22ème Chapitre (1/2)
Sois fort, protège éternellement ton sourire
Journal de bord du commandant Isvadavimas
Vendredi 23 novembre 2351
Rapport du sergent Nuraminti. Contact avec une personne affirmant venir de Farshlisn, ville rebelle. Équipe envoyée pour la ramener. Clef USB. Besoin de matériel spécifique pour la lire. Attente de technicien.
La clef USB a été ouverte. Contient des informations sur le régime totalitaire et la société fortement inégale de Farshlisn. Réunion prévue lundi pour en discuter.
Lundi 26 novembre 2351
Réunion stratégique ce matin. Nous devons agir. Récolte d'idées. Mise en place d'une ébauche de plan. Communiqué envoyé aux villes alliées. Message pour le président, demande d'une entremise.
La rescapée a beaucoup d'informations. Elle servira de guide. Son comportement est étrange, elle ne veut pas se reposer mais prendre part aux entraînements. Pas de données sur elle, refus de parler de son passé. Plusieurs jours dans le désert, corps déjà guéri. Cache quelque chose. Se méfier.
Mardi 1er janvier 2352
Plan final transmis au président depuis une semaine. À l'aube, réponse arrivée. Permission d'agir.
Lancement des travaux. Tunnel souterrain pour soldats, but envahir la ville et prendre le contrôle sans danger pour les civils. Matériel déjà prêt et placé hors de vue de Farshlisn. Demande d'armes, de protections et d'équipements envoyée. Début de l'entraînement des troupes. Réunion logistique prévue demain matin. Réunion stratégique demain après-midi.
Demande de renforts adressée aux alliés. Attente de leur réponse.
La rescapée insiste pour être mise au courant. Surveillance constante de ses actions, ne semble pas être une espionne. Parle de la « réserve ». Fera partie d'un groupe spécial, les guidera dans la ville. Sergent Nuraminti désigné comme chef d'équipe. Partiront avec huit hommes. Paralyseront le système.
Mardi 22 avril 2352
Arrivée de matériel. Tunnel avance bien. Ingénieurs estiment la fin dans trois mois. Entraînement des troupes en bonne voie. Petits changements dans le plan.
Commandant Skerdimas de Zelner nous rejoint avec 50 hommes. La ville de Zelner nous fournit des armes.
Directrice Moterys de Meydl nous envoie du matériel, des travailleurs et vingt soldates menées par la générale Mires.
Ville de Karg participe aux dépenses. Reste à l'écart des combats.
Lundi 14 juillet 2352
Divisions arrivées ce matin de Zelner et Meydl. Formation commune. Réunion avec commandant Skerdimas et générale Mires. Coordination des unités. Je suis désigné comme le responsable des opérations depuis l'arrière.
La rescapée s'est bien intégrée aux troupes. Capacités hors-normes. Refuse toujours de se plier à un examen médical poussé, raison inconnue.
Lundi 28 juillet 2352
Le tunnel a atteint Farshlisn. Il faut maintenant le relier aux souterrains. Pose d'un brouillage, utilisation de scanners. Mot d'ordre : prudence.
Consolidation du passage. Matériel commence à être acheminé. Revu du plan. Réunion stratégique. Tout se met en place.
Mardi 19 août 2352
Dernière réunion stratégique. Coordination des équipes. Matériel prêt. Troupes prêtes. Derniers détails réglés. Message du président.
Ce soir, repos. Fête, peut-être la dernière pour les soldats. Besoin de relâcher la pression.
La rescapée n'est pas venue. Femme mystérieuse, force le respect. Garder un œil sur elle. Dangereuse.
L'opération commencera dans deux jours. Le jeudi 21 août 2352.
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Vay avait reçu la permission d'accompagner les chefs des différentes unités dans le tunnel pour une inspection générale. Avançant à la gauche du sergent Naraminti, elle sentait l'appréhension grandir en elle. Faisait-elle le bon choix ? Farshlisn hébergeait bien des inégalités, des problèmes et des horreurs, mais renverser le gouvernement et prendre le contrôle de la ville par la force, n'était-ce pas trop ?
Durant les mois qu'elle avait passés à Kamf en compagnie des soldats, elle avait beaucoup appris, que ce soit en matière de combats, d'utilisation d'armes ou d'interactions sociales. Au début, elle avait énormément suscité la méfiance, surtout par son incroyable faculté de récupération. Ils l'avaient repêchée dans l'oasis, affamée et affaiblie. Une longue nuit de sommeil et deux repas plus tard, elle avait retrouvé presque toute sa vigueur.
En démontrant sa ténacité et ses capacités au corps à corps, elle avait gagné le respect des guerriers, qui avaient commencé à lui parler. Le sergent Naraminti n'y était pas pour rien, il avait tout fait pour qu'elle se sente à l'aise et lui avait enseigné les coutumes de leur ville. Cité qui était très différente de Farshlisn, notamment par son aspect plat et étendu ainsi que propre. Pas de buildings ou de gratte-ciel, tout juste quelques immeubles. Aucun nuage de pollution omniprésent sur le sol. Les habitants usaient tous de technologies qui tournaient grâce à l'électricité produite par des énergies renouvelables. Bien qu'il y ait toujours des opposants au système et des personnes pour se plaindre, la société fonctionnait bien. Chacun avait sa chance, personne n'était mis de côté.
— Rassure-moi, tu ne vas pas te prendre peur maintenant ?
Relevant la tête, Vay croisa le regard turquoise de Naraminti qui ressortait sur sa peau sombre. À chacun de ses pas, ses rastas se soulevaient.
— J'étais distraite, c'est tout.
— À quoi pensais-tu ?
— Aux derniers mois. Avant de quitter le cen... Farshlisn, je n'imaginais pas qu'un univers aussi vaste existait. Ni que les ravages de la troisième guerre avaient presque complètement disparu.
— Les Fondateurs n'allaient pas laisser le monde dans un si piteux état. Alors même que les villes n'étaient pas sécurisées, ils réfléchissaient déjà au meilleur moyen d'assainir le sol. Tu sais, de nombreux évènements ont lieu en trois cents ans.
Ils avancèrent un moment dans le tunnel. Long d'une cinquantaine de kilomètres, une navette électrique faisait des allers-retours, déposant les personnes à environ cinq cents mètres de la fin. Les machines de chantier ayant été renvoyées à l'arrière, toute la largeur du passage pouvait être exploitée, permettant à plusieurs équipes de se tenir côte à côte sans problème.
— Que feras-tu, une fois que Farshlisn sera libérée ?
— Je... je n'en sais rien. Je crois que j'aimerais voyager. Peut-être que d'autres villes sont dans le même état, que des gens sont prisonniers sans avoir conscience qu'il existe une multitude de possibilités à l'extérieur.
— C'est noble de ta part.
Elle resta silencieuse. Au fond d'elle, elle ne souhaitait qu'une seule chose : le revoir. L'homme qui l'avait sauvée. Celui qui l'avait aidée quand elle en avait le plus besoin. La première personne à lui avoir tendu la main.
Vay voulait le remercier. Une fois que ce serait fait, elle pourrait partir sans se retourner. Sa poitrine se serra, elle n'était pas honnête avec elle-même. Comment l'être, alors qu'il l'avait peut-être oubliée ? C'était ça, il ne se souvenait sûrement plus d'elle. Il avait une vie, après tout.
Consciente que les larmes lui montaient aux yeux, la jeune femme détourna la tête avec une inspiration tremblante. Il n'y avait aucune raison pour qu'elle se sente abandonnée. Des gens l'acceptaient comme elle était, elle pouvait leur faire confiance. Si elle avait un souci, ils l'aideraient, alors pourquoi un tel sentiment de solitude l'habitait-il ? Elle qui était enfin libre de ses choix ?
— Nous y sommes.
Revenant au moment présent, Vay observa les alentours. Ils étaient au fond d'une sorte de puits dont les murs étaient longés par de larges escaliers. À quelques mètres de hauteur, une porte était visible. Un ingénieur leva la main pour demander l'attention des chefs, le silence se fit.
— Bienvenue dans la base. C'est de là que les soldats partiront avec vous pour prendre d'assaut Farshlisn. Chaque équipe a un rôle bien précis, je vais vous expliquer le fonctionnement des souterrains. Vous recevrez également des plans et une boussole digitale pour vous repérer. Comme vous le voyez...
Vay ?
La jeune femme faillit sursauter, elle ne s'attendait absolument pas à entendre une voix.
Tu es sûre que c'est elle ?
Il me semble. L'identifiant est le même.
C'est étrange.
Elle réprima un sourire, il valait mieux ne pas attirer l'attention avec des réactions singulières.
S'éloignant sans émettre le moindre bruit, elle se plaça à l'écart du groupe dans l'ombre et chuchota le plus doucement possible :
— Les voix, ça faisait longtemps.
Neuf mois.
Quinze jours.
Six heures.
Trente-deux minutes.
Dix-huit secondes.
C'est la durée entre la dernière fois où nous avons capté ton signal et maintenant.
— De quel signal parlez-vous ? Je ne suis pas un robot.
Les chercheurs t'ont implanté une puce électronique à la base du crâne.
— Dans ce cas, comment ai-je pu m'échapper ?
À ton avis ?
Indice : c'est lié au scientifique qui s'est occupé de toi.
Elle n'eut pas besoin de réfléchir beaucoup, la réponse était évidente. Le professeur l'avait protégée en trafiquant l'appareil.
Qu'est-ce que tu fais sous terre ?
En quelques mots, elle leur résuma la situation et les prévint de l'offensive imminente. Les voix demeurèrent silencieuses durant un long moment, elles devaient appréhender toutes les conséquences de l'attaque. Vay se demanda à quel point elles allaient en être impactées. Après tout, la jeune femme ne savait rien d'elles, simplement qu'elles possédaient d'énormes connaissances et qu'elles l'avaient secourue.
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