- Peter !? Nom d'un chien, s'il-te-plait, PETER !?

Peter se sentit reposer sur le sol. C'était du bêton froid – mais pas un trottoir. C'était trop lisse pour être un trottoir. Était-il de retour sur le toit ?

Avec Tony ?

- Peter ?! Allez, Peter, regarde-moi !

Cette même chaleur enroulée autour de Peter. Des doigts glissèrent le long de son cuir chevelu, tandis qu'une main chaude se posait contre sa poitrine. Les doigts descendirent à l'arrière de sa tête et se pressèrent ensuite contre son cou. Ils tremblaient.

Tony ?

Peter tremblait aussi. Mais... doucement. Il se balançait. La chaleur, ferme, comme une masse pressée contre sa poitrine, le berçait, d'avant en arrière. Et Peter se balançait avec elle.

Doucement – tellement doucement – la voix de Tony commençait à filtrer à travers la passoire qu'était devenu le cerveau de Peter.

- Non, non. S'il-te-plait. Mon Dieu, non ! S'il-te –

Les doigts qui étaient pressés contre la nuque de Peter bougèrent de haut en bas, avant de presser à nouveau, fort, douloureusement.

Peter pouvait faiblement sentir son pouls battre contre les doigts.

Et, apparemment, ceux qui le tenaient pouvaient aussi.

- Oh, bon sang !

Les mots s'échappèrent d'un souffle, mais Peter pouvait les sentir au-dessus de lui. Des bras chauds entourés plus fermement autour de lui, et un front qui se posait contre le sien.

- Oh, Seigneur, merci. Merci.

Pendant quelques minutes, il n'y eut rien. Peter... exista simplement. Tout comme l'homme au-dessus de lui. Et l'homme fit de même. Il prit de profondes inspirations – Peter suivant le mouvement comme il était toujours serré contre la poitrine de l'homme – et continua à les bercer.

Ça ressemblait à Tony. Bon sang – ça sentait même comme Tony.

Peter connaissait ces mains. Elles étaient abimées et rugueuses. La paume dure. Elles effleuraient parfois la main de Peter quand ils étaient au labo, travaillant sur des sections infimes de ses lances-toiles. Elles avaient tapoté ses épaules tellement de fois qu'il ne les comptait plus. Et bon sang elles étaient fortes. Il y pensait à chaque fois qu'il faisait quelque chose de stupide, ou de dangereux, parce que ces mains s'agrippaient à lui comme des chaînes. Des mains d'ingénieur. Fortes et fermes.

Mais l'homme avait dit qu'il était mort.

L'homme avait dit –

- Peter. Peter ! Tu dois me regarder. Regarde-moi. Allez, fais-moi un signe, petit, s'il-te-plait

Ces doigts se retrouvèrent sur son visage à nouveau. Effleurant son front, ses yeux. Survolant ses lèvres pour voir s'il respirait.

En sentant la souffle de Peter contre son doigt, l'homme qui l'agrippait laissa échapper un autre souffle, et la main qui était sur le visage de Peter disparut pendant un moment.

Peter disparut avec elle.

- Bruce ! Bruce.

La voix de Tony traversa le brouillard de son esprit.

- Ouais, je l'ai. I-il est pas tombé. Enfin, il est tombé – il est pas tombé. Il est p-pas tombé – je l'ai. Je l'ai, mais il ne va pas bien. Ses yeux sont ouverts, mais il ne réagit pas.

Huh. Les yeux de Peter étaient ouverts ? C'était curieux. Il ne pouvait rien voir. Il ne pouvait... enfin... il ne pouvait rien faire. Il était tellement engourdi qu'il n'était pas sûr du tout d'avoir encore un corps.

- Il a un pouls – mais il respire à peine. J'ai besoin que tu ailles à l'atelier, ok ?

Tony parlait précipitamment. Peter n'écoutait que la moitié de ce qu'il disait. Il y avait des choses plus importantes dont il devait se soucier. Comme de savoir s'il avait toujours un corps. Il ne savait pas vraiment s'il devait s'en inquiéter ou non, mais ça valait le coup d'y réfléchir.

- Il y a une nouvelle machine sur laquelle j'ai travaillé, mais elle est toujours branchée dans le configurateur. Tu sauras ce que c'est quand tu le verras. Il faut que tu débranches tout et que tu l'allumes – je peux pas le faire d'ici – non. Non. J'ai besoin de cette machine. Il respire à peine, ok, s'il arrête de respirer quand on sera en route – non, ok ? non. La machine qui est dans l'atelier a un respirateur, alors si – si quoi que ce soit se passe sur le trajet, ça peut le garder en vie jusqu'à ce qu'on arrive –

Peter devait toujours avoir un corps. Il était retenu par quelque chose. Et Tony disait... quelque chose. Quelque chose à propos de respirer. Il fallait avoir un corps pour faire ça, pas vrai ? Et si on avait un corps, il fallait respirait. Huh. Peter n'était même pas sûr de ça. Il ne ressentait –

Il ne ressentait rien.

Il n'avait pas froid, n'était pas endolori, ni quoi que ce soit d'autre qu'il aurait sans doute dû ressentir. Il pouvait à peine sentir la main qui était frottée fortement le long de son sternum – en essayant de stimuler une réaction.

- Allez, petit. Je sais que tu as de bons poumons.

La voix fatiguée de Tony lui parvint, interrompant les pensées de Peter.

- Je t'ai entendu parler pendant des heures sans même prendre une inspiration. Tu dois respirer. Allez, prends une grande inspiration.

Ça n'avait rien à voir avec ce que l'homme lui avait dit.

Il avait dit que Peter serait en sécurité une fois qu'il serait tombé. Que tout le monde serait en sécurité – mais il ne se sentait pas en sécurité. Et Tony n'avait pas l'air en sécurité. Il avait l'air effrayé.

Ce n'était pas du tout comme ce que l'homme avait promis. Ce n'était pas... bien.

Peter n'était pas bien.

- Mon niveau d'anxiété est déjà bien supérieur à la moyenne, ce soir.

La voix de Tony interrompit de nouveau les pensées confuses de Peter.

- N'ajoutons pas à ça une réanimation cardio-pulmonaire, alors, s'il-te-plait, continue à respirer. Ok ? Continue à respirer.

Continue à respirer. Continue à respirer.

Peter pouvait faire ça. Non ?

Il n'était plus sûr, tout à coup. Mon Dieu. Il commençait vraiment à ne pas aimer ça. C-ce néant. C'était partout autour de lui. Dans ses mains, et dans ses pieds, qu'il ne pouvait toujours pas sentir. Dans ses os, et dans sa poitrine. Dans ses poumons – lesquels, malgré tous ses efforts, ne voulaient pas bouger davantage.

- Allez, petit – Peter – s'il-te-plait, s'il-te-plait, continue à respirer –

Continue à respirer. Continue à respirer.

Continuer à resp –

Peter se réveilla lentement – le soleil perçant ses paupières. Mon Dieu. Avait-il encore oublié de fermer les stores ? Et, bon sang, ce soleil était tellement brillant. Avait-il dormi ici ? May allait le tuer s'il était en retard pour l'école. Il avait un examen de maths, et un entraînement pour le Décathlon, et bordel, MJ allait le tuer si –

Quelque chose le repoussa quand il essaya de s'asseoir.

Levant une main, il essaya d'enlever ce qui le retenait, pour seulement trouver un long tube de plastique qui entourait son visage et entrait dans son nez.

Une canule nasale.

Les yeux de Peter s'ouvrirent d'un coup.

Il était au Complexe des Avengers. Dans l'aile médicale. Le torse dénudé, et enveloppé dans un tas de couvertures douces. Sa poitrine, qui, elle, n'était pas recouverte, était reliée par différents fils à plusieurs appareils médicaux.

Un moniteur cardiaque bipait de façon stable à côté de lui.

Oh merde.

May allait définitivement le tuer.

Un écho de voix en provenance du hall de l'étage médical interrompit sa panique grandissante. La porte de sa chambre était légèrement entrouverte – et Peter se redressa pour écouter ce que disaient les voix.

- Non. Non. J'en ai rien à foutre –

- Tony –

- J'y vais.

C'étaient Tony et Steve – et ils ne parlaient pas vraiment bas.

Peter fit l'effort de calmer sa respiration et de garder un pouls stable. La dernière chose dont il avait besoin, c'est que toutes les machines autour de lui commencent à s'emballer, et que les deux hommes se précipitent ici avant que Peter ne puisse comprendre ce qui s'était passé.

Il savait par expérience que Tony avait toujours tendance à minimiser les choses, quand il était blessé. Il ne mentait jamais – Peter pouvait le dire – mais il était clair que Tony lui servait toujours la version abrégée de l'histoire. Pour le bien de Peter ou celui de Tony, ça, il ne savait pas.

Et en considérant le fait que Peter ne se rappelait d'absolument rien, il était sûr que quelque chose de grave s'était passé.

- ?

La voix de Steve résonna dans le hall.

- Tu ne sais même pas où ce type se trouve.

- Je le trouverai, insista la voix de Tony, durement. Je connais la localisation des autres victimes – et celle de Peter – il doit se trouver dans ce périmètre-là. Il finira par se montrer –

- Et après quoi ? Tu vas le tuer ? Au beau milieu de New-York – avec des milliers de témoins –

- Oui ! tempêta la voix de Tony. Tu as foutrement raison, je le ferai. Il tue des enfants, Steve.

La respiration de Peter se bloqua dans sa gorge.

- Il n'y a pas que ceux qui se jettent d'un immeuble, ou d'un pont, il y a aussi la moitié d'entre eux qui n'arrive jamais à temps à l'hôpital ! L'insuffisance cardiaque et respiratoire les tue presque immédiatement –

- Je sais. Je sais, Tony –

- NON ! Tu ne sais pas ! rugit Tony, assez fort pour faire sursauter Peter. Tu ne sais pas !

La voix de Tony se brisa sur le dernier mot. Le couloir devint silencieux.

- Tony.

La voix de Steve était douce, maintenant.

- Tony, il va s'en sortir.

- Non. Non, je n'ai pas – tu n'étais pas –

- Il va bien, insista Steve. Entre toi et Bruce, il a été contrôlé un millier de fois au cours des dernières heures – et il va bien. Il respire, il bouge. Son corps réagit – tout comme les autres qui ont pu recevoir une aide médicale à temps. Ils allaient bien – et il va aller bien, lui aussi.

Steve fit une pause, mais continua ensuite dans un murmure.

- Et quand il se réveillera, quel genre d'exemple vas-tu lui donner ?

Le silence de Tony était éloquent.

- Ce gamin vénère le sol sur lequel tu marches, sembla presque l'implorer Steve, si tu sors d'ici pour tuer cet homme, et qu'on t'envoie en prison, quel genre de message ça lui envoie ?

- Ça lui dira que des gamins arrêteront de se jeter du haut des immeubles – répondit Tony. Il a touché à mon gamin, je vais pas –

- Je suis pas en train de suggérer qu'on laisse ça de côté, certainement pas, le coupa Steve, avec sévérité de nouveau. Je ne te dis pas ça parce que j'en ai quelque chose à faire de cette enflure – j'ai envie de le tuer aussi, crois-moi – mais parce que je me soucie de ce qui arrive à cette équipe. Je ne vais te laisser gâcher ta vie et aller en prison, quand on peut faire ça correctement. Ensemble.

- Et tu serais d'accord avec ça ? le provoqua Tony. Avec le fait de le tuer ?

- Cet homme tue des enfants, répondit Steve avec sérieux. Je serais plus que d'accord pour le tuer.

Les deux se turent à nouveau.

- Hmm, marmonna Tony doucement. Peut-être que tu as un côté sombre, finalement.

Ça n'avait pas l'air de lui déplaire, au ton de sa voix.

Peter se pencha un peu plus au-dessus du lit – pour mieux entendre ce qui se passait – mais le câble d'une des électrodes attachées à sa poitrine se tendit et la machine à laquelle elle était reliée, à la droite de Peter, tangua dangereusement.

- Oh merde !

La machine s'écrasa au sol, s'explosa en plusieurs morceaux, et arracha ainsi les électrodes connectées au torse de Peter.

Tony et Steve se précipitèrent dans la chambre.

- Je suis désolé ! Merde, je suis vraiment désolé, Mr. Stark, débita Peter, en se redressant pour se pencher davantage au-dessus du lit afin de ramasser les débris. J-j'ai juste – c'est tombé – je l'ai. Je vous promets que je –

Des bras forts attrapèrent les épaules de Peter et le forcèrent à se recoucher dans le lit.

- Ne t'inquiète pas à propos de cette foutue machine, dit Tony, sans même jeter un coup d'œil à cet appareil médical sans doute très coûteux. Allonge-toi. Comment tu te sens ?

Tony repoussa Peter contre l'amoncellement d'oreillers dans son dos et s'assit sur le bord du lit – en inspectant Peter avec sérieux.

- Tu sais où tu es ? Ce qui s'est passé ? Tu as mal quelque part ? Ta poitrine – est-ce que ta poitrine te fait mal ? C'est dur de respirer ?

- Tony.

Steve avait fait le tour du lit et se tenait de l'autre côté de Peter – le regardant d'un air inquiet. Il laissa échapper un léger rire quand Tony le regarda.

- Il pourrait te répondre si tu lui laissais une seconde pour le faire.

Tony ne voulait pas admettre que Cap avait raison, mais quand il retourna son attention vers Peter il ne dit rien de plus – et se contenta d'inspirer avec appréhension.

- Je vais bien, dit finalement Peter. Je me sens bien. J'ai juste – qu'est-ce que – qu'est-ce qui s'est passé ? Je ne m'en rappelle pas.

Steve et Tony échangèrent un regard.

- De quoi tu te rappelles ? demanda doucement Tony. La dernière chose dont tu te souviens ?

- J-j'étais chez Delmar, dit Peter en essayant d'assembler ses souvenirs. Avec Ned, je crois. Ned caressait Murph – le chat de Mr. Delmar – et – je sais pas. Je sais pas – qu'est-ce qui s'est passé ?

La panique commençait à s'installer.

- Vous avez dit que des enfants mouraient ? Ned ? Est-ce que Ned va bien ? Qu'est-ce –

- Ned va bien, le coupa Tony en se penchant vers lui pour placer une main chaude sur l'épaule de Peter. Il va bien. Tout comme May. Tout le monde va bien, dit-il. Prends une grande inspiration, ok, plusieurs, même, de préférence. Calme-toi.

- Mais qu'est-ce qui s'est passé ?

- Tu as été – Tony lança un autre regard à Steve – faute d'un meilleur mot, hypnotisé.

- Hypnotisé ?

- Ouais, soupira Tony. Il y a un homme qui s'en prend aux enfants, en ville – et d'une certaine manière, il prend possession de leur tête, et les fait –

L'estomac de Peter se retourna.

- Et les fait faire quoi ? demanda Peter – mais il avait le sentiment qu'il connaissait déjà la réponse.

Tony ouvrit la bouche pour répondre, mais les mots semblaient coincés dans sa gorge. Il regarda Peter. Et ses yeux étaient tristes et... perdus.

- Il les fait se jeter du haut des immeubles, ou des ponts, quelque chose d'assez haut pour – répondit Steve, et sa voix se fana.

Peter n'avait pas besoin de connaître la fin de la phrase.

Il hocha doucement la tête.

- Combien ?

- Ce n'est pas –

- S'il-vous-plait, Steve, combien ?

- Huit.

- Huit ! s'exclama Peter en se redressant d'un coup, en dépit des efforts de Tony pour le garder allongé. En une nuit ?! comment c'est possible ?

Les sourcils de Steve se froncèrent, et la confusion était lisible sur ses traits.

- Peter, dit finalement Tony, en regardant Peter avec précaution. Quel jour es-tu allé chez Delmar avec Ned ?

- Hier, répondit Peter. Mardi.

Tony et Steve échangèrent de nouveau un regard.

- Peter, commença Tony. On est dimanche, aujourd'hui.

- Quoi ? demanda Peter, secouant la tête. Non. Non, je – mais. Oh mon Dieu. May. Il faut que j'appelle May – elle va paniquer, je –

- Hey, hey, calme-toi, lui dit Tony, en repoussant de nouveau Peter contre les oreillers. Je l'ai appelée, elle sait où tu es. Et tu es ici depuis seulement hier soir, ok ? Quoi qu'il t'ait fait, ça a dû te perturber un peu. Tu as dû oublier quelques jours.

- Qu'est-ce qu'il a fait ? demanda Peter, hésitant.

Il n'était pas sûr de vouloir la réponse.

- Ou plutôt, qu'est-ce que j'ai fait ?

Pendant quelques secondes, personne ne répondit. Les deux hommes regardaient simplement Peter.

Finalement, Steve ouvrit la bouche pour parler – mais Tony le coupa.

- Tu n'as rien fait. Il t'a hypnotisé, tu es allé faire un tour, et là je t'ai trouvé. Je t'ai ramené ici et je t'ai soigné. C'est tout.

Peter ne savait pas s'il devait être offensé par ce mensonge évident, ou reconnaissant. Il avait le sentiment qu'il ne voulait vraiment pas savoir – mais en même, il voulait vraiment savoir aussi.

- C'est tout ? insista Peter.

Si les autres enfants avaient... qu'est-ce qu'il avait fait, lui ?

Tony l'observa pendant un moment.

- Il s'est presque passé quelque chose, murmura l'homme d'une voix basse, ses yeux fixés sur lui, un peu à contrecœur. Presque – mais ça a été. Et maintenant tu vas bien. C'est tout.

La voix de Tony s'était durcie sur le dernier mot.

Peter hocha la tête.

- Alors qu'est-ce qu'on fait, maintenant ? demanda Peter, plus que prêt à changer de sujet alors qu'il essayait d'assimiler les informations. Comment on le retrouve ?

- Oh non, il n'y a pas de « on ». Il n'y aura pas de « on » dans cette affaire. Tu restes en-dehors de ça, dit Tony avec vigueur, en se redressant et en jetant un regard furieux à Peter. Tu es confiné dans cette chambre pendant les deux prochains jours, au moins, et –

- Quoi ? s'énerva Peter, en repoussant la main que Tony avait laissée sur son épaule pour s'asseoir de nouveau. Non ! Je peux aider. Mr. Stark, s'il-vous-plait, je peux –

- Non. Tu restes ici.

- Mais –

- Non.

- Steve ! interpella Peter. Allez, s'il-vous-plait !

Steve sourit doucement, mais secoua la tête.

- Désolé, Peter, Tony a raison. Tu as besoin de te reposer. Laisse-nous gérer ça.

- Quoi ! Non –

- Tu l'as entendu, le coupa Tony avant de se lever. America a parlé. On peut pas argumenter avec lui. Donc repose-toi, et Cap et moi allons nous occuper de ce –

- Ce ne sera pas nécessaire.

Les trois têtes se levèrent en direction de la porte, où Clint Barton venait de rentrer, s'appuyant négligemment contre l'embrasure de la porte. Il lança un sourire à Peter.

- T'as l'air d'aller mieux, petit. Tu te sens bien ?

- Ouais, je me sens bien, dit Peter, mais Tony le coupa.

- Qu'est-ce que tu veux dire par « pas nécessaire » ?

Barton entra dans la pièce, et sortit un dossier de derrière son dos. Il le donna à Tony.

- Voici Adrian Turner, dit Barton, alors que Tony lui prenait le dossier des mains et commençait à le parcourir. Il est décédé tôt ce matin, en se jetant du haut d'un immeuble de quatre-vingt-treize étages, à Broadway.

- Tu es sûr que c'est lui ? demanda Steve en se penchant par-dessus le lit pour lire le dossier au-dessus de l'épaule de Tony.

Peter se releva un peu, pour essayer de faire de même, mais Steve le repoussa gentiment sans lever les yeux du dossier.

- On l'a vu à travers une caméra de surveillance avec un des gamins, en train de faire quelque chose, acquiesça Barton. On voit pas vraiment, mais quelque chose s'est passé, et une heure plus tard, le gamin a sauté du haut de l'immeuble de ses parents.

- Alors il est mort. Turner, dit Tony.

Ce n'était pas une question – mais Barton répondit quand même, sentant clairement que Tony avait besoin d'une confirmation.

- Ouais, il est mort.

- Bien.

Tony remit le dossier dans les bras de Barton et s'écarta du lit. Il passa quelques minutes à farfouiller dans la chambre – il nettoya l'appareil cassé sur le sol, vérifiant les équipements autour du lit qui mesuraient les constantes de Peter, avant de se laisser tomber sur un fauteuil qui trainait dans un coin de la chambre, près du lit de Peter.

Steve et Clint échangèrent un regard entendu, mais avant que Peter ne puisse les questionner, Barton prit la place de Tony sur le lit.

- Tu peux pas faire ce genre de conneries avec nous, gamin, dit-il avec un rictus amusé. On est tous vieux, on peut pas supporter ça.

Il désigna Steve avec son pouce.

- Surtout lui. Il a presque mille ans maintenant – il supporte mal le stress.

Peter eut un léger rire, mais ne pouvait s'empêcher de garder un œil sur Tony. Il avait abandonné le fauteuil à côté du lit de Peter et avait tourné son attention vers une des machines qui prenait le pouls de Peter. Steve le rejoignit et lui parla doucement.

- Il va bien.

Les yeux de Peter se posèrent sur Clint, dont la voix n'avait été qu'un murmure. Mais Peter l'avait entendu.

- Il va bien, murmura de nouveau Clint, ses yeux ne quittant jamais ceux de Peter. Tu l'as juste vraiment fait flipper, sur ce coup-là.

Peter baissa les yeux, et la culpabilité s'abattit sur lui. Barton se pencha vers lui, et posa une main rugueuse sur l'épaule dénudée de Peter.

- Il va bien aller. Toi, repose-toi, guéris, et ne te blesse pas pendant au moins une semaine, et il se portera bien.

- Je suis désolé, chuchota Peter.

- Ne le sois pas.

La voix de Barton, bien que basse pour ne pas être entendue de Steve et Peter, était sévère.

- Ce type était un monstre.

- Mais je l'ai laissé –

- Tu ne l'as rien laissé faire. Ce qu'il a fait était mal – et rien de tout ça n'était de ta faute, asserta Barton, sa voix ne laissant aucune place à la protestation.

Il murmurait toujours – mais ses yeux brûlaient de colère.

- Crois-moi. J'ai de l'expérience avec les enfoirés manipulateurs.

Les yeux de Peter se froncèrent avec confusion.

- Je te raconterai cette histoire, un jour, dit Barton en pressant l'épaule de Peter. Mais pour le moment, repose-toi. Et si t'as besoin de quelqu'un pour parler de ce qui s'est passé, je suis là.

Peter eut un petit rire.

- Hey, les interrompit Tony.

Il se remit au bout du lit, alors que Steve était près de la porte de la chambre.

- De quoi est-ce que vous parlez, tous les deux ? Vous complotez ? Vous deux n'êtes pas autorisés à comploter. Ok ? Ce bâtiment n'a pas été conçu pour résister à vos forces combinées.

Peter ouvrit la bouche pour le contredire – mais Barton parla avant lui.

- Fais de ton mieux ! dit-il naturellement, en se levant du lit de Peter pour rejoindre Steve près de la porte.

Il fit un geste de la main à Peter.

- Les vieux hommes ont besoin de se reposer.

Peter ricana et Tony attrapa un oreiller qu'il lança en direction de l'archer.

Barton l'évita facilement, avant de sortir de la chambre.

Steve le suivit après avoir fait un sourire à Peter, et salué Tony d'un hochement de la tête.

Peter se recoucha contre les oreillers, en en mettant quelques-uns derrière son dos nu – s'attendant à ce que Tony suive les deux autres.

Sauf qu'il ne le fit pas.

A la place, il se détendit lui aussi. Il s'affala dans le fauteuil, reposant ses pieds sur le bord du lit de Peter, et laissa tomber sa tête contre le dossier en ajustant un coussin. Il ferma les yeux.

Peter le regarda.

Et continua à le regarder pendant un long moment.

- Ouais, marmonna Tony, sans même ouvrir les yeux, ça commence à devenir flippant, petit.

- Vous êtes pas obligé de rester, insista Peter.

Bon sang, Tony avait perdu bien assez de temps avec lui. Peter n'avait absolument aucune idée du temps qu'il avait passé au Complexe – mais ça faisait déjà au moins une nuit, selon ce qu'avait dit Tony. Peter ne pouvait pas lui faire perdre plus de temps –

- Je reste, marmonna Tony, en s'enfonçant davantage dans le fauteuil pour être plus confortable, mais il n'ouvrit pas les yeux.

- Vous n'êtres vraiment pas obligé, vraiment pas. Je-je – commença Peter, et il replaça les oreillers sur ses jambes en se redressant.

- Je reste, petit, dit de nouveau Tony, toujours sans ouvrir les yeux.

Il leva une main et repoussa Peter doucement contre le lit.

- Alors arrête de parler et dors.

A contrecœur, Peter se recoucha sur le matelas et remonta les couvertures sur lui. Il lança un regard à l'homme à côté de lui, couché dans le fauteuil, et il ferma les yeux.

Il s'endormit en quelques secondes.

- Combien de temps ça va lui prendre pour le remarquer ?

Clint regardait à travers la fenêtre d'observation qui donnait sur la chambre, observant Tony et Peter qui dormaient.

- Remarquer quoi ?

Steve était debout à côté de lui – plongé dans le dossier que Clint lui avait donné – mais il leva les yeux pour regarder les deux endormis. Clint fit un signe de tête en direction de Tony.

- Qu'il a presque adopté un gamin, dit Clint.

Il les regarda pendant un moment.

- Ça lui va bien.

- Ouais, c'est vrai.

Les yeux de Steve se baissèrent de nouveau sur le dossier.

- Alors, c'est réglé ? demanda Steve en lisant les dernières pages. C'est terminé ? Il a simplement sauté d'un immeuble et fait le boulot à notre place.

Clint haussa les épaules.

- Natasha l'a peut-être aidé, admit Clint.

Steve laissa échapper un soupir et passa une main lasse sur son visage.

- Il a tout avoué. Tout. Il a donné les noms des gamins – dont celui de Peter, expliqua Clint, et Steve le regarda, les yeux brûlants de colère. Peter l'a trouvé en train d'essayer d'hypnotiser un gamin de son école – il n'a sûrement même pas eu le temps de comprendre quoi que ce soit avant que l'autre s'en prenne à lui.

Steve lança un autre regard en direction des deux hommes qui dormaient.

- Pourquoi ?

Clint n'eut pas besoin de lui demander de clarifier sa question. Il savait exactement ce qu'il demandait. Clint s'était posé la même question.

- Il a dit qu'il était accro au désespoir – il a dit à Natasha que ça l'aidait à trouver la paix.

Clint cracha le dernier mot.

- Il n'y a rien qui puisse remonter jusqu'à elle ? demanda Steve.

Clint lui lança un regard incrédule. Steve hocha la tête.

- Très bien, alors j'imagine qu'on peut tous aller se coucher.

- Ouais, soupira Clint en se détachant de la vitre, et en lançant un dernier regard à Tony et Peter. Ouais, moi je vais rentrer à la maison et serrer mes gamins dans mes bras.

Il rit, mais le son était étranglé. Steve comprit.

- Tu es le bienvenu.

Steve secoua la tête.

- Je vais sûrement rester ici. Garder un œil sur eux.

Clint n'eut pas besoin de le regarder pour voir qu'il observait Tony et Peter.

- Ils iront bien – tous les deux, le rassura Clint.

Mais il comprenait l'inquiétude de Steve. Il avait vu Tony au bord de l'hystérie, portant le garçon immobile jusqu'aux chambres de soin. Il n'était pas près de l'oublier.

- Je sais ça, dit Steve en haussant les épaules. Mais je veux rester là pour les aider le temps qu'ils se remettent sur pied.

Un rire échappa à Clint.

- Tout le bâtiment est dirigé par une Intelligence Artificielle. Qu'est-ce que tu peux faire de plus ?

- Je peux faire de meilleurs petits-déjeuners que Dum-E, répondit Steve avec un petit sourire.

- Ça, c'est vrai.

Steve hocha la tête et réfléchit.

- Qu'est-ce que les adolescents mi-homme, mi-araignée, mangent au petit-déjeuner ? demanda-t-il en fronçant les sourcils.

- Et bien, si mon garçon de treize ans peut être une indication – tout et n'importe quoi, rit Clint en se dirigeant vers l'ascenseur, en compagnie de Steve.

- Je peux gérer ça.

- Et les génies insomniaques – quand ils arrivent enfin à se détacher de leur adorable gamin qu'ils viennent d'adopter – boivent du café, continua Clint en pénétrant dans l'ascenseur, rejoint par Steve.

- Je suis presque sûr que je peux y rajouter un pancake ou deux. 

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