Chapitre 15 : Séraphin contre Séraphin

Incapable de dormir, Rika buvait un chocolat chaud, perchée sur les hauts remparts d'Exil. En contre bas, l'ancien camp de réfugié, devenu à son tour une petite forteresse grâce aux talents de Blanche, était plein de vie. Même à cette heure de la nuit. Une ambiance pré-apocalyptique planait sur les lieux, sans que personne ne puisse déterminer la date exacte des hostilités. C'était cela, le pire. L'attente.

Elle jeta un coup d'œil à sa sœur. Exténuée, elle c'était roulée en boule sur l'un des bancs longeant les remparts. Elle y était peut être allée un peu fort. Néanmoins, c'est pour son bien, se justifia-t-elle en avalant une gorgée de chocolat. Nergal apparut au bout d'un moment. Il la salua d'un mouvement de tête, avant de prendre la Némésis endormit dans ses bras, pour la ramener chez elle.

Chez elle. Elle était heureuse de voir sa sœur avec un « chez elle ». Peu d'entre elles pouvaient s'en targuer.

-Tu devrais dormir dans un lit, Rika.

Elle sursauta. Bon sang ! En dépit de sa carrure d'ours, ce Ferguson se déplaçait avec la discrétion d'un fantôme ! Il sauta sur le rempart à son coté, nullement gêné par son attitude glaciale.

-J'ai plus l'habitude de la rudesse du sol.

-Cela n'exclut pas le douceur d'un matelas. Profites-en tant que tu peux en bénéficier.

-Arrête de vouloir changer mes habitudes, Fergus.

-J'essaie simplement d'être aimable.

-Garde ta pitié pour toi.

Elle sentit le poids de son regard sur elle. Cela la mit mal à l'aise.

-Pitié ? Pour quoi faire  ?

-Je n'en sais rien. Je...

Rika s'arrêta nette. En contre-bas, prés des portes des réfugiés, il y avait du mouvement. Le métamorphe aussi l'avait vu. L'instant suivant, il déployait des ailes de cuir rouge, spectaculaires. Il haussa un sourcil à son adresse.

-Aux dernières nouvelles, tu ne peux pas voler, non ?

Sans piper mot, elle accepta de prendre sa main. Il l'attira contre lui, avant de se jeter dans le vide. Tout ce qui l'empêcha de hurler de surprise et de peur fut sa discipline de soldat. Néanmoins, elle ne put retenir ses ongles de s'enfoncer dans les épaules de Fergus. Il eut la courtoisie de ne rien dire, même lorsqu'il se posa au milieu des soldats d'Exil, où elle le lâcha avec soulagement. Les airs n'étaient vraiment pas son domaine. En constatant qu'il gardait une main sur sa hanche, afin de la soutenir, elle se dégagea. Elle n'avait besoin de personne.

Surtout dans un moment pareil.

Cernée par trois Nergal, les arcs de dizaines de réfugiés elfiques pointés sur elle, une Némésis la fixait de ses grands yeux noirs, inexpressive.

-Je ne suis pas venue en ennemi, déclara-t-elle à Rika. Je suis simplement venue vous voir.

-Vous auriez dû l'exécuter à vue, lança-t-elle aux Nergals.

Les différents clones du démon dardèrent sur elle un regard dur.

-Elle n'a pas appelé ses Ancêtres. En outre, elle a à peine dix sept ans.

-Il n'y a pas d'âge pour le meurtre.

Ils n'avaient donc rien retenu de ses avertissements ? Cette gamine aurait pu causer de redoutables dégâts, si elle avait voulu !

-Ne vous en faites pas. Je ne me risquerais certainement pas à vous attaquer, seule de surcroît, en sachant quelles Némésis se trouvent ici.

Un point pour elle. Elle la fixait, avec un air de fascination qui ne lui plaisait pas particulièrement. Non loin de là, Fergus s'adossa tranquillement à l'une des maisons de pierre, le clair de lune éclairant crûment la scène.

-Je me nomme Macha, déclara la Némésis. Et si je suis ici, c'est parce que j'ai eu l'honneur de servir sous vos ordres, lors de la Bataille des Géants de Pierre.

-Ça me fait une belle jambe.

-Je suis venue vous demander les raisons de votre trahison. Nous nous demandons toutes pourquoi vous vous êtes retournée contre nous.

Cela surpris tout le monde dans l'assistance. Certains la regardèrent, elle, en attente de sa réponse. Génial. Ce n'était vraiment l'heure pour une explication de texte. Rika s'approcha de la dénommée Macha, sur le qui-vive. A la moindre forme de brume importune, elle l'ouvrirait comme une huître.

-Les raisons ? Je ne vois pas pourquoi je les fournirais à une potentielle espionne.

Macha ne frémit pas. Elle prit une profonde inspiration, carra les épaules.

-Je ne comprends pas à quoi sert cette rébellion. Nous sommes maudites. Nous ne pouvons en aucun cas tuer Lucifer. Cela nous est impossible. Nous le savons toutes.

Une pointe de désespoir ? Oui. En dépit de l'embrigadement, Rika parvint à desceller cette note, si importante en l'instant présent. Elle se rapprocha de Macha, l'air impénétrable.

-Tu veux savoir de quoi il en retourne ? Connais-tu le mot liberté ?

Macha fronça les sourcils, l'air perdu.

-Liberté ?

-Ce sera tout. Retournes chez toi et fais passer ce mot aux tiennes. Peut être l'une d'entre vous comprendra-t-elle.

Faisant signe au démon, qui dut recevoir l'accord d'Alastor, quelque part en Exil, Rika laissa la Némésis partir. Elle allait peut être devoir revoir ses plans.

*

Hell avait encore vu une tranche du passé de Barbatos. Violente. Sanglante. Une dispute entre Métatron et lui. Elle n'avait pas compris l'origine de leur différent, mais elle n'avait jamais assisté à un tel combat. Séraphin contre Séraphin, êtres divins engagés dans un combat à mort, avec une telle rage que cela avait fait trembler cieux et terre. Ils auraient dévasté le Paradis, si le Créateur n'était pas intervenu pour les arrêter.

En se réveillant, écœurée, Hell aurait volontiers tapé sur quelqu'un. Car selon toute vraisemblance, voilà comment c'était fini leur incartade : Métatron était resté aux cieux. Et Barbatos, dont les mains étaient couvertes du sang des innombrables ennemis des anges, avait été déchu. Mais pourquoi c'étaient-ils disputés ? Qu'est-ce qui avait bien pu les conduire à un tel stade de fureur ?

Toutes ces questions s'envolèrent, lorsqu'elle se découvrit seule dans son lit. Aux draps imbibés de sang. Son cœur manqua un battement, elle se releva d'un bond. Que ce passait-il !? Barbatos... Où se trouvait Barbatos !? Que c'était-il passé dans son sommeil !?

Repoussant la couverture poisseuse, elle vit d'autres traces sur le sol, conduisant droit à la salle de bain. En un clin d'œil, elle s'y retrouva, la porte allant cogner contre le lavabo. Debout sous le jet de douche, dos à elle, l'ange s'appuyait contre le mur, laissant l'eau ruisseler le long de son corps. Elle retombait écarlate sur la mosaïque du sol. Car le tatouage si étrange de son dos semblait à présent découpé dans sa chair, comme si l'encre s'enfonçait dans sa peau, le transformant en une scarification à vif.

Cela devait faire horriblement mal. Il ne l'entendit même pas s'approcher. En vérité, elle découvrit qu'il avait les yeux fermés, sourcils froncés. Ses doigts étaient littéralement enfoncés dans le carrelage du mur, ses bras tremblaient tant il luttait contre la souffrance.

-Ça va passer, ne t'en fais pas.

Il avait murmuré ces mots d'une voix tendue. Cela lui fit reprendre ses esprits. Elle n'allait pas le laisser dans cet état. Hors de question. Elle avait la capacité de soigner. Ce n'était pas pour le laisser tomber à un moment pareil !

Elle parvint à se glisser sous son bras, pour se retrouver entre le mur et lui. L'eau était glacée, faite pour soulager ses plaies. Il entrouvrit les paupières, ses iris d'un bleu surnaturel la transperçant de part en part.

-Ne gaspilles pas tes dons pour moi. Il doit y avoir un paquet d'hypocrites, là dehors, qui désirent en tirer profit.

-Je suis la seule à décider de ce que je fais de mes pouvoirs, Barbatos.

Dressée sur la pointe des pieds, elle l'embrassa à pleine bouche. Elle trouva instinctivement la douleur en lui, parvint à la prendre. Elle l'atténua, doucement. Le corps de l'ange se décontracta contre le sien, jusqu'à ce qu'il entrouvre les lèvres, lui laissant le champ libre pour autre chose. Mais même si leur baiser prit une tournure plus intense, elle ne s'arrêta pas. Elle combattit la douleur, la faisant complètement disparaître. Cela l'exténua, à tel point que l'ange dut la soutenir, à l'instant où ses jambes se dérobaient sous elle. Il était de nouveau frais comme un gardon.

-Merci, murmura-t-il à son oreille.

-Pas de quoi, marmonna-t-elle.

Une sonnerie de téléphone retentit dans la chambre. Sans la lâcher, il retourna dans la pièce, attrapa son appareil, avant de faire la grimace face au lit. Il s'assit alors dans un fauteuil en osier, la métamorphe assise sur ses genoux, un bras autour de sa taille. Elle n'était pas si fatiguée que ça, tout de même ! Elle lui tapa sur les doigts alors qu'il décrochait, pour aller s'attaquer à ses draps sanglants.

-Tu as des nouvelles, Al ? Mmh... Oui. Emprisonné, dis-tu ? Bon. On a les informations ? Oui... Je sais, tu me hais. Mais il est tout à fait capable.

De quoi parlait-il ? Intriguée, elle l'observa tout en défaisant son lit. Elle ne parvenait pas tout à fait à comprendre, mais apparemment, les nouvelles n'étaient pas bonnes.

-Le compte à rebours a commencé, donc.

En entendant ces mots, elle se redressa, sourcils froncés. Mais l'ange lui fit un clin d'œil, avant de raccrocher.

-Tu sais, tu devrais t'habiller en soubrette sexy, pour faire ce genre de chose.

-J'ai une tête de soubrette ? Dis-moi plutôt ce que c'est que cette histoire de compte à rebours.

-L'attaque de Lucifer est pour cet après-midi.

Elle lâcha aussitôt les draps, pour se ruer vers son armure, posée dans un coin de la chambre.

-Et pour ton tatouage ? Tu peux me dire de quoi il en retourne ? Tu te vides souvent de ton sang, de cette façon ?

-Oh, ça ? Ce n'est rien. Je réglerais le problème ce soir.

En se retournant, elle découvrit qu'il avait déjà enfilé sa tenue de la veille, l'air parfaitement décontracté. Il mentait. C'était évident, il mentait, et pour un Séraphin, c'était une honte. Bon, cette nuit aussi était une honte pour un être divin, néanmoins, ça, elle avait beaucoup aimé.

-Tu es prête ?

-Juste mon épée, et je suis prête a...

Elle avait à peine posée le doigt sur le pommeau de sa lame, qu'elle tombait à genoux dans le Hall de la Souffrance, la main de Barbatos sur son épaule. Bon sang !

-Depuis quand tu sais faire ça !? S'exclama-t-elle en se redressant, ahurit.

L'ange lui adressa un grand sourire radieux.

-Depuis toujours. Mais je ne pouvais plus le faire. Au fait, viens par là.

Il l'embrassa furtivement, une main sur sa nuque.Comme la veille, elle sentit son pouvoir glisser en elle, avec une intimité qui la laissa pantelante. Il rompit leur étreinte, son petit sourire en coin donnant un air de diablotin à son visage d'ange.

-Tu es terriblement sexy, quand tu gémis ainsi.

Elle devint certainement rouge pivoine. Cela ne s'arrangea pas, lorsqu'un toussotement tout sauf discret les poussèrent à se tourner vers le trône. Là, Alastor maintenait son frère sur le siège de bois sculpté, hilare. Fergus, lui, était livide de colère, les poings serrés à s'en faire blanchir les jointures.

-Soyez magnanime avec le petit Ferguson, lança le démon. Allez vous bécoter ailleurs.

*

Installé au milieu de sa cellule, Svenn prenait le temps de se reposer. Par chance, les sbires de Bathin avaient tout juste pris la peine de le désarmer, sans approfondir leur fouille. Il avait donc gardé les ordres... Et Potchi, en forme de fourmis, dissimulé sous ses vêtements, accompagné d'un stylo et d'un morceau de papier. Durant son emprisonnement, il avait eu le temps de rédiger son rapport à Barbatos, ou à n'importe qui d'autre se trouvant à Exil à ce moment là. Il avait ensuite envoyé le tout par le biais de Potchi, si efficace en mouette voyageuse.

Jusque là, les choses se déroulaient comme prévu. En revanche, il ne s'attendait pas à voir surgir dans les geôles une belle femme blonde, armée de pied en cap. Belliqueuse, de surcroît. S'il ne se trompait pas, il s'agissait de celle laissée dans le lit par le Duc de Bathin. Il ne s'attendait pas à la revoir avec un allure de guerrière, au vue de son hurlement strident de midinette.

-Toi, siffla-t-elle, profitant du vide des prisons autour d'eux. Tu viens d'Exil ?

-En quoi ça te regarde ?

Elle frappa sur les barreaux, furieuse.

-Réponds ! Qui sont tes parents !?

Ses parents ? Pourquoi diable s'intéressait-elle à une telle chose ? Ce n'était pas le moment de se poser toutes ces questions, toutefois. Il devait sortir d'ici. Selon les manuscrits de Lucifer, le Duc de Bathin devait partir de ce château dans la journée. En entendant le cliquetis d'une clef tournant dans une serrure, il fixa la femme, indécis. Elle ouvrit la porte, visiblement prête à le passer à tabac pour obtenir sa réponse.

Sans rire ? Ça allait être si simple ?

Elle l'empoigna par le devant de son t-shirt, avec une force incroyable.

-Dis-moi tout ! Ton père se nomme-t-il bien Vassili ? Si oui, pourquoi diable es-tu toujours de ce monde !?

Svenn profita de la montée d'adrénaline de la femme. Son poings s'enfonça dans son estomac, la prenant au dépourvu. Elle se courba en deux dans un hoquet de douleur, avant d'être terrassé par un coup à la mâchoire. Le loup n'attendit pas qu'elle s'écroule sur le sol pour se glisser hors de sa cellule, et inverser les rôles. Elle retrouva l'usage de la parole à l'instant où il tournait une deuxième fois la clé dans la serrure ancestrale.

-Tu... Frappes une femme... Tu n'as pas la galanterie de ton père...

Il lui adressa un clin d'œil.

-J'ai été en partie élevé par des démons. Ils savent parler aux femmes.

Il se détourna, content d'être parvenu si facilement à s'échapper. Néanmoins, il était mal placé pour faire ce genre de remarque. Lui qui était incapable de s'expliquer clairement à Silke, ni de se débarrasser de cette folle de Faith... Il devrait peut être envisager de réviser son comportement du quotidien, avec les femmes.

Arrivé dans la lumière du soleil infernal, il jeta un coup d'œil à sa montre. Midi. Il devait rentrer au plus tôt en Exil.

Attendez... Cette femme n'avait-elle pas prononcé le prénom de son père ?

*

Barbatos fixait l'horloge, lui aussi. L'heure tournait, inexorablement, et toujours aucune nouvelle de Svenn. Dans son message, il avait affirmé pouvoir revenir avant le début des affrontements. Il regrettait un peu de l'avoir mit dans une telle position. Et si Bathin le reconnaissait ? Et s'il décidait de le torturer, histoire de s'amuser un peu ? Si cela arrivait, il lui arracherait son âme de ses propres mains !

Il quitta des yeux les aiguilles, pour aviser la situation. Tout le monde était sur le pied de guerre. Les enfants les plus fragiles avaient été mis en sécurité dans les profondeurs de la falaise, sous la surveillance de Holly Damon. Les autres étaient habillés pour le combat. Les réfugiés, aujourd'hui véritables soldats d'Exil, affûtaient leurs lames, les guérisseurs se reposaient, jusqu'à l'ultime moment. Lui aussi avait encore une chose à faire, avant de risquer une nouvelle fois sa vie.

Occupée à évaluer l'équilibre de son épée, Hell lui jeta un coup d'œil distrait à son approche. Assise sur les marches du Hall de la Souffrance, elle surveillait tous les déplacements des villageois.

-Je peux te demander une chose ? Lança-t-elle.

-Demande toujours.

-Pourquoi as-tu été déchu ?

Hum. La question qui fâchait. Il se laissa tomber sur une marche à coté d'elle, les coudes posés sur celle du dessus. Les jambes tendues devant lui, en une pose décontractée, il réfléchit à ses prochaines mots.

-Par stupidité.

Elle prit une pierre à aiguiser.

-C'est à dire ?

Il l'observa. De profil, elle paressait terriblement calme. A l'instar de tout guerrier millénaire. Bah. Il pouvait bien lui répondre.

-Je me suis disputé avec Métatron, lâcha-t-il en levant les yeux vers le ciel. Au sujet de Nergal et d'Alastor.

-Hein ?

Cette fois-ci, elle le fixa avec des yeux écarquillés.

-Tu m'as bien entendu. Tu sais, je n'ai pas beaucoup de qualités, mais je suis d'une indéfectible loyauté. Ces deux crétins de démons étaient déjà mes amis, à l'époque. Et Métatron m'a plus ou moins demandé de faire un choix : arrêter de voir la lie des Enfers, cette engeance qui n'était autre que notre ennemi à nous, les anges. Ou alors, j'encourrais son courroux pour trahison.

-C'est donc pour cela, votre combat si violent, murmura-t-elle, pour elle même.

Elle reprit son ouvrage, mais il avait parfaitement entendue. Elle... Elle avait dû voir un autre souvenir, sans le lui dire. A ses joues un peu pâles, elle avait certainement assisté à son affrontement avec Métatron. Ha... Si le Créateur ne l'avait pas arrêté, il l'aurait probablement tué, ce jour là. Même maintenant, l'envie le titiller. Ce sale lèche botte avait bien mérité la raclée qu'il lui avait mise. A ce souvenir, un mauvais sourire étira ses lèvres.

-Je l'ai presque tué. Mais le Vieux en a décidé autrement. Il a gardé Métatron à ses cotés. Quand à moi... Je fus punis pour ma violence et mon amitié contre nature. On m'arracha quatre de mes ailes, me faisant perdre par là les quatre sixièmes de mes pouvoirs. Puis je fus jeté sur Terre, entre la vie et la mort.

Par chance, d'une certaine façon, il avait mis un tel chaos dans les airs, que Nergal et Alastor étaient sortis des Enfers pour se renseigner sur le problème. Ils l'avaient trouvé avant les autres, pour le soigner et le remettre sur pied. C'était au commencement d'Exil, lui semblait-il. Les débuts étaient un peu flous dans son esprit. Il avait eu du mal à se remettre de la disparition de ses ailes.

-Étant donné mon manque de trahison flagrante, les cieux ont décidé de m'utiliser régulièrement pour des « missions de seconde chance ». Si je réussissais, on me promettait de remonter là haut, expliqua-t-il en pointant son doigts vers le ciel. Mais on me refusa à chaque fois ce retour. Au bout d'un moment, j'en ai eu marre. Ma dernière mission en date, c'était... Tiens, on me l'a attribuée lorsque tu m'as coulé par le fond.

-Je ne m'excuserais pas !

-Je ne m'excuserais pas non plus de t'avoir décapité en représailles.

Elle grommela une insulte, ce qui le fit sourire.

-Et c'était quoi, cette mission ?

Il tourna la tête vers elle. Elle était belle. Agressive, mais d'une beauté qui transcendait les ages. Hell plongea ses yeux dans les siens, avant de hausser les sourcils, dans l'attente d'une réponse.

-Tuer les Némésis.

-Quoi !?

Un sourire amusé étira ses lèvres. Hell, en revanche, paressait outrée.

-Quand j'ai compris de quoi il en retournait réellement, je leur ai dit d'aller voir ailleurs si j'y étais. Ils n'ont pas vraiment... Apprécié. C'est pourquoi j'évitais précautionneusement les anges, ces derniers temps. Je pensais que Métatron me cherchait pour me dire mes quatre vérités, version mise à mort.

-Quel sale con, cet emplumé ! S'exclama-t-elle en levant le nez.

-Hé, Hell ? Pourquoi ton père t'a-t-il enchaîné ?

Le changement de sujet parut lui faire l'effet d'une douche froide. Toujours tête levée, il la vit déglutir nerveusement. Pourtant, il ne regretta pas sa question. Il voulait savoir. Il voulait aussi lui dire... Non. Il n'y parviendrait pas. Pourtant, s'il trouvait le courage de le faire...

-Disons que... Je n'étais pas très docile.

-Ça, j'avais remarqué.

-Et que je suis un être exceptionnel.

Il manqua glisser de sa marche d'escalier, avant d'éclater de rire.

-Hé ben ! C'est pas la modestie qui t'étouffe, toi !

-Barbatos ! S'exclama-t-elle en baissant la tête vers lui. Ce n'est pas...

-Oh, allez, ne soit pas gênée, lâcha-t-il en glissant une main derrière sa nuque. Moi, je suis heureux de t'avoir rencontré.

-Hein ?

Son souffle se perdit contre les lèvres du Séraphin.

-J'ai encore envie de te faire l'amour, grommela-t-il.

-Alors vas-y...

-En plein milieu du village ? Petite cochonne.

-Hein ? Non, ce n'est pas ce que je voulais...

Une main enserra le crane de Barbatos, le faisant instantanément s'immobiliser. Aïe, Aïe...

-Garde ton énergie pour le combat, sale tête de piaf, gronda Alastor, avec un sourire démoniaque. Ce n'est pas le moment de se disperser.

-Je fais ce que je...

-Il n'a pas tort.

Il se tourna vers Hell, dont le petit haussement d'épaule contrit le désespéra.

-Une fois que nous sommes lancés, tu sais bien qu'il nous faut un moment avant de... Heu...Disons que la bataille risque de commencer avant que nous aillons finis.

-Mouais. Tu as certainement rai...

-ALERTE !

Le hurlement d'une sentinelle le fit se remettre sur pieds d'un bond. Il n'eut pas besoin de bouger pour savoir de quoi il en retournait. Car dans le ciel, surgissant de nul part, des boules noirs fusaient, catapultées des profondeurs de la forêt. Les parasites infernaux !

Certainement prêt depuis des heures à intervenir, un énorme dragon rouge fendit l'air. Ses crocs se plantèrent dans l'une des créatures, tandis que sa queue en frappait une autre, la renvoyant au loin. A coté de Barbatos, la température monta en flèche. La seconde suivante, l'oiseau de feu qu'était Hell rejoignait son frère, réduisant en cendres les autres parasites. Le vent balaya leurs restes, plongeant de nouveau les alentours dans un lourd silence.

Le Séraphin prit une profonde inspiration. Les hostilités avaient commencé. Lucifer avait bel et bien décidé de les raser de la carte. Et toujours pas la moindre trace de Svenn.





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