Chapitre 7 : La Ferme de Lucifer
Son épée translucide posée pointe vers le sol, Barbatos considéra les Enfers, en contre-bas. La colline sur laquelle il s'était perché n'était pas bien haute, mais au moins lui donnait-elle une vue dégagée sur la Ferme. Grande, elle faisait la taille d'un petit village, avec ses bâtisses noires à un seul étage. Dans une cour intérieure, il distinguait des silhouettes sombres naviguant parmi d'autres, bien plus petites.
Les Alps, selon Rika, était les elfes noirs chargés par Lucifer d'élever et surveiller les nouvelles Némésis. Cette Ferme-ci se chargeait des enfants entre dix et quinze ans, avant de les transférer dans une structure bien plus fermée pour la fin de l'adolescence. L'endoctrinement commençait à la « Couveuse », la première Ferme, pour ceux de zéro à dix ans.
-Tu peux me dire pourquoi on nous envoie en éclaireurs ?
Hell, qui était parvenue à enfiler les pièces de son armure, considérait les lieux sombres, sinistre. Elle n'aimait pas non plus ce que dégageait cette Ferme. Une impression d'esclavagisme, d'embrigadement intellectuel suffisamment fort pour créer des Némésis au service du monstre des Enfers, Lucifer.
-Je suis l'éclaireur, d'habitude. Comme nous sommes menottés, tu dois venir avec moi.
-Génial. Je m'en réjouis d'avance.
Il donna une tape sur les fesses de la métamorphe, qui poussa un glapissement indigné en lui retournant une gifle mémorable.
-Tu vois ? Lança-t-il en ignorant la douleur à sa joue. Il y a toujours pire.
-Me faire tripoter par toi est toujours pire.
-Allez, viens. Souviens-toi de ne pas faire de bruit. S'ils ne nous voient pas, ils peuvent tout de même nous entendre.
Elle hocha la tête. Il était capable d'avoir une patte de velours dans les missions d'infiltrations, mais il se demandait si elle en serait capable. Grâce aux anneaux d'invisibilité, les même utilisés par Nergal pour aller chercher Blanche, ils étaient certains de se faire discrets. Du moment qu'un Prince démoniaque ne se trouvait pas dans les parages, car ils étaient capable de voir au travers du voile.
Ils dévalèrent la pente. Hell lui avait déjà demandé pourquoi il gardait son épée en mainPeu désireux de lui révéler l'un de ses multiples secrets, il ne lui avait pas répondu. En vérité, cette relique du passé était la seule à pouvoir dissimuler sa présence aux yeux des anges. Le Duc de Bathin se trouvant forcement dans les parages, il avait préféré jouer la carte de la sécurité.
Les cuisines comportaient une grande fenêtre, pour évacuer la fumée des fours à bois. Ils passèrent par là pour entrer dans la ferme. Ils se retrouvèrent dans la cuisine, au milieu de cinq alps, occupés à préparer le repas autour d'un grand chaudron. Leur peau grisâtre détonnait avec leurs yeux rouges, leur conférant un teint cadavérique. Néanmoins, ils et elles étaient musclés, en plus de la magie planant sur eux. Des cuistots taillés pour le combat. Barbatos n'aimait pas ça.
Il fit signe à Hell, dont la chevelure rousse ressortait dans la pièce sombre. Heureusement qu'ils portaient les anneaux d'invisibilité, sinon elle aurait été immédiatement repérée. Un vrai phare.
Une porte donnait sur un dortoir gigantesque, une autre sur la réserve de nourriture. La dernière permettait d'aller dans la cour intérieure, peuplée de cibles d'entraînements, de poules, de cochons, et d'enfant aux yeux morts. Inexpressifs.
Des prunelles d'un noir d'encre, fixés sur leur collègue, sans un sourire, sans un froncement de sourcil. Tels des marionnettes, ils suivaient les ordres des elfes, vêtus de longues tuniques noires, brodées de rouge sang. Ils s'alignaient, levaient les poings, regardaient les cieux. Et la brume envahissait le sol, parcourut de soubresauts. Les Ancêtres d'une cinquantaine de Némésis prenaient forme, lentement, sûrement. Leur front se perlait de sueur, leur visage se contractait sous la concentration, faisant réaliser soudain une chose à Barbatos : ce qui était d'une facilité extrême pour Rika et Silke, était une véritable épreuve pour d'autres.
Une fille de quatorze ans tomba soudain à genoux, des larmes de sang roulant le long de ses joues pales. Les alps vinrent tout de suite à elle, sans un mot, ils regardèrent si elle allait bien. Puis ils la remirent sur pied, pour la laisser sur place. Silencieuse, elle releva les yeux vers les cieux, prête à reprendre son effort... Et croisa ceux de Barbatos.
L'espace d'un instant, le néant parut l'engloutir, tant ces prunelles noires étaient insondables. Puis elle ouvrit la bouche, le doigt pointé vers lui.
-Ennemi, fit-elle platement.
Toutes les autres Némésis tournèrent la tête vers eux, avec la synchronisation de pantins cauchemardesques.
*
Svenn avait déjà eu quelques mauvaises surprises en se réveillant. Dont l'une avait été de se retrouver attaché à un chevalet de torture, avec Lucifer à son chevet. Mais là... Il avait l'impression d'être complètement à côté de la plaque.
Assis sur une chaise, en plein milieu d'une pièce d'un blanc immaculé, il avait les bras ramenés en arrière... Attachés aux barreaux d'une chaise très inconfortable. Ses jambes avaient subi le même sort. Mal à l'aise, il regarda devant lui, cherchant à comprendre comment il en était arrivé là. Fergus était venu le voir. Ils avaient un peu discuté de tout et de rien... Puis le trou noir.
Un frisson glacé remonta le long de son dos. Que lui arrivait-il, encore ? Il en avait ras la casquette des coups fourrés ! Que se passait-il !?
-Tu es bien réveillé, Svenn ?
En entendant la voix glaciale, il tourna la tête... Et serait tombé à la renverse s'il n'avait pas été aussi bien ligoté. Silke l'observait avec des yeux accusateurs. En sous-vêtements. Habillée d'un soutien-gorge à balconnet noir et d'un boxer assortit, les deux rehaussés d'une ficelle blanche venant faire un nœud délicat, elle était à tomber. Ses jambes fines, ses hanches accueillante, son ventre, ses seins généraux... Tout s'offrait à sa vue, menaçant de lui faire perdre le peu de neurones en sa possession. Il se détourna, rouge pivoine, les yeux écarquillés. Il était en train de faire un rêve sacrément réaliste !
-Tu ne rêves pas, crétin.
-C'est ce que tu dirais dans un de mes fantasmes.
Il y eu un silence. Puis une odeur douce envahit ses narines, pleine de sensualité. Silke venait de poser une main sur le dossier de la chaise, l'autre sur sa hanche dénudée. Sa poitrine se trouva juste sous son nez, jusqu'à ce qu'elle mette son visage à la hauteur du sien. Il tomba alors sur son air narquois.
-Alors comme ça tu fantasmes sur moi, mon petit Svenn ? Ça va rendre ma vengeance d'autant plus délectable.
Il émit un glapissement de fillette quand elle posa les mains sur son torse... Pour déchirer son t-shirt en deux, le mettant à nue jusqu'à la taille. Elle émit une sorte de ronronnement laissant glisser ses doigts le long de sa peau, de ses pectoraux, jusqu'à ses abdominaux... Pour s'arrêter à la ceinture. Non de... Le souffle court, Svenn ne pouvait pas empêcher son sexe de devenir dur, et de protester vigoureusement contre l'étroitesse de son boxer. Il pria pour qu'elle ne le voit pas. Mais elle dut le sentir.
Car malheureusement pour lui, elle s'installa à califourchon sur lui. Les jambes largement écartées, ses genoux reposant de part et d'autre des hanches de Svenn, elle croisa les mains derrière la nuque de jeune loup. Ses lèvres étaient à un cheveu des siennes, son soutien-gorge effleurait sa peau.
-Heu... balbutia-t-il, rouge comme une tomate.
-Je sais que tu n'as pas touché Faith de cette façon, murmura-t-elle à son oreille, son index venant tracer la ligne entre ses pectoraux. Mais tu n'imagines pas... à quel point j'ai été jalouse qu'elle le prétende.
Le doigt passa entre ses abdominaux, avant de rencontrer sa ceinture.
-T... Toi, jalouse ?
Sa main se posa sur la bosse de son pénis, le faisant sursauter. Non de... Silke lui mordilla l'oreille, l'empêchant de raisonner correctement. Bordel... Il se passait quoi, là !?
-Mords moi, souffla la Némésis.
Hein ?
Cela lui fit l'effet d'une douche froide, le rapatriant brutalement sur terre. Il était tout sauf dans un rêve. Dans son rêve, elle n'aurait même pas abordé le sujet. Il n'aurait pas existé.
Silke s'éloigna juste assez de lui, pour pouvoir le fixer de ses prunelles noires. Elle avait perçu sa soudaine tension.
-Non.
C'était irrévocable. Pourtant, la jeune femme glissa une main dans ses cheveux blonds, avec un sourire carrément moqueur. Un faux semblant. Il la connaissait assez pour savoir quand elle était furieuse.
-Tu veux donc dire que non seulement on ne couche pas ensemble, mais en plus tu refuses de me mordre ?
Il crut perdre trois ans de sa vie lorsqu'elle descendit la braguette de son pantalon d'un air autoritaire.
-Mais que ce que tu fiches !? S'exclama-t-il soudain, furieux. Pourquoi veux-tu que je te morde !? Ça n'a rien d'érotique, ça n'a rien d'agréable, c'est juste une chose hideuse que je suis contraint de faire pour survivre !
Elle ne cilla même pas face à sa réaction. Bien au contraire, elle lui offrit un petit sourire sadique.
-Et moi, ton amie, je n'ai pas le droit de t'aider ?
-Ce n'est pas...
Le souffle coupé, il fut incapable de finir sa phrase. Les doigts de Silke venaient d'envelopper son pénis, sous son boxer, dans une poigne d'une chaleur quasi-insoutenable. Une myriade de sensations s'abattit sur lui, l'empêchant de penser. Par les dieux...
-Silke...
-Je sais que tu as besoin de me mordre, susurra-t-elle à son oreille, sa main remontant lentement le long de son sexe, dure comme de la pierre. C'est ce qui s'est passé, non ? Aux Arènes... Tu as failli plonger... tes dents en moi.
Ses crocs choisirent ce moment pour se manifester. Il se mordit la lèvre inférieure, afin d'étouffer un gémissement de plaisir. Sa paume allait et venait doucement le long de son pénis, le rendant incapable de penser. Pour lui qui n'avait aucune expérience avec les femmes, se retrouver dans cette situation menaçait de lui faire perdre la raison. Surtout si c'était elle. Elle qui le touchait, qui le tenait dans le creux de sa main. C'étaient ses seins qui se pressaient contre son torse, son souffle rauque qui caressait son cou. Oh, par tous les dieux... C'était si bon...
Elle voulait lui faire perdre la tête, afin de le forcer à la mordre. Elle risquait bien d'y parvenir. Il commençait à avoir une furieuse envie de suivre ses gestes avec ses hanches, en dépit de ses liens.
-Je... Refuse... Je... Tiens trop à toi, pour t'infliger ça... Silke...
Elle s'arrêta net. Pour la première fois depuis son réveil, elle lui parut indécise, les sourcils froncés. Mais finalement, elle reprit un air démoniaque. Non de... Elle était encore plus excitante ainsi !
-Malheureusement pour toi, je tiens trop à toi pour te laisser mourir.
Hein ? Non, elle n'allait tout de même pas... Elle l'attrapa par la nuque, pour un baiser dévastateur. Au goût de sang. Celui le sien. Le souffle coupé, jouant de sa langue autour de celle de Silke, Svenn tira sur la corde lui entravant les poignets. Il regrettait de ne pouvoir s'en débarrasser pour la toucher. Pour plonger ses doigts dans ses cheveux, attraper ses fesses à pleines mains pour la plaquer contre lui, la renverser sur le sol...
Elle reprit ses mouvements autour de son sexe, sans jamais rompre leur baiser. Sous le joug d'un plaisir incontrôlable, il se mit à jouer des hanches, à la rechercher de plus encore. Elle passa la pointe de sa langue sur ses canines, il émit un grognement de protestation. Il voulait plus.... Il la voulait elle, entière, consentante ! Il voulait la toucher, la mordiller, la lécher, au lieu d'être le seul à recevoir. Mais elle ne l'entendait pas de cette oreille. Bien au contraire. Et lui, il était sur le point de rendre les armes. Il ne pourrait jamais... Il avait tant envie de la mordre !
Elle dut le sentir, car elle l'attira aussitôt au creux de son cou. Il voulut résister, vraiment. Il fit tout ce qu'il pouvait, mais cette maudite corde était bien plus résistante que la normale. Et sa main qui ne lui laissait aucun répit...
Ses lèvres se pressèrent contre la peau douce de Silke. Il pouvait sentir son pouls battre au travers, aussi affolé que le sien. C'était une invite impossible à ignorer. Ses crocs percèrent sa chair si tendre. Le sang afflua dans sa bouche, le cri de plaisir de Silke emplit ses oreilles. L'orgasme de la Némésis entraîna le sien, incontrôlable.
Pour la première fois depuis des jours, il fut incapable de penser.
*
Entendre les râles de plaisir, dans la pièce voisine, rendait mal à l'aise Holly. Certes, ils avaient l'air de bien s'amuser. Mais pourquoi donc était-elle obligée d'être là !? Fergus se trouvait avec elle, occupé à lire un livre, sifflotant presque. Nullement incommodé.
La vampire se passa une main sur le visage, épuisée nerveusement. Elle avait bien compris l'importance de la situation. Si Svenn ne buvait pas le sang de la jeune Silke, il mourrait. Or, il n'était pas du tout consentant, et c'était la raison pour laquelle le métamorphe était venu la chercher. Afin d'enseigner à la Némésis les petits trucs susceptibles de totalement faire craquer un vampire.
Mais ils avaient eu peur que ce dernier soit incapable de s'arrêter. D'où leur présence ici. Par tous les dieux, elle ne parlerait jamais de cette humiliante soirée ! Surtout que, bien malgré elle... Ses canines pointaient sur sa lèvre inférieure. L'odeur du sang emplissait ses narines, lui rappelant qu'elle n'avait rien bu depuis longtemps.
-Tout va bien ?
La demande, émanant de Fergus, la mortifia. Il ne quittait pas des yeux son livre. Heureusement.
-Oui... Heu... Au bruit, je dirais qu'il n'y a plus aucun risque. Vous devriez pouvoir continuer sans moi.
-Merci, madame Damon. Encore désolé pour le dérangement.
La vampire sortit des sous-sols d'Exil, le ventre noué. Elle avait soif. Elle qui se contrôlait de manière exemplaire, avait une grande envie de sang. Elle devait absolument rentrer chez elle. Au plus vite.
Mais on semblait vouloir lui compliquer la tâche. Sur le chemin du retour, elle croisa la route de Morténe, assis sous le chêne Freddy. Pourquoi ne dormait-il pas, celui-là !? En l'apercevant, il parut comprendre aussitôt que quelque chose n'allait pas.
-Madame Damon. Que se passe-t-il ?
Il était sur le point de la toucher ! Faisant un bond en arrière, Holly le fixa un instant, le souffle court. Elle pourrait en profiter. Elle pourrait le plaquer au sol, là, maintenant, et lui prendre ce qu'elle désirait tant. Elle pourrait...
-Ne m'approchez pas, siffla-t-elle en le dépassant, furieuse contre elle-même.
*
Dire que les choses avaient mal tourné était un euphémisme.
Tout autour de Barbatos, le chaos régnait. Le ciel était zébré des éclats de pouvoirs des alps, tandis qu'un déluge de brume recouvrait le sol, provenant soit des Némésis de la Ferme, soit de Rika, apparemment bien décidée à éradiquer tout le monde. Les elfes noirs faisaient face à Alastor, Nergal, Cassandra et Fergus, qui tentaient de rejoindre l'ange et Hell, aux prises avec l'arrière des troupes. Par bonheur, ils surveillaient la ferme au moment où la gamine psychopathe les avait repérés. Leur aide n'était pas de trop !
-Attention ! Cria-t-il à la métamorphe, en la soulevant littéralement du sol pour qu'elle évite une faux.
-Dans ton dos !
Elle lança une boule de feu par-dessus l'épaule de l'ange, qui sentit les poils de sa barbe naissante roussir. Un alp poussa un hurlement de douleur en se recroquevillant sur lui-même. Ce qui ne déstabilisa pas pour autant les autres. Avec toute l'énergie magique autour d'eux, Barbatos ne pouvait même pas prendre son envol, sous peine de se faire canarder.
Il ne savait plus depuis combien de temps ils luttaient. Hell et lui se battaient farouchement, se faisant de plus en plus confiance dans la bataille. Les blessures s'accumulaient sur le corps de l'ange, tandis que la métamorphe se régénérait quasiment instantanément. Plusieurs alps tombèrent, sans qu'ils n'en voient pour autant le bout. Rika faisait un carnage de son coté, mais ils étaient bien trop nombreux. Leur mission était un échec sur toute la ligne, tout ça parce qu'une Némésis avait percé le voile d'invisibilité ! Quelle plaie !
-Une ouverture ! Cria Hell.
Il repéra aussitôt la zone, que les alps n'avaient pas encore bloqué. Ils s'élancèrent pour l'atteindre... Et le visage du Duc de Bathin se matérialisa devant Barbatos. Il eut à peine le temps d'apercevoir son sourire cruel que le monde changeait brutalement.
Un toit d'ardoise apparut sous ses pieds, mais pas sous ceux de Hell, téléportée elle aussi. La métamorphe poussa un cri de surprise en tombant dans le vide... Entraînant l'ange au passage. Tiré par son poids, il atterrit rudement sur les tuiles aux bords aiguisés, s'arrêta in-extremis avant de chuter à son tour. Hell pendait au bout des menottes, suspendue des centaines de mètres au-dessus du sol. Ils se trouvaient au sommet d'une tour branlante, cernée par un désert rougeâtre. A plat ventre, avec l'impression qu'on lui arrachait l'épaule, l'ange prit une profonde inspiration. Bon. Les choses s'annonçaient mal.
-Barbatos ! Cria la métamorphe en s'agrippant à la chaîne des menottes. Que ce passe...
Il n'eut pas le temps de lui expliquer. Quelqu'un atterrit derrière lui, ses bottes faisant crisser les tuiles brisées. Il n'avait pas besoin d'entendre son rire moqueur pour reconnaitre Bathin. Par tous les emplumés des cieux ! Il avait fallu que ça arrive maintenant !
-Elle est jolie, ta copine, siffla l'ange déchu en plantant la pointe de son épée entre ses omoplates. Tu as décidé de passer le pas, à cause de ton tatouage ? Si prévisible... Je vais la tuer en première !
Non ! Pendue dans le vide, sur cette maudite tour démoniaque, Hell fixait l'ange déchu dans son dos, avec des yeux ronds. Barbatos serra les dents, les doigts crispés sur la garde de son épée. Il devait agir vite ! Déjà, il pouvait entendre le bruissement du vent infernal dans les plumes de Bathin, signe qu'il était sur le point de fondre sur Hell, tel un rapace sur sa proie. D'un mouvement vif, sa lame fendit l'air... Et trancha net la chaîne reliant les deux menottes. Séparée de lui, la métamorphe chuta avec un cri stupéfait. Le Duc sauta à sa suite, son rire de fou assoiffé de sang raisonnant dans les enfers. Non !
Barbatos déploya ses ailes, pour se lancer à leur suite. En dépit de sa déchéance, une chose n'avait pas changé : sa vitesse. De tous les anges des cieux, il avait toujours été le plus rapide. Il percuta Bathin une dizaine de mètres au-dessus du sol. En dessous, en plein milieu du paysage désertique, Hell s'était déjà posée, des flammes léchant son corps désormais nu.
-Ha ha ! Ricana le Duc en se retournant dans les airs. Tu t'es enfin décidé à combattre !?
-La ferme !
Il fendit l'air de son épée translucide. Bathin para avec facilité, avant d'enchaîner une série de coups violents. Les dents serrées, Barbatos répliqua coups pour coups, sans parvenir à prendre le dessus. Merde ! Il n'allait jamais s'en sortir à ce rythme ! Et dire que le combat dans les airs avait été son point fort...
-Tu n'es plus qu'un déchet ! Tu es devenu la honte des anges ! Tout ça à cause de Métatron !
-Je vais te réduire en miettes !
Il évita l'un des coups du duc, rabattit ses ailes pour le percuter à nouveau. Il tendit le bras, pour saisir l'une de celle de Bathin. Il tira violemment sur les plumes, déclenchant un hurlement de douleur chez son adversaire. Puis ils tombèrent vers le sol, entraînés par leur poids et l'absence de battements d'ailes du déchu. Leur atterrissage fut violent. Ils projetèrent une nuée de poussière rougeâtre autour d'eux, tels des comètes percutant la terre. Barbatos ne lui laissa pas le temps de se remettre. A califourchon sur lui, il saisit Bathin par la gorge, pour lui décocher un coup de poings à lui décrocher la mâchoire. Puis un autre. Et encore un, si violent que le sang tacha ses phalanges.
Une roulement de tonnerre raisonna au-dessus d'eux. Il n'eut pas l'occasion de se méfier, qu'une vive brûlure incendia son dos. Avec un rugissement de douleur, l'ange se redressa d'un bond, courbé en deux. Par tous les dieux ! Qu'est-ce qui venait de... Un éclair s'abattit tout près de lui, lui faisant comprendre. Il venait de diriger un éclair contre lui, le salopard !
-Tu as l'air bien surpris, ricana Bathin en se remettant sur pieds, le visage en sang.
Pourtant, son nez se remettait déjà dans son axe, ses plaies se refermaient, bien plus vite que celles de Barbatos. Un autre éclair le choisit pour cible, le faisant mettre un genou à terre, terrassé par la douleur. L'odeur de chair brulé emplissait ses narines.
-C'est petit, Bathin, cracha-t-il, en tentant de se remettre debout.
Un troisième l'en empêchant, la douleur lui coupant le souffle. Ses nerfs durent être touchés, car il se trouva incapable de bouger. Agenouillé, les mains au sol, il luttait pour respirer, mais ne parvenait plus à se relever. Bordel de... Tout autour d'eux, les éléments se déchaînaient, le tonnerre grondait, régit par la colère du Duc. Ce dernier l'attrapa par les cheveux, le forçant à le regarder.
-Contemple la puissance des anges! Rien n'est « petit », quand on est né avec. Toi qui a perdu ta grandeur, tu devrais le savoir !
Il saisit la base d'une de ses ailes, avec un rire glaçant. Cloué sur place, Barbatos eut un hoquet de stupeur en le sentant tirer. De plus en plus fort, jusqu'à ce qu'il ressente une déchirure dans son dos. Non... Le sang coula le long de sa peau brûlée, alors qu'il ne pouvait plus bouger. Il allait lui arracher les ailes ! Il voulait le condamner à rester sur terre, pour le restant de ses jours ! Non ! Non, il ne pouvait pas le laisser faire ça ! Il ne...
Une énergie l'envahit soudain, jaillit de nulle part, lui donnant la force de bander ses muscles. Dans un sursaut, il se retournant avec un rugissement de rage pure, prêt à ouvrir en deux la gorge de Bathin. Stupéfait de le voir capable de bouger, le Duc fit un bond en arrière... Et disparut, emportant avec lui éclair, nuage, tonnerre. Mais lui laissant la douleur
Barbatos retomba à genoux, haletant de souffrance. L'énergie inconnue avait déjà quitté son corps. Il perdit connaissance, dans une odeur de sang et de chair calcinée.
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