C͟͟͟͞͞͞h͟͟͟͞͞͞a͟͟͟͞͞͞p͟͟͟͞͞͞i͟͟͟͞͞͞t͟͟͟͞͞͞r͟͟͟͞͞͞e͟͟͟͞͞͞ 1͟͟͟͞͞͞0͟͟͟͞͞͞

10 septembre 1998 : PDV Ramona

J'ignorais encore pourquoi je lui avais proposé cela. J'avais parlé avant de réfléchir. Était-ce une bonne idée ? Je déglutis maladroitement en attendant sa réponse.

Jason restait figé sous le coup de l'étonnement. J'étais persuadée qu'il allait me rembarrer. Mais à mon grand étonnement, il n'en fit rien. Il accepta non sans ajouter qu'il n'avait pas besoin de ma pitié mais qu'il n'avait nulle part où dormir de toute façon.

Sur tout le chemin du retour, un long silence malaisant nous enveloppa. Je n'osais pas le regarder, et je crois que lui non plus. Mais dans le silence étouffant de la nuit, je pouvais entendre sa respiration saccadée. Il semblait encore plus gêné que moi, ou alors était-ce encore les sur-coups de son début de soirée dans la rue.

J'ignorais ce qu'il s'était fait mais j'avais pu remarquer les profondes entailles sur ses mains qui semblaient très récentes. Mais je ne me risquai pas à lui demander leur provenance, de peur qu'il ne se ferme encore plus.

Nous arrivâmes enfin devant la porte de chez moi. J'allais insérer les clefs dans la serrure mais Jason posa brusquement sa main sur la mienne pour m'arrêter.

- Euh...t'es sûre que tu veux bien de moi chez toi ? Je le dévisageai un instant. A quel moment j'avais pas été claire ?
- Mais oui je te dis ! Tu vas pas dormir avec les rats, nan ?!
J'ouvris finalement cette porte et pénétrai accompagnée de Jason dans la demeure familiale.

Lorsque je fis face aux visages plus que surpris de mes parents, je m'arrêtai net dans le couloir prenant soin de garder mon invité surprise derrière moi.

- Ramona ? Tu peux nous expliquer ce que ce garçon fait chez nous à cette heure-ci ? Je croyais qu'on avait été claires à propos de...

- C'est pas ce que vous croyez !
Coupai-je rapidement ma mère avant qu'elle ne dise quelque chose de regrettable qui serait susceptible de rendre la situation encore plus inconfortable.

Mes deux parents me toisèrent à présent avec suspicion, attendent mes promptes explications qui tardaient à s'échapper de ma bouche. Je ne savais pas comment justifier la présence de Jason sans trop leur en dire. Heureusement pour moi, le concerné s'en chargea à ma place.

- Bonsoir Monsieur et Madame Murphy. Je suis désolé de venir ici à l'improviste. Je m'appelle Jason Whey, je suis un camarade de classe de votre fille. Il s'arrêta une seconde pour prendre une profonde inspiration qui m'a semblé lui être très douloureuse.
Ramona m'a proposé de dormir chez vous ce soir car je n'ai nulle part où dormir et elle est la seule personne que je connaisse susceptible de m'accueillir pour le moment.

Il finit son discours la tête baissée, fixant ses pieds. J'étais plus que surprise qu'il ait osé raconter tout ça à mes parents. Justement, ils hésitèrent, se concertant quelques secondes dans la cuisine avant de revenir vers nous.
- Très bien...commença mon père, Tu peux rester uniquement ce soir, sur le canapé. Mais pas le moindre problème, compris jeune homme ?
Jason acquiesça, droit comme un piquet, d'un hochement de tête presque militaire.

Mes parents nous laissèrent donc finalement seuls dans le salon, annonçant qu'ils allaient se coucher. J'indiquai à Jason de me suivre où je lui présentai maladroitement le canapé.

Il s'assit dessus, complètement recroquevillé sur lui même. Je jetai un rapide coup d'œil au thermomètre présent sur le buffet sous la tv. Je constatai avec aberration qu'il faisait plus de 25 degrés et que Jason portait un gros sweat-shirt étouffant.

- Euh...Jason, tu devrais enlever ton sweat. Il fait vraiment très chaud tu vas attraper un coup de chaleur.
Il me regarda quelques instants avec des yeux de merlan frit.
- Je préfère pas.
Je ne souhaitais pas qu'il fasse un malaise alors j'insistai.
- Ne fais pas l'idiot ! Enlève ce pull.

Hésitant, il continuait de me fixer tout en enlevant doucement son sweat devant moi. Ses joues s'empourprèrent quand il constata le regard effaré que j'avais posé sur les parties apparentes de son corps.

Il portait un large t-shirt du groupe Blink-182, mais qui ne dissimulait nullement les multiples blessures qui le recouvraient. Plus je le détaillais, et plus mon faciès se décomposait d'horreur. Je me mis à trembler malgré moi, j'en avais presque la nausée. Lui, il ne bougea pas d'un millimètre, peut-être dans l'espoir que je ne pose pas de question. Raté.

- Que...comment...c'est...c'est ta mère qui t'a fait ça ? J'avais à peine réussi à articuler ces mots que j'étais tombée à genoux, devant lui qui était toujours assis sur le canapé.

Il se contenta d'hocher la tête, presque indifférent face à la situation. Des larmes commencèrent à perler au coin de mes yeux avant de dévaler mes joues pour venir s'écraser à ses pieds.

Je vis la stupeur l'étreindre subitement. Il me semblait complètement désemparé. Il n'osait pas bouger, peut-être de peur de me brusquer. Il se dandina, mal à l'aise, sur le canapé, espérant que je sèche vite mon visage.

J'essayai de reprendre le contrôle de ma respiration, mais en vain. Comment était-ce possible ? Comment on pouvait faire du mal consciemment à son propre enfant ? Son sang ?

- Ram', tu sais c'est rien. J'ai l'habitude, ne t'en fais pas pour ça. Tenta-t-il de dire pour me rassurer.
- Mais justement ! Tu ne devrais pas avoir l'habitude de ces horreurs.
Un long silence s'en suivit durant lequel il me fixa avec une lueur dans le regard que je ne lui connaissait pas. Cela me fait du mal de voir les gens à qui je tiens souffrir. Soufflai-je entre mes dents.

- Tu...tu tiens à moi ? Je pris alors conscience de ce que je venais de sous-entendre. Je relevai alors enfin la tête pour croiser son regard plongé dans mes iris.

C'est vrai. Je tenais à lui, peut-être plus que je ne le devrais. J'étais vraiment confuse. Et lui ? Qu'en pensait-il ? En cet instant, je ne ressentais qu'une douce chaleur au creux de mon estomac qui me criait de m'approcher de lui, de seulement goûter à la tendresse de ses lèvres.

Je le voulus sincèrement, peut-être que lui aussi, mais Paul fit subitement son irruption dans la pièce en sautillant d'un pied sur l'autre, une énorme couverture à la main. Cette entrée théâtrale me fit bondir de surprise et reculer de bien 50 centimètres.

- Coucou ! Maman m'a dit d'apporter une couverture à Jason. Donc Voili-voilou ! Un large sourire angélique illuminait son visage, je ne pouvais lui en vouloir d'avoir brisé ce moment.

Je m'emparai de la couverture en le remerciant tout en le renvoyant dans sa chambre pour aller dormir. Le petit s'exécuta sans broncher après avoir chaleureusement salué mon invité.

Avec un peu plus d'hésitation dans la voie, je tendis la couverture à Jason et lui souhaitai une bonne nuit. Après cela, je m'empressai de fuir pour rejoindre ma chambre et enfin souffler après cette suite d'événements totalement dingues.

J'avais Jason Whey dans mon salon !

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