Chapitre 8
Chapitre 8 : Juillet
Après de longues heures de vol, le groupe posa enfin le pied sur le sol thaïlandais, à l'aéroport international de Phuket.
L'air chaud et humide les enveloppa dès leur sortie de l'avion, un contraste brutal mais exaltant avec la fraîcheur climatisée de la cabine.
Malgré les traits tirés par la fatigue, l'excitation du voyage l'emportait sur l'épuisement.
Ezra et Eva, débordant d'enthousiasme, échangeaient déjà sur les paysages qu'ils mouraient d'explorer.
Eva, en particulier, était prête à documenter chaque instant.
Elle avait même investi dans un appareil photo dernier cri, déterminée à capturer chaque détail — des couchers de soleil flamboyants aux marchés nocturnes colorés.
De leur côté, Alix et Charlie, véritables exploratrices dans l'âme, s'étaient déjà plongées dans les brochures et applications de voyage.
Déterminées à maximiser chaque journée, elles débattaient sur les temples à visiter, les plages secrètes à découvrir et les expériences culinaires à ne pas manquer.
Charlie fronça les sourcils en consultant son téléphone.
— Kayak dans les grottes marines ou rando dans la jungle ?
Sans hésitation, Alix releva la tête, son regard brillant.
— Les deux, évidemment.
Un sourire étira les lèvres de Charlie.
— Je m'attendais à cette réponse.
À quelques pas, Ezra écoutait distraitement leur conversation, un léger sourire en coin.
Elle était dans son élément.
Alors qu'ils récupéraient leurs bagages, l'excitation flottait dans l'air, plus forte que jamais.
Le chauffeur, mandaté par leur hébergement, les attendait à la sortie, tenant une pancarte griffonnée de leurs noms.
Quelques minutes plus tard, ils s'engouffraient dans un van climatisé, direction Viola Villa, un écrin de luxe niché à quelques pas de la plage.
Le trajet fut bercé par l'effervescence de Phuket, les rues vibrantes de vie, les enseignes lumineuses contrastant avec l'obscurité naissante.
Eva, téléphone en main, capturait déjà les premières images du voyage, tandis que Charlie et Alix échangeaient sur leur planning du lendemain.
Ezra, lui, se contenta d'observer.
Il n'avait rien à prévoir, rien à imposer.
Pour la première fois depuis longtemps, il allait juste suivre le mouvement.
Et voir où cela le mènerait.
Le van s'arrêta devant l'entrée de leur villa, révélant une bâtisse moderne et élégante, nichée entre les palmiers et la végétation luxuriante.
L'air sentait le sel marin et les fleurs tropicales, un mélange à la fois intense et apaisant.
Charlie, épuisée par le voyage, poussa un soupir d'aise en entrant dans la villa.
— Ok. Je vais dormir trois jours.
Eva rit doucement, passant un bras autour de sa taille.
— Je t'autorise une nuit, pas plus. Après, c'est full aventure.
— Hmm... négociation possible, marmonna Charlie en traînant des pieds vers leur chambre.
Ezra les observa légèrement envieux de leur complicité, tandis qu'Alix, à peine posée dans le salon, lança :
— Quelqu'un veut venir marcher sur la plage ?
Eva secoua la tête sans hésiter.
— Je vais rester avec Charlie. On n'a pas eu beaucoup de temps à deux ces derniers jours.
Alix hocha la tête avec compréhension, mais Ezra perçut une légère hésitation.
Comme si, malgré sa proposition, elle s'attendait à ce qu'aucune réponse ne vienne.
Il n'attendit pas.
— Je viens.
Alix releva les yeux vers lui, surprise.
— Vraiment ?
Il haussa les épaules, jouant l'indifférence.
— J'ai pas prévu de dormir tout de suite.
Elle sembla peser la situation une seconde, puis hocha la tête.
— Ok alors. Prends une veste, ça risque de souffler un peu.
Il suivit son conseil, enfila un sweat léger, et sortit derrière elle.
La plage s'étendait devant eux, déserte à cette heure tardive.
L'air était chargé d'humidité, et la mer étalait doucement ses vagues sur le sable, dans un rythme presque hypnotisant.
Le silence n'était pas désagréable.
Juste un peu épais.
Alix avançait les bras croisés, son regard perdu vers l'horizon, tandis qu'Ezra marchait à ses côtés, cherchant un moyen de rendre cette promenade moins formelle.
Il décida de rompre le silence.
— C'est quand la dernière fois que t'as marché sur une plage comme ça ?
Alix ne tourna même pas la tête.
— Aucune idée.
Une réponse brève, neutre.
Super.
Ezra ne se découragea pas pour autant.
— Ça fait du bien, non ?
— Ouais.
Encore une réponse courte.
Il fronça légèrement les sourcils, pesant ses options.
Puis, il opta pour la carte de l'humour.
— Tu sais, t'es pas obligée de me parler comme si je t'avais forcée à venir.
Cette fois, Alix tourna la tête vers lui.
Elle le fixa une seconde de plus, avant de hausser légèrement les épaules.
— C'est vrai.
Son ton était moins fermé cette fois.
Une avancée. Minime, mais réelle.
Ezra décida d'enfoncer le clou.
— Tu n'as pas refusé que je t'accompagne.
Il lui lança un regard en coin.
— Donc, techniquement, ça veut dire que tu voulais que je vienne avec toi.
Alix laissa échapper un souffle amusé, mais masqua rapidement son expression.
— Faut pas trop t'emballer non plus, Pham.
Il arqua un sourcil, faussement offensé.
— Trop tard.
Elle secoua la tête, feignant l'exaspération.
Mais il le vit.
Ce micro-sourire furtif.
Une fraction de seconde, une esquisse à peine perceptible.
Mais il était là.
Petit à petit.
Elle se détendait.
Et ça, c'était tout ce qui comptait.
Ezra décida de ne pas relancer immédiatement la conversation.
Parfois, le silence avait plus de valeur qu'un flot de paroles.
Il profita du moment, du vent marin qui s'engouffrait dans ses vêtements, du bruit régulier des vagues, et surtout, du fait qu'Alix ne semblait pas chercher à fuir cette proximité.
Elle était là, à quelques centimètres de lui, et pourtant elle demeurait une énigme insondable.
Chaque pas qu'il faisait vers elle était comme un jeu d'équilibriste.
Trop près, et elle s'éloignerait, trop loin, et il perdrait cette infime connexion.
Un mot maladroit, et elle pourrait se refermer comme une huître.
Finalement, Ezra prit une inspiration discrète et lança, tentant de masquer sa nervosité sous une plaisanterie légère :
— Dis-moi, t'as toujours marché aussi vite ou c'est juste pour me semer ce soir ?
Alix tourna la tête vers lui, un éclat d'intrigue dans le regard.
— C'est toi qui marches comme un escargot.
Ezra fit mine d'être profondément blessé, posant une main dramatique sur sa poitrine.
— Ou alors, tu tentes de me distancer. Faut dire que je suis pas si mauvais compagnon que ça, non ?
Elle leva un sourcil, le coin des lèvres légèrement relevé dans un sourire à peine contenu.
— Si j'avais vraiment voulu te semer, tu te serais déjà perdu quelque part derrière.
Il eut un rire discret, presque nerveux.
— Sympa. Maintenant, j'ai l'image de moi, seul, perdu dans le noir, alors que toi tu sirotes un cocktail à l'autre bout de la plage.
Alix secoua doucement la tête, mais il vit le léger tremblement de ses épaules, signe qu'elle réprimait un vrai sourire.
Un petit pas, mais un pas tout de même.
Petit à petit, il avançait.
*
Le soleil filtrait à travers les larges baies vitrées, projetant des taches dorées sur le sol carrelé de la villa.
L'odeur du café frais embaumait déjà l'air, mêlée aux notes sucrées des fruits tropicaux soigneusement découpés par Eva, qui s'activait dans la cuisine avec une précision méthodique.
Charlie, en revanche, n'avait clairement pas encore récupéré.
— Si quelqu'un me parle avant dix heures, je le maudis sur trois générations, grogna-t-elle en s'affalant sur une chaise, les cheveux en bataille, le front collé à la table.
Eva, sans lever les yeux de son couteau et de son ananas, répondit avec un sourire en coin :
— T'es déjà debout, c'est un progrès.
— Parle pas trop vite, je peux encore m'évanouir sur place.
Eva déposa une assiette devant elle et, du bout des doigts, poussa une tranche de mangue en direction de sa copine.
— Tiens, mange.
Charlie grogna quelque chose d'incompréhensible avant de croquer mollement dans le fruit.
— J'crois que je t'aime un peu plus quand tu me nourris.
— Je prends ce que je peux, murmura Eva, amusée, en déposant une tasse de café devant elle.
Charlie saisit la tasse, la porta à ses lèvres et soupira profondément après une première gorgée.
— Ok, je vais survivre.
Ezra, installé en face d'elle depuis plusieurs minutes, observa toute la scène avec une certaine fascination.
— C'est toujours aussi intense, vos matins ?
Eva lui lança un regard en coin.
— Disons que si je l'aime encore après ça, c'est que c'est du sérieux.
Charlie lui adressa un vague geste d'amour inabouti en levant mollement la main et replongea dans son sommeil improvisé.
Eva rit doucement, secouant la tête avant de se tourner vers Ezra.
— T'as l'air étrangement en forme ce matin.
Ezra but une gorgée de café, haussant nonchalamment les épaules.
— C'est l'air de la mer. Ça revigore.
Eva plissa les yeux, suspicieuse.
— L'air de la mer ou la compagnie d'Alix ?
Ezra ne réagit pas immédiatement, se contentant de porter son café à ses lèvres.
— On a juste marché.
— Oh, bien sûr, murmura Eva, faussement innocente.
Ezra lança un regard à Charlie, espérant une diversion, mais cette dernière ne semblait pas décidée à bouger de sa position comateuse.
Alors, il fit la seule chose qu'il pouvait faire : esquiver.
— Alix est réveillée ?
Comme pour répondre à sa question, la jeune femme fit son apparition sur la terrasse, les cheveux cachés sous un bonnet en satin, un tee-shirt ample tombant sur son short.
Elle était encore à moitié endormie, mais remarqua immédiatement les regards qui s'échangeaient à table.
— Quoi ? demanda-t-elle en arquant un sourcil.
Ezra faillit sourire.
Mais il se retint.
Eva n'eut pas la même retenue.
— Rien du tout, juste Ezra qui nous racontait votre petite balade nocturne.
Alix cligna lentement des yeux, comme si son cerveau analysait encore l'information.
Puis, sans lui accorder un regard, elle se servit un café avant de lâcher, d'une voix encore ensommeillée :
— J'espère que t'as bien raconté, Pham.
Cette fois, Ezra ne put empêcher son sourire.
Les discussions étaient encore lentes, bercées par l'éveil progressif de la villa.
Alix, toujours ensommeillée, piochait distraitement dans un bol de mangue, tandis qu'Eva s'occupait de trier les brochures et son téléphone, prête à organiser leur séjour.
— Bon, les amis, on a deux semaines.
Elle posa un carnet de notes sur la table, tapotant du doigt la première page.
— Je propose qu'on se cale un programme histoire de ne pas finir à zoner au bord de la piscine tous les jours.
Charlie releva la tête, s'intéressant soudainement à la conversation.
— Zoner au bord de la piscine ne me dérange absolument pas.
— On sait, répliqua Eva avec un sourire moqueur.
— Donc ? demanda Alix, curieuse.
— Donc, voici ce que j'ai en tête.
Eva dégaina son téléphone et fit défiler son écran.
— On alterne plage, excursions et détente. On peut faire une sortie snorkeling, visiter un temple, explorer les îles en bateau...
Elle releva les yeux vers Charlie et esquissa un sourire en coin.
— ... et bien sûr, on te laisse des moments chill.
Charlie hocha lentement la tête.
— Tant que je peux bronzer, je suis partante.
Ezra prît une gorgée de café, jetant un coup d'œil à Alix, qui feuilletait une brochure avec un air concentré.
Il se contenta d'écouter.
Moins il s'imposait, mieux c'était.
Après quelques minutes de débat sur l'ordre des activités, Eva posa son téléphone et croisa les bras.
— Ah oui, petit point important.
Elle échangea un regard avec Charlie avant d'annoncer calmement :
— On va prendre un peu de temps pour nous, aussi.
Un silence.
Alix releva les yeux, intriguée.
— C'est-à-dire ?
Charlie, les lunettes de soleil déjà sur le nez, répondit du ton le plus détaché du monde :
— Genre... un ou deux jours dans notre coin.
Ezra arqua un sourcil.
— Vous nous abandonnez ?
— Oh, calmez-vous, répliqua Charlie en s'étirant, un peu plus éveillée. On vous aime bien — sauf toi Ezra— mais on n'a pas prévu de passer toutes nos vacances collées à vous.
Eva acquiesça.
— Mais la plupart des activités, on les fait ensemble.
— On peut vivre avec ça, commenta Alix avec un léger sourire.
Ezra ne dit rien, mais une idée se formait déjà dans son esprit.
Si Eva et Charlie prenaient du temps à part... ça signifiait qu'il aurait lui aussi plus d'occasions de se retrouver seul avec Alix.
Lentement, il reposa sa tasse de café et s'étira avec un air faussement nonchalant.
— Ça me va.
Alix ne fit pas de commentaire.
Mais il vit, juste une fraction de seconde, ses doigts tapoter le rebord de son verre, signe qu'elle réfléchissait.
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