Le 7 avril.


Moi malade, qui essaie de survivre a un énième câlin maternel.

Depuis que je suis de retour au bercail, soit depuis 3 jours, je ne peux pas faire un pas sans que ma mère m'embrasse, me prenne dans ses bras ou me demande comment je vais. Voir les trois à la fois.

C'est papa qui est venu me chercher à l'aéroport l'autre jour, on en a profité pour s'installer sur une terrasse pour boire un café. Il m'a dit que j'avais l'air un peu fatigué, mais que dans l'ensemble j'avais bonne mine, on en a aussi profité pour parler un peu. Il a toujours été plus calme que ma mère, cette grande exubérante, il a toujours été mon rocher et encore plus depuis quelques années.

Je lui ai presque tout dit, même quelques fêtes, il a froncé les sourcils, soupiré et a levé les yeux au ciel. Façon pour lui de me croire qu'il est fâché, il n'est pas dupe et je suis la digne fille de ma mère. J'aime faire la fête, elle est devenue sérieuse avec le temps. Papa dit souvent que c'est qu'il la séduit, elle faisait la fête, étudiait et faisait la fête en étudiant.

Par contre je ne lui ai pas parlé de la relation que j'ai eue avec le bel Irlandais, pas que j'en ai honte, mais il y a des choses qu'une fille doit garder pour elle, les parties de jambes en l'aire au clair de lune en font partie. En parlant de lui, j'ai refusé d'échanger nos mails... Dans le fond j'en mourais d'envie, vraiment, mais, la réalité est tout autre. Une simple question comme « comment tu vas ? » prend un autre sens maintenant.

Je m'évite toute forme de souffrance, le plus possible du moins.

Blague à part, ce fut douloureux de lui dire non je l'aime vraiment bien, mais... ma réalité est tout autre et mon alien, une fois découvert, entache mes relations.

Dans tout ce merdier, seul mon père a su résister à l'étrange attraction « du malade ». Ma sœur aussi, mais, d'une autre façon. Béné avait quinze ans quand ça nous a pété à la tronche, elle ne s'est pas rebellé ou n'est pas devenue une sorte de folle dingue en colère contre l'univers, non, elle s'est plongée dans les études. Oui, ma petite sœur est devenue une véritable tête d'ampoule, pas pour trouver un remède au cancer comme certains l'auraient fait. Elle veut bosser pour les animaux.

Son endroit favori ? Le zoo. On en a bouffé des kilomètres dans tout un tas de parcs animalier. Quand je ne pouvais pas venir, ou ne voulais, elle me faisait un résumé d'une journée et demi au moins.

Je l'écoutais religieusement pour une fois qu'on ne parlait pas de « ça ». À certains moments, je pense que j'aurais été capable d'écouter en boucle les vieux croûtons du sénat sur la deux ou la trois.

Ouais, à ce point-là.

En rentrant à la maison l'autre jour, ma mère m'a sauté dessus. Heureusement que papa était derrière moi avec mes bagages sinon j'aurais goûté au sol !

— Tu as maigri !
— Bonjour à toi aussi maman...

J'ai été forcé de me mettre à table pour m'avaler un second petit dej, juste quelques heures avant de manger. On ne contrarie pas une mère, mais putain que quelqu'un ose me parler de tartines et de confitures et je l'explose sur place !

— Mais il ne fallait pas dépenser ton argent pour nous !
— Maman...
— Mais si ! regarde-moi toutes ces petites merveilles ! Commence ma sœur fouillant directe dans le gros sac foncé qui contient les souvenirs. Il y en a pour tous les goûts !!!

— Mange ! hooo mais c'est...
— Ha non ! elles sont à moi ces chaussures !

— Je...
— Mange je te dis ! Béné, ne me force pas à user de mon droit parental !
— Abuser tu veux dire...
— Les filles... soupire papa en regardant un genre de calendrier de l'avent que je lui tends, a la place des chocolats il y a des mignonnettes d'alcool local.
— On peut manger Mac do ?

Ce matin, après ma routine de cancéreuse en rémission, je me prépare pour aller faire mon contrôle technique comme dit ma morveuse de petite sœur. Soit dit au passage elle n'a pas réussi à avoir ces fameuses petites chaussures. Heureusement qu'il en avait une seconde paire. Il y a eu des déclarations de guerre pour moins que ça !

— Je vais passer mon contrôle Tech ! Je dis dans le couloir en enfilant une paire de bottines moumounes.
— Tu veux que je conduise ?

Je ne réponds pas à ma mère, je me contente de la regarder en soupirant.

— Bon, bon, qu'elle me répond en soufflant a son tour en levant les mains vers le ciel. Tu seras gentille d'aller m'acheter ces deux trois petites choses. Elle me tend une liste longue comme le bras.

Je ronchonne un « a tout à l'heure » et prends la direction du garage.

Je n'ai jamais aimé conduire. La circulation parisienne n'aide pas, elle est trop compacte, trop bruyante et agitée pour pas grand-chose au final. Et aujourd'hui cela ne déroge pas à la règle et il flotte un peu.

Se garer dans le parking de l'hôpital est une vraie mission, beaucoup trop de monde. Des morts vivants pour la plupart.

Un petit quart d'heure de retard c'est rien non ? Puis les médecins ne savent pas être ponctuels, l'un dans l'autre...

— Bonjour, je suis Mademoiselle Loti et j'avais rendez-vous il y a un quart d'heure. Je me présente à une secrétaire que je ne connais pas.

« Rebbeka » d'après son badge blanc accroché sur sa blouse tout aussi blanche. En tout cas j'adore ces cheveux ! Des boucles indisciplinées toutes brunes !

Elle me sourit et me demande de m'asseoir pour attendre le docteur Apps, qui en retard comme toujours.


Pour une fois il n'y a pas grand monde dans la salle d'attente, d'un simple coup d'œil je suppose qu'aucunes des deux personnes présentes sont condamnées. C'est presque rassurant.

Le docteur, celui que je n'enterrerais pas, sort de son bureau avec un homme lui serre la main et appel le couple assit devant moi. Il m'adresse un petit signe de tête quand nos regards se croisent, je fais de même en tapotant une montre imaginaire sur mon poignet.

Dans mon dos j'entends pouffer, en me retournant je vois la secrétaire aux cheveux sauvage reprendre son sérieux en se raclant la gorge.


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