Pour Dokyemoppa
"Bonjour monsieur!" lança Madelaine à la cantonade en s'installant à sa place.
Le professeur Flitwick leva les yeux au ciel. Au début il avait apprécié cette jeune fille volontaire et joviale. Elle était si dynamique ! Malheureusement elle était davantage que dynamique, elle était hyperactive. En effet à peine s'était-elle installée qu'elle se retourna pour discuter avec ses voisins de derrière. Lorsque le cours commença pour de bon - autrement dit lorsque Flitwick refermer la porte- la jeune fille se tut. Ce jour-là, elle était déterminée à écouter! Du moins les dix premières minutes... Après son esprit se mit à vagabonder sans qu'elle ne puisse l'empêcher. Elle pensa à sa famille, à ses amis, à son stylo fétiche qu'elle avait perdu, à ce nouveau livre de fantasy qu'elle mourrait d'envie d'acheter, et puis à Fred Weasley. Oui, Fred Weasley le rouquin d'un an son aînée. Elle était tombée sous son charme. Tandis que d'autres filles bavaient devant Harry Potter ou même Draco Malfoy, elle rêvait de Fred. Ce qu'elle aimait chez lui, ce n'était pas tant ses cheveux roux et ses yeux émeraudes, ce n'était pas son sourire craquant qui l'avait charmée. Ce qu'elle aimait par-dessus tout, c'était son caractère. S'il n'était pas ce plaisantin invétéré, jamais elle ne lui aurait prêté attention! Il avait cette manie de faire le pitre dans les moments les plus sérieux, et même si ses farces se révélaient parfois vaseuses, de mauvais goût, Maddy les adorait. Elle avait besoin de légèreté dans sa vie, de quelqu'un qui éclaire tout ce qui l'entourait. Fred Weasley pouvait être cette personne, c'est ce qu'elle s'était mise à penser. Toutefois elle ne lui avait jamais adressé la parole, alors comment pouvait-elle espérer attirer son attention? Sans compter que le bal en l'honneur de la Coupe de Feu approchait et elle mourrait d'envie qu'il l'invite. Mais c'était peine perdue, elle le savait. Rien que d'y penser l'accablement la saisit.
"Maddyyy tu devrais copier le cours au lieu de rêvasser."
La jeune fille revint soudainement à la réalité et se pencha sur son parchemin de nouveau. La fin de l'heure passa lentement, Madelaine n'avait qu'une hâte, manger. Les cours juste avant midi étaient sans doute aucun les pires. La sonnerie indiquant la pause déjeuner retentit, Madelaine bondit sur ses jambes et sortit de la salle. Ses amis étaient déjà sortis et l'attendaient sans aucun doute impatiemment devant le self. En effet lorsqu'elle l'atteignit, elle les aperçut:
"C'est la première fois que tu es aussi rapide, qu'est-ce qu'il t'arrive? se moqua Martin.
-J'étais très pressée de te retrouver, plaisanta-t-elle en ponctuant sa phrase d'un clin d'oeil aguicheur."
Tous éclatèrent de rire et allèrent s'installer. Le déjeuner se passa bien, Madelaine put se détendre et oublier ses cours, ses professeurs, ses contrôles. Une fois le déjeuner expédié, ils montèrent dans leur salle commune pour discuter. Personne ne s'y trouvait jamais à cette heure, ils savaient qu'ils pourraient parler tranquillement. Madelaine se laissa tomber dans son fauteuil favori avec un soupir de plaisir. Enfin elle quittait les désagréables bancs et chaises de l'école pour quelque chose de bien plus confortable!
"Alors le bal de la coupe de feu approche! lança Cécile joyeusement."
Quelques grognements lui répondirent, mais cette marque de désapprobation ne l'empêcha pas de continuer:
"Vous avez déjà quelqu'un avec qui y aller?
-Pourquoi tu nous parles de ça, gémit Grégoire. Je n'ai pas envie d'y penser c'est dans un mois...
-Si tu nous demandes, je suis convaincue que c'est parce que toi tu as déjà un cavalier.
-Bien joué Maddy, congratula Cécile joyeusement. J'y vais avec George Weasley! "
La mâchoire de Madelaine se décrocha et plusieurs exclamations de surprise s'élevèrent:
"Sérieusement? Je ne pensais absolument pas que c'était ton type, souffla Danielle.
-Attends, Maddy ce n'est pas toi qui a le béguin pour Fred? Cécile tu ne veux pas arranger quelque chose à notre petite Maddy?
-Laisse-tomber Martin j'y ai déjà pensé... Sauf qu'il a une cavalière : Angelina."
Le cœur de Madelaine se brisa dans sa poitrine. Non il était si douloureusement serré qu'elle avait l'impression qu'il allait exploser. La jeune fille plaqua un sourire faussement amusé sur ses lèvres et parla. Qu'avait-elle dit? Impossible de s'en souvenir. Elle était si bouleversée, si concentrée à ne pas laisser son désespoir paraître qu'elle répondait par automatisme. Une fois qu'elle fut seule dans la salle commune, que ses amis la laissèrent pour partir en cours; Madelaine réfléchit, retourna la situation dans sa tête.
"Au fond, pensa-t-elle, inviter quelqu'un au bal ne veut pas dire grand chose. Angelina et Fred sont dans la même équipe de Quidditch mais ça ne veut pas nécessairement dire qu'il y a davantage que de l'amitié entre eux."
Cette idée la rassurait et elle s'y accrocha désespérément. Pour avoir confirmation elle pouvait demander à ses frères et sœurs ils devaient sans aucun doute savoir quelque chose. Georges? Non Fred et lui éraient fusionnels, hors de question que ça s'ébruite. Ginny peut-être garderait le secret! Non elle était trop jeune et Fred ne devait pas lui confier ce genre de choses. Percy l'enverrait paître. Il restait Ron, d'un an son cadet. Elle ne connaissait rien de lui, elle savait seulement qu'il passait son temps avec Harry et Hermione. Jusqu'au dîner, elle soupesa et évalua l'idée d'aller le voir. Mais le hasard ne lui laissa pas le choix. Alors qu'elle se rendait en salle d'étude pour rejoindre ses camarades de classe, elle les croisa tous les trois. Un instant elle faillit les ignorer et ne pas leur parler mais son corps se mut de lui-même. Une seconde plus tard, elle avait saisi Ron par la manche. Comme un seul homme, les trois adolescents lui firent face, un air de curiosité peint sur le visage.
"Salut Ron... Euh je sais que tu ne me connais pas mais j'aurais besoin d'une information. Enfin bien sûr je comprendrais que tu ne sois pas disposé à me la communiquer puisqu'on ne s'est jamais parlés mais je me disais juste que ça serait très généreux de ta part."
Madelaine s'interrompit et poussa un profond soupir. Elle babillait de nouveau. Elle tenta d'ignorer les regards surpris de Harry et Hermione mais sentit ses joues s'empourprer. Ron se balança quelques secondes d'avant en arrière puis d'un air de conspirateur, se pencha vers Madelaine avant de glisser:
"Bon dis-moi que veux-tu savoir?"
Madelaine rassembla ses idées et se racla la gorge:
"J'ai entendu dire que Fred va au bal avec Angelina... Et je me demandais si par hasard ils sortent ensemble?"
Ron plissa les yeux avec méfiance puis un sourire amusé vint danser sur ses lèvres:
"Pourquoi tu veux savoir? T'esintéressée?"
Madelaine fut tentée de répliquer que ce n'était pas ses affaires mais l'information lui échapperait, alors la jeune fille prit une profonde inspiration et avoua:
"Peut-être bien. Réponds-moi."
Ron se passa une main sur le visage, pensif et avoua:
"Ils ne sortent pas ensemble. Fred l'a parfois évoquée, je crois qu'il a un petit faible pour Angelina."
Elle hocha la tête, soudain vidée de toute énergie. Ce n'était pas un désespoir qui la poussait au bord du gouffre non, mais une douce tristesse, celle de celui qui se sait vaincu et qui est prêt à abandonner le combat. Subitement, Madelaine réalisa à quel point elle s'était compromise dans cette affaire. Elle plongea ses yeux dans les siens et, d'un air excessivement sérieux qui ne manqua pas d'amuser Ron, elle déclara d'une voix ferme:
"J'aimerais que vous n'en parliez pas à Fred, ni à personne d'autre d'ailleurs."
Ron hocha la tête, même s'il savait qu'il ne pourrait garder le silence bien longtemps. Madelaine le crut naturellement. Si elle avait su, elle ne lui aurait jamais adressé la parole.
Ron était surpris, qui aurait cru que Madelaine, la quatrième année maladroite, gaffeuse apprécierait Fred Weasley! Il la voyait plutôt avec un garçon plus calme. Madelaine n'était pas calme pourtant. De toute façon qu'est-ce que ça pouvait lui faire? Il s'en fichait pas mal d'avec qui Madelaine pouvait vouloir sortir même si c'était son frère. La journée passa lentement, avec ses hauts et ses bas. Ron était fatigué et ne rêvait que d'une chose: aller se coucher. Il avait eu une avalanche de mauvaises notes et pour ne rien arranger il n'avait toujours pas de cavalière pour le bal. Il s'affala dans le canapé de la salle commune, prêt à faire la loche pendant une heure. Ses deux fidèles amis étaient en cours et c'était probablement pour le mieux, il n'aurait pas pu supporter les remontrances d'Hermione. Il n'était pas d'humeur.
"Tout va bien Ron?"
Le jeune garçon remarqua soudain la présence d'une Gryffondor à sa droite. Il n'était pas sûr de connaître son nom... Anna? Layla? À tout hasard, il tenta:
"Oui et toi Anna?"
Elle ne réagit pas, tant mieux, il ne s'était pas trompé:
"Bien sûr, mais tu as l'air fatigué, insista-t-elle.
-J'ai eu une journée épuisante, approuva-t-il."
Où pouvait-elle vouloir en venir? Dans sa grande naïveté, Ron pensa que peut-être il lui plaisait. Ils discutèrent à bâtons rompus quelques minutes puis Anna demanda sans ambages:
"Je t'ai vu avec Maddy plus tôt, je ne savais pas que vous vous connaissiez."
Maddy?
"Ah Madelaine! s'exclama-t-il dans un éclair de compréhension. Oui, elle avait quelque chose à me demander.
-Quoi donc?"
Ron hésita un instant, Madelaine serait gênée voire agacée et Ron n'aimait pas les histoires. De plus cette fille était une inconnue...
"Alors, le pressa-t-elle."
Ron haussa les épaules, et puis tant pis si Madelaine voulait que cela reste un secret elle aurait dû le garder pour elle. Alors Ron parla.
Fred Weasley s'installa confortablement dans le fauteuil de la salle commune. Il avait probablement passé une des plus belles journées de sa vie. Le piège qu'il avait tendu aux Serpentards avait parfaitement fonctionné, Angelina avait accepté de l'accompagner au bal et il avait reçu une bonne note à son devoir. Il poussa un soupir d'aise et se laissa aller contre le dossier du fauteuil. Il ferma les yeux un instant et se remémora la scène qui s'était déroulée quelques heures plus tôt; le sourire d'Angelina, son regard rieur mais envoûtant... Fred fut tiré de sa rêverie amoureuse par des pas. Il ouvrit les yeux sur-le-champ. Son frère jumeau accompagné du cadet s'installèrent juste en face de lui. Georges souriait étrangement et ce sourire attisa immédiatement la curiosité de Fred qui haussa un sourcil, interrogateur:
"Dis-moi Georgie, qu'as-tu en tête pour être aussi guilleret?
-J'ai une information croustillante pour toi."
Cette fois c'était plus que de la curiosité, Fred était avide de savoir.
"Dis-moi tout."
George le fit patienter puis parla à son tour.
Habituellement lorsque Madelaine croisait le regard de Fred, il ne paraissait pas la voir. Ses prunelles passaient sans s'attarder. Cette fois, ce fut différent. Madelaine le remarqua immédiatement et en fut extrêmement gênée. Pourquoi la fixait-elle? Certaines auraient sauté aux conclusions, auraient sur-le-champ pensé que Fred l'avait remarquée. Mais Madelaine n'était pas ce genre de filles, elle n'était pas dupe. Elle avait parlé à Ron et miraculeusement Fred apprenait son existence, ce n'était pas une coïncidence. Il n'avait probablement pas su tenir sa langue... La jeune fille en eut la confirmation le dernier jour de la Coupe de Feu. Tous les élèves étaient rassemblés devant le labyrinthe qui constituait la dernière épreuve. Madelaine n'avait malheureusement pas réussi à avoir une place devant, elle était au beau milieu de la foule, poussée, compressée. Elle détestait cette sensation, il lui semblait qu'elle allait mourir étouffée à tout moment. Soudain à bout de souffle, la jeune fille joua des coudes et s'extirpa de la masse. Elle laissa échapper un profond soupir de soulagement et releva à la tête. À quelques pas d'elle Fred Weasley la fixait. Madelaine détourna les yeux et feignis de n'avoir rien remarqué. Elle se tourna vers le labyrinthe, également impatiente de voir l'épreuve commencer:
"La tension est à son comble."
Hébétée; Madelaine se retourna pour s'assurer que c'était bien à elle que Fred parlait. Elle n'en croyait pas ses oreilles. Elle reprit une contenance et acquiesça:
"C'est la dernière épreuve, c'est compréhensible. Enfin je veux dire la tension a toujours été présente même pendant la première épreuve mais là, c'est le plus important alors l'excitation a atteint son paroxysme c'est normal enfin qui ne serait pas..."
Madelaine poussa un profond soupir et s'interrompit:
"Désolée, je me perds en explications."
Fred eut alors une réaction qui plut à la jeune fille, il éclata de rire;
"T'es vraiment marrante, s'exclama-t-il entre deux hoquets."
Madelaine sentit ses joues se colorer.
"Madelaine c'est ça?
-Maddy, corrigea-t-elle. Tout le monde m'appelle Maddy."
J'aimerais vous dire que ce premier contact mena à une magnifique histoire d'amour, que Fred eut un véritable coup de foudre pour Maddy mais les choses se passent rarement ainsi. Ils s'entendirent bien et les jours qui suivirent, il leur arrivait de discuter à la fin des cours, pendant les heures d'autonomie. Une semaine passa, Madelaine avait l'espoir que Fred tombe amoureux d'elle. Cependant le jour du bal, Madelaine n'avait toujours pas de cavalier. Au fond, ça ne l'embêtait pas vraiment, elle préférait y aller seule plutôt qu'accompagnée de quelqu'un qu'elle n'appréciait pas vraiment. Elle mit un temps infini à se préparer. Elle n'y allait pas dans l'optique de plaire à quelqu'un, juste dans celle d'observer ses camarades et de voir ses amis mais elle voulait au moins être fière de son apparence. Madelaine portait une robe noire assez longue et des talons.Elle était jolie, oui c'est du moins ce qu'elle pensait jusqu'à voir les autres filles ''Je me fonds dans la masse'' pensa-t-elle avec amertume. Presque tous étaient par deux, et Madelaine avait beau essayer de se convaincre qu'elle n'avait besoin de personne, au fond elle savait qu'elle se mentait à elle-même. Personne n'est fait pour être seul. On peut prétendre être fort mais seulement un moment. Un jour ou l'autre notre masque se fissure et se brise. Ce temps n'était pas venu pour Madelaine, elle commençait seulement à en éprouver la fragilité. Comme tout le monde elle assista à l'ouverture du bal avec un certain émerveillement. Il était magnifique de voir les élèves subitement tous silencieux, béats devant le spectacle qui s'offrait à eux. Dans la salle, il régnait un silence presque religieux. Il n'y avait pas un murmure, seulement la douce musique, les froissements des vêtements et le claquement des talons ou le frottement des semelles sur le sol. Le sourire ébaubi de Madelaine disparut lorsque le bal s'ouvrit. Elle était seule au milieu de quelques centaines de couples. Il n'existait rien de plus douloureux que de se sentir isolée dans une foule. Pour se donner une contenance, l'adolescente prit un verre sur la table qu'elle sirota distraitement. Elle observait les autres, au moins elle s'occupait. Malheureusement il aurait été plus avisé de laisser son regard dans le vide. Plus elle voyait les autres filles, plus elle les enviait, elle se sentait si transparente.
"Maddy."
À peine quelques secondes plus tard, Lia et son cavalier se plantèrent devant elle, tous deux souriant. Lia détailla Madelaine de haut en bas, qui d'embarras ne tenait pas en place.
"Tu es magnifique! Qui est ton cavalier?"
Toujours cette même question, elle n'y échapperait pas. Elle haussa les épaules d'un air faussement désinvolte:
"Je préfère être seule."
Lia hocha la tête, prétendant comprendre, mais au fond de ses yeux, Madelaine la voyait cette lueur, celle de pitié. Le plus rapidement possible, Madelaine prit congé du couple, gênée. Elle retourna s'adosser à une table, seule. Parfois quelques amis venaient lui parler, mais elle se sentait terriblement seule. C'est pour cela qu'elle vit immédiatement qu'il s'approchait. Il était seul lui aussi, leurs regards se croisèrent, la piste de danse les séparait. Madelaine détourna les yeux, mais elle voyait tout de même du coin de l'oeil la forme de Fred, grossissante à mesure qu'il avançait. Lorsqu'il fut assez proche, elle le regarda franchement et lui adressa un sourire :
"Alors qu'est-ce que tu fais ici toute seule?"
Madelaine avait eu cette question une vingtaine de fois pendant la soirée et cette fois elle était rodée et prête à fournir une réponse digne de ce nom dans s'emmêler les pinceaux:
"J'admire les adolescents dans leur habitat naturel."
Cette réplique eut le mérite de le faire rire et Madelaine sentit une bouffée de joie monter en elle, tout le monde n'avait pas le privilège d'amuser Fred Weasley, un maître dans la discipline de l'humour!
"Et toi? s'enquit-elle presque sur-le-champs. N'étais-tu pas censé avoir une cavalière?"
Fred croisa les bras sur sa poitrine et désigna du menton Angelina qui dansait avec un Serdaigle:
"Comme tu peux le voir j'ai été laissé tomber."
Madelaine hésita un court instant et lança:
"Elle a fait une grossière erreur, moi je ne t'aurais pas abandonnée.
-Mais ma cavalière est Angelina, pas toi."
Madelaine serra les dents à la rebuffade. Fred avait posé des limites on-ne-peut-plus claires. Madelaine resta une demie heure aux côtés de Fred mais la fatigue et l'abattement eurent raison d'elle. Une fois confortablement installée dans son lit, Madelaine réfléchit, réfléchit à sa situation. Oui elle aimait Fred mais si c'était à sens unique à quoi bon? La jeune fille poussa un profond soupir, l'amour c'était censé rendre heureux alors pourquoi était-ce si compliqué? Madelaine se tourna et retourna sur son matelas; mais il lui était impossible de trouver le sommeil. Agacée, elle s'enroula dans sa couette et se traîna jusqu'à la fenêtre qu'elle ouvrit en grand. Le froid s'engouffra dans la pièce mais personne n'en serait dérangé; ses compagnes de chambre n'étaient pas encore rentrées. Face au paysage qui s'offrait à elle, Madelaine se sentit enfin apaisée. Tous ses tourments semblaient s'être volatilisés. La voûte céleste était sertie d'éclats d'argent, la lune était presque pleine et éclairait les alentours d'une lumière pâle. Ici il n'y avait pas de réverbère, pas d'ampoule artificielle, simplement la lueur des astres; étrangement apaisante. Face à l'univers entier, la jeune fille se sentit soudain minuscule. Elle n'était qu'un petit engrenage dans la grande machine qu'était le monde. Elle laissa son esprit dériver. Elle se pensait au fond du trou à cause de Fred mais certains sur cette planète, avaient des problèmes bien plus grave. Comment osait-elle se lamenter sur son sort? Certains faisaient à ce moment même face à la perte d'un être cher, d'autres mourraient, travaillaient depuis probablement l'aube sans avoir le luxe de s'octroyer une seule pause. Elle se plaignait d'injustice mais elle se savait pourtant parmi les plus valorisés de cette planète. Subitement, cette conscience du monde qui l'entourait disparut. De nouveau elle se trouva seule, à sa fenêtre, avec ses problèmes d'adolescente. Cependant cette fois elle avait pris une décision, puisque Fred l'avait repoussée, elle n'insisterait pas. Ce fut sur ces pensées presque positives que Madelaine alla se coucher.
Le lendemain, elle se leva le cœur léger. Voir Angelina et Fred n'éveilla aucune haine en elle. Le surlendemain, elle était tout aussi joyeuse. Peu à peu Fred perdit de l'importance à ses yeux, sa scolarité se termina sans accroc.
Comme tout le monde elle participa à la guerre contre Voldemort et bienheureusement en ressortit vivante. Elle revint à Londres mais s'installa dans son propre appartement. Elle coupa les ponts avec tous ses camarades de Poudlard. Elle ne s'était jamais leurrée, les élèves qu'elle avait rencontré, elle ne les reverrait jamais. Elle ne s'en était jamais attristée. Elle avait connu de nouvelles personnes au travail et un seul de ses collègues valait mieux que tous ses anciens amis réunis. Elle n'avait gardé qu'un seul contact: Fred Weasley. Ils discutaient par le nouveau moyen de communication, le téléphone portable mais ne s'étaient pas revus en face à face depuis un bout de temps. Ils ne s'étaient jamais perdus de vue; après tout Fred avait quitté l'école un an avant elle puisqu'il était parti lorsqu'Umbridge avait fait des siennes. Ils n'arrivaient pas à se fixer de rendez-vous, chacun était trop occupé de son côté. À force de discuter tous les jours, Fred et Madelaine se connaissaient extrêmement bien. C'est ainsi que Madelaine apprit que Fred et Angelina s'étaient séparés à peine un mois après la fin de Poudlard. Selon Angelina, avoir quitté l'école lui avait permis de se rendre compte que ce n'était pas le genre de garçon dont elle avait besoin. Ce ne fut qu'au bout de six mois que Fred et Madelaine parvinrent à se voir. Ils se donnèrent rendez-vous dans un café banal et moldu. Madelaine arriva légèrement en avance. Elle était étrangement fébrile à l'idée de le revoir, elle ne lui avait pas parlé depuis si longtemps! Avait-il changé? Elle guettait la rue, et le reconnut de loin. Sa démarche était toujours la même, sautillante et nonchalante à la fois. Il était l'image même de l'insouciance. Un sourire fit son chemin jusqu'à ses lèvres. Pour Fred la vie était un jeu, et cette manière désinvolte et peut-être immature de voir les choses était en quelque sorte rafraîchissante. Madelaine prétendit malicieusement de ne pas l'avoir vu et plongea le nez dans son téléphone. À peine quelques minutes plus tard, une chaise fut tirée de sa table:
"Bien le bonjour inconnue."
Madelaine renifla d'amusement et répondit du même ton:
"On se connaît?
-Non mais ça peut s'arranger."
Cette dernière plaisanterie la fit franchement rire:
"Tu n'as pas changé d'un poil, remarqua-t-elle. Tu as l'air plus adulte mais...
-Je suis toujours la même au fond bien sûr. Pourquoi changer lorsqu'on est aussi extraordinaire que moi?"
Madelaine leva les yeux au ciel avec amusement. Fred ne lui laissa pas le temps de répondre et remarqua:
"Je suis déçu, je n'ai même pas le droit à une étreinte de ma camarade Gryffondor préférée."
Madelaine sentit son cœur faire un bond dans sa poitrine. Elle hésita un instant puis finit par céder. Elle se leva de concert avec Fred qui l'attira dans ses bras:
"Tu m'avais manquée Maddy!"
La jeune femme n'en croyait plus ses oreilles, Fred Weasley était-il en train de flirter avec elle? Pendant une heure ou deux ils discutèrent de tout et de rien autour d'un verre, puis deux. Madelaine s'enquit des autres membres de la famille Weasley et Fred s'intéressa à toute la vie de Madelaine. Cette dernière sentait tout en discutant avec Fred - un vieux sentiment qu'elle avait pourtant bien enfoui commençait à refaire surface. Elle ne le refoula pas, ne paniqua pas. Au contraire, elle laissa son amour pour Fred souffler d'un vent nouveau. Elle avait oublié à quel point Fred était charmant, amusant et elle se faisait un plaisir de le redécouvrir. Leur rendez-vous se prolongea jusqu'à l'heure du dîner où Madelaine s'excusa:
"Il est minuit mon prince, je dois filer."
Cette plaisanterie fit sourire Fred jusqu'aux oreilles:
"C'est mon genre de vannes! Quand pourrais-je vous revoir Cendrillon?
-La semaine prochaine si vous n'avez pas de devoirs princiers, répliqua Madelaine d'un ton léger.
-Je les annulerai tous pour vous, susurra Fred en ponctuant sa phrase d'un clin d'oeil parfaitement ridicule.
-Assez de mascarade, à la semaine prochaine Mr.Fred Weasley."
Sans attendre de réponse, Madelaine tourna les talons, le sourire aux lèvres. Le voir avait égayé sa journée. Ils n'avaient pas fait qu'évoquer le passé et leurs souvenirs communs, ils avaient partagé le présent, leur nouvelle vie. Les sept jours suivants passèrent terriblement lentement. Ce ne fut pas une mauvaise semaine, mais Madelaine avait hâte de retrouver Fred. Ils discutaient par messages bien sûr mais c'était différent.
"Je suis vraiment trop faible, ne put-elle s'empêcher de penser. Je ne l'ai revu qu'une fois et voilà que je ne peux déjà plus me passer de lui!"
Aux rendez-vous qui suivirent Fred se montra tout aussi séducteur et même si au début Madelaine lui résista, elle céda rapidement à ses avances et entra dans son jeu. Pendant deux mois entiers ils continuèrent à tourner autour du pot, sans aller vraiment à l'essentiel. La jeune femme ne s'inquiétait pas de cette situation, préférant penser que Fred souhaitait simplement prendre son temps. Aller trop vite serait courir le risque d'emprunter un chemin similaire à celui que Fred et Angelina avaient pris. Madelaine en avait assez des petites relations sans aucun avenir, elle espérait cette fois quelque chose de plus long, de plus concret.
Cette fois-ci fut différente dès le début. Au lieu d'aller simplement boire un café, Fred lui proposa d'aller dîner dans un restaurant japonais qu'il connaissait bien. Naturellement Madelaine ne déclina pas l'offre; il s'agissait de sushis après tout, il était hors de question qu'elle refuse des sushis! Le soir elle se vêtit normalement et quitta son appartement un peu en avance. Sur le chemin elle réfléchit et songea qu'au lycée elle aurait paniqué à l'idée d'aller dîner avec Fred Weasley. Un sourire lui vint lorsqu'elle se remémora sa première discussion avec lui, elle avait bafouillé et avait probablement eut l'air d'une fille terriblement timide. Au fond c'est ce qu'elle avait été, à chaque fois que quelqu'un lui adressait la parole elle paniquait et ne semblait subitement plus capable d'aligner deux mots. Heureusement qu'elle avait changé depuis le temps. Elle pensait devoir attendre une dizaine de minutes mais quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'elle aperçut Fred, les mains dans les poches de son sweat assis devant le restaurant! En l'apercevant, il lui adressa un de ses sourires lumineux dont il avait le secret.
"Maddy! Heureusement que tu arrives en avance ça fait une demie-heure que je suis là!"
Madelaine éclata de rire :
"Fred Weasley t'es vraiment un cas! Quel intérêt de venir aussi tôt?
-J'étais bien trop impatient de te voir, répliqua-t-il du tac au tac."
Madelaine renifla avec amusement et répliqua d'un ton taquin:
"Tes phrases de playboy des années 80 tu peux te les garder on n'a plus dix-sept ans."
Fred haussa les épaules, un sourire aux lèvres. Il aimait le répondant. Tout en discutant de tout et de rien, de leur journée ils s'installèrent dans le restaurant. Madelaine passa une soirée très agréable car après tout, être avec Fred était toujours synonyme de bon moment. Une fois le repas terminé, Madelaine insista pour payer le repas et tous deux partirent se promener. À cette heure tardive, les rues étaient vides, les voitures ne passaient plus. Le travail terminé, la plupart des habitants étaient rentrés chez eux. les deux jeunes gens s'installèrent sur un banc. En face d'eux, se dressait un grand immeuble. La nuit était tombé, et par les fenêtres éclairées on pouvait surprendre un morceau de vie. Pendant de longues minutes, Fred et Madelaine restèrent là, à profiter de ces moments volés. Au premier étage, un enfant jouait sur une table, une famille était attablée et mangeait avec animation. Au second un couple se disputait. Au troisième une femme accoudée au balcon discutait au téléphone, un sourire béat aux lèvres.
"Tous ces gens n'ont pas une seule idée de tout ce qui les entoure, souffla Madelaine.
-Tu parles de la magie?"
La jeune femme hocha vigoureusement la tête. Fred remarqua:
"On leur a toujours appris que ce n'était que mythes et contes de fées, en quoi croient ces gens alors?"
Madelaine sourit:
"En leur rêves, en eux, en les autres, certains en Dieu. Ce n'est pas parce que la magie est absente de leur vie qu'ils ne croient en rien, qu'ils n'ont aucun but. Les histoires, les romans servent à les faire rêver.
-J'espère qu'un jour ils apprendront que leur monde est deux fois plus vaste qu'ils ne le pensaient.
-Moi je n'espère pas, grimaça la jeune femme."
Fred lui adressa un regard interrogateur auquel elle répondit :
"S'ils apprennent que certains ont des pouvoirs mais qu'eux n'en ont pas... Que crois-tu qu'il va se passer? Je pense que certains pourraient y voir une menace, d'autres une source politique ou même économique à exploiter. La découverte de la magie rajouteraient des conflits et il y en a déjà bien assez."
Le rouquin acquiesça lentement, soucieux. L'idée de se cacher à tout jamais le peinait un peu. D'un commun accord ils se levèrent et continuèrent leur promenade. Il faisait bon ce soir-là, les criquets du soir chantaient, la lumière diffusée par les réverbères étaient jaunâtre mais étrangement relaxante. Alors qu'ils marchaient dans un silence confortable Fred le plus naturellement du monde lui prit la main. Un sourire dansa sur les lèvres de la jeune femme. Fred la raccompagna jusqu'à chez elle. Ils n'échangèrent que peu de paroles mais ils étaient tous deux heureux, et ça suffisait. Ils profitaient de l'instant qu'ils savaient éphémère. Arrivés devant l'appartement de Madelaine; Fred se racla la gorge:
"Bon, et bien à la prochaine fois j'imagine."
Madelaine hocha la tête, mais elle savait que la soirée ne faisait que commencer. Elle planta ses yeux dans les siens et, avec un sourire enjôleur, se mit sur la pointe des pieds en passant ses bras derrière sa nuque. Naturellement Fred s'inclina et l'embrassa. Madelaine sentit une bouffée de joie monter en elle, lui embrouillant l'esprit. Le couple s'embrassait avec une passion jusque là refoulée. La soirée ne se termina pas dans la rue, non, mais certaines choses ne se relatent pas...
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top