Chapitre 15 : Le Coussin de Contrôle
Les larmes séchaient sur les joues d'Aliénor, tandis qu'elle tenait la main de son grand-père.
Célestin de l'Esprit Saint avait, il y avait une minute à peine, les ongles arrachés. La peau lardée de coups de fouet. De coups de couteau. Assoiffé, affamé, il avait une apparence famélique que les serviteurs de Bérith s'escrimaient à faire disparaitre.
Ils l'avaient trouvé inconscient dans la tente d'Oscar.
Ramené en urgence dans le palais de Bérith, il avait été immédiatement pris en charge pour les soins. Depuis, Aliénor n'avait pas lâché sa main. Ils se trouvaient dans l'une des dizaines de chambres du Duc, cernés par petits et grands êtres démoniaques. Ils lui jetaient régulièrement des coups d'œil inquiets, mais un regard de leur maitre les rappelait à l'ordre.
Leur maitre qui avait envoyé son grand-père dans cet Enfer.
-Savais-tu que les choses se passaient ainsi pour lui ?
Adossé au mur en face d'elle, de l'autre côté de Célestin, Hawk la fixa un long moment avant de répondre. Il n'avait plus ses inscriptions noires sur la peau, tout comme elle.
-Je m'en doutais.
La colère grandit en elle.
-Alors, pourquoi ne pas être allé le chercher ?
De nouveau, il la gratifia d'un silence exaspérant. Autour d'eux, les serviteurs se précipitaient vers la sortie.
-C'est une guerre, Aliénor. Pas une promenade de santé.
-C'est mon grand-père !
-Et tu es sa petite fille.
Elle fronça les sourcils, tout en serrant un peu plus fort la main inerte dans la sienne. Dans ce plan, Célestin n'avait pas cette forme éthérée prouvant sa mort. Il était de chair et d'os. Ses cheveux blancs, ses rides, sa peau pâle... Elle pouvait le toucher pour la première fois depuis un long moment.
-Je le sais.
-Non, tu ne comprends pas, gronda Bérith en quittant le mur. Célestin l'a fait en grande partie pour toi.
-De quoi parles-tu !?
-Nous savons depuis un moment qu'Oscar veut te sacrifier ! C'est lui qui m'a proposé de se rendre directement chez l'ennemi, afin d'en apprendre plus ! Alors ai eu moins le bon sens de respecter son choix.
Ses paroles la choquèrent un tantinet. Baissant les yeux sur son grand-père, elle sentit sa colère s'évanouir totalement. Une vague de fatigue s'abattit également sur elle.
-Désolée, Bérith, souffla-t-elle.
Il parut tomber des nues.
-Tu... Tu t'excuses ? bafouilla-t-il.
-Je... Oh, tais-toi ! Laissons papy se reposer, veux-tu !?
-Heu... Comme tu veux...
Apparemment, ses excuses le perturbaient. Gênée de sa réaction, Aliénor sortit de la pièce, pour découvrir tous les petits démons au pied de la porte. Ils lui firent un immense sourire.
-Vous n'en avez pas marre de nous espionner, vous ? bougonna-t-elle.
-C'est de la simple curiosité, répondit à leur place Bérith. Pour ce qui est de ton grand-père, il devrait se réveiller dans un moment. Nous le ramènerons chez toi à ce moment-là. En attendant, que souhaites-tu faire ?
-Me coucher, répondit-elle sans réfléchir. Je ne suis pas habituée aux voyages éthérés, je me sens épuisée.
Il l'accompagna donc dans cette grande chambre rouge et noire, sous l'œil des curieux du palais. Vraiment... Ils ne paraissaient pas méchants, vus ainsi. Ils semblaient surtout soucieux du bien-être de leur maitre.
-Pourquoi Oscar te qualifie-t-il de « le pire des démons » ?
Assise sur le lit, Aliénor avisait le Duc, qui marchait de long en large dans la chambre.
-Mmh ? Oh, c'est à cause de mes fonctions.
Elle fronça les sourcils.
-Es-tu si cruel que cela ? Après tout, tu es l'une des trois puissances principales infernales.
Il s'arrêta pour la considérer, avant de détourner aussitôt le regard en reprenant sa marche.
-Non, ce n'est pas pour cela. C'est à cause de mes fonctions d'exorciste. Ils ne supportent pas que je les renvoie ici à chaque fois qu'ils tentent de faire des misères aux humains.
Son cœur fit un bond dans sa poitrine. Les doigts crispés sur le couvre-lit, elle écarquilla les yeux.
-Tu... Tu es réellement exorciste, alors ?
Cette fois-ci, il ne prit même pas la peine de s'arrêter.
-Oui, fit-il négligemment, comme si la chose était sans intérêt. C'est pour cela que je peux aller et venir entre les mondes sans sacrifice. Car non, je n'ai pas tué de vierge pour aller sur terre, Aliénor.
-Attends ! Vas-tu donc cesser de marcher, Bérith !?
Levant le nez sur elle, il haussa les épaules. Sans cesser sa marche.
-Non.
-Pourquoi !?
-Parce que tu es assise sur mon lit ! Voilà pourquoi !
Pardon ? Elle avisa la couette sur laquelle elle était installée. Effectivement, elle était sur son lit. Rougissante, elle se releva d'un bond. Il était malséant de se comporter ainsi ! À chaque fois qu'elle était avec lui, elle oubliait les convenances !
-C'est de ta faute ! À force de dormir avec toi, j'en oublie la normalité !
Il grimaça en faisant une halte.
-Ne t'en fais pas. Pour le coup, je ne dormirais pas avec toi, Aliénor.
Diantre. Elle allait de surprises en surprises.
-Et pourquoi cela ?
Ses yeux vairons l'avisèrent, avant qu'il ne fronce le nez.
-Parce que je vais dormir sur le canapé.
Effectivement, il y en avait un au pied du lit. Sans somation, il s'y allongea sur le dos, avant d'attraper un coussin pour le serrer contre lui. Mais je rêve, ma parole !? songea-t-elle.
-Bonne sieste.
-Tu te moques de moi, Hawk !? explosa-t-elle en se plantant devant lui, les poings sur les hanches.
Les mains croisées sur son maigre rempart, il secoua la tête tel un enfant sage.
-Pas du tout.
-Donc, quand je suis en sécurité chez moi, tu te glisses dans mes draps, mais quand je suis en Enfer cernée par des démons, tu refuses de dormir avec moi !? Quelle est donc ta logique !?
-Il y en a une, pourtant, marmonna-t-il en fixant le plafond.
-Bérith... Tu m'énerves !
Sur quoi elle donna un coup de pied au canapé, qui ne bougea même pas sous l'impact. Néanmoins, cela eut le mérite de lui faire relever la tête. Ses yeux vairons semblaient briller d'un feu dangereux.
-Écoute, ma petite Aliénor... Je me maitrise très bien d'habitude. Mais je t'assure que si je vais dans ce lit avec toi, je vais avoir plus que des mains baladeuses.
Oh...
-Or, je n'ai pas envie de finir molesté par un tyran en jupons, merci bien, grommela-t-il en se renfonçant dans son canapé. Donc, je dors là-dessus, et toi, dans mon lit.
Bon. Bon, très bien. Sa défense était acceptable. À un point prés.
-Très bien, cingla-t-elle. Dans ce cas, peux-tu au moins m'aider à me déshabiller ? Car je ne peux pas sortir seule de la robe dont tu m'as affublée.
La tension entre eux parut grimper d'un cran. Sur les coudes, le démon l'avisa, ses iris brillants d'une lueur inhumaine. Les bras croisés sous sa poitrine, Aliénor attendait sa réaction, le cœur battant peut-être un peu trop vite.
-Tu veux jouer à ce petit jeu ? gronda-t-il. Bien.
Jetant son coussin de côté, il se glissa dans le dos de la jeune femme. Ses doigts brulants glissèrent le long de sa nuque, pour rejoindre les lacets de sa tenue entre ses omoplates. Un frisson parcourut la peau d'Aliénor. Néanmoins, elle s'abstint de tout commentaire. Surtout, ne pas penser trop fort.
-Tu pourrais simplement la faire disparaitre, non ? demanda-t-elle. De coutume, tu faus les choses ainsi.
-De coutume, tu ne m'agaces pas à ce point.
-Je n'ai rien fait.
-Non...
Il tira d'un coup sec, sectionnant le laçage dans son dos. Oups... Il était énervé. Pourtant, ses gestes furent doux quand il fit glisser son haut le long de ses épaules, ses paumes glissant sur elle en une légère caresse. Sensuelle...
-Tu as juste décidé de me rendre fou, gronda-t-il à son oreille.
Jupes et jupons échouèrent sur le sol. En bas, culotte et chemise de corps, elle pivota vers lui, le prenant légèrement par surprise.
-C'est toi qui me rends folle depuis cinq ans, contra-t-elle en enfonçant son index dans son torse.
-Je...
-Tu débarques dans ma vie, tu me fais la cour, on fricote ensemble... Puis tu disparais !
-Aliénor...
Non. Elle n'avait pas envie d'arrêter. Le fusillant du regard, elle avait conscience d'être incroyablement proche de lui. À un souffle, un cheveu de son corps immense, brulant. Tendu telle une corde d'arc. Pourtant, ni l'un ni l'autre ne recula.
-Tu aurais pu me prendre à la chapelle, mais tu t'es ravisé ! Tu aurais pu me prendre sous ta forme de démon, mais tu ne l'as jamais fait. Tu me rends folle, Bérith ! Que veux-tu de moi, hein !?
-Je...
-Mon âme ? le coupa-t-elle en posant sa main à plat sur son torse, là où son cœur semblait battre aussi fort que le sien. Je n'y crois pas. Mon corps ? Je n'y crois plus.
Il la saisit par les poignets, la forçant à rompre le contact. Elle le fusilla du regard, mais elle avait surtout envie de pleurer. Que voulait-il, à la fin !?
-Aliénor... Je ne suis pas... Je... Bon sang, c'est compliqué ! s'exclama-t-il en la relâchant, pour faire un pas en arrière. Tu me connaissais en tant que Hawk, mais j'étais censé être un homme de dieu, je ne pouvais pas t'aimer ! Puis tu as passé ce pacte, et j'ai dû te faire découvrir ma vraie nature. Malheureusement, tu ne m'aimais pas ainsi... Tu ne me connaissais pas. Comment aurais-je pu profiter assez de la situation pour m'imposer à toi, hein !?
Elle aurait voulu parler, mais ce fut à son tour de l'empêcher de s'exprimer.
-Tu sais ce que ça fait, de devoir te briser le cœur !? Ça fait mal. Je voulais disparaitre de ta vie en tant que Hawk... Pour avoir une chance sous ma forme de démon, celle où j'aurais pu m'unir à toi. Mais au final, tu m'as démasqué. Résultat des courses ? Quelle que soit mon identité, je t'ai perdu.
Il haletait presque en disant cela. Les pieds comme cloués au sol, elle l'écoutait, le cœur serré.
-Voilà pourquoi je refuse de me coucher avec toi dans ce lit, Aliénor ! Parce que je refuse de... de... morbleu, je te désire à en devenir fou ! Pour le moment, je ne peux plus m'approcher de toi sans perdre les pédales ! Alors... Laisse-moi sur le canapé. S'il te plait.
Sans la regarder, il alla rejoindre son petit territoire. Il était sur le point de reposer son coussin sur son ventre quand elle le lui arracha des mains, pour le jeter de l'autre côté de la pièce. Sans le prévenir, la jeune femme se mit à califourchon sur lui. Aussi immobile qu'une pierre, il la fixa avec des yeux ronds, les mains levées pour ne pas la toucher, les orteils plantés dans l'accoudoir.
Consciente de sa présence entre ses cuisses, Aliénor posa les mains à plat sur son torse, ses longs cheveux venant frôler sa peau. Il ne respirait même plus.
-Pourquoi es-tu chaste depuis cinq ans ? demanda-t-elle lentement.
-Je sais plus, gargouilla-t-il en la voyant se pencher sur lui, de telle façon qu'elle posa sa poitrine sur ses pectoraux.
-Bérith, réponds-moi. Pourquoi ?
Contre toute attente, il agrippa l'accoudoir derrière sa tête, comme pour empêcher ses mains de se permettre des privautés sensuelles. Aliénor entendit le bois craquer sous sa poigne. Son corps, lui, était tendu sous elle. Chaud...
-Je te conseille de t'éloigner, Aliénor.
-Et si j'avais autant envie de toi que toi de moi ? susurra-t-elle, ses lèvres à un cheveu des siennes.
L'accoudoir se brisa à ces paroles. L'instant suivant, ils se trouvaient au pied du canapé, à s'embrasser passionnément. Les mains dans ses cheveux, cambrée au possible pour le sentir contre lui, Aliénor perdit pied à une vitesse stupéfiante. Son corps entier parut s'embraser, tandis qu'il trouvait naturellement sa place contre son bassin. Ses lents mouvements de hanches se heurtaient à leurs vêtements, la frustrant au possible.
-Ha... Hawk, haleta-t-elle lorsqu'ils rompirent leur baiser.
-Pas sur le sol.
Hein ? Il l'empoigna par les fesses, l'incitant à passer les bras autour de son cou. Aidé de ses ailes, il les remit debout. Plaquée contre lui, Aliénor profita de cette position pour reprendre ses lèvres. Le démon émit un grondement appréciateur tout en la plaquant au mur.
-Comme ça, c'est mieux ? gloussa-t-elle en nouant les jambes autour de sa taille.
-Mmh...
Leurs vêtements partirent en fumée, les laissant nus l'un contre l'autre.
-Là, c'est mieux.
Ils s'embrassèrent de nouveau, avec une passion nouvelle. Il fit glisser ses mains le long de ses côtes, avant de prendre ses seins dans ses paumes. Un gémissement échappa à la jeune femme, plus encore lorsqu'il prit se pressa plus étroitement contre elle. Sa verge se frottait contre son bas-ventre, lui faisant perdre ses moyens. Son impressionnante érection était chaude, dure contre elle.
Ils s'étaient déjà retrouvés dans cette situation, un an plus tôt. Pourtant... ils n'avaient jamais été aussi près de concrétiser les choses. D'aller jusqu'au bout.
-Tu vas me laisser vierge cette fois aussi ? chuchota-t-elle en glissant la main entre eux.
Ses doigts caressèrent la pointe de sa verge, son gland brulant semblant tressauter à son contact. Elle commençait à avoir du mal à penser.
-Oh non... J'ai bien l'intention de faire de toi une femme... murmura-t-il en mordillant la ligne de sa gorge, ses pouces remontant la courbe de ses seins pour en effleurer la pointe.
-Bérith... je... veux...
Elle s'arrêta, incapable de prononcer ces mots à haute voix. Elle voulait le gouter. Elle voulait le prendre dans sa bouche, connaitre la saveur de son sexe sur sa langue... Entendre ses gémissements de plaisir...
Le démon se figea, le nez dans son cou.
-Tu penses incroyablement fort, fit-il d'une voix rauque.
Elle dut devenir écarlate de la tête aux pieds, mais son baiser ardent fit se volatiliser toute la pudicité de son être. L'instant suivant, ils se trouvaient sur le lit. Allongée sur le dos, Aliénor gardait les jambes nouées autour de la taille du démon.
-Hors de question que tu me fasses ça pour le moment, décréta-t-il en descendant le long de son corps, ses mains venant caresser l'intérieur de ses cuisses.
Tout en se mordillant la lèvre, elle se retint de se trémousser lorsqu'il l'embrassa sous le nombril. Proche... Si proche...
-Pou... Pourquoi ?
-Parce tu serais bien capable de me faire jouir avant l'heure.
Sur quoi il posa ses lèvres à un endroit ignoré depuis un an. Un glapissement échappa à Aliénor, tant à cause de sa réplique que de son geste. Au contact de sa langue, elle perdit le peu de pensées qui lui restaient. Il y avait un an déjà, il lui avait fait perdre la tête de la sorte. Mais là... Là...
Une main dans ses cheveux, l'autre dans les draps, elle se cambra en ondulant du bassin. Et croisa son reflet. Celui de Bérith, la tête entre ses cuisses, ses ailes rabattues dans son dos. Il y avait un miroir au plafond !
Elle pouvait voir ses muscles se contracter tandis qu'il semblait mener une lutte intérieure, ses fesses bougeant en une lente cadence qu'il refrénait à chaque fois. Cette vision, associée au jeu de sa langue sur son sexe, manqua la faire s'évanouir de plaisir.
Malheureusement, il s'arrêta soudain, lui arrachant un gémissement de frustration.
-Aliénor, haleta-t-il en revenant lui mordiller le cou. Par tous les esprits de...
Cette fois-ci, elle perdit vraiment la tête. Car elle le renversa sur le dos, les prenant tous les deux par surprise lorsqu'elle se retrouva à califourchon sur lui. Une main sur son torse, l'autre autour de sa verge longue et dure, elle lui adressa le regard le plus torride auquel il avait jamais eu droit.
-Je te veux maintenant.
-Tes désirs sont mes ordres, gronda le démon en l'empoignant par les hanches.
Elle perdit de nouveau le contrôle de la situation, lorsqu'elle se retrouva sur le dos. Bérith prit possession de ses lèvres tout en glissant une main sous l'un de ses genoux pour replier sa jambe... Et soudain, elle sentit son gland s'enfoncer en elle. Elle poussa un glapissement se muant en une plainte rauque tandis qu'il la comblait de sa verge, tandis qu'il la possédait pour la première fois.
-Aliénor...
C'était si bon qu'elle fut incapable de répondre. Elle voulait... Juste... Ha... Les bras noués autour de son cou, elle imprima un mouvement à ses hanches qui lui fit comprendre. La maitrise de son démon se fissura, il se mit à aller et venir en elle. Faisant monter en elle un plaisir qui la fit s'agripper aux draps, tout son corps tendu vers le sien. Incapable de résister à la tentation, son Duc prit tour à tour la pointe de ses seins dans sa bouche. Sans cesser son jeu de bassin, allant tantôt vite, tantôt avec une lenteur capable de la faire gémir de dépit. De la faire le supplier d'aller plus vite. Plus fort... L'entendre gémir son nom brisa les derniers lambeaux de conscience de Bérith. Leur étreinte se fit moins douce, plus exigeante. Plus torride.
Jusqu'au moment où son corps entier se contracta, l'entrainant vers une jouissance qui précipita celle de son amant.
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