Un à un, ils se dévisagèrent, balayèrent la salle du regard. Ils s'interrogèrent. Réfléchirent aux étranges choses qui se produisaient depuis leur réveil. Sachant qu'ils ne s'étaient réveillés que depuis dix minutes. Bradley se passa la main sur le visage, souffla un bon coup. Dix minutes. Une chambre renversée. Un cheval. Une fille nue. Sept célébrités. Un jeu d'émission télévisée. Very Bad Trip. Ce dernier nom représentait bien l'ensemble de la situation.

- Bon, toussota Brad après avoir avalé sa bouchée. Réfléchissons.

Il coinça le produit inconnu entre ses dents, manqua de faire vomir plus d'un de ses collègues et revint s'asseoir aux côtés de Chris.

- Very Bad Trip, hein ? Et un jeu télévisé qui recrée des jeux de sociétés en grandeur nature. Peut-être qu'on a juste mal lu. Que l'émission recrée des films grandeur nature.

Mais Steve balaya cette supposition d'un féroce coup de menton :

- Impossible. Je fais toujours attention sur quoi je signe.

- À l'inverse de moi... grinça Ryan, hilare.

Mais son sourire s'envola lorsqu'ils le toisèrent d'un mauvais œil.

- C'était une blague... se défendit-il prestement.

En face, Hugh ferma les yeux et fit lentement non de la tête, ce qui lui valut une belle grimace agacée de la part de son ami. Bradley eut du mal à retenir un rire.

- Peu importe comment on est arrivé là, lâche Jack. On est dans Very Bad Trip et il nous manque trois gars. Si vous voulez mon avis, on a été drogué, on se souvient de rien, on a fait des choses pas nettes cette nuit. On aurait même pu y rester. Alors imaginez qu'on s'en aille sans les trouver ? Ils vont peut-être claquer.

Bradley plissa les yeux :

- Doug ne risque pas la mort dans Very Bad Trip.

- On pourrait appeler la police ? proposa Johnny, qui regardait ses ongles vernis de noir avec un sourcil levé, comme agacé de son apparence.

Tous les mentons se redressèrent dans sa direction.

- Bonne idée ! approuva Bradley. Quelqu'un a un téléphone ?

Ils fouillèrent leurs poches. Bradley aussi. Jusqu'au moment où il comprit qu'il n'avait pas de poches. Ni lui, ni aucun des hommes présents.

- Bon, soupira Hugh en se relevant, grimaçant sous l'effort. Trouvons nos vêtements.

Lui avait plus de chance que Bradley. Il portait un t-shirt et un short de bain, assortis qui plus est.

— Hugh, s’enquit Ryan, un sourcil arqué, c’est quoi dans la poche de ton bas ?

Tandis que les autres se relevaient en grognant, renversant meubles et draps à la recherche de leurs habits, Bradley se dirigea vers Hugh et Ryan. Ce dernier disait vrai ; un sachet en plastique, bourré de cachets ronds aux reflets bleutés, était glissé dans sa poche.

— Je me souviens de rien... soupira Hugh, les sourcils froncés.

Il retira le sachet et l’examina à la lumière. Bradley croisa les bras sur son torse nu, perplexe. Pourquoi avait il l’impression d’avoir déjà vu ces comprimés quelque part ?

— Garde les sur toi, fit il finalement. C’est peut-être avec ça qu’on nous a drogué. Quand on aura appelé la police, on pourra leur donner.

— Bonne idée, approuva Ryan. Tu m’aides à me relever, maintenant ?

Bradley lui attrapa l’avant bras, le tira dans un grognement. Une fois que son collègue ait chassé ses vertiges, il le relâcha et reporta son attention sur la chambre. Les quatre autres semblaient avoir trouvé des vêtements, bien qu’ils ne furent pas les leur.

— Je crois que personne n’a son téléphone, grogna Brad, les mains sur les hanches.

L’air désinvolte qui l’habitait quelques minutes plus tôt s’en était envolé, laissant place à une inquiétude qui colorait son visage d’un blanc maladif. Il était vêtu d’un costume trois pièce noir à chemise blanche qui lui saillait comme un gant.

Bradley, quant à lui, repéra un pentalon cargo, un débardeur et une veste militaire qui lui quadrillaient bien les épaules. Ça n’étaient pas ses habits, mais il s’en contenterait.

— T’es prêt pour American Sniper, pouffa Jack, qui coiffait ses cheveux d’un chapeau semblable à celui de son personnage dans Jumanji.

Bradley étira un sourire. En temps normal, il aurait rit, mais vu la situation, il n’en avait pas du tout envie.

Quant au seul des sept hommes qui était déjà vêtu, à savoir Johnny, alias Jack Sparrow, il patientait au bar de la suite. Bradley se permit de s’asseoir sur le siège déchiré à ses côtés. Ainsi avachi, le regard perdu sur les bouteilles d’eau de vie brisées derrière le comptoir, Johnny ressemblait plus que jamais au vieux Pirate qu’il interprétait.

Jack Black, qui s’était approché à son tour, demeura debout. Bradley en fut rassuré. Il n’était pas certain qu’une de ces chaises cassées aurait supporté le poids de son collègue.

Les trois hommes furent bientôt rejoint par les quatre autres, tous habillés de la façon la plus incongrue qui soit. Salopette pour Steve, veste en cuir rouge sur un t-shirt à manches longues noires pour Chris, chapeau haut de forme accompagné d’un manteau à queue de pie pour Hugh et enfin le plus simple des t-shirt, bleu ciel, allant de pair avec un jean beige, pour Ryan.

Bien que Bradley trouvait cela très amusant, étant donné que Johnny était un Pirate, Jack un semblant de touriste sans lunettes et lui un militaire sans chapeau, cela le rendait également très inquiet, voire même effrayé. Ces tenues paraissaient être celles des personnages des acteurs, et Bradley avait la terrible impression que cela ne pouvait être une coïncidence.
Tout ce qu’il espérait, en vérité, c’était de ne pas être plongé dans American Sniper en plus de Very Bad Trip. Autrement, aucun d’eux n’y survivrait.