La lumière est comme l'eau

Un jour, j'ai dit à un enfant, curieux de savoir comment fonctionnait la lumière, que c'était comme de l'eau : il suffisait de tourner le robinet pour qu'elle coule de l'ampoule.

Cet enfant curieux, un jour où ses parents étaient parti, avait cassé une ampoule allumée, et aussitôt un flot de lumière, tel une cascade, se déversait. Sortant de sa chambre la petite barque construite en secret, il navigua grâce à sa rame entre les meubles qui avaient les pieds dans l'eau, chantant des chansons marines et regardant le ciel avec son sextant. Mais heureusement, le vase aux glaïeuls de mamie n'était pas tombé.

L'enfant toujours curieux attendit un autre soir où ses parents partaient, et il brisa toutes les ampoules du salon. Aussitôt, tel un flot, la lumière s'écoulait en cascade. L'enfant sorti de sa chambre les plongeurs construits en secret, et avec sa barque il navigua dans le salon inondé, plongeant entre les meubles immergés pour remonter des trésors oubliés. Mais heureusement, il a pu retrouver le vase aux glaïeuls de mamie qui avait sombré.

L'enfant au comble de la curiosité, patienta jusqu'au soir suivant sans ses parents, et détruisit toutes les ampoules de la maison. De la rue, les passants pouvaient observer une cascade dorés qui descendait des fenêtres en un bien joli flot. Les pompiers appelés trouvèrent l'enfant qui jouait avec ses plongeurs et son sextant, auréolé de la lumière coulant des ampoules. Mais malheureusement, le vase aux glaïeuls de mamie s'est cassé en tombant dans la rue.

Si l'on avait su ça, peut-être aurait-il dit aux enfants que la lumière est comme l'eau : il ne faut pas ouvrir tous les robinets d'un coup sinon ça déborde. Et après tous les vases sont cassés.

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-Elle est bête ton histoire ! Ça coule pas des ampoules la lumière !

Tendrement, la mère déposa un baiser sur le front de son enfant qui fixait ostensiblement le calendrier indiquant 21/05. Lui aussi était très curieux, et il commençait peu à peu à tomber dans les délicieux mystères du temps, sujet bien trop compliqué et sérieux pour son jeune âge.

-C'est fait exprès Théo, dit-elle tout bas, ça s'appelle le fantastique : on ne sait jamais si c'est magique ou juste imaginé ! Mais c'est vrai, la lumière n'est pas comme l'eau, si tu casses une ampoule tu n'auras pas une cascade de lumière, juste une ampoule cassée.

-Comme un cœur ?

Bouche bée, voilà comme cette dernière phrase avait laissé Carla. Elle avait bien vu que son enfant n'était pas dans son état normal. Avait-il compris ce qu'il se passait ?

-Oui, murmura-t-elle tout bas. Quand on brise un cœur, on obtient juste un cœur brisé. C'est pour ça qu'il ne faut pas faire de mal aux autres, parce que c'est difficile de réparer un cœur. Tu seras toujours gentil avec les autres, n'est-ce pas ?

Comme simple réponse, il y eût une étreinte. On ne pouvait savoir lequel de la mère ou du fils en avait le plus besoin mais aucun ne pouvait la refuser. Un jour, elle devra mettre ses enfants au courant. Un jour, elle devra donner un nouveau sens au rôle de "mère". Elle espérait juste que sa fille trop absente en ces jours ne réagisse pas trop fort, et qu'elle n'emporte pas son jeune frère dans sa chute...

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Cette histoire a été grandement inspirée du conte latinoaméricain "La luz es como el agua", écrit par Gabriel García Márquez. Si vous avez aimé le style, je vous conseille le registre du "réalisme magique"~
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