Day 43
L'avion avait à peine atterri que je m'accapare de mon téléphone, fourré entre mon passeport et mon roman du moment. Si ce vol de trois heures a été l'occasion de me déconnecter un peu de ces quelques jours hectiques, il est temps de revenir au travail maintenant.
Et il était également temps d'affronter les réactions du public.
J'avais demandé à Riko d'attendre le moment où je serais suspendue dans les airs pour poster un prétendu aveu sur mon compte, admettant que je sortais avec quelqu'un -sans préciser qui- et que je leur demandais de respecter notre vie privée. Ironiquement, elle m'avait répondu par un document détaillant tous nos engagements contractuels bilatéraux ainsi qu'un excel avec les dates des shootings planifiés avec les paparazzis, histoire de lancer de l'huile sur le feu.
Le premier était prévu dans deux jours, avec comme idée que mon cher et tendre compagnon avait profité de ses vacances pour m'accompagner lors de mon voyage d'affaire. A secret getaway, un peu à l'américaine. Le plan était studieusement étudiés, avec plusieurs photos faussement innocentes de chacun de nous séparément, mais dans la même ville, puis dans le même restaurant. De quoi donner à l'audience l'impression d'être arrivée d'elle même à la conclusion que nous essayions de fuire l'œil public pour vivre notre amour de plus belle.
La réalité était de toute évidence aux antipodes de l'image que l'on vendait aux médias. Je m'étais déplacée pour superviser l'avancement d'une nouvelle alliance stratégique avec un producteur de renom d'un des pays voisins. L'idée était de permettre à chacun d'entre nous de pénétrer le marché de l'autre et profiter de nos expertises locales. C'était un pari risqué, car il était toujours possible que cela se retourne contre nous et que nous soyons entrain d'ouvrir la porte et de dérouler le tapis pour un de nos plus gros concurrent qui pourrait prendre nos parts de marché et détruire notre business. Mais comme le risque était tout aussi présent pour eux, nous comptions sur notre méfiance et notre retenue mutuelle pour capitaliser autant que possible.
Toujours était-il que cette affaire valait beaucoup pour tout ce que Loris et moi avions batti depuis des années. Dans un sens, j'espérais que cette charade avec Livaï allait créer suffisamment d'engouement pour les convaincre de signer sans trop d'aller-retour.
Livaï, lui, avait quelques compagnes publicitaires prévues à filmer avec quelques autres joueurs, et resterait quelques jours par la suite avec Erwin pour discuter avec quelques équipes locales pour un potentiel transfert dans le futur. Il lui restait une autre saison avec l'EAC au moins, mais quand on était le meilleur joueur de sa génération, les équipes les plus prestigieuses étaient prêtes à payer des sommes astronomiques pour arracher un tel as à leur concurrents.
J'ignorais mes messages privés, sachant que les gens se donnaient un peu trop de liberté pour commenter sur la vie privée des autres. Les articles des journaux, eux, restaient un peu vagues dans leurs accusations mais mentionnaient tous les rumeurs sur ma prétendue romance avec Livaï. Si Riko savait faire quelque chose, c'était garder les journalistes sous contrôle. J'étais persuadée que son passe-temps préféré était de visiter les journaux avec deux avocats et une liste de tout ce qui comptait d'un point de vue légal pour de la diffamation ou de la malinformation.
Rassurée que la situation semblait sous contrôle, j'entrepris ma journée d'entrevues avec quatre couches d'anti-cernes, trois tasses de café et mon regard le plus déterminé. Ces périodes de rush avait beau être éprouvantes, la satisfaction d'en ressortir avec un résultat positif valait le coup.
N'ayant pu croquer qu'un léger encas entre un appel visio avec l'équipe du siège et la réunion avec la cabinet de conseil qui devait nous fournir son avis externe, je m'empressais de me rendre dans le restaurant de l'hôtel une fois rentrée en fin de journée. Après un rapide repas, j'espérais pouvoir dormir un peu avant de recommencer à zéro le lendemain.
Admirant mon magnifique cordon bleu, délicieusement doré et cuisiné à la perfection, je balayais la salle du regard pour trouver une table libre, avant de voir un Livaï fidèle à lui même, mangeant dans son coin éloigné des autres clients.
Et pour une fois, je fis le premier pas et partis vers lui.
-"Ce siège est libre ?"
Il leva un sourcil interrogateur mais ne laissa paraître aucune surprise, se contentant d'hocher la tête.
-"L'emploi ne prévoyait aucun faux dîner que je sache."
-"Probablement car ce n'est pas un faux dîner."
Son expression fermée ne vascilla pas.
-"Ta mère se porte mieux ?"
Sa main s'immobilisa, la fourchette flottant à mi-chemin de sa bouche.
-"À quoi tu joues ?"
-"Tout le monde n'est pas un enfoiré comme toi, je demande de ses nouvelles car tu m'as dit qu'elle était hospitalisée, pas pour je ne sais quelle raison."
Le silence s'installa, comme s'il essayait de jauger mes intentions.
Bonne chance mon petit Lili, car je ne sais pas moi même ce que je fous.
-"Elle est rentrée chez elle. Elle va un peu mieux."
-" Dieu merci."
Après quelques bouchées qui me permirent de chasser le brouillard dans mon esprit dû à la fatigue et à la faim, je repris la parole.
-"Et bien dis donc, pour une fois que c'est moi qui vient te parler, tu es bien muet. Je te retrouve bien là."
Ok, peut-être que le brouillard ne s'est pas réellement dissipé.
-"Ne me fais pas ça [t/p]."
-"Pour une fois que je suis bien tranquille..."
-"Ne fais pas comme si de rien n'était. On sait tous les deux qu'on est loin d'avoir tout dit."
Je reposais mes couverts presque à contre cœur et affrontais son regard de glace.
-"Tout compte fait, tu as raison. J'avais une question à te poser. Qu'est-ce que tu cherches au juste ? Tu viens foutre la merde dans ma vie après sept ans pour avouer que tu ne m'as pas trompé, mais dans quel but ? On est bien d'accord que les sentiments de l'époque ont largement eu le temps de disparaître, et je doute que tu soit si déterminé à devenir ami ami pour mes beaux yeux."
-"Car tu me détestais."
-"Tu sais que ce n'est pas en me disant que tu m'as menti sept ans que ce problème se résout ?"
-"Je devais le faire."
-"Laisse moi deviner, car tu savais que tu allais déménager et que tu ne voulais pas me briser le cœur ? Car si c'est ça, j'aimerais bien que tu explicites ton processus de réflexion."
J'avais longuement réfléchi à tous les scénarios possibles, à toutes les raisons qui auraient pu le pousser à préférer passer pour un homme infidèle, mais rien ne me venait à l'esprit.
-"Qu'est-ce qui nécessitait que tu me brises le cœur comme tu l'avais fait ?" Demandais-je avec une voix presque désespérée.
Avec les mille-et-une questions qui me trottaient dans l'esprit, je n'avais pas besoin de continuer à me triturer les ménages pour obtenir une réponse qu'il avait déjà.
-"Ce n'est pas le moment. Tu es clairement fatiguée et tu dois te reposer."
-"Foutaises. Tu essaies juste de fuir."
Il se leva, soutenant mon regard.
-"Je te rappelle qui a failli jeter notre relation par la fenêtre car elle n'arrêtait pas de fuir ?"
-"Je te rappelle qui a jeté notre relation par la fenêtre."
-"Tu allais juste souffrir à cause de moi."
-"Donc ta solution a été de me faire souffrir ? Je ne suis pas la seule à voir à quel point c'est con, hein ?"
Il ferma les yeux un instant, se frottant l'arrête du nez, avant de faire un pas dans ma direction.
L'air s'échappa de mes poumons en le voyant rapprocher sa main de mon visage. Doucement, avec une hésitation qui ne lui ressemblait pas, il la déposa sur ma joue, ses doigts tremblant contre ma peau. Et avec une docilité qui ne me ressemblait pas, je le laissais faire.
-"Tu as l'air exténuée. Repose toi. On en parlera par la suite, promis."
Je ne répondis rien, essayant de comprendre pourquoi mon cœur me criait de fondre à son contact.
-"Et pour ta première question, je ne sais pas. L'humain est un sacré connard, non ?"
Et il s'en alla, laissant sur mon visage une chaleur brûlante qui m'accompagna dans ma nuit sans rêves.
Faut vraiment que je réfléchisse à l'enchaînement des événements avant d'écrire un chapitre, car croyez moi, ce n'était absolument pas prévu. Mais soit, j'espère que ce chapitre sans queue ni tête vous aura tout de même plu.
Désolé de mon absence prolongée, et merci de toujours lire l'histoire. Je vous aime.
N'oubliez pas de parler de la Palestine, du Soudan, du Congo, des Ouïghours et de toutes les minorités autour de vous !
~Caporal Neko
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