Le 27 avril.

Moi médecin, en pleine exploration de grande littérature.

Pile de gossip, ok.
Chaussure enlevée, ok.
Pieds sur mon bureau, ok.
Énorme mug de café bien chaud, ok.

J'ai absolument tout ce qu'il faut pour passer un bon moment, juste avant mon premier rendez-vous j'ai demandé à Rebbeka si elle pouvait aller me chercher un deux magasines plein de conneries de star. Elle est revenue avec pas moins de cinq bouquins !

Une perle je vous dis !

Je passerais sur l'œil septique qu'elle m'a envoyé. Je me lance le pari de la rendre accro à ma culture littéraire en moins d'une semaine !

Je soupire d'aise quand j'ouvre le premier de la pile, au passage j'active le son de mon téléphone au cas où. Il faut aussi que je pense à organiser mes vacances aussi, ça, approche.je pense que je vais passer quelques jours chez mes parents sur Bordeaux.

Mon père m'a délicatement glissé qu'un peu de testostérone ne lui ferait pas de mal.

Première page !

Hoooo un récap' de chirurgie esthétique !!! Elle s'est injecté de l'huile de colza à la place de Botox ! Botox, que son chir ne voulait plus lui mettre, car il la trouvait accro. La blague, bref quoi d'autre ?

Machin truc a trompé chose machin et chose machin s'est venger en publiant des photos perso de machin truc... Sacré pétard cette machin truc !

— Dorian ! Dites il y a votre collègue qui demande des nouvelles du jeune Liam. Quand ma nouvelle et trop jeune secrétaire débarque dans mon bureau, j'étais en pleine tentative de compréhension d'une phrase d'une gourde de la télé-réalité. Ça devrait devenir une discipline olympique !

Je veux bien qu'on ne soit pas futé, mais là il y a du niveau !

— Je vais l'appeler, que je lui réponds en baissant à peine mon sésame.
— Vous voulez que je le fasse ? Quand elle me pose sa question, elle est appuyée sur le chambranle de ma porte avec les bras croisés sur sa poitrine. Sa touffe capillaire bloque toutes sortes de lumières.

Pour toutes réponses, je lui fais mon plus beau sourire.

Elle soupire avec le sourire aux lèvres et fais demie tour. Si elle avait vingt ans de plus. Ou moi vingt de moins... Non j'avais une salle tronche a cette période-là.

— Rebbeka !
— Oui ? Elle me répond sans bouger de son bureau, on fait souvent ça quand il n'y a personne dans la salle d'attente. On est des flemmards.
— Un grec pour midi ça te va ?
— C'est vous qui payez ?

Sa répartie me fait sourire, au moins elle se sent plus à l'aise avec moi.

— Je paye, tu te déplaces !
— Vous payez, vous commandez et je réceptionne le repas.

Je ronchonne pour la forme, je lui dis que si elle eut le badge d'employée modèle il faut qu'elle se déplace jusqu'au resto.

— Le badge ne remplira pas mon estomac. Qu'elle me répond la môme !

Tout en passant ma commande, avec double portion d'oignon pour elle, je regarde ma boîte mail sur mon ordinateur.

Je fronce les sourcils quand je me rends compte que j'ai complètement oublié de répondre à Alice ! Mon bouquin n'a pas encore touché le sol que je suis déjà sur mon clavier.


De : Dorian Apps.
À : Alice Loti.

Objet : toujours pas d'objet.

Quand vous dites que Bouda est un « putain d'enfoiré », vous voulez vraiment dire que c'est un « putain d'enfoiré ? ». Ce n'est pas quelqu'un qui prône la paix ? Je pense que vous pourrez éclairer ma lanterne.

Comment vous portez vous ? Votre voyage se passe bien ?

Je suis allé sur internet pour en savoir plus sur le parc national de Manas. Ca à l'aire d'un sacré endroit et je comprends mieux maintenant votre référence au film de Jurassic park !

Bien trouvé soit dit au passage.

Je vous souhaite une bonne journée.


Je relis très rapidement mon mail, je supprime tous mes smileys. À contrecœur, mais je le fais.

— Docteur ? Mme Cellier vous fait savoir que son fils est réveillé.
— J'y vais, les plats arriveront vers midi dix. Les premiers rendez-vous sont pour quand ?
— Dans un quart d'heure.

Je regarde ma montre et fais la grimace.

— Je vais leur dire que vous aurez un peu de retard.

En passant devant elle je lui tends mon précieux magazine, elle hausse un sourcil et finit par le prendre. Je suis sûr que quand je vais revenir elle va être à fond dedans !

J'enfourne rapidement mon portable dans une des poches de ma blouse. J'arpente rapidement les couloirs, je sais que sa chambre est au deuxième étage et que c'est la porte 401.

Une fois devant, je prends une seconde avant de frapper sur la porte. Non pas que j'angoisse, je sais que j'ai bien travaillé, l'opération s'est bien passée et je l'ai traitée avec respect.

Je crois que c'est la première fois ou je n'ai pratiquement pas chanté pendant que j'opérais.

— Docteur. M'accueille se mère avec un vrai sourire.

— Comment allez-vous ?
— On va bien. Tout en e répondant elle serre la main de son fils, qui ne me regarde pas.

On échange quelques banalités, pas si anodine que ça dans le fond. J'essaie de m'assurer qu'elle tient le choc. L'opération est une chose, le traitement qui s'en suit une autre.

Je lui ai prescrit de la radiothérapie, a raison de cinq jours d'affilés sur six semaines. En ouvrant, je me suis rendu compte que certains tissus étaient plus épais qu'ils auraient dû l'être. Après analyse, il s'est avéré qu'il y avait quelques cellules cancéreuses.

La première séance va avoir lieu la semaine prochaine, on commence avec un protocole simple et dès qu'on a les résultats de la simulation il aura ses rendez-vous régulièrement.

Pendant notre petit échange, le môme n'a pas levé les yeux une seule fois.

— Comment te sens-tu ? Je finis par lui demander en me plaçant devant lui. Sa mère lui tend un petit carnet brun, pratiquement vierge.

Quand il me regarde enfin, il soupire et baisse de nouveau son nez.

— Tu as des douleurs ? Il me fait signe que non sans relever la tête. Tu arrives à avaler ?
— Peu m'avoue se mère.
— Tu es alimenté par sonde ou liquide ?

Quand il me regarde, il me jette un regard noir. J'encaisse sans rien dire, il est en colère et c'est normal.

— Par sonde, pour le moment l'infirmière a dit qu'il fallait attendre que sa gorge soit moins sensible.

J'acquiesce et m'approche de lui. Il lève le menton sans que je lui demande et commence regarder les sutures.

— C'est propre, j'ai vu que vous avez passé une radio ?
— Elle est là, sa mère me tend une grande enveloppe en papier kraft foncé.

— Tout est en place, je finis par dire après avoir regardé la radio.

J'échange encore avec sa mère tout en essayant d'inclure Liam, mais il ne fait même pas mine de s'intéresser a nous.

Normalement, je devais lui parler de la possibilité d'apprendre le langage des signes. Je pense que je vais attendre la semaine prochaine. Un regard tueur par semaine me suffit largement.

Forcement, quand je reviens j'ai plus de trois quarts d'heure de retard.

Ouais, bravo. Bref.

Du coup, j'enchaîne mes rendez-vous sans même prendre le temps de boire mon café, qui est bien froid maintenant.

Ce n'est qu'en fin de journée, quand je rentre chez moi, que je me décide à regarder mon portable.

— Oui mon chaton, miaouuuu moi aussi ! tu as passé une bonne journée ? Ho tu n'as pas pissé sur la chaise ? Ha si. Autant pour moi. Dis-moi, elle t'a fait quoi cette chaise ? Je lui demande en lui grattant le dos. Oui, oui miaou toi aussi. Attends, une seconde !

Je me laisse tomber sur mon canapé et Loti me grimpe sur les genoux tout passants et repassant sur mes jambes.

Je ne lui dis pas, mais demain matin c'est direction clinique vétérinaire pour sa stérilisation. C'est bête, mais je ne veux pas qu'elle me fasse la tête !

— Oui, oui, moi aussi je t'aime. Attend je vibre, attend. Je lui dis en la poussant une fois ou deux sur les coussins du canapé.


De : Alice Loti
À : Dorian Apps
Objet : J'ai envie de chocolat.

Cela vous convient comme objet ?

Plus sérieusement, quand je dis que bouda est un putain d'enfoiré, c'est un putain d'enfoiré ! D'après lui le Karma règne sur le monde et le karma c'est lui qui fait en sorte que tout ce qui vous arrive vous le méritez. Donc, en quoi je mérite mon cancer ?

Trêve de bavardage superficiel !

Je n'ai jamais aimé le camping, mais je dois bien avouer que me dire que l'ancêtre du poulet peut venir me croquer d'une minute à l'autre m'éclate !

Je vous laisse, car mon tour de charge est passé !

(Il ne me manque rien).

Bonne journée !


— L'ancêtre du poulet ? Je répète en relisant son mail avec le sourire.  

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