5 | Cinq fois où Chuuya est arrivé en retard et deux fois en avance
Hé hé hé... Je suis en vie. J'ai aussi rajouté la petite musique d'ambience que je passais en boucle pendant l'écriture de ce chapitre. Aussi étrange que cela puisse paraître, j'écris et je lis toujours. D'ailleurs, j'espère que Agaroche mettre à jour ses fics...
Attends, mais c'est moi Agaroche !
Veuillez profitez de ce retour dans Wattpad pendant que l'auteur fait une crise de panique.
Enjoy~
I
Chuuya Nakahara détestait être en retard. Depuis son « réveil », il avait une étrange obsession de garder un œil sur le temps. Ce n'était pas maladif au point de garder une montre sur lui, mais quelque chose lui faisait grincer les dents quand il se rendait compte que, pour une raison quelconque, il avait un temps de retard.
La première fois que cette frustration avait fait apparition dans sa vie était quand ses camarades des bidonvilles lui avaient montré les technologies qu'il avait manquées, même après avoir passé plus de sept ans à devenir un humain. Il devait apprendre à parler, marcher, courir, écrire, lire, se battre... Il devait faire tant de choses, dans un corps d'enfant humain faible et il était déjà en retard. Il avait mis du temps à les rattraper et quand il pensait enfin être au même niveau que les autres, les membres des Brebis lui avaient présenté ce qu'il voyait de loin et qui étaient plus courants qu'il ne le pensait au départ. Les technologies étaient entrées dans l'équation.
Il ne s'était jamais senti aussi en retard sur son époque qu'à ce moment. Les écrans, les voitures, les téléphones, les salles d'arcades... Tout était nouveau pour lui et pourtant il ne s'était jamais senti aussi à la traîne par rapport aux autres. Il était un génie du combat, faisait des miracles avec sa capacité, mais était inutile face aux nouvelles technologies. Et il détestait ça.
Il haïssait le sentiment d'être reclus pendant que les autres parlaient du dernier film, du dernier jeu, de la dernière sortie de quoi que ce soit. Il ne savait pas de quoi ils parlaient et quand il s'intéressait, ils tombaient dans un silence inconfortable. Dans ces moments, Chuuya partait dans un entrepôt abandonné sur le territoire des Brebis et s'entraînait pendant des heures, se rappelant que son devoir était de protéger les siens en tant que roi, pas de se lier à eux. De temps en temps, Yuan et Shirase venaient le trouver pour discuter. Ils parlaient du gang, du territoire, rappelaient au rouquin de ne pas trop se pousser parce qu'un « roi fatigué est un roi qui ne peut pas nous protéger ».
Parfois, quand il avait rassemblé assez de courage pour demander comment fonctionnait un appareil qu'il ne connaissait pas, ils le regardaient avec une légère pitié avant de mettre son ignorance sur le compte de son apparence exotique, son « amnésie » qui avait brouillé sa mémoire de ses sept premières années ou juste une incapacité inhérente à comprendre les nouvelles technologies. La plupart du temps, Chuuya se retenait de demander quoi que ce soit et se persuadait que ces choses étaient insignifiantes.
« Je te défie » avait dit Osamu Dazai la première fois qu'ils avaient eu un conflit d'intérêt en désignant une salle d'arcade miteuse. « Défi relevé » avait répondu Chuuya en serrant les dents, refusant d'avouer qu'il ne savait pas jouer.
Ça avait été un massacre : il ne faisait que perdre. Il avait beau s'améliorer à chaque nouvelle partie, le message restait toujours le même à la fin. Il s'énervait, criait de rage, savait pertinemment que l'autre adolescent le faisait tourner en bourrique, mais il n'abandonnait jamais. Parce que pour la première fois, il avait l'impression que ce n'était pas grave, qu'il soit en retard sur quelque chose d'aussi insignifiant.
II
Chuuya découvrit vite qu'arriver en retard à un rendez-vous n'est pas quelque chose qu'il appréciait. Tous les regards tournés vers lui, amis comme ennemis, lui faisait monter le rouge aux joues. Il s'était perdu dans les étages labyrinthiques, d'accord ? Ça arrivait à tout le monde. Comment pouvait-il savoir que « l'habituel » se trouvait au 33e étage et non au 50e ? Grinçant silencieusement des dents, il se dirigea derrière son instructrice après avoir salué le Patron et retiré son chapeau. Il évita soigneusement le sourire triomphal de Dazai. Bon dieu, il le rendait chèvre celui-là.
La mafia était un tout nouveau monde auquel il avait beaucoup de mal à s'habituer. Il prenait du retard, encore, et il détestait ça. Tout ce que faisait Osamu semblait si facile, si naturel... Cela rendait Chuuya jaloux.
Dès le premier jour, après avoir rencontré celle qui allait se charger de son éducation, Ozaki Kouyou, il comprit que rien n'allait être facile dans sa vie. La première chose qu'elle lui demanda de faire, était de la calligraphie. Chuuya tenta vainement de tenir le pinceau de la bonne manière, mais il ne connaissait même pas le caractère kanji qu'elle lui demandait. Son sang s'agita, le démon en son sein avec. Il savait qu'il n'avait qu'une base superficielle dans les matières scolaires, les bidonvilles étaient une école de la vie, pas une école normale.
Il était en colère, frustré, désespéré. Il allait commencer sa nouvelle vie par un échec cuisant. Ça avait déjà été assez dur d'être trahi par ceux qu'il pensait être ses amis, mais ça allait de mal en pis. Les lèvres mordues de frustration, il sentit le goût du sang dans sa bouche. Il n'allait pas craquer. Pas maintenant. Alors qu'il venait de commencer.
Il fut brusquement tiré de ses pensées tournoyantes par le bruit de la céramique contre la table en bois. Sans un mot, Kouyou prit un morceau de parchemin et sortit un pinceau d'une de ses manches de kimono. Délicatement, elle trempa le bout des poils dans l'encre de Chine avant de tracer élégamment le kanji qu'il ne connaissait pas. Fasciné, il enregistra à peine les mouvements qu'elle faisait, pleinement concentré sur la création d'un art traditionnel bien connu. Quand elle eut terminé, elle tourna le parchemin vers lui avec deux doigts.
« Ceci, elle prit sa tasse qu'elle porta à ses lèvres, sera la première chose que tu apprendras. Elle désigna le kanji Shoshin. Cela ne fait même pas une journée que tu es dans la mafia, et malgré tes expériences précédentes, tu restes un débutant. Grandis, apprends, maîtrise-toi, mais n'oublie jamais ta détermination. »
Elle haussa un sourcil et il hocha rapidement de la tête. D'un sourire, elle l'invita à reprendre là où il s'était arrêté, gardant sa copie comme référence. Le rouquin, probablement d'origine occidentale d'après son apparence, manipulateur de gravité, ancien roi des moutons, Arahabaki, plongea à son tour le pinceau dans l'encre. Il y en avait trop, et pourtant il ne pouvait pas se résoudre à retirer le surplus. D'un geste bâclé, il traça du mieux qu'il put le caractère. Il était trop gros, prenait l'entièreté de la feuille, les traits étaient pressés et appuyés, mais cela définissait sans aucun doute ce qu'il était. L'ancienne courtisane l'observa sans rien dire et inclina légèrement la tête quand il eut terminé.
« Cette règle s'applique sur tous les aspects de la vie. Le combat, l'apprentissage, la vie quotidienne, la discipline... Je ne serais pas tendre Nakahara Chuuya, affirma-t-elle en plongeant son regard rougeoyant dans celui céruléen. Mais si tu acceptes que je sois ton enseignante, la mafia portuaire ne sera qu'un terrain de jeu pour toi. »
Chuuya ne put que rester bouche bée devant ce qu'il considérait un miracle. Son retard n'en serait bientôt plus un, il pourrait combler l'écart qui le séparait du prodige de la mafia.
III
Parfois, la tendance au retard de Chuuya avait des conséquences désastreuses, irrémédiables, irréversibles.
Le conflit de la tête du Dragon avait chamboulé à nouveau sa perception de la vie. Il avait sauvé in extremis Dazai en sacrifiant sa moto. Oui, sa moto avait eu une place particulière dans son cœur, symbole de son premier achat en tant que mafieux et de la liberté qu'il avait durement acquise. Pouvoir sentir le vent fouetter son corps alors qu'il roulait à fond sur les grandes artères de Yokohama la nuit, ne voir qu'un flou à la place des lumières publiques... C'était une expérience qu'il appréciait chaque jour. De temps en temps, il emmenait le maquereau avec lui et le forçait à porter son casque, l'idiot suicidaire pensait que c'était une bonne idée de faire du 130 km/h sans protection. Ces quelques sorties étaient calmes, les deux profitants du couvert de la nuit pour se retrouver. Bien des fois Chuuya avait réquisitionné de force Osamu pour l'emmener sur le Mont Oyama ou le lac Miyagase la nuit afin d'observer les étoiles.
Mais ce fut la perte de ses subordonnés, des gens qu'il avait côtoyé assez longtemps pour les appeler des camarades et mettre sa vie entre leurs mains, qui avait été dévastatrice. Dans sa rage, il réveilla le dieu destructeur et annihila une partie du quartier, Shibusawa avec. Tout cela pour des vulgaires cailloux.
Chuuya, pendant un temps, devint plus froid, plus dur avec ses nouveaux subordonnés. Dazai le laissa faire, continuant à jouer au plus jeune capitaine de la Mafia Portuaire. Les deux adolescents avaient une relation vacillant entre la haine et l'amour, le respect et le dédain, mais restaient des partenaires. Les jumeaux de l'ombre étaient devenu un nom bien connu parmi les services fédéraux et ceux qui trempaient dans les affaires louches. Ils étaient connus, reconnus, mais pourtant toujours anonymes, car personne n'était ressorti vivant d'une rencontre avec le sinistre duo de la mafia.
Un jour, Osamu revint avec deux enfants. Mal nourris, maltraités et sales. Chuuya se vit en eux et détourna le regard, laissant le génie s'occuper de l'éducation de ces chiots perdus. Il plaça la fille, Gin, au sein de l'escadron des Lézards Noirs, décidant de faire d'elle un assassin parfait. Chuuya avait observé son entraînement ; à la sortie, il conseilla à ses hommes de ne pas la provoquer inutilement. Le garçon, Ryunosuke, suivait Dazai comme un chien suivait son maître. Quand ils étaient tous les deux seuls, le brun plaisantait sur le fait que le gamin était un bien meilleur toutou que lui, même si Chuuya était son meilleur chien d'attaque. Chuuya se mit en colère et décida de partir sur une mission à l'étranger, sa première, qui devait durer quelques mois.
Ces quelques mois salvateurs, loin de tout et surtout de la pression de vivre au QG lui avait remis les idées en place. Il avait découvert un amour pour le rock, mais aussi le vin français et s'était épanoui dans les combats qu'il créait volontairement. Sa technique s'était affinée et il pouvait affirmer, sans honte, qu'il était un prodige du combat. Il avait aussi beaucoup réfléchi, un verre de vin à la main et prit de nombreuses décisions. L'une d'elle fut de récupérer la garde d'Akutagawa parce que Osamu Dazai, aussi génial qu'il soit, n'avait aucune idée de comment gérer un être humain qui avait eu autant de problèmes que les Akutagawa.
Quand il revint à Yokohama, il eut l'impression de recevoir une gifle. Le gamin maladif, inoffensif, cherchant de l'attention était devenu dangereux, mais surtout autodestructeur. La transformation était, pour être poli, effrayante. Plus tard, Dazai lui avouera qu'il avait cherché à le rendre plus fort, plus indépendant. Mais le gosse avait mal tourné, pas étonnant, c'était Dazai le suicidaire fou son mentor et ressemblait plus à chien enragé fait pour les arènes de combat qu'un chien d'attaque comme Chuuya.
Le rouquin serra les dents, se rendant compte qu'il était arrivé en retard, une fois de plus, et cela, par sa propre stupidité et de son égoïsme.
Bien plus tard, quand le très connu chien enragé de la Mafia Portuaire ramènera une petite fille avec lui, il lui conseillera de partager la garde avec Ane-san. Il savait qu'essayer de récupérer l'enfant allait être compliqué, surtout avec les tendances possessives de Ryunosuke. La carte Ozaki Kouyou était un joker bienvenu puisqu'elles avaient des capacités similaires. Un verre de Pinot Noir à la main, il soupira en voyant le reflet de ses yeux morts dans ceux de l'enfant.
IV
Quand il a rejoint la Mafia Portuaire, Chuuya n'avait pour habitude de porter des accessoires. Ils étaient inutiles et une gêne certaine dans les combats. Cependant, il se mit à porter des chapeaux, un en particulier, après avoir rejoint la mafia. Les ras-de-cou, étaient arrivés un peu plus tard, un cadeau qu'il ne pouvait pas vraiment refuser. Le premier rendez-vous de Chuuya avec Dazai avait été un désastre. Une catastrophe douce-amère qu'il se remémorait avec tendresse.
Chuuya était arrivé en retard, pour changer. Ce n'était pas sa faute, pas totalement. En tant que partenaire du plus jeune capitaine de la Mafia, il n'était pas rare qu'ils se séparèrent pour des missions différentes, chacun partant avec une petite équipe. En cette douce fin de nuit de début d'automne, Chuuya avait eu une transaction à mener avec deux hommes qui l'accompagnaient et cinq autres postés en renfort à des points stratégiques.
L'affaire devait se passer dans un des entrepôts de la Mafia, sur le port, aux premières heures du jour du matin, le soleil ne faisant que se lever. Dès le début, Chuuya flairait le mauvais coup dans l'affaire. En tant qu'ancien apprenti de Kouyou, il reprenait sa contrebande de pierres précieuses, joyaux et bijoux quand elle était indisponible. Ce qui devait être un travail simple devenait un mal de tête aiguë.
Les clients, d'une part, étaient arrivés avec presque une heure de retard et visiblement nerveux. Impair. Chuuya se mit sur ses gardes, mais passa outre, décidant qu'il n'avait pas à se mêler aux affaires des clients. Il fit signe à un subordonné d'ouvrir la mallette afin de montrer la marchandise. Leurs interlocuteurs prirent quelques secondes afin d'observer les diamants, saphirs et rubis d'une valeur inestimable avant de hocher la tête. Le mafioso referma la mallette et l'autre s'approcha, prêt à tendre la main afin de récupérer l'argent. Ce fut à ce moment précis que tout dégénéra.
Il entendit de la statique dans son oreillette, signe qu'on cherchait à le contacter ou que l'on essayait de pirater leur ligne. Le dieu scellé en lui vibrait d'excitation, signe qu'il voulait sortir et faire ce qu'il savait faire de mieux. Il eut juste le temps de hurler « À terre ! » avant de se jeter sur le sol, tenant son chapeau d'une main. Celui qui tenait la mallette de pierres était à terre, du sang s'étalant lentement sur le sol. Son acolyte tira un revolver de sa veste et visa les clients qui les regardaient avec un air mi-figue mi-raisin. L'un d'eux leva vainement les mains en l'air.
« Du calme, nous pourrions dis-. »
Pop.
Une balle lancée par la capacité de Chuuya atterrit proprement entre les deux yeux du traître qui s'effondra.
« Je ne discute pas avec les menteurs. »
Il balança négligemment une autre balle vers le second client, atterrissant cette fois dans la jambe. Il hurla de douleur et bascula en arrière, lâchant la mallette remplit d'argent. Dehors, Chuuya pouvait entendre les coups de feu des revolvers et les sirènes de police. Hiroshi, l'un des hommes qui l'accompagnaient se tourna vers lui en secouant la tête, la main sur le pouls de son collègue. Le rouquin serra les poings, encore un visage qui allait rejoindre ses cauchemars.
« Hiroshi, applique le protocole C et prends l'argent et les bijoux. La police est trop proche, on ne peut pas se permettre un poids mort maintenant. Il porta la main à son oreille. Ici Nakahara, rapport.
- Ici Kazuma. On est encerclé par l'armée et la police. Joosuke est blessé au bras et sa radio est HS. Terminé.
- Ici Natsume. J'ai une sortie en visuel, l'ennemi semble la laisser délibérément. Terminé.
- Ici Momo. Je suis engagé avec l'armée. Terminé.
- Ici Yamato. J'ai Momo en visuel, je la soutiens de mon point. Terminé. »
Chuuya soupira. La « sortie » était visiblement un piège. Mais ne valait-il pas mieux foncer dedans en sachant que c'était un risque plutôt que de forcer une échappée ? Le rouquin grinça des dents. Bon sang, pensa-t-il, ça va être une longue journée.
Et il n'avait pas eu tort. Il arriva avec deux heures de retard, ayant juste eu le temps de nettoyer pour retirer l'odeur du sang, de la poudre et de la cendre et de se changer dans une tenue civile. Il avait prévenu Dazai dès son retour à l'appartement. Il le retrouva, heureusement comme prévu, devant le parc d'Hodogayawakuwaku. L'apprenti de Mori semblait positivement joyeux de le voir, devenant collant comme une sangsue et se plaignant de son retard. Chuuya, fatigué, ne répliqua que faiblement.
Osamu cligna des yeux, voyant que son partenaire semblait plus calme que d'habitude. Il fredonna avant de hocher fermement de la tête, une décision prise. Chuuya frissonna, il n'aimait pas ce regard. Mais il se laissa quand même traîner dans les rues de Yokohama, le brun chantonnant joyeusement sa chanson sur la mort. Ils s'arrêtèrent devant une devanture colorée, avec un mur vitré où se trouvait des chiots en train de dormir paisiblement. Le brun ne laissa pas son partenaire s'émerveiller devant la fragilité des petites bêtes et le traîna à l'intérieur.
L'odeur de paille fraîche, les petits piaillements des bébés et la vue adorable des animaux paisibles firent fondre le cœur de Chuuya. Dazai l'attira vers les chiots qui se précipitaient vers eux, cherchant des caresses et des jeux. Dans un enclos à proximité, des lapins dormaient les uns sur les autres. Sur les étagères des murs, quelques poissons nageaient tranquillement. Le vendeur les assura qu'ils pouvaient jouer avec les chiots tant qu'ils ne les nourrissaient pas. Le duo accepta et s'ensuivit une demi-heure de jeux, de caresses et de doux rires.
L'atmosphère paisible apaisa Chuuya qui ressentait encore l'adrénaline du précédent combat. Il vit un moment Osamu s'éclipser vers l'avant du magasin, mais avant qu'il ne puisse dire quoi que ce soit, il se fit assaillir par tous les chiots qui jouaient auparavant avec son partenaire. Il était beau, l'un des membres les plus mortels de la mafia portuaire. Le brun revint un instant, demandant s'il préférait le rouge ou le noir, et, quand il eut la réponse de Chuuya, il repartit aussitôt. Le rouquin haussa simplement des épaules avant de se remettre à jouer avec les chiots. Dazai le rejoignit peu de temps après et s'agenouilla à ses côtés, prenant un lapin de l'autre cage et se mit à le caresser, un air rêveur sur le visage.
Voyant que des clients arrivaient, ils décidèrent de partir ; le magasin n'était pas très large, plus de gens rendait l'atmosphère plus étouffante. Dazai le conduisit d'une main douce dans un café non loin et appartenant à la mafia. Ils s'assirent derrière un paravent, restant à l'abri des regards et discutèrent tranquillement pendant quelques heures, commandant de nouvelles boissons à chaque fois et demandant des concoctions plus spéciales qui avaient pour but de rendre le barman chèvre. Ils pouffèrent tous les deux en voyant sa réaction face à la liste d'ingrédients que Dazai avait demandé pour son Masa-Frapu-Caramelo-Cappuccino.
Un moment dans la conversation, Osamu fit glisser une petite boîte enveloppée dans du papier cadeau bleu. Chuuya ressentit une bouffée de chaleur sur ses joues avant de marmonner qu'il n'avait rien prévu pour son compagnon. Le brun balaya l'excuse d'un geste de la main, l'invitant à ouvrir le cadeau. Bizarre, mais toute la journée avait été bizarre, donc Chuuya ne réfléchit pas au calme de Dazai. Il déballa le papier avec presque de la révérence parce qu'il pouvait compter sur une main le nombre de fois où il avait reçu un cadeau.
Il dévoila une petite boîte en carton qu'il ouvrit, le cœur battant. Dedans se trouvait un collier pour chien rouge à sa taille.
Chuuya sentit une veine sur son front éclater et il balança sans ménagement la boîte, le collier avec, vers Dazai qui l'esquiva sans ménagement.
« SALE BÂTARD ! » Hurla-t-il avant de déposer une liasse de billet pour sa note avant de sortir à grand pas du café.
Quand il rentra dans son appartement, à la fois éreinté et énervé, il se dirigea sans ménagement vers sa cuisine, ne prenant pas la peine d'enlever ses chaussures et son manteau. Il se dirigea vers sa cave à vin quand un objet étranger situé sur son bar en marbre attira son regard. C'était une boîte en velours bleu marine, avec un logo doré représentant deux C entrecroisés dans un ovale. À côté, un petit feuillet signé d'un D attira en premier son attention. Sachant qui était l'auteur de la lettre, il l'ouvrit sans ménagement, décidé à s'en débarrasser au plus vite.
Tu n'avais pas qu'à être en retard. (~o ̄3 ̄)~
Chuuya replia soigneusement la lettre avant de regarder la boîte en velours. Il se promit que si c'était une autre mauvaise blague, il allait écorcher vif le brun, protégé du patron ou pas. Soigneusement, il ouvrit le contenant, s'attendant en quelque sorte à voir un citron jaune vif à l'intérieur. À la place, il tomba sur un magnifique ras-de-cou en vélin noir. Le cuir était lisse, mais ne brillait pas à la lumière, ressemblant plus à une pièce de velours qu'à de la peau. En face de l'attache se trouvait une boucle en argent, comme celle des ceintures, finement travaillée, avec des détails à peine perceptibles. Le rouquin eu un sourire amer avant de se tourner vers la porte d'entrée, la boîte toujours en main.
Il présenta le collier à Dazai qui s'approchait, un sourire prédateur aux lèvres.
« Tu me le mets ? »
V
La dernière fois que Chuuya était arrivé en retard à un rendez-vous avec Dazai quand il était encore dans la mafia, ce fut lors d'une mission à Kyoto. La mission qui devait durer deux jours aller-retour, s'étendit jusqu'à une semaine. Avant de partir, Dazai lui fit un baiser sur le front avant lui souhaiter bonne chance et de laisser Chuuya seul dans le couloir, bagages en mains.
Le patron l'avait envoyé avec une escouade éliminer quelques fourmis qui pensaient pouvoir prendre de l'ampleur sur leur territoire. Peu après avoir terminé la mission, c'est-à-dire après avoir écrasé les opposants, Mori lui confia une mission parallèle de contrebande et de surveillance. Chuuya avait légèrement rechigné mais le ton du patron ne laissait place à aucune discussion. Le rouquin prit son mal en patience et prévint Dazai qu'il aurait du retard. Son acolyte ne répondit qu'avec un émoji.
Réponse typique mais trop courte au goût de Chuuya. Il se décida à finir la mission au plus vite, la date de leur anniversaire de couple approchant à grands pas. De plus, Mimic, la nouvelle organisation terroriste prenait un peu trop d'initiatives contre la mafia au goût du rouquin. Et il n'aimait pas être mis à l'écart. Surtout avec un compagnon aussi suicidaire que Dazai laissé seul. Il espérait qu'Oda Sanosuke pourrait le contrôler jusqu'à ce qu'il revienne.
Chuuya revint deux jours après la nouvelle envoyé par Kouyou : Mimic était vaincu et le patron avait réussi à avoir un permis d'utiliser les capacités. Le même que la toute nouvelle Agence de Détectives Armés possédait. Le rouquin fredonna de joie pendant le trajet en voiture, ses yeux revenant régulièrement sur la bouteille de Pétrus qu'il avait acheté pour Dazai et lui lors de son futur dîner aux chandelles. Ils pourraient en profiter pour fêter l'obtention du permis par la même occasion.
Il rentra dans son appartement complètement vidé des affaires de son acolyte, sa voiture détruite et un message de Mori. Dazai avait déserté pendant son absence, suite à la mort d'Oda Sanosuke qui s'était sacrifié pour vaincre Mimic.
Chuuya était arrivé deux jours trop tard.
+1
« Non. Avait établi Chuuya sans une once d'hésitation.
- Mais Chuyaaaa~ ! C'est mon style de prédilection.
- Je suis l'apprenti d'Ane-san. JE connais le style. Ce que tu portes est une injure à la mode.
- Dit celui porte toujours un vieux chapeau en toutes circonstances. Marmonna le brun en boudant.
- Laisse mon chapeau en dehors de ça ! Cria le rouquin, piqué au vif. »
Pour une fois, Chuuya et Dazai étaient arrivés en avance sur le lieu de rendez-vous. Un grand centre commercial bondé de touristes et de locaux, en pleine heure de pointe. Ils avaient cherché à faire profil bas, et là où Chuuya y était arrivé avec brio, Dazai était... Dazai.
« Je ne peux pas croire que tu portes plus de deux motifs avec trois couleurs différentes ! S'offusqua Chuuya en traînant son partenaire dans un VRAI magasin de vêtements. »
Osamu se laissa traîner sans résistance, geignant juste comme un enfant. Chuuya fit volte-face et se colla à lui, tête contre tête.
« Écoute-moi bien, sale maquereau : je connais ce client depuis un moment et j'ai toujours, et je dis bien toujours, eu de bonnes relations avec lui. Ane-san et Hirotsu ont plus de mal comparé à moi. Mori nous a collé ensemble cette fois, mais je REFUSE que tu sois la source d'un conflit qui n'aurait pas lieu d'être. Compris ?
- Tu es vraiment sexy quand tu me menaces sérieusement. Répondit Dazai avec une lueur de désir dans ses prunelles chocolat.
- Va te faire foutre !
- Seulement si c'est toi chéri~. »
Chuuya soupira avant de continuer à traîner le brun par le bras, s'attirant des regards curieux des autres clients. Il ne voulait surtout pas que Dazai fasse une mauvaise impression avec un partenaire potentiel pour la Mafia Portuaire. Mori avait été très clair : il fallait s'attirer les faveurs de cet homme, il pouvait leur faciliter la vie juridique.
Le rouquin avait eu l'occasion de le rencontrer plusieurs fois auparavant, toujours en tant qu'accompagnateur. Mais Kouyou et Hirotsu n'avaient, pour une raison quelconque, jamais passé les critères de l'homme. En désespoir de cause, Mori proposa qu'il choisisse son interlocuteur lui-même. Etonnemment, Chuuya fut choisit et ils se rencontrèrent toutes les quelques semaines, Chuuya faisant passer les demandes et propositions du patron, l'autre annonçant son prix et donnant des conseils, autour d'un verre de vin.
Le partenaire commercial lui avait avoué un soir qu'il avait choisi Nakahara Chuuya parce qu'il semblait être le seul à savoir apprécier un bon spiritueux français. Le jeune homme en fut flatté et leur relation ne fit que s'améliorer. Un jour, Dazai, jaloux, exigea de rencontrer cet homme. Et Chuuya, en tant que subordonné fut obligé de se conformer. Il n'aurait jamais deviné que le brun essaierait de saboter la rencontre afin qu'il ne soit plus l'intermédiaire du juge.
Mais bon, ils étaient en avance, autant en profiter et faire un peu de shopping.
+2
Dazai, avait découvert Chuuya, était terrible avec les sentiments. C'était un parfait manipulateur, maître de son art, mais il était incapable d'aller plus loin. Il pouvait reconnaître un sentiment, l'analyser et l'utiliser à son avantage, mais cela n'irait jamais plus loin. En cela, Chuuya avait découvert qu'il avait une certaine avance sur le fameux prodige de la mafia. Contrairement à l'autre, il était capable de ressentir de l'empathie et de la pitié. Aussi glauque que cela puisse paraître, il ne tirait pas sur un corps mort, lui.
Ane-san lui avait proposé une explication pour sa colère constante : il était sensible et empathique, une combinaison dangereuse dans la mafia. Une faiblesse qu'il fallait cacher à tout prix. Elle lui assura que la colère était une illusion parfaite, capable de leurrer aussi bien Dazai que Mori. Chuuya n'en avait pas été aussi sûr mais avait accepté la demande : il cachait ses émotions par de la colère.
C'est pourquoi il comprit tout de suite ce qu'il ressentait quand, pour la première fois, il ressentait plutôt le besoin d'embrasser Osamu plutôt que de le plâtrer contre un mur. Cela avait refroidi sa colère mais le brun ne le remarqua pas à son grand soulagement. Chuuya avait passé un long moment à savoir ce qu'il devait faire à ce propos. Il décida donc d'observer le brun pour anticiper sa réaction quand il se confesserai. Parce qu'il devait se confesser, d'une manière ou d'une autre, sinon il vivrait avec l'incertitude sur la conscience.
Ce fut ainsi qu'il découvrit que si Dazai était un génie pour les autres, c'était un simple demeuré envers lui-même. Aucun sens de l'auto-préservation, une provocation constante, un désir de mort juste pour arrêter son ennui et, surtout, un myope envers ses propres sentiments.
Le rouquin ne savait pas s'il cherchait à se convaincre qu'il y avait QUELQUE CHOSE entre les deux. Peut-être une tension sexuelle harassante comme l'avait décrit Kaiji lors de l'un de leurs débats houleux. Ou une confiance totale et absolu de l'un envers l'autre comme disait Kouyou.
Par conséquent, Chuuya, un soir de repos qu'il partageait avec Dazai, l'invita sur les docks pour le confronter. La lune était pleine et rosâtre ce soir-là, illuminant le duo d'un halo doucereux. Le rouquin grimaça intérieurement : il savait reconnaître un cliché quand il en voyait un.
La forme allongée de Dazai lui fit détourner le regard et la lumière pâle qui se reflétait sur la peau pâle et les bandages qui semblaient devenir sanglant lui coupa brièvement le souffle. Il prit une grande inspiration et parla avant même qu'Osamu essaye de le rendre dingue.
« Je t'aime. »
Le brun s'arrêta brusquement et cligna de l'œil une fois. Puis deux fois.
« Et je sais que tu ressens quelque chose pour moi. Il observa l'œil s'écarquiller légèrement. Je ne peux pas te dire ce que c'est, je ne suis pas toi, mais je peux t'aider à le découvrir. »
Osamu Dazai, le prodige démoniaque de la Mafia Portuaire, pencha la tête sur le côté, comme un animal curieux. Son regard, fixe et concentré, s'aiguisa. Il se mit à fredonner doucement, comme s'il venait de comprendre quelque chose.
« Je ne peux pas croire... Il reprit sa marche et s'arrêta devant Chuuya qui l'observait, le cœur battant. Que tu aies compris quelque chose avant moi, Chuuya~. »
Il se pencha vers lui, les cheveux bruns assombri par la nuit, l'œil vide de toute vie présentant un éclair d'intérêt. Chuuya avala sa salive.
Ils se perdirent dans le regard de l'autre pendant de longues secondes, chacun retenant son souffle. Osamu se pencha un peu plus vers son partenaire.
« Chuuya... Murmura-t-il d'une voix sensuelle. »
Le rouquin releva ses iris saphirs féroces, pleins de vie et de chaleur, promesse d'un avenir ni paisible ni serein mais accompagné et compréhensif.
« Je peux t'embrasser ? Demanda Dazai sur la même tonalité. »
Chuuya franchit la barrière invisible restante et toucha les fines lèvres de son compagnon. Dazai répondit avec une lente ferveur et ils se séparèrent pour reprendre leur souffle.
« Je suppose que c'était un oui. »
Chuuya éclata d'un rire joyeux et libéré.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top