Chapitre n°11 : Avancer
Julien
La reprise des cours n'avait pas été aussi simple que je le pensais. Déjà, j'avais dû rattraper les leçons que j'avais loupé. Par chance, Capucine m'aidait beaucoup sur le sujet. Je me sentais encore assez faible le soir, aussitôt après le repas je filais me coucher en espérant récupérer des forces le plus vite possible.
Comme chaque soir depuis cinq jours, j'entrais dans le bureau de Winston et m'installais sur le fauteuil en velours bleu canard en face de son bureau. Il y a quelques jours, j'avais réussi à lui expliquer ce qu'il s'était passé avec Noam. Nous n'avions cependant pas encore parlé de l'incident du lac. Mais il m'avait aidé à comprendre ce qu'il s'était passé en moi ce jour-là, quand mon frère est mort. Il m'avait expliqué que le lac avait dû réveiller mon énergie élémentaire et que, les premières utilisations étant toujours hors de contrôle, celle-ci avait eu des conséquences dramatiques. Une partie de moi espérait toujours que j'aurais pu faire autrement, que j'aurais pu contrôler ma colère, mais une autre commençait à assimiler tout ce qu'il s'était passé, et même si je ne pouvais pas me le pardonner je pouvais au moins comprendre.
Ce soir, Winston essaya une autre approche en me parlant de tout sauf des événements qui me perturbaient. Il commença par me parler des futurs cours de transformation :
- Tu n'es pas encore prêt pour ces cours, mais tu verras à l'avenir que ce sont des cours très important pour apprendre à te contrôler et utiliser ton énergie de façon mesurée.
- Et si je ne veux pas l'utiliser ?
- On ne peut pas te la retirer Julien.
- Et cette fille Terre alors ?
Il parut hésiter mais voyant que j'en savais assez pour le contredire il répondit :
- Seuls ceux qui nous mettent en danger se font retirer leur énergie élémentaire. Mais je te déconseille de t'y risquer, ce n'est pas la seule conséquence de ce genre d'acte.
Il me regardait avec insistance et son air grave finit de me convaincre. Je trouverai bien un autre moyen de la contrôler sans l'utiliser. Il fallait seulement que je l'étudie davantage.
Capucine
La semaine venue, je continuai à travailler à la bibliothèque avec Julien tous les après-midi pendant notre temps libre avant le dîner. Nous travaillons et faisions nos devoirs, mais aussi, essayons d'en apprendre davantage sur les Eléments. J'espérais comprendre d'où nous venaient cette énergie élémentaire mais c'était un mélange assez complexe d'histoire et de génétique que je ne maîtrisais pas encore suffisamment. Parfois, Camille s'installait à la table juste derrière Julien et essayait de me déconcentrer. Il disait que je passais trop de temps à étudier, et encore plus avec un Eau. Je commençais à croire que certains avaient raison quand ils disaient que les Feux se sentaient supérieurs. Mais j'essayais de l'ignorer à chaque fois, préférant ne pas me mêler tout de suite à une confrontation. De plus, Julien n'avait pas besoin de ça en ce moment. Je sentais qu'il était encore trop faible et préoccupé pour se retrouver pris à partie.
Ce soir-là, après le repas, Camille me suivit quand je sortais du réfectoire. Je sentais qu'il allait vouloir me parler de mon ami et que ça n'allait pas me plaire. Je décidai donc d'avancer d'un pas décidé vers les dortoirs. Mais avant que je n'atteigne les dernières marches qui montaient à l'étage des filles il me barra le chemin.
- Capucine !
- Quoi ?
- Décidément, tu n'as plus envie de me parler ?
- Je sais déjà ce que tu vas me dire. dis-je en levant les yeux au ciel, une main posée sur la rambarde des escaliers
- Alors pourquoi tu continues ?
- C'est quoi ton problème Cam ? En quoi ça te dérange que je parle avec Julien ? Il t'a fait quoi au juste ?
Je commençais à perdre patience et ma voix s'étai faite plus forte. Un garçon qui passait en bas des marches nous regarda d'un air curieux mais continua sa route. Camille m'intima de m'asseoir avec lui sur les marches pour discuter, mais je n'étais pas certaine d'avoir envie de parler tranquillement avec lui alors qu'il essayait de me contrôler. Et sa phrase d'amorce ne m'en donna pas davantage :
- Les Eaux sont dangereux pour nous. Tu n'as pas écouté les cours de Mans ou lu des bouquins sur l'Histoire des Eléments quand tu étais à la bibliothèque avec ton pote ?
- Pourquoi ça te dérange que je passe du temps avec lui ? Ca ne te dérangeait pas autant quand c'était Brendan qui s'occupait de lui et d'Hortense.
- Brendan s'est toujours comporté comme ça, personne n'arrive à le raisonner. Et tout le monde a fini par laisser faire parce qu'il est le fils de Karl II et qu'ils ont peur de...
- Attends attends, fils de qui ?
Il avait l'air de penser que je savais de qui il parlait. Pourtant je n'en avais aucune idée.
- Karl II, c'est le père de Brendan. Il est le Gardien du Feu et s'occupe de la protection du Sanctuaire et de l'Ecole.
- Tu veux dire que c'est lui qui donne les ordres aux Harponneurs ? Mais je ne comprends pas, en quoi ça change quelque chose pour Brendan et le fait qu'il parle avec d'autres Eléments ?
- Oui, on peut dire ça, il s'occupe d'eux. Er ce que ça change c'est que les gens qui ont peur des Harponneurs, et donc des ordres que pourraient donner le père de Brendan si quelqu'un venait à faire une réflexion à son fils. Et lui en profite pour déjouer toutes les règles. Son père rappelle pourtant tous les ans dans son discours de Paix que nous devons nous éloigner des Eaux pour éviter les mauvais mélanges d'énergie et que l'Elément finisse par ne plus exister.
- Tu es en train de me dire que les Eléments se reproduisent entre eux pour faire perdurer leur lignée ?
- C'est ça.
Je trouvais ça complètement insensé, comment on pouvait forcer les gens à ne pas se mélanger. D'autant plus en nous formant dans une école comme celle-ci qui nous incitait à parler et socialiser entre Eléments. Mais cette règle avait l'air tellement encrée que Camille n'avait pas sourcillé en m'expliquant ces règles. Et en y réfléchissant, ça faisait sens. On nous séparait lors des repas, dans plusieurs cours pour apprendre à gérer notre énergie...Les seuls moments où on était réellement mélangés c'était les cours et les dortoirs. Même là, je remarquais que les Eaux et les Feux n'étaient pas mélangés. Alors même là, tout était calculé ?
Sentant l'angoisse monter en moi je décidai de profiter l'inattention de Camille pour me lever et partir au pas de course en direction de ma chambre. En entrant dans la précipitation, je fis sursauter Mélinda. Elle me lança un regard d'excuse avant de me serrer dans ses bras pour me canaliser. Elle avait dû lire dans mes pensées, e savait le tourbillon d'émotions et de sentiments qui commençaient à se dessiner dans mon esprit. Elle me serrait fort mais je ne bougeais pas, je savais qu'il fallait que je me calme, e je savais que nous pourrions discuter de ce que je venais d'apprendre une fois tranquille. Après quelques minutes de silence pendant lesquelles on entendait plus que le bruit de notre respiration, elle recula et s'asseya sur son lit en tapotant l'espace à côté d'elle pour m'inviter à lui raconter ce qu'il s'était passé.
Hortense
J'avais rendu son lit à Dorian le lundi matin, trois jours auparavant. J'avais assez profité de son hospitalité et m'étais sentie suffisamment capable de monter les dernières marches qui me séparaient de ma chambre. Brendan avait pris soin de moi tous le week-end, ménageant chacun de mes efforts, m'apportant tout ce dont j'avais besoin avant même que je n'en ressente moi-même la nécessité. Les quelques jours qui suivirent le retour à ma chambre et la solitude pendant que ma colocataire était en cours furent difficiles. J'avais du mal à penser à autre chose que ce qui me préoccupait. Par chance, j'étais assez épuisée pour ne jamais tenir éveillée plus de trois heures, je passais donc le plus clair de mon temps à dormir. Et j'avais demandé à Dorian et Carmen d'occuper un maximum Brendan pour ne pas qu'il passe ses journées à mon chevet, il avait déjà assez perdu de temps.
Ce soir, Mademoiselle Blois m'avait autorisée à redescendre manger au réfectoire avec les autres, elle estimait que j'avais récupéré assez d'énergie pour descendre les escaliers et les remonter une fois par jour. Et j'imaginais qu'elle espérait que de voir les autres me motive suffisamment pour me reposer un maximum et retrouver mon état normal au plus vite. Vers vingt heures, je descendis donc avec Carmen. Elle m'expliquait comment s'étaient passé ses cours de la journée et me laissa aller à la table des Airs quand nous entrâmes dans la grande pièce.
J'aperçus quelques personnes me lancer des regards en biais lorsque je m'installai à ma
J'aperçus quelques personnes me lancer des regards en biais lorsque je m'installai à ma table, appuyant mes béquilles contre ma chaise. Gabriel, Jessica et Sonia avaient l'air, eux, ravis de me revoir. Ils s'empressèrent de remplir mon assiette et de me raconter les dernières anecdotes qu'ils avaient vécues. Gabriel avait réussi à effectuer sa transformation pour la première fois et en était super fier, les autres avaient plutôt des potins à raconter sur d'autres élèves que je ne connaissais pas.
Perdant le fil de la conversation, je vis mon frère se lever de sa table après avoir fini son repas. Il se dirigeait vers la sortie. J'avais attendu des jours pour pouvoir lui parler. Je me levais brusquement et pris mes béquilles pour l'intercepter rapidement avant qu'il ne disparaisse dans sa chambre. Arrivés dans le hall, d'entrée, je l'appelai. Il se retourna, fit quelques pas en avant pour me rejoindre mais une ombre passa dans son regard lorsqu'il vit les béquilles et laissa une distance entre nous.
- Ça n'a rien à voir avec toi Julien.
Il ne parut pas convaincu.
- Comment tu te sens ? dit-il pour faire la conversation
- Mieux, l'infirmière a dit que je pourrais sûrement bientôt reprendre les cours et lâcher les béquilles. Je pense qu'elle exagère un peu et que je pourrais déjà m'en passer.
J'essayais tant bien que mal de détendre l'atmosphère mais il restait tendu. Il lâcha un grognement avant de me dire que je ferais mieux de suivre les indications de Mademoiselle Blois. Je levais les yeux au ciel.
- Est-ce que tu te sens mieux ? tentai-je à mon tour. J'aurais aimé qu'on se voit plutôt mais je ne pouvais pas vraiment me déplacer.
- C'est rien, ça va, je vois souvent Monsieur Winston, il m'aide beaucoup.
Je me rapprochais de lui et le serrais dans mes bras. Il ne me serra pas tout de suite contre lui mais se détendit.
- Tu m'as fait peur. osai-je
- Je suis désolé. Je ne recommencerai plus.
- J'ai besoin que tu prennes soin de toi.
En le regardant dans les yeux, je vis qu'il allait se reprendre, ou en tout cas, qu'il allait faire de son mieux pour s'accrocher et avancer. Sentir qu'il allait mieux me fit un bien fou. J'étais soulagée. Avant l'extinction des feux, je rejoignis Brendan dans le couloir des dortoirs, près d'une fenêtre, pour lui raconter ma discussion avec mon frère. Il avait l'air presque aussi heureux et soulagé que moi.
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