025Mph

« Sérieux Jungkook, tu devrais arrêter cette merde...
—J'ai essayé, je te signale. Mon corps se met à faire des trucs chelous.
—Ouais, et plus tu continuera d'en prendre plus ton truc fera des trucs chelous le jour où tu décidera vraiment d'arrêter. C'est normal que tu sois pas bien durant un laps de temps ! Sevrage, allô !
— Clairement, c'est pas le moment pour moi de me mettre ça en soucis sur le dos en plus de ce que j'ai déjà. »

Jungkook tira avec ses dents pour tirer le garrot qu'il venait de se faire au-dessus du coude, puis il inséra l'aiguille dans son bras, réprimant une grimace puis une expression de jouissance, se mordant doucement la lèvre, les yeux clos.

Shin lança un son désapprobateur avant de tirer sur son joint. Et alors que le liquide s'introduisait lentement dans le corps de Jungkook, celui-ci regarda son ami.

« D'ailleurs je ne vais pas rester ici plus longtemps... Ça tourne au vinaigre et je veux pas te causer de soucis.
—Et tu comptes dormir où ?
—Peu importe... Éventuellement si tu veux bien me laisser la garde de ta Chevrolet rafistolée, je dormirai dedans.
—T'as cru que j'allais te laisser ma ponette ?
—Arrête de l'appeler comme ça, ça réduit considérablement son charisme.
—T'as intérêt de me la ramener en un seul morceau quand tout ça sera terminé. Je comptais la revendre.
—Promis, Shin. »

Il retira alors l'aiguille de son bras et relâcha la garrot.

«Tu passes une dernière nuit ici, au chaud, quand même ?
—De ce que j'ai compris, il me reste 2 jours tranquilles, mais je préfère prendre un peu de marge.
— Et tu veux pas m'en parler ? Parce que je t'avoue que ça fait flipper quand on t'entend parler et qu'on connait pas tout.
—Ahah, si je t'en parlais ça te ferait encore plus flipper! Mais je te dois bien ça, au moins pour que tu acceptes de faire attention les prochaines semaines.
— Ok, déballe »

Alors Jungkook lui raconta tout, du moins tous les éléments importants à sa compréhension, alors que le joint circulait maintenant entre leurs doigts.

«En vrai ça craint de ouf... Tu pense réellement qu'il existe une fin heureuse à toute cette merde ? Je veux dire... Putain, elle a prit le contrôle de la Kkangpae t'as petite copine, ça déconne pas... Si elle t'en veut personnellement, en plus...
—Je suis pas sûre qu'il y ait une fin heureuse pour moi, mais je peux pas me barrer. Je veux plus fuir.
— Comme quoi les gens changent, ahah ! D'ailleurs en parlant de changement, t'as vu Tae, maintenant ?
— Quoi Tae ?
— Va te balader à Gangnam et lève les yeux sur les panneaux publicitaires, tu comprendras! Il est mannequin maintenant, ou model, je sais pas trop, mais en tout cas, sa tronche apparaît en gros, maintenant!. »

Jungkook sourit doucement. Qu'on lui apprenne que Tae' avait arrêté la prostitution pour se trouver quelque chose de plus réglo' était la plus bonne nouvelle qu'il aurait put espérer de la soirée. Quelque chose lui disait que Jimin n'était pas étranger à ce changement radical, et il lui formula un remerciement silencieux qui ne pouvait l'atteindre.

« Bon, faisons un récap': Tu veux toujours trouver la vérité derrière tout ça ?
—Si je l'expose à la Kkangpae et pas seulement à elle et que tous se rendent à l'évidence, alors elle n'aura plus de pouvoir là dedans, elle sera obligé de me laisser tranquille, donc oui.
—Okay. Et bah bonne chance, parce que là ça me parait light ton début d'indice.
—Quel début d'indice ?
—Non, j'avoue, t'as rien. »

Jungkook profita de sa dernière soirée à la chaleur d'une habitation, appréciant la façon que son ami avait de dédramatiser la situation, de parvenir à lui en faire rire. Il savoura sa dernière nuit dans quelque chose d'aussi confortable que l'étroit canapé du mécanicien.Lorsque le matin arriva et que le soleil vint laper le visage des deux hommes, Jungkook se réveilla doucement, et partit prendre une douche.

Les aurevoirs furent assez longs. Shin lui offrit tout un sac d'herbe, sous prétexte que pour ralentir l'héro' rien de mieux qu'un peu d'herbe, ce qui amena un nouveau sourire sur les lèvres de l'ex-transporteur. Puis il lui donna les clefs de sa "ponette".

Lorsque Jungkook posa à nouveau les yeux sur cette voiture, il se rappela à quel point c'était du gâchis de l'appeler ainsi. C'était comme appeler un cheval de course "gropoutou". Il remercia néanmoins son ami une dernière fois, lui donnant un numéro de téléphone sur lequel le contacter en cas de soucis majeur, puis disparut à bord de la voiture vrombissante. Un sourire étira les lèvres de Jungkook alors qu'il appuya sur la pédale de droite. Les moteurs trafiqués de Shin étaient réellement les meilleurs, quand bien même il avait toujours refusé qu'il touche au moteur original de sa Mercedes.

Et il devait bien avouer quelque chose: les sensations d'un moteur puissant qui gémissait à la moindre caresse de ses pieds sur les pédales était quelque chose qui lui avait putain de manquer. C'est lorsqu'il dévalait les rues et boulevards de Séoul à toute vitesse qu'un sourire sincère s'étira sur ses lèvres: il était de retour en Corée. Il était chez lui dans ces rues, finalement.

Ce jour-là, il ne savait pas réellement quoi faire. Alors c'est presque inconsciemment qu'il conduit la voiture jusqu'à l'immeuble de BigHit Entertainement. Il y passa la journée, avachi sur le volant, la voiture garée sur le bord de la route, scrutant les allers et venus de l'entrée, réfléchissant à la suite des événements.

En réalité, il n'avait pas la moindre idée de comment s'y prendre. Un premier pas serait de savoir quels éléments exactes poussaient la Kkangpae à penser qu'il était coupable. Tout ceci devait être dans les dossiers du bureau du Leader de la Kkangpae, au Q.G. Bonne nouvelle: il savait où ce bureau se trouvait. Mauvaise nouvelle : y accéder était à la limite du suicide.
Il grimaça à cette idée en tirant sur sa cigarette dont la fumée flotta à l'intérieur de l'habitacle dans un nuage léger qui n'avait nul espace pour s'échapper.

Lorsqu'il retourna son attention à l'entrée de l'immeuble, il aperçut deux silhouettes marchant côte à côte, descendant les quelques marches de l'entrée jusqu'au trottoir. Un sourire étira ses lèvres, reconnaissant même d'aussi loin la silhouette et le visage de Jimin caché par des lunettes de soleil. Et à côté de lui était... Taehyung. Son sourire s'élargit: alors eux deux étaient réellement restés en contact ? Cette idée renforça l'impact que Jimin avait dû avoir dans sa vie et une sensation de chaleur et gratitude l'enveloppa.

Les revoir, même d'aussi loin, était sûrement la chose dont il avait le plus besoin pour se donner un peu de courage. Accéder aux dossiers était réellement la seule solution qu'il avait: et il allait le faire.

Il dessina dans sa tête les plans du Q.G. les hautes clôtures, les positions des hommes de main gardant le bâtiment. Il passa le reste de sa journée, et même sa soirée, à trouver un plan pour y accéder. Il était décidé à agir, et ce dès cette nuit. Il voulait retrouver au plus vite ces deux personnes auprès de lui. Il voulait retrouver une vie.

Il enfila son sweat noir, mit sa casquette et sa capuche encore par dessus, puis démarra le moteur et prit la direction du Q.G. Il se gara trois ruelles plus loin et se faufila dans la nuit jusqu'à l'entrée.

Il s'accroupit non loin du portail principal, observant les deux hommes de mains qui y étaient postés, puis regarda sa montre. 05h11. A cette heure-ci les hommes ne devaient plus être très frais, et il remercia le fait qu'ils se trouvaient légèrement en rentrait pour ne pas trop attirer l'attention depuis la rue sur laquelle donnait l'entrée de la propriété.

Il s'avança prudemment, silencieusement, jusqu'à n'être plus qu'à quelques mètres d'eux, le dos adossé à l'imposant pilonne qui servait à maintenir le portail encore ouvert. Ils devaient sûrement attendre le retour d'une voiture.

Jungkook inspira pour se donner du courage puis se laissa glisser et tourner le long du pilonne pour passer de l'autre côté avec une agilité qui lui était jusque-là inconnue de lui-même. Il resta quelques secondes dans le champ de vision des gardes qui ne le virent pas, puis il longea la clôture pour s'assurer que ces deux là ne lui poserait plus problème, s'écartant d'eux au maximum. Il coupa alors à travers la pelouse, s'avançant de l'entrée du bâtiment. Évidemment, celle-ci était également gardée, mais il connaissait cet homme de réputation, quelqu'un pour qui le sommeil était quelque chose de précieux, plus que de garder un œil ouvert sur l'entrée. Il s'avança et se risqua à passer un bref coup d'œil. Il était bien là, avachi sur sa chaise, le menton collé contre son poitrail, ronflant lourdement.

Jungkook passa sur la pointe des pieds puis grimpa directement les marches de l'escalier central trois par trois. A l'étage, il entendit des voix derrière lui, les hommes qui marchaient le long du corridor arrivaient tranquillement derrière lui. Jungkook accéléra, se félicitant qu'ils soient derrière lui plutôt que devant, même si pour ce coup-ci il remercia la chance.

Il avança jusqu'aux dernières pièces du fond. Il savait le bureau à droite, mais de nouvelles voix s'élevèrent depuis la pièce en face dont la porte était ouverte. C'était la salle de repos des hommes de main, et évidemment, le fait que cette pièce garde le bureau n'était pas une coïncidence.

Pourtant, maintenant qu'il était arrivé là il n'avait plus le choix. Des gardes étaient derrière lui, il ne pouvait pas ralentir. Alors aussi vif et discret qu'il pouvait l'être, il saisit la clenche et ouvrit la porte, s'engouffrant dans la mince fente qu'il venait de créer. Il se redressa alors et s'avança vers le bureau, ouvrant un à un les tiroirs, tentant d'ignorer le battement lourd de son cœur dans sa poitrine. Rien le concernant, si ce n'est un dossier sur Kangdae. Le fameux. Celui qui le hantait même dans la mort.

Il continua de chercher un dossier, n'importe quoi. Il ne s'attendait pas à en trouver un qui parlerait d'un potentiel procès fictif, avec toutes les pièces à l'intérieur, il ne fallait pas rêver. Mais si au moins il pouvait trouver quelque chose à son nom... La Kkangpae avait forcément un historique des gens ayant travaillé pour eux.

Rien. Rien d'accessible ne lui était intéressant. A la rigueur, un dossier dont la tranche était décorée des mots 'historique transports 2017' le fit sourire, mais ça n'allait pas pouvoir l'aider à avancer plus que ça.

Des voix le tirèrent de sa rêverie. Des voix qui avançaient tout droit vers la porte du bureau.

«Madame, vous devriez faire plus attention, vous avez besoin de sommeil si vous souhaitez être en forme pour trouver les bonnes solutions et donner les bonnes instructions!
—Merci de vous soucier de moi, mais j'ai des préoccupations plus importantes qu'un potentiel manque de sommeil. »

Jungkook paniqua en reconnaissant la voix de Ji-Hye. Elle allait entrer dans le bureau. Elle allait le trouver là. Et il n'y avait pas d'issue.

Lui qui aurait ne pas laisser de trace de son passage, qui aurait aimé dans le meilleur des mondes pouvoir lire les documents sur place puis les ranger et disparaître comme il était venu, cette douce idée lui semblait corrompue.

Il prit les dossiers "transports" et "Kangdae" sous le bras, sans avoir le temps de plus réfléchir, et se précipita vers la fenêtre sans avoir davantage le temps de réfléchir. Il l'ouvrit et se jeta du 1er étage alors que le bruit de la clenche raisonna dans son dos.

Il tenta d'amortir le choc en pliant ses genoux, mais les graviers en dessous rendirent l'atterrissage plus délicat. Son genou droit tomba brutalement sur le sol, s'écrasant sur les graviers acérés. Il retint un gémissement et se releva, courant vers la sortie alors que la voix de Ji-Hye criait de stupéfaction depuis la fenêtre du bureau. Il ne se retourna pas, mais il était sûr qu'elle s'était précipitée à la fenêtre et pouvait actuellement le voir s'en aller.

«Rattrapez-le! »

Les gardes ? Plus rien à foutre, il était repéré maintenant. Alors il fonça en ligne droite jusqu'à la sortie, passant devant les deux gardes de l'entrée qui ne comprenaient pas la situation, alors que d'autres déboulaient de la bâtisse, leur beuglant dessus pour qu'ils l'attrape tandis que d'autres montaient dans des voitures.

Son genou lui donnait envie de crier à chaque foulée, mais il s'en foutait. Son échappatoire se trouvait à 3 rues d'ici, et il se maudit de ne pas avoir garé la Chevrolet plus près de l'entrée de peur qu'elle soit repérée. Il parvint à garder la distance avec les deux qui couraient à sa suite malgré sa blessure, et se précipita à l'intérieur de la voiture, balançant les dossiers sur le fauteuil passager.

Elle démarra alors que les feux des voitures de la Kkangpae se reflétaient maintenant dans ses rétroviseurs. Son pied plaqua la pédale d'accélération jusqu'à sa limite et la voiture bondit de sa place dans un crissement aiguë des pneus et le gémissement du moteur.

Encore haletant et l'esprit embrumé par sa fuite à pied et l'adrénaline, il avait du mal à réfléchir. Il laissa ses réflexes prendre le contrôle de la Chevrolet, la propulsant dans les arrières rues de Séoul. Il avait trois véhicules à semer derrière lui. Un sourire carnassier étira ses lèvres. Il était sur son terrain de jeu, à présent.

Et son pied écrasa à nouveau la pédale. Cette sensation. Cela faisait maintenant si longtemps qu'il ne l'avait pas eu. Celle de contrôler une créature d'acier qui était prête à écouter le moindre de ses mouvements, à vrombir pour lui. L'adrénaline.

Il vivait pour ces moments alors que les feux des 3 voitures derrière lui paraissaient de plus en plus lointains, alors qu'il slalomait entre les véhicules innocents qui avançaient en queue bien ordonnée le long des avenues. Trente minutes plus tard il se décida enfin à s'arrêter, il était maintenant à l'extrémité est de la banlieue de Séoul. Son cœur battait dans sa poitrine.

Tout en cette journée lui rappelait pourquoi il était rentré. Pourquoi il avait mené cette vie qui lui avait jusque là fait penser qu'il était descendu dans un sous-sol appelé 'Enfer', ou encore 'Solitude'. Il regarda les dossiers avec satisfaction, malgré le fait que les feuilles s'étaient répandues partout sur la place passager.
[...]

«Qu'est-ce qu'on fait, madame ? »

Ji-Hye passait en revu ses tiroirs et étagères, cherchant à trouver ce qui avait attiré l'individu jusqu'ici. Jusque là, elle n'avait rien trouvé, et cette situation la frustrait au plus au point. Un homme toqua sur la porte ouverte.

«Nos hommes n'ont pas réussi à rattraper l'intrus. Il s'est échappé à bord d'une voiture Chevrolet grise métalique dont ils ont réussi à noter la plaque. Il était, selon leurs dires, beaucoup trop rapide et habile. »

Les yeux de Ji-Hye s'écarquillèrent alors qu'elle se précipita vers le tiroir où elle avait fraîchement rangé le dossier de Kangdae. Il avait disparu. Ça ne pouvait pas être une coïncidence. Le retour de l'ex-transporteur. La disparition du dossier. Le fait qu'il ait réussi à leur échapper si facilement.

« Jungkook...
—Madame ?
—Retrouvez d'où vient la plaque de la voiture. »

Alors que Jimin amenait le bout de viande jusqu'à ses lèvres, tentant d'apprécier autant que possible la nourriture de ce restaurant réputé de Séoul, le son du voiture passant à toute vitesse surement pas plus loin que deux rues plus loin résonna aux oreilles de tous. Il leva les yeux vers Taehyung qui s'était figé, les yeux dans le vides, écarquillés, jusqu'à ce que le bruit s'évanouisse.

L'idole soupira et posa sa main sur celle du mannequin. Il savait pertinemment ce qu'il était en train de penser.

«Toi aussi, ce son te rappelle des souvenirs..? Pourtant ce n'est pas lui. Tu le sais, n'est-ce pas..? »

Son pouce caressa doucement le dos de la main en dessous de la sienne alors que ses yeux aux reflets peinés tentaient de se connecter à ceux de Taehyung.

«Comment tu peux être aussi sûr que ce n'est pas lui? Ce genre d'accélération je la connais par cœur.
—Arrête, ce n'était pas le seul conducteur à la recherche de sensation dans Séoul, et ça ne sera pas le dernier.
—Pourquoi j'ai l'impression que c'est comme si tu espérais que ce ne soit pas lui ? Que tu te convainc que ça ne peut pas être lui.
—Je n'essaye pas de me convaincre, je le sais, c'est tout.
—Jimin... »

L'idole rompit le contact, ramenant sa main vers lui, baissant les yeux vers son assiette, tentant de reprendre son repas comme si de rien n'était.

«Je n'arrête pas de penser que tu essaies de me cacher quelque chose depuis que tu es revenue de ta tournée...
—Tu dis n'importe quoi... Et tu te figes dès que tu entends un son de voiture un peu plus fort que les autres... Il faut que... tu te le sorte de la tête...
—Jimin, je comprends pas... J'ai l'impression que tu agis délibérément comme si son absence ne t'affecte pas, récemment. Je sais que tu me dis tous les jours que tu n'as besoin de personne d'autre si je suis là... Mais parfois j'ai juste l'impression que ce n'est qu'une façade. Sois tu me dis maintenant comment tu peux être aussi sûr de ce que tu dis, soit tu finis ton repas seul. Mais tu ne peux pas avoir changé autant, pas de l'homme qui aurait fait n'importe quoi pour lui à soudainement quelqu'un qui affirme s'en foutre. »

Ce n'était pas vraiment l'objet du chantage qui fit frémir Jimin à cet instant. C'était la sensation que Taehyung doutait de lui. Et le fait de savoir qu'il avait raison.

Ce n'était que de l'auto-persuasion, qu'une façade quand il disait à Tae que ça ne servait plus à rien de penser à Jungkook, tout comme Taehyung l'avait dit lorsque le transporteur s'était évanouit dans la nature la première fois. Leurs rôles s'étaient étrangement inversés. Et effectivement, il lui cachait quelque chose qui le tiraillait sans cesse. Est-ce que c'était le bon moment pour lui avouer? Pour montrer ses faiblesses à Taehyung qui commençait à percer ce masque qu'il s'était fabriqué?

«Je sais qu'il n'est pas en Corée car il est en Pologne.
—Q-Quoi..?
—Je l'ai vu lors du dernier concert. Je l'ai vu alors que j'avais perdu tout espoir et toute crainte de le croiser.
—Est-ce que...
—Il avait l'air d'aller bien. Il travaille dans une société privée de transport de personnes, celle qui a eu le contrat à Varsovie pour notre concert.
—Jimin, ça n'allait pas être ma question...Mais je suis heureux de savoir qu'il va bien... »

Devinant la suite, blessé par anticipation, il posa ses couverts, annonçant qu'il n'avait plus faim. Taehyung acquiesça. Ce n'était pas le lieu pour poser les questions qui lui brûlaient les lèvres. Alors ils payèrent, rentrèrent et s'assirent sur le lit. Taehyung enlaça les hanches de Jimin de son bras.

« Est-ce que toi et lui vous avez pu... parler ? »

Jimin acquiesça en silence, fixant le parquet de la chambre.

« Seul à seul..? »

Jimin acquiesça une nouvelle fois. Son cœur se serra dans sa poitrine et sa gorge le piqua.

« Pourquoi tu ne m'as rien dit...? Est-ce que... Comment... Rhaaa... »

Taehyung laissa sa tête choir sur l'épaule de l'idole qui ne bougea pas. Comment pouvait-il formuler ça sans faire du mal à Jimin ? Comment pouvait-il épargner à Jimin de ressentir la même douleur que lui. Il n'y avait pas de question plus douce que d'autre. Pas s'il voulait savoir la vérité et éloigner cette angoisse grandissante qui le saisissait à chaque fois que Jimin acquiesçait. Il inspira longuement, se donnant du courage.

« Sois-honnête. Pourquoi me l'avoir caché..? Qu'est-ce que vous avez fait..? »

Jimin ferma ses yeux, tentant de retenir des larmes qu'il sentait monter. Son poing se ferma de résignation.

« J'étais pétrifié. J'avais peur de moi-même. Terrifié que mes sentiments pour lui prennent le pas pour ce que je ressens envers toi.
—...Et est-ce que ce fut le cas ? »

L'Idole resta silencieux, incapable de répondre. Les tremblements qui parcouraient le corps de Taehyung à côté de lui le faisait prendre conscience de la souffrance que son silence, son aveu inaudible, provoquait en cette personne qu'il aimait sincèrement. Les larmes roulèrent maintenant sur ses joues malgré la barrière de ses paupières.

«Je suis désolé Tae... Il ne savait pas pour nous deux, et j'ai juste pas eu assez de volonté pour le fuir, le repousser... J'y arrivais pas... »

Taehyung se leva alors, silencieux à son tour, se dirigeant lentement vers la porte. Il fallait qu'il fuit. Il avait voulu des réponses, il en avait eu. Mais il ne pouvait pas les supporter. Alors que sa main agrippa la poignée pour ouvrir le dernier obstacle qui le retenait dans la pièce, des doigts attrapèrent sa manche. Le son des pleures de Jimin, dans son dos, lui fendit le cœur.

« Taehyung, je t'aime... Je suis désolé... Je suis sincèrement désolé... Et j'ai même pas eu le courage de te le dire tout de suite, j'ai pas réussi à me convaincre de te blesser en t'avouant la vérité... Je suis pitoyable, je le sais... Mais s'il te plait, ne me prend pas pour un menteur... pas quand je te dis que je t'aime...»

Le mannequin leva son visage pour tenter d'arrêter ses propres larmes, reniflant.

«J'ai besoin d'un peu de temps... d'être seul, au moins cette nuit... Désolé, Jimin.»

Comme s'il venait d'entendre la pire chose possible, ses doigts relâchèrent le tissu, libérant Tae qui partit sans se retourner. Il fixa la porte entre-ouverte que la lumière du salon illuminait.

S'il se laissait aller à ses pleurs maintenant, il était sûr que tout le groupe arriverait directement dans sa chambre, savoir ce qui n'allait pas, tenter de le réconforter. Mais il ne voulait pas être réconforté.

Cette douleur, cette solitude à cet instant, c'était tout ce qu'il méritait. Il voulait les ressentir pleinement. Il voulait souffrir, goûter à ne serait-ce qu'un dixième de ce que Tae pouvait ressentir à cet instant.

Il se leva et donna un coup de pied violent dans la porte qui se claqua dans un bruit sonore. Il était en colère contre lui-même. Son poing atterrit contre le bois laqué. Il voulait se faire mal, et plus encore. Il déversa toute sa haine, tout son dégoût envers lui-même jusqu'à ce que la souffrance physique atténue sa peine.

Haletant, les poings rougits, il se laissa alors tomber sur son lit. Il remonta ses genoux contre son torse et se laissa aller dans des sanglots muets.

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