Ellia Delrry
Cela fait maintenant cinq jours que je suis rentrée chez mes parents pour les vacances de la Toussaint.
Halloween est maintenant dans quelques heures, et nous avons décidé de le faire tous ensemble avec le reste de la classe. Noreen habite un peu loin de l'internat, alors elle viendra dormir chez moi pour l'occasion.
J'ai hâte de cette soirée, la première après notre anniversaire d'il y a une semaine.
Les surveillants sont bien évidemment arrivés en furie, le proviseur a débarqué quelques minutes plus tard et nous avons été enfermés dans nos chambres sauf pour aller aux toilettes et manger, à condition d'être accompagnés par un adulte.
Mon père trouve que la façon dont nous sommes traités est excessive, mais ma mère trouve que c'est une bonne chose de nous apprendre la discipline. A l'entendre, je suis la petite rebelle de ma famille. Et pourtant lorsque mon frère est parti faire ses études à Paris l'an passé, rien ne pouvoir surpasser son ingratitude.
Hier matin, certains de la classe ont commencé à discuter de se rendre devant le lycée pour huer le proviseur. Je sais que je ne devrais pas aller dans cette direction, et pourtant comme tous les autres je rêve de lui crier que la façon dont il nous traite frôle l'illégalité.
Même ceux qui sont d'ordinaire plus réticents à enfreindre le règlement s'impliquent dans le projet.
Je n'en ai pas parlé à mes parents. A vrai dire je ne compte pas le faire. Ils l'apprendront de toute manière tôt ou tard je suppose, mais si je leur en touche un mot, je ne pourrai pas sortir et Noreen ne pourra pas non plus se rendre sur le lieu de protestation.
Alors je me tais et espère que le jour où mes parents l'apprendront, je serai de retour à l'internat.
Je suis en train d'hésiter sur mon costume du soir, lorsque j'entends sonner à la porte.
Je me précipite en bas, et ouvre la porte à Noreen avec enthousiasme. Elle salue rapidement sa mère et me suit à l'étage.
"-Alors, tu as enfin trouvé quoi mettre ce soir, me taquine-t-elle. Elle sait pertinemment que c'est loin d'être le cas.
-Tu parles, impossible. Je partais pour me mettre en démone mais plusieurs personnes seront déjà comme ça. Et j'avoue que je ne vois pas trop quoi mettre qui fasse Halloween dans cette penderie. Il y a bien longtemps que ma mère a jeté nos déguisements à mon frère et moi.
-Tu m'étonnes. Je me doutais que ce serait la galère. Comme je te l'ai dit je me déguise en magicienne. J'ai apporté quelques trucs qui me restaient, si tu veux jeter un coup d'œil fais toi plaisir.
-Ah Noreen je t'adore tu le sais ça." Je déballe le sac qu'elle me tent pendant qu'elle va installer ses affaires. Mes parents sont sortis alors nous en profitons pour mettre la musique à fond et chanter à tue-tête.
Je prends un par un les objets et vêtements d'Halloween que Noreen a apporté. J'en mets quelques-uns de côté qui me semblent convenir pour être magicienne aux côtés de mon amie.
"-Oh Noreen cette cape est incroyable.
-Tu peux la mettre ce soir si tu veux, elle devrait être à ta taille je pense.
-Eh je viens d'avoir une idée. Si je mettais la robe noire que j'ai acheté en Angleterre cet été! Avec ma mère dans les parages je n'ai encore jamais osé la porter, mais elle n'est pas là ce soir et elle n'y verra que du feu quand on rentrera.
-Oh oui tu serais hyper canon canon comme ça. Oh attends tu sais quoi. Elle sort une couronne qui tombe sur le front et me la tend.
Je comptais la porter ce soir mais elle ira bien mieux avec ta tenue.
-T'es sûre vraiment? Si tu veux la garder t'as le droit.
-Non non t'inquiète, et puis vraiment tu seras super belle comme ça.
-Et bien merci beaucoup alors.
-Tu viens on va aller se maquiller et se coiffer, à nous deux il nous faudra au moins bien les quatre heures restantes pour être à l'heure." Je rigole en pensant qu'elle est loin d'avoir tort.
Et effectivement nous avons passé ces quatre heures à discuter et à nous amuser plus qu'à nous préparer, et nous avons dû passer la dernière heure à courir pour espérer ne pas être trop en retard.
*
*
*
"-Les gars vous êtes sûrs pour ça? Demande Axelle. Face à elle, Nolann et Maxime sont apparemment très fiers de leurs tomates pourries.
-Mais si allez viens, ça peut être marrant? et on cassera rien promis.
-Nan mais attendez, là vous partez trop loin là Nolann. On parle de jeter des tomates sur la fenêtre du proviseur. Aller crier notre mécontentement c'est une chose, dégrader du matériel en est une autre, qui peux largement nous valoir un procès.
-Oh allez Axelle ce sera marrant. Adam se rajoute visiblement aux garçons, et tous les trois se mettent à supplier notre déléguée. Celle-ci nous jette un regard désespéré, et je vois que ses lèvres s'articulent pour former un 'au secours' qui vient visiblement du cœur.
Même si nous rions tous face à la situation, Axelle n'en a pas moins raison. Les garçons vont trop loin avec leurs tomates pourries. Je décide de m'avancer à mon tour.
-Eh les gars pensez un peu à notre avenir quand même. C'est marrant de gueuler un peu sur le proviseur, mais je pense que le reste de la classe est d'accord pour dire que c'est hors de question de risquer notre avenir juste pour une bonne vanne.
Nous avons du mal à les convaincre, et Noreen, Thylann et Maeva viennent me soutenir. Cette dernière est particulièrement véhémente envers eux, et les convainc finalement de renoncer à leur projet, à grand renfort de "vous êtes complètement stupides", "mais ça va pas bien dans votre tête", et de "mais mûrissez un peu les gars là sérieux!".
Ils sont tous les trois vexés, mais nous savons tous que c'est pour le mieux. Nous nous mettons d'accord sur les limites à ne pas franchir ce soir, puis Anthony nous lance en direction du lycée, où le proviseur habite.
*
*
*
"-Vous êtes prêts?"Demande Ethan en se positionnant dans une position de combat, les mains en porte-voix.
Je jette un coup d'œil à Noreen et Adèle, et sans nous concerter, nous répondons toute ses trois un "oui chef!" bien sonore, vite imité par le reste de la classe.
La tension est à son maximum.
Voilà deux ans que nous attendons ce moment, et ce début d'année a fait plus qu'exacerber notre haine envers cet être abject qui n'a aucun respect pour les adolescents.
"-Eh rappelez-vous pas de connerie, ne peut s'empêcher d'ajouter Maeva. Nous hochons tous la tête pour la rassurer, mais nous savons bien qu'une fois que nous serons lancés, le pouvoir d'être trente-quatre nous donnera des ailes et nous nous laisserons emporter.
-A l'abordage, sus à l'ennemi!!!" Crie Oliver à ce moment-là.
Au début, nous nous contentons de répéter des slogans appris par cœur.
"Libérez les ados, libérez les terminales."
"On travaillera à condition de ne pas se faire séquestrer".
"Rendez-nous nos vacances de Noël". Car oui, le proviseur a demandé aux parents qu'on passe Noël à l'internat.
Mais plus les minutes passent, plus le ton monte. Je ne sais pas si le proviseur nous entend, ni même s'il est présent ce soir.
Mais j'en m'en fiche, il me mérite.
Je vois quelques personnes commencer à huer, et certains -Nolann et Maxime, ces idiots - commencent à crier des insultes et à enchaîner les gestes grossiers.
Je sais bien que cela va bien au-delà de tout ce que nous nous sommes dis, mais lorsque je pense au proviseur je sens la colère monter en moi aussi.
Après tout qu'il aille se faire foutre.
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